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Adoption de la "loi Airbnb" : ​La Ville d’Ajaccio va réguler ses meublés de tourisme


Patrice Paquier Lorenzi le Vendredi 8 Novembre 2024 à 09:05

En préambule de l’ordre du jour du conseil municipal de ce jeudi soir, Stéphane Sbraggia a annoncé que la Ville d’Ajaccio allait mettre en place dans les mois à venir une politique visant à réguler les meublés de tourisme de la cité impériale. Cette annonce fait suite à la promulgation de la loi dite « Airbnb » adoptée ce jeudi 7 novembre à l’Assemblée Nationale. Ajaccio compterait plus de 3 500 annonces de meublés de tourisme répertoriées sur les différentes plateformes de réservation en ligne.



La Ville d'Ajaccio va mettre en place une politique visant à réguler les meublés de tourisme dans les mois à venir.
La Ville d'Ajaccio va mettre en place une politique visant à réguler les meublés de tourisme dans les mois à venir.
L'Assemblée nationale a adopté, ce jeudi 7 novembre, la proposition de loi dite « Airbnb » visant à inciter les propriétaires immobiliers à louer leurs logements sur de longues durées, plutôt qu’en meublés touristiques. Stéphane Sbraggia, le maire d’Ajaccio, n’a pas tardé à réagir à cette annonce, en préambule du conseil municipal de ce jeudi soir. Lui et son équipe attendait depuis plusieurs mois, le vote de ce texte pour l’adapter à la cité impériale et ses 3 500 locations meublés répertoriées sur les différentes plateformes en lignes.
 
Sommé il y a quelques mois, par l’opposition mais aussi les professionnels de l’hôtellerie, le maire d’Ajaccio avait temporisé dans l’attente du vote de ce texte à l’échelon national.  « Dès 2021, notre ville était la première à se pencher sur ces problématiques des meublées de tourisme. Nous sommes un territoire, très tendu, au niveau du logement et la question de la remise de logements permanents sur le marché est un enjeu clé de notre politique d’attractivité en centre-ville. Encore plus au vu du retard en termes de logements sociaux. On s’est interrogé sur la fiscalité car réguler c’est aussi accepter une perte de la THRS (Taxe habitation sur les résidences secondaires) avec des recettes qui vont se transformer en Cotisation Foncière des Entreprises (CFE) et qui vont échapper à la Ville pour aller à la Communauté d'Agglomération du Pays Ajaccien (CAPA). On avait commandé une étude qui nous annonçait une perte estimée à 3,2 millions d’euros, ce qui n’avait pas aidé à prendre des mesures, vous le comprendrez bien volontiers. Nous avons revu cette étude et les chiffres qu’on nous donne sont finalement en deçà de cette perte sèche. ll y a également des passerelles possibles avec la CAPA pour en récupérer une partie. Dans les outils que nous allons avoir, il y a des possibilités que nous allons pouvoir mettre en place, notamment sur le changement d’usage, sur des règlements de quotas ou d’imposition sur les logements à venir. Il faut maintenant évaluer et mettre en oeuvre une stratégie globale. Cela peut sembler long mais des fois il faut attendre pour prendre les bonnes décisions. La Ville d’Ajaccio va mettre rapidement son modèle de régulation », a expliqué le maire d'Ajaccio. 
 
Quotas, compensations, durée de location, un panel très large

Après les discussions menées à l'Assemblée, au Sénat et en commission mixte paritaire (sept députés et sept sénateurs), la "niche fiscale" associée aux meublés touristiques reste en effet en vigueur, mais elle a été réduite. Jusqu'ici, il était nettement plus avantageux de louer un meublé touristique qu'un logement classique. Avec cette loi, les règles changent un peu. Actuellement, en fonction du confort du logement, le taux d'abattement des locations de tourisme peut varier de 50 à 71%. Avec l'article 3 du texte de loi, les règles sont davantage harmonisées d'un logement à un autre. Pour les loueurs de meublés de tourisme classés (c'est-à-dire ceux qui disposent d'équipements spécifiques de confort) et de chambres d'hôte, l'abattement fiscal se montera à 50%. Cet avantage sera limité aux loueurs dont les recettes n'excèdent pas 77 700 euros. Pour les propriétaires de meublés de tourisme, on sera sur 30% d'abattement jusqu'à 15.000 euros de recettes. Parmi les autres mesures du texte, l'article premier prévoit d'obliger les propriétaires à réaliser un diagnostic de performance énergétique (DPE). Ce n'était pas le cas pour l'instant alors que c'est indispensable pour un propriétaire qui loue à l'année. Autrement dit, il y avait, jusqu'ici, tout intérêt à louer un meublé touristique, non seulement pour des raisons fiscales, mais aussi parce qu'on n'avait aucune obligation de le rénover si c'était une passoire thermique.

D'autre part, les collectivités locales devraient avoir plus de marge de manœuvre pour réglementer sur leur territoire. Par exemple, elles pourront plus facilement mettre en place des quotas (ou des compensations). Les communes pourront également réserver certaines zones aux résidences principales et l'inscrire dans leur plan local d'urbanisme (dans les communes possédant plus de 20% de résidences secondaires ou dans les communes en zones tendues). Elles pourront aussi réduire de 120 à 90 jours par an la durée maximale pendant laquelle une résidence principale peut être louée aux touristes. Enfin, les propriétaires des meublés touristiques seraient contraints de les déclarer officiellement aux collectivités locales. Pour les défenseurs du projet de loi, le flou actuel empêche d'avoir une visibilité réelle sur le parc des meublés de tourisme.

« Cela ne changera pas grand-chose pour les Ajacciens qui louent moins de 120 jours par an »

Christelle Combette, Président de l’OIT du Pays Ajaccien complète les propos du Maire : « C’était important de faire un point sur cette actualité. Nous avons été les premiers à nous soucier du problème. Les hôteliers estiment que nous avons été trop longs pour mettre en place une stratégie depuis 2021, mais je leur dis que c’est le temps de la raison. Cette loi devrait entrer en vigueur au 1er janvier 2026, ce qui va nous le temps donner de sensibiliser les propriétaires et de dire aux Ajacciens qui louent moins de 120 jours par an, n’ayez pas peur, cela ne va pas changer grand-chose pour vous. Ces Ajacciens, qui louent quelques semaines quand ils vont au village l’été, pour payer quelques factures, ne seront pas touchés ».
 
Des propos qui feront tout de même bondir Jean-François Casalta, membre de l’opposition, qui avait sommé la ville de réguler ses meubles de tourisme, lors notamment de la séance du jeudi 22 février dernier : « Je suis heureux d’entendre cela. Mais depuis l’étude de 2021, aucune décision n’avait été prise. Alors qu’Ajaccio est une des villes qui est le plus touchée par ce phénomène. Je vous rappelle que nous avions saisi le Conseil municipal pour en parler et proposer un règlement qui est déjà tout fait. Ce modèle peut être repris en changeant peu de choses. Il va falloir s’entendre sur les mesures. Il ne faut pas effrayer les gens, on ne va pas interdire, ce n’est pas ce que nous voulons, mais il faut réguler. Il vaut mieux tard que jamais ».
 
La multinationale Airbnb a réagi quelques minutes après l'adoption du texte pour souligner qu'elle collabore "déjà avec plus de 350 villes à travers la France sur le bon respect des règles locales, et nous souhaitons travailler avec davantage de communes à la mise en œuvre de mesures proportionnées et efficaces, dans les territoires où les problématiques sont clairement identifiées". Quant au volet fiscal prévu par la loi, Airbnb affirme "regretter l’addition de nouvelles contraintes fiscales et administratives qui pèseront lourdement sur les familles françaises désirant louer occasionnellement leur logement.”