Sensibiliser le plus grand nombre à la condition des femmes en Afghanistan. C’est le défi qu’a relevé Anna-Gioia Fara, élève de première au lycée Jean-Paul de Rocca Serra à Porto-Vecchio, lors du concours de plaidoiries des lycéens du Mémorial de Caen, dont la finale a eu lieu le 14 mars dernier. Un concours auquel elle a participé dans le cadre d’un atelier proposé par son lycée. “Notre lycée fait partie des établissements en éducation prioritaire”, indique Fabrice Fara, proviseur. “Il y a trois ans, nous avons signé, avec l’académie de Corse et Sciences Po Paris, une convention qui a permis la mise en place d’un atelier de méthodologie destiné aux élèves, afin de les accompagner dans leur ambition scolaire, leurs compétences rédactionnelles et leur oralité, à raison de deux heures par semaine. Le concours de plaidoiries des lycéens du Mémorial de Caen faisait donc partie des concours proposés aux élèves.”
Dans le cadre du concours, les participants devaient dénoncer un droit humain bafoué entre les années 2023 et 2024. Anna-Gioia Fara a choisi tout naturellement de parler de la condition des femmes afghanes. “J’aime m’informer politiquement et socialement, et je suis très engagée, notamment pour les droits des femmes”, indique-t-elle. “Au moment où j’ai envoyé ma candidature, une nouvelle loi pour restreindre encore plus les droits des femmes en Afghanistan a été votée. J’avais déjà lu plusieurs livres à ce propos, comme Les Hirondelles de Kaboul. C’est un sujet qui dure depuis des années, qui m’attriste beaucoup, et je trouvais que cette cause pouvait me donner de l’inspiration pour être éloquente.” Son objectif à travers sa plaidoirie ? “Sensibiliser au maximum le public, qui a parfois tendance à oublier que ce n’est pas encore terminé, et qu’il reste du chemin à parcourir pour les droits des femmes en Afghanistan.”
Une place en finale à Caen
Pour écrire sa plaidoirie, Anna-Gioia Fara a d’abord fait des recherches sur le sujet. “J’ai d’abord recherché des lois qui auraient été signées mais pas respectées par les talibans, ainsi que des témoignages”, décrit-elle. “Ça a été la partie la plus compliquée. L’Afghanistan est un pays qui signe peu de lois, mais qui en bafoue beaucoup, et tout est très secret. Il a été très difficile de trouver des textes juridiques pour appuyer mes propos, mais aussi des témoignages, parce qu’ils étaient trop courts. Pourtant, je devais absolument mettre des cas concrets dans ma plaidoirie, et essayer de garder un fil conducteur.” Après ses recherches, l’écriture s’est alors faite de manière naturelle. “J’ai d’abord écrit dans le désordre. Lorsque j’avais une idée de formulation, une phrase avec une rime, une référence littéraire, je le notais. Je me suis ensuite concentrée sur des phrases plus concrètes, qui dénoncent plus violemment, parce que l’idée était quand même de plaider pour cette cause. À la fin, j’ai tout assemblé dans l’ordre qui me semblait le plus opportun.”
Après une première sélection lors d’une vidéo d’une minute, et une seconde lors d’une vidéo de six minutes, Anna-Gioia Fara est sélectionnée pour participer à la finale du concours de plaidoiries des lycéens du Mémorial de Caen le 14 mars dernier, aux côtés de 13 autres candidats venus de la France et du Maroc, et retenus parmi plus de 1 400 candidatures. “La veille de la finale, j’étais très stressée”, explique-t-elle. “Une fois sur place, tous les candidats étaient très solidaires. On s’est dit que les prix et le classement ne seraient qu’un bonus, et j’ai pu répéter ma plaidoirie devant les autres finalistes avant mon passage, ce qui m’a permis de relâcher la pression. Je pensais que j’allais paniquer sur scène, mais la salle pleine était finalement moins impressionnante que la salle vide. Je me suis aussi rappelée que j’étais là pour plaider une cause qui me tient à cœur, et ça m’a donné du courage.” Anna-Gioia Fara repart de Caen avec des compliments du public. “Beaucoup d’adultes ont trouvé ça très touchant, dont des bénévoles d’Amnesty International. Ils m’ont dit qu’ils voyaient que j’y avais mis du cœur, et que ça faisait plaisir de voir que des jeunes sont conscients des problèmes et essaient de faire bouger les choses à leur manière.”
La lycéenne va maintenant se lancer dans un nouveau défi : un concours de lecture. “Dans le cadre de l’atelier, j’ai été choisie pour représenter mon lycée lors du concours ‘Si on lisait à voix haute’.” Après l’envoi d’une première vidéo, où elle a lu un extrait du Mage du Kremlin de Giuliano da Empoli, Anna-Gioia Fara va bientôt découvrir le texte qu’elle devra lire lors de la demi-finale. Si elle parvient à se qualifier, elle participera à la finale nationale, qui aura lieu au mois de juin.