
Palme d’or au Festival de Cannes, victoire aux Césars et nomination aux Oscars… Rien ne semble arrêter Noëlle Levenez, productrice du court métrage L'Homme qui ne se taisait pas. À 28 ans, cette Ajaccienne connaît une renommée internationale. Pourtant, rien ne la prédestinait à embrasser cette carrière. “J’ai toujours aimé le cinéma”, se souvient-elle. “Plus jeune, je regardais déjà beaucoup de films. Après mon bac, j’ai commencé des études de droit à La Sorbonne. En parallèle, le week-end ou pendant les vacances, j'aidais des amis en école de cinéma sur des tournages.” Avec un sourire, elle se remémore ces moments. “Je préparais des sandwichs, je maquillais les acteurs, je relisais les scénarios… J’allais là où on avait besoin de moi.”
C’est une rencontre qui bouleverse sa carrière il y a trois ans. “Un jour, on m’a expliqué ce qu’était le métier de producteur”, raconte-t-elle. “J’ai tout de suite été intéressée. J’aime la partie artistique, le fait de miser sur des auteurs, de trouver des projets, mais aussi toute la partie organisationnelle et administrative.” Noëlle Levenez se lance alors pleinement dans cette aventure, en créant sa “famille de cinéma”. “Le plus important, c’est de trouver des jeunes qui débutent. Je prenais toutes les opportunités qui se présentaient à moi. J’ai commencé à regarder des films d’école, à aller à des projections de courts métrages, à aller dans des festivals et des marchés de coproductions pour y rencontrer des réalisateurs.” Elle intègre alors la société de production Les Films Norfolk en tant qu’assistante. Peu de temps après son arrivée, elle fait la connaissance de la société de production croate Antitalent Produkcija.
Palme d’or du court métrage au festival de Cannes et victoire aux Césars
Antitalent Produkcija lui propose plusieurs projets, mais aucun ne lui correspond totalement. “Ils m’ont alors parlé d’un court métrage, mais ils pensaient qu’il n’allait pas me plaire”, explique Noëlle Levenez. Ce court métrage, c’est l’histoire de Tomo Buzov, un passager qui tente de s’opposer aux assaillants lors du massacre de Štrpci en 1993, où 24 musulmans bosniaques ont été tués dans un train par un groupe paramilitaire serbe. “Dès que j’ai lu le scénario, j’ai tout de suite adoré ! C’était un pari pour Nebojša Slijepčević, le réalisateur, qui devait réussir ce huis clos où tout passe par le visage de l’acteur.” Un défi qu’elle estime être réussi. “Je trouve que ce film arrive, en peu de temps, à soulever des questions sur l’injustice, tout en alliant de vraies propositions visuelles.”
Au mois de mars 2024, seulement un mois après le tournage du court métrage, c’est le moment d’envoyer une sélection de films au Festival de Cannes. “Le court métrage n’était pas fini”, lance Noëlle Levenez. “On leur a envoyé une version sans le montage son. Quand ils nous ont appelés pour nous dire que le film était sélectionné, on ne s’y attendait pas. On a commencé une course effrénée pour pouvoir finir le film avant sa projection.” Quelques mois plus tard, L'Homme qui ne se taisait pas obtient la Palme d’or du court métrage lors de la 77e édition du Festival de Cannes. Une étape importante dans la carrière de Noëlle Levenez. “Cannes, c’est ce qui m’a donné envie de faire du cinéma, donc c’était une chance immense d’y être et de remporter un prix.”
Deux nominations aux Césars et aux Oscars
L’aventure est loin d’être terminée pour Noëlle Levenez et L'Homme qui ne se taisait pas. Le court métrage a obtenu, vendredi soir, le César du meilleur court métrage de fiction et a été nommé aux Oscars. “C’est une vraie course”, explique Noëlle Levenez. “Une fois qu’on est nommé, il y a toute une campagne, presque politique, pour promouvoir le film. On réalise petit à petit ce qu’on est en train de vivre.” Avec ce film, la productrice participe avec fierté au rayonnement du cinéma français à travers le monde. “De nombreux films étrangers sont associés à une société de production française, ce qui témoigne d’une richesse du cinéma français. C’est aussi une fierté supplémentaire en tant que Corse, car le cinéma corse a connu une année incroyable, que ce soit pour les réalisateurs, les acteurs ou les producteurs.”
Désormais, Noëlle Levenez souhaite s’orienter vers la production de longs métrages. “Je souhaite toujours produire des courts métrages, mais j’ai aussi envie de me concentrer sur les longs métrages. Avec Les Films Norfolk, on a déjà plusieurs projets avec des réalisateurs très différents.”