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Bastia : À San Ghjisè, la tradition des panzarotti se transmet de génération en génération


JC le Mardi 18 Mars 2025 à 18:45

En Corse, les grandes fêtes liturgiques comme Noël ou Pâques sont souvent associées à des traditions culinaires propres à chaque microrégion. San Ghjisè ne fait pas exception. À cette occasion, i panzarotti, de petits beignets sucrés, tiennent une place centrale, témoignant d’un savoir-faire ancien et d’une symbolique forte.



(Photo Françoise Geronimi)
(Photo Françoise Geronimi)

À San Ghjisè, i panzarotti sont indissociables de la fête. “De mémoire de San Ghjisippani, ils ont toujours existé”, confient les plus anciens du quartier. Parmi eux, Angèle, nonagénaire, attache une importance particulière à cette tradition qu’elle a elle-même reçue de sa belle-mère. Si aujourd’hui elle ne peut plus les préparer, elle a veillé à transmettre ce savoir-faire à ses proches.
Sa belle-fille Daria perpétue la recette avec fidélité. “Dans le quartier, les panzarotti de ma belle-mère sont célèbres, ils sont uniques au monde”, raconte-t-elle. Elle se souvient encore de la période de la neuvaine, lorsque “trois jours avant la fête, elle en préparait des kilos pour les offrir autour d’elle. Il y avait la queue devant chez elle, et si quelqu’un ne pouvait pas se déplacer, elle lui en envoyait une belle part”.

I Panzarotti, symbole de générosité et de partage
Dans la tradition chrétienne, San Ghjisè n’est pas seulement l’époux de Marie, il est aussi Nutritor Domini, le nourricier du Seigneur. Un rôle qui résonne particulièrement dans cette tradition culinaire. “San Ghjisè a veillé sur la Sainte Famille, il a protégé Marie et son enfant malgré les épreuves. C’était un homme juste”, explique Daria. Le lien entre le saint et les panzarotti se trouve dans leur forme et leur signification : “Ce sont de petits beignets tout ronds, leur nom signifie ‘petit ventre’, une évocation de la satiété, de la générosité et du partage”. Il existe plusieurs variantes de la recette, mais à San Ghjisè, la version traditionnelle est préparée à base de farine de pois chiches parfumée à la fleur d’oranger.
L’archiconfrérie, garante des traditions, veille à ce que ces beignets soient distribués selon une coutume bien précise : “À tout le monde et à personne”, comprenez à ceux que l’on connaît et à ceux que l’on ne connaît pas. Une manière d’affirmer l’esprit de partage qui entoure cette fête.

Daria décrit avec précision les étapes de la préparation : “Il faut deux jours pour les réaliser. La veille, on cuit la farine de pois chiches avec de l’eau jusqu’à obtenir une panizza, que l’on passe au presse-purée le lendemain pour l’assouplir. Ce n’est qu’ensuite que l’on prépare la pâte.” Comme Angèle avant elle, Daria a souvent préparé ces beignets avec ses enfants, Céline et Joseph. “San Ghjisè et i panzarotti, c’est une tradition incontournable dans ma famille depuis toujours”, confie-t-elle en souriant, alors qu’elle s’affaire à préparer le grand repas de fête. “Sparte i panzarotti è tuccà un bicchierinu di muscattu face parte di a festa di u nostru santu” – partager ces beignets et trinquer avec un verre de muscat fait partie de la célébration de notre saint.

Une tradition vivante, où la foi se mêle à la convivialité, et qui, d’une génération à l’autre, continue de faire vibrer le cœur des San Ghjisippani.