Eric Simoni, membre de l’Exécutif de Corsica Libera et leader d’Un Alba Nova per Bastia.
- Comment percevez-vous l’annonce, par le ministre de la justice, du rapprochement prochain des deux jeunes nationalistes Niculaiu Battini et Stefanu Tomasini ?
- Le rapprochement est l’application d’une loi qui existe. Cela peut être perçu comme un premier signe d’apaisement, - nous l’espérons -, mais cela ne nous fait pas oublier les condamnations iniques et l’arbitraire des juridictions d’exception qui doivent cesser. Si on veut ensemencer le sillon de la paix que le mouvement national a tracé, il faut des gestes concrets d’apaisement pour les prisonniers, mais aussi pour les procès à-venir. Il faut arrêter cette violence faite à notre peuple sous la forme d’une répression politique qui n’a aucune raison de s’exercer et qui devient encore plus incompréhensible, même pour des gens qui ne sont pas nationalistes.
- A Paris, le gouvernement et les politiques sont unanimes pour refuser ne serait-ce que d’évoquer l’amnistie des prisonniers politiques. Dans ce contexte, cette revendication est-elle toujours pertinente ?
- Il y a déjà eu des amnisties. La revendication est non seulement pertinente, mais c’est une manière de solder une situation conflictuelle en ouvrant des perspectives de paix avec des garanties pour tout le monde. C’est aussi un geste politique fort. Aujourd’hui, le problème vient d’un blocage psychologique, d’autant plus que nous avons affaire à un gouvernement faible et à un Etat français qui, confronté à un certain nombre de crises, ne veut pas prendre de risques politiques. C’est, à notre avis, un mauvais calcul ! En ne voulant pas écouter cette revendication qui ouvre le champ de la résolution politique, il ne prouve que sa faiblesse, pas sa force. Ceci dit, en attendant l’amnistie, il peut y avoir des gestes d’apaisement qui vont dans le bon sens, mais ils doivent être applicables immédiatement. On ne comprendrait pas dans la situation actuelle de la Corse avec des Nationalistes qui ont été portés au pouvoir territorial, avec la sortie de la clandestinité du FLNC et avec tous les voyants au vert depuis deux ans, que l’Etat français reste sur des positions de blocage aussi absurdes.
- L’attaque De Courson contre la fiscalité corse et sa menace de s’en prendre de nouveau aux Arrêtés Miot vous inquiètent-elles ?
- Oui ! Au plus haut point ! En même temps, ces gens-là, en portant des coups à la Corse de manière réitérée et malveillante, prouvent, - et c’est le paradoxe -, que nous avons raison quand nous demandons un statut fiscal et social. On ne peut plus continuer à demander, de manière complètement désarticulée, la pérennisation de certaines dérogations en donnant l’impression qu’on nous fait des cadeaux, alors qu’on ne nous en a jamais fait ! Il faut obtenir un statut et des compétences fiscales pour que la Corse puisse définir sa fiscalité. Cela va dans le sens de l’émancipation que nous voulons et dans la prise en main par les Corses des affaires de la Corse. C’est primordial ! C’est la seule solution pour échapper à ces attaques réitérées qui finiront par détruire le peu d’économie qui nous reste !
- Des candidats à la primaire de la Droite clament leur accord pour un statut fiscal et même d’autonomie. Comment l’analysez-vous : vraie évolution ou simple promesse électorale ?
- En temps de campagne présidentielle, on entend tout, surtout des promesses qui nous font sourire, vu que lorsqu’ils étaient aux affaires, ces gens-là ne sont jamais allés dans ce sens. Néanmoins, nous nous en réjouissons, pas parce que nous croyons à ces promesses, mais parce que cela veut dire que quelque chose bouge. Aujourd’hui, quand un homme politique français vient en campagne en Corse, il est obligé de parler de ces questions-là. Cela veut dire que si nous sommes opiniâtres, comme nous savons l’être, nous obtiendrons sans doute satisfaction. Il y a eu des avancées qui vont dans le sens de ce que nous demandons depuis des années : le dossier maritime, l’obtention du statut île-montagne, la récupération d’une partie de la TVA en lieu et place d’une dotation qui nous était, soi-disant, généreusement octroyée. Nous obtiendrons d’autres avancées, il faut continuer à lutter.
- Ne craignez-vous pas que la tentation de normalisation, qui se dessine même au travers de la collectivité unique, ne finisse par remettre la Corse dans le droit commun ?
- L’Etat français a toujours cette tentation de remettre la Corse dans le droit commun et de normaliser la situation. Nous ne pouvons pas refuser une avancée qui va dans le sens de notre projet global sous prétexte qu’un jour, ailleurs, d’autres régions, notamment françaises, s’aligneront sur ces mêmes dispositions. Par contre, nous savons très bien que nous aurons toujours un coup d’avance parce que la spécificité de la Corse est la spécificité d’une nation réelle. Il y a des nations virtuelles, des Etats-nations, et puis les nations réelles. Notre réalité, nous la ferons valoir.
- La spécificité corse est, pourtant, attaquée de toutes parts. Que vous inspire la remise en cause judiciaire du PADDUC ?
- Le PADDUC est attaqué sur le plan judiciaire, mais aussi par sa non-application par un Etat qui tergiverse sans arrêt. Il subit des attaques systématiques de gens qui font du lobbying. Rappelez-vous la question orale posée par Josepha Giacometti en 2015 concernant la loi Macron qui est une manière de dire légalement que l’on peut détourner la loi et se permettre de ne pas détruire les constructions invalidées. Les attaques sont perpétuelles pour tenter de minimiser la portée du PADDUC et nous mettre dans des situations embarrassantes qui font la part belle aux projets spéculatifs de tous poils. Nous nous y opposerons, nous continuerons à lutter. Nous pensons que si l’Assemblée de Corse prend de plus en plus d’importance et parvient à imposer ce qu’elle doit imposer, les affaires de la Corse iront d’autant mieux. C’est pour cela que nous soutenons cette majorité territoriale de toutes nos forces.
- Le rapprochement est l’application d’une loi qui existe. Cela peut être perçu comme un premier signe d’apaisement, - nous l’espérons -, mais cela ne nous fait pas oublier les condamnations iniques et l’arbitraire des juridictions d’exception qui doivent cesser. Si on veut ensemencer le sillon de la paix que le mouvement national a tracé, il faut des gestes concrets d’apaisement pour les prisonniers, mais aussi pour les procès à-venir. Il faut arrêter cette violence faite à notre peuple sous la forme d’une répression politique qui n’a aucune raison de s’exercer et qui devient encore plus incompréhensible, même pour des gens qui ne sont pas nationalistes.
- A Paris, le gouvernement et les politiques sont unanimes pour refuser ne serait-ce que d’évoquer l’amnistie des prisonniers politiques. Dans ce contexte, cette revendication est-elle toujours pertinente ?
- Il y a déjà eu des amnisties. La revendication est non seulement pertinente, mais c’est une manière de solder une situation conflictuelle en ouvrant des perspectives de paix avec des garanties pour tout le monde. C’est aussi un geste politique fort. Aujourd’hui, le problème vient d’un blocage psychologique, d’autant plus que nous avons affaire à un gouvernement faible et à un Etat français qui, confronté à un certain nombre de crises, ne veut pas prendre de risques politiques. C’est, à notre avis, un mauvais calcul ! En ne voulant pas écouter cette revendication qui ouvre le champ de la résolution politique, il ne prouve que sa faiblesse, pas sa force. Ceci dit, en attendant l’amnistie, il peut y avoir des gestes d’apaisement qui vont dans le bon sens, mais ils doivent être applicables immédiatement. On ne comprendrait pas dans la situation actuelle de la Corse avec des Nationalistes qui ont été portés au pouvoir territorial, avec la sortie de la clandestinité du FLNC et avec tous les voyants au vert depuis deux ans, que l’Etat français reste sur des positions de blocage aussi absurdes.
- L’attaque De Courson contre la fiscalité corse et sa menace de s’en prendre de nouveau aux Arrêtés Miot vous inquiètent-elles ?
- Oui ! Au plus haut point ! En même temps, ces gens-là, en portant des coups à la Corse de manière réitérée et malveillante, prouvent, - et c’est le paradoxe -, que nous avons raison quand nous demandons un statut fiscal et social. On ne peut plus continuer à demander, de manière complètement désarticulée, la pérennisation de certaines dérogations en donnant l’impression qu’on nous fait des cadeaux, alors qu’on ne nous en a jamais fait ! Il faut obtenir un statut et des compétences fiscales pour que la Corse puisse définir sa fiscalité. Cela va dans le sens de l’émancipation que nous voulons et dans la prise en main par les Corses des affaires de la Corse. C’est primordial ! C’est la seule solution pour échapper à ces attaques réitérées qui finiront par détruire le peu d’économie qui nous reste !
- Des candidats à la primaire de la Droite clament leur accord pour un statut fiscal et même d’autonomie. Comment l’analysez-vous : vraie évolution ou simple promesse électorale ?
- En temps de campagne présidentielle, on entend tout, surtout des promesses qui nous font sourire, vu que lorsqu’ils étaient aux affaires, ces gens-là ne sont jamais allés dans ce sens. Néanmoins, nous nous en réjouissons, pas parce que nous croyons à ces promesses, mais parce que cela veut dire que quelque chose bouge. Aujourd’hui, quand un homme politique français vient en campagne en Corse, il est obligé de parler de ces questions-là. Cela veut dire que si nous sommes opiniâtres, comme nous savons l’être, nous obtiendrons sans doute satisfaction. Il y a eu des avancées qui vont dans le sens de ce que nous demandons depuis des années : le dossier maritime, l’obtention du statut île-montagne, la récupération d’une partie de la TVA en lieu et place d’une dotation qui nous était, soi-disant, généreusement octroyée. Nous obtiendrons d’autres avancées, il faut continuer à lutter.
- Ne craignez-vous pas que la tentation de normalisation, qui se dessine même au travers de la collectivité unique, ne finisse par remettre la Corse dans le droit commun ?
- L’Etat français a toujours cette tentation de remettre la Corse dans le droit commun et de normaliser la situation. Nous ne pouvons pas refuser une avancée qui va dans le sens de notre projet global sous prétexte qu’un jour, ailleurs, d’autres régions, notamment françaises, s’aligneront sur ces mêmes dispositions. Par contre, nous savons très bien que nous aurons toujours un coup d’avance parce que la spécificité de la Corse est la spécificité d’une nation réelle. Il y a des nations virtuelles, des Etats-nations, et puis les nations réelles. Notre réalité, nous la ferons valoir.
- La spécificité corse est, pourtant, attaquée de toutes parts. Que vous inspire la remise en cause judiciaire du PADDUC ?
- Le PADDUC est attaqué sur le plan judiciaire, mais aussi par sa non-application par un Etat qui tergiverse sans arrêt. Il subit des attaques systématiques de gens qui font du lobbying. Rappelez-vous la question orale posée par Josepha Giacometti en 2015 concernant la loi Macron qui est une manière de dire légalement que l’on peut détourner la loi et se permettre de ne pas détruire les constructions invalidées. Les attaques sont perpétuelles pour tenter de minimiser la portée du PADDUC et nous mettre dans des situations embarrassantes qui font la part belle aux projets spéculatifs de tous poils. Nous nous y opposerons, nous continuerons à lutter. Nous pensons que si l’Assemblée de Corse prend de plus en plus d’importance et parvient à imposer ce qu’elle doit imposer, les affaires de la Corse iront d’autant mieux. C’est pour cela que nous soutenons cette majorité territoriale de toutes nos forces.
- Justement, quel regard portez-vous sur cet an 1 de pouvoir nationaliste : satisfait ou peut mieux faire ?
- Ce n’est pas à nous de décerner des bons points aux élus que nous avons contribués à porter au pouvoir territorial, c’est au peuple de les juger. Néanmoins, sans tomber dans l’autosatisfaction, les observateurs les plus éloignés du mouvement nationaliste disent qu’ils n’ont jamais vu un travail tel ! Les Nationalistes ont accompli en quelques mois ce qui n’a pas été fait pendant des décennies ! Ils ont sorti de l’ornière un certain nombre de dossiers, notamment celui des transports maritimes. Bien sûr, tout n’est pas réglé, mais on va vraiment vers quelque chose de meilleur pour la Corse. Le fait de mener une réflexion globale depuis des années a permis de trouver des solutions alors qu’avant, on allait d’atermoiements en blocages, etc. Pouvait-on faire mieux au niveau de la CTC ? Difficilement ! Tout le monde s’en aperçoit et c’est de bon augure pour l’avenir.
- De tout ce qui a été accompli, quel est, pour vous, le point le plus important ?
- C’est très difficile de répondre ! Tout est lié ! Notre projet global associe le développement économique au développement social. La volonté d’émancipation nous permettra de nous doter des outils fiscaux qui génèreront le développement économique… A partir du moment où on défend les intérêts de la Corse et des Corses, des décisions ponctuelles se dégagent, ont peut-être plus d’impact au niveau de la population. Le dossier du maritime aura très rapidement des répercutions que nous ne mesurons pas encore, mais qui seront très bénéfiques pour la Corse. Sur le dossier de la Collectivité unique, la simplification administrative et la mise en cohérence de toutes les infrastructures, qui servent à rendre un vrai service public aux Corses, sont des éléments importants qui auront des effets immédiats. Le statut île-montagne nous ouvre la porte à des financements, que nous n’avions pas jusqu’à maintenant, pour faire des choses cohérentes sur l’ensemble du territoire. On ne peut pas saucissonner les problèmes comme ça a été fait jusque là. Nous ne saucissonnons pas, nous pensons le développement global de la Corse en tant que pays, en tant que nation d’Europe.
- Quelle est, pour vous, la priorité de la prochaine année de mandature ?
- Il faut ancrer le processus de résolution politique et pacifique du problème corse. Déjà, il faut arracher des mesures concrètes concernant nos prisonniers, les procès à-venir… Il faut peser de toutes nos forces pour que des signes d’apaisement concrets soient véritablement donnés. C’est une garantie pour que le processus continue. Ensuite, évidemment, la précarité et le développement économique sont des priorités absolues. La Corse est un paradis à portée de main, il n’est pas normal qu’on y retrouve les mêmes problématiques que dans les régions complètement défavorisées. C’est une île de Méditerranée, riche avec des potentialités extraordinaires. Quand on voit des petits pays comme l’Islande, perdue dans les eaux du Nord, se débrouiller par elle-même avec une population de 300 000 habitants sur dix fois notre superficie, on peut se poser des questions !
- Après un demi-siècle d’opposition, comment appréciez-vous votre rôle en tant que parti de gouvernement ?
- Nous avons un rôle de soutien au gouvernement corse actuel, c’est-à-dire à la majorité territoriale formée des deux composantes du nationalisme. Notre gouvernement fait un excellent travail. Il faut donc le renforcer, relayer ses décisions sur le terrain pour que celles-ci soient appliquées même si elles ne sont pas inscrites dans le marbre de la loi française. Cela fait partie du travail de Corsica Libera. Nous appelons les gens à nous rejoindre pour conforter la majorité. Et, puis il y a notre spécificité propre : le cap mis sur l’indépendance nationale. Nous continuerons à porter notre projet d’indépendance pour convaincre les gens et populariser cette idée le plus possible comme c’est le cas en Ecosse ou en Catalogne.
- L’indépendance, n’est-ce pas un cap de long terme ?
- L’indépendance, c’est le cap ! C’est l’objectif ! Mais, si on veut aller vers l’indépendance, il faut démontrer progressivement qu’on est capable d’y aller, que notre peuple peut arriver à prendre en main son avenir. Nous devons prouver concrètement que la Corse a des capacités à se développer économiquement et socialement dans le cadre d’un projet européen où elle retrouvera toute sa dimension de nation et tous ses droits nationaux. Cette démonstration se fait au quotidien. Chaque fois que nous avançons de cette manière-là, nous faisons la démonstration que l’indépendance est non seulement possible, mais souhaitable. Il n’y a pas du tout d’antagonisme, ni d’incompatibilité entre ce que nous considérons comme une phase d’étape et l’objectif qui reste et demeure un objectif de libération nationale, à savoir l’indépendance de notre pays.
- L’étape intermédiaire serait l’autonomie. Accepterez-vous un statut, comme le promet la droite, s’il est proposé ?
- L’autonomie, oui, mais quelle autonomie ? Même Alain Juppé dit qu’il faut plus d’autonomie à la Corse, mais il faut savoir ce qu’on met sous ce vocable très générique d’autonomie. Nous, nous parlons d’un processus très précis de dévolution du pouvoir, c’est-à-dire un contenu, qui conduira à la reconquête de nos droits nationaux pleins et entiers, à une souveraineté pleine et entière. Tout ce qui va dans ce sens, même si c’est par étapes, est bon à prendre. Ces étapes, nous les construirons nous aussi, et nous en définirons le contenu en sachant que nous regardons une idée qui n’est pas cachée, mais affichée, celle de l’indépendance nationale.
Propos recueillis par Nicole MARI.
- Ce n’est pas à nous de décerner des bons points aux élus que nous avons contribués à porter au pouvoir territorial, c’est au peuple de les juger. Néanmoins, sans tomber dans l’autosatisfaction, les observateurs les plus éloignés du mouvement nationaliste disent qu’ils n’ont jamais vu un travail tel ! Les Nationalistes ont accompli en quelques mois ce qui n’a pas été fait pendant des décennies ! Ils ont sorti de l’ornière un certain nombre de dossiers, notamment celui des transports maritimes. Bien sûr, tout n’est pas réglé, mais on va vraiment vers quelque chose de meilleur pour la Corse. Le fait de mener une réflexion globale depuis des années a permis de trouver des solutions alors qu’avant, on allait d’atermoiements en blocages, etc. Pouvait-on faire mieux au niveau de la CTC ? Difficilement ! Tout le monde s’en aperçoit et c’est de bon augure pour l’avenir.
- De tout ce qui a été accompli, quel est, pour vous, le point le plus important ?
- C’est très difficile de répondre ! Tout est lié ! Notre projet global associe le développement économique au développement social. La volonté d’émancipation nous permettra de nous doter des outils fiscaux qui génèreront le développement économique… A partir du moment où on défend les intérêts de la Corse et des Corses, des décisions ponctuelles se dégagent, ont peut-être plus d’impact au niveau de la population. Le dossier du maritime aura très rapidement des répercutions que nous ne mesurons pas encore, mais qui seront très bénéfiques pour la Corse. Sur le dossier de la Collectivité unique, la simplification administrative et la mise en cohérence de toutes les infrastructures, qui servent à rendre un vrai service public aux Corses, sont des éléments importants qui auront des effets immédiats. Le statut île-montagne nous ouvre la porte à des financements, que nous n’avions pas jusqu’à maintenant, pour faire des choses cohérentes sur l’ensemble du territoire. On ne peut pas saucissonner les problèmes comme ça a été fait jusque là. Nous ne saucissonnons pas, nous pensons le développement global de la Corse en tant que pays, en tant que nation d’Europe.
- Quelle est, pour vous, la priorité de la prochaine année de mandature ?
- Il faut ancrer le processus de résolution politique et pacifique du problème corse. Déjà, il faut arracher des mesures concrètes concernant nos prisonniers, les procès à-venir… Il faut peser de toutes nos forces pour que des signes d’apaisement concrets soient véritablement donnés. C’est une garantie pour que le processus continue. Ensuite, évidemment, la précarité et le développement économique sont des priorités absolues. La Corse est un paradis à portée de main, il n’est pas normal qu’on y retrouve les mêmes problématiques que dans les régions complètement défavorisées. C’est une île de Méditerranée, riche avec des potentialités extraordinaires. Quand on voit des petits pays comme l’Islande, perdue dans les eaux du Nord, se débrouiller par elle-même avec une population de 300 000 habitants sur dix fois notre superficie, on peut se poser des questions !
- Après un demi-siècle d’opposition, comment appréciez-vous votre rôle en tant que parti de gouvernement ?
- Nous avons un rôle de soutien au gouvernement corse actuel, c’est-à-dire à la majorité territoriale formée des deux composantes du nationalisme. Notre gouvernement fait un excellent travail. Il faut donc le renforcer, relayer ses décisions sur le terrain pour que celles-ci soient appliquées même si elles ne sont pas inscrites dans le marbre de la loi française. Cela fait partie du travail de Corsica Libera. Nous appelons les gens à nous rejoindre pour conforter la majorité. Et, puis il y a notre spécificité propre : le cap mis sur l’indépendance nationale. Nous continuerons à porter notre projet d’indépendance pour convaincre les gens et populariser cette idée le plus possible comme c’est le cas en Ecosse ou en Catalogne.
- L’indépendance, n’est-ce pas un cap de long terme ?
- L’indépendance, c’est le cap ! C’est l’objectif ! Mais, si on veut aller vers l’indépendance, il faut démontrer progressivement qu’on est capable d’y aller, que notre peuple peut arriver à prendre en main son avenir. Nous devons prouver concrètement que la Corse a des capacités à se développer économiquement et socialement dans le cadre d’un projet européen où elle retrouvera toute sa dimension de nation et tous ses droits nationaux. Cette démonstration se fait au quotidien. Chaque fois que nous avançons de cette manière-là, nous faisons la démonstration que l’indépendance est non seulement possible, mais souhaitable. Il n’y a pas du tout d’antagonisme, ni d’incompatibilité entre ce que nous considérons comme une phase d’étape et l’objectif qui reste et demeure un objectif de libération nationale, à savoir l’indépendance de notre pays.
- L’étape intermédiaire serait l’autonomie. Accepterez-vous un statut, comme le promet la droite, s’il est proposé ?
- L’autonomie, oui, mais quelle autonomie ? Même Alain Juppé dit qu’il faut plus d’autonomie à la Corse, mais il faut savoir ce qu’on met sous ce vocable très générique d’autonomie. Nous, nous parlons d’un processus très précis de dévolution du pouvoir, c’est-à-dire un contenu, qui conduira à la reconquête de nos droits nationaux pleins et entiers, à une souveraineté pleine et entière. Tout ce qui va dans ce sens, même si c’est par étapes, est bon à prendre. Ces étapes, nous les construirons nous aussi, et nous en définirons le contenu en sachant que nous regardons une idée qui n’est pas cachée, mais affichée, celle de l’indépendance nationale.
Propos recueillis par Nicole MARI.