- Votre rapport a été très bien accueilli par les groupes politiques. Cela vous a-t-il surpris ?
- Non ! Parce que nous avons fait un gros travail dans trois Commissions successives : la Commission des finances, la Commission des compétences législatives et règlementaires, ainsi que la Commission du développement économique. J’ai senti que ce rapport recevait un accueil critique, mais positif. Critique dans le sens où certains élus m’ont fait part des remarques judicieuses, notamment les maires, ainsi que Pierre Chaubon et José Rossi. J’ai compris qu’ils étaient très intéressés par cette problématique qui est revenue, d’ailleurs, plusieurs fois sur les bancs de l’Assemblée sous les mandatures antérieures. Pas de surprise concernant l’intérêt du sujet, mais une peu surprise, néanmoins, du vote à la quasi-unanimité.
- Qu’est-ce qui vous a poussé à présenter un tel rapport ?
- J’ai été sollicitée par différents opérateurs, des maires, des présidents de fédérations d’hôtellerie de plein air, mais aussi de simples citoyens qui m’écrivent ou me téléphonent concernant le phénomène des camping-cars qui s’installent un peu partout en Corse, que ce soit sur le littoral ou à l’intérieur, le plus souvent sur des sites exceptionnels et protégés. Ces opérateurs se trouvent assez démunis face à ce camping sauvage qui est normalement interdit et qui engendre un certain nombre d’impacts sur le plan environnemental, mais aussi sur le plan économique et même sur le plan sociétal. A cela s’ajoute une inégalité sur le plan touristique : les camping-caristes sont des touristes qui ne payent pas la taxe de séjour alors que les autres touristes, qui fréquentent les hôtels, les campings et les meublés, la payent. Se pose un véritable problème de développement durable et de soutenabilité de cette pratique touristique en Corse. Il a fallu quelques mois pour travailler sur le sujet qui n’est pas facile.
- Pourquoi ?
- Parce qu’on ne peut pas interdire les camping-cars. Ce n’est pas possible au regard du principe de la libre circulation des personnes et des véhicules en Europe. Il fallait trouver la façon de réguler le phénomène des camping-cars qui ne passent pas les nuits dans un camping ou une aire dédiée à cet effet. La difficulté essentielle est là. En 2015, 28 000 camping-cars sont entrés en Corse. Entre 20% à 30% d’entre-eux ne sont pas allés dans un camping, ce qui fait plus de 6 400 camping-cars dans la nature !
- Quelle solution a été retenue pour régler le problème ?
- Nous avons retenu l’idée de la mise en œuvre d’un plan de gestion globale des camping-cars avec une mesure fiscale, une mesure de pédagogie et de communication, et une mesure d’action et d’investissement. La Corse manque d’infrastructures publiques d’accueil des camping-cars. L’ATC pourra, dans le cadre de son régime des aides au tourisme, accompagner les communes ou les communautés de communes qui souhaiteraient s’équiper de bornes de vidange. Avec l’Office de l’environnement et le Comité de massif, nous contribuerons à moderniser un certain nombre de campings en matière de gestion des déchets et de vidange des eaux usées pour aller dans le sens d’un tourisme durable. Ensuite, il faut communiquer pour dire aux camping-caristes où aller, où trouver les 170 campings disponibles. Nous avons déjà, un accord avec les compagnies maritimes, les opérateurs de voyages et les fédérations pour réaliser une campagne d’information contre le camping sauvage sur les réseaux sociaux, les bateaux, dans les agences...
- Comment inciter les camping-caristes à aller dans un camping ou une aire dédiée ?
- Nous avons pensé à une écotaxe qui est une fiscalité incitative. En amont du voyage, les camping-caristes achèteraient, en ligne, une vignette dont le montant correspondrait à l’écotaxe. Cette vignette, pourvue d’un code barre, serait appliquée sur le pare-brise des véhicules et, par un dispositif de lecture optique, serait enregistrée dans les campings. Si les camping-caristes se comportent de manière vertueuse, ils seraient remboursés du montant de l’écotaxe à leur départ de Corse. Ce montant doit être assez élevé et correspondre à un certain nombre de nuitées pour obliger les camping-caristes à ne plus stationner n’importe où, s’ils veulent le récupérer. C’est un dispositif très simple à mettre en place.
- Cette écotaxe est-elle juridiquement possible ?
- Oui ! C’est possible ! Le droit européen et le droit en matière d’environnement prévoient une fiscalité environnementale pour conduire les gens à avoir un comportement vertueux et pour protéger les richesses de l’île des comportements délictueux et irrespectueux. A ceci près que le produit de cette fiscalité doit être dédié à l’environnement et contribuer à produire un service environnemental et touristique, c’est-à-dire un service éco-responsable ! C’est très important ! Nous ne sommes pas là pour faire de l’argent sur le dos des camping-cars, nous sommes là pour les inciter à se comporter de manière vertueuse vis-à-vis de l’environnement et des réglementations en vigueur. Un camping-car ne peut pas stationner sur les plages, dans les forêts, à moins de 200 mètres d’un point d’eau potable… Il y a des règles, il faut les respecter ! La question de la biodiversité est fondamentale !
- Avez-vous bon espoir de mettre en place cette écotaxe ?
- Oui ! Nous espérons que cette écotaxe sera inscrite dans un article dédié de la prochaine loi de finance 2018 qui sera votée à l’automne. Nous allons saisir le ministre Nicolas Hulot qui connaît bien la Corse, son patrimoine naturel et le niveau de protection dont elle a besoin. Nous demandons au 1er ministre de mettre en place cette écotaxe, d’autant qu’un rapport de 2010 de l’Assemblée nationale convergeait, déjà, dans ce sens. Nos députés suivent le dossier avec attention à Paris. Il y a, donc, une fenêtre de tir possible. Si le principe de cette écotaxe est retenu, l’Assemblée de Corse pourrait, par son pouvoir règlementaire, en fixer le montant et les modalités concrètes. Ce dispositif, tant sur le plan juridique que règlementaire, informatique et logistique, pourrait être opérationnel dès la saison 2018.
Propos recueillis par Nicole MARI.
- Non ! Parce que nous avons fait un gros travail dans trois Commissions successives : la Commission des finances, la Commission des compétences législatives et règlementaires, ainsi que la Commission du développement économique. J’ai senti que ce rapport recevait un accueil critique, mais positif. Critique dans le sens où certains élus m’ont fait part des remarques judicieuses, notamment les maires, ainsi que Pierre Chaubon et José Rossi. J’ai compris qu’ils étaient très intéressés par cette problématique qui est revenue, d’ailleurs, plusieurs fois sur les bancs de l’Assemblée sous les mandatures antérieures. Pas de surprise concernant l’intérêt du sujet, mais une peu surprise, néanmoins, du vote à la quasi-unanimité.
- Qu’est-ce qui vous a poussé à présenter un tel rapport ?
- J’ai été sollicitée par différents opérateurs, des maires, des présidents de fédérations d’hôtellerie de plein air, mais aussi de simples citoyens qui m’écrivent ou me téléphonent concernant le phénomène des camping-cars qui s’installent un peu partout en Corse, que ce soit sur le littoral ou à l’intérieur, le plus souvent sur des sites exceptionnels et protégés. Ces opérateurs se trouvent assez démunis face à ce camping sauvage qui est normalement interdit et qui engendre un certain nombre d’impacts sur le plan environnemental, mais aussi sur le plan économique et même sur le plan sociétal. A cela s’ajoute une inégalité sur le plan touristique : les camping-caristes sont des touristes qui ne payent pas la taxe de séjour alors que les autres touristes, qui fréquentent les hôtels, les campings et les meublés, la payent. Se pose un véritable problème de développement durable et de soutenabilité de cette pratique touristique en Corse. Il a fallu quelques mois pour travailler sur le sujet qui n’est pas facile.
- Pourquoi ?
- Parce qu’on ne peut pas interdire les camping-cars. Ce n’est pas possible au regard du principe de la libre circulation des personnes et des véhicules en Europe. Il fallait trouver la façon de réguler le phénomène des camping-cars qui ne passent pas les nuits dans un camping ou une aire dédiée à cet effet. La difficulté essentielle est là. En 2015, 28 000 camping-cars sont entrés en Corse. Entre 20% à 30% d’entre-eux ne sont pas allés dans un camping, ce qui fait plus de 6 400 camping-cars dans la nature !
- Quelle solution a été retenue pour régler le problème ?
- Nous avons retenu l’idée de la mise en œuvre d’un plan de gestion globale des camping-cars avec une mesure fiscale, une mesure de pédagogie et de communication, et une mesure d’action et d’investissement. La Corse manque d’infrastructures publiques d’accueil des camping-cars. L’ATC pourra, dans le cadre de son régime des aides au tourisme, accompagner les communes ou les communautés de communes qui souhaiteraient s’équiper de bornes de vidange. Avec l’Office de l’environnement et le Comité de massif, nous contribuerons à moderniser un certain nombre de campings en matière de gestion des déchets et de vidange des eaux usées pour aller dans le sens d’un tourisme durable. Ensuite, il faut communiquer pour dire aux camping-caristes où aller, où trouver les 170 campings disponibles. Nous avons déjà, un accord avec les compagnies maritimes, les opérateurs de voyages et les fédérations pour réaliser une campagne d’information contre le camping sauvage sur les réseaux sociaux, les bateaux, dans les agences...
- Comment inciter les camping-caristes à aller dans un camping ou une aire dédiée ?
- Nous avons pensé à une écotaxe qui est une fiscalité incitative. En amont du voyage, les camping-caristes achèteraient, en ligne, une vignette dont le montant correspondrait à l’écotaxe. Cette vignette, pourvue d’un code barre, serait appliquée sur le pare-brise des véhicules et, par un dispositif de lecture optique, serait enregistrée dans les campings. Si les camping-caristes se comportent de manière vertueuse, ils seraient remboursés du montant de l’écotaxe à leur départ de Corse. Ce montant doit être assez élevé et correspondre à un certain nombre de nuitées pour obliger les camping-caristes à ne plus stationner n’importe où, s’ils veulent le récupérer. C’est un dispositif très simple à mettre en place.
- Cette écotaxe est-elle juridiquement possible ?
- Oui ! C’est possible ! Le droit européen et le droit en matière d’environnement prévoient une fiscalité environnementale pour conduire les gens à avoir un comportement vertueux et pour protéger les richesses de l’île des comportements délictueux et irrespectueux. A ceci près que le produit de cette fiscalité doit être dédié à l’environnement et contribuer à produire un service environnemental et touristique, c’est-à-dire un service éco-responsable ! C’est très important ! Nous ne sommes pas là pour faire de l’argent sur le dos des camping-cars, nous sommes là pour les inciter à se comporter de manière vertueuse vis-à-vis de l’environnement et des réglementations en vigueur. Un camping-car ne peut pas stationner sur les plages, dans les forêts, à moins de 200 mètres d’un point d’eau potable… Il y a des règles, il faut les respecter ! La question de la biodiversité est fondamentale !
- Avez-vous bon espoir de mettre en place cette écotaxe ?
- Oui ! Nous espérons que cette écotaxe sera inscrite dans un article dédié de la prochaine loi de finance 2018 qui sera votée à l’automne. Nous allons saisir le ministre Nicolas Hulot qui connaît bien la Corse, son patrimoine naturel et le niveau de protection dont elle a besoin. Nous demandons au 1er ministre de mettre en place cette écotaxe, d’autant qu’un rapport de 2010 de l’Assemblée nationale convergeait, déjà, dans ce sens. Nos députés suivent le dossier avec attention à Paris. Il y a, donc, une fenêtre de tir possible. Si le principe de cette écotaxe est retenu, l’Assemblée de Corse pourrait, par son pouvoir règlementaire, en fixer le montant et les modalités concrètes. Ce dispositif, tant sur le plan juridique que règlementaire, informatique et logistique, pourrait être opérationnel dès la saison 2018.
Propos recueillis par Nicole MARI.
Marie-Antoinette Maupertuis, conseillère exécutive et présidente de l’Agence de tourisme de Corse (ATC).