Le tribunal a estimé, à la majorité de huit voix contre une, qu'Antoine Pietri était coupable d’avoir volontairement donné la mort à Patrick Julien. La question de la préméditation a été retenue, tandis que l’hypothèse d’un guet-apens a été écartée par les jurés.
L'avocat général a estimé que les preuves convergeant vers la culpabilité d'Antoine Pietri étaient nombreuses. Il a évoqué "une personne impulsive", "obsédée par les armes", dont la présence sur les lieux du crime au moment des faits était avérée. Un tee-shirt qu'il portait, retrouvé sur la scène de crime, était parsemé de 27 résidus de tirs.
Le mobile du crime a été évoqué lors du procès. L'avocat général a expliqué que Antoine Pietri avait agi par crainte de voir Patrick Julien lui retirer un terrain destiné à ses chèvres. Cette décision aurait signifié pour lui la perte de près de 25.000 euros d’aides agricoles. Le procureur a martelé : "Vous avez bien compris qu’Antoine Pietri avait un mobile pour tuer Patrick Julien."
Lors de l'énoncé du verdict, Antoine Pietri, cheveux bouclés sur les yeux, n'a pas immédiatement réagi, mais s’est ensuite énervé en criant, une fois arrêté pour être incarcéré : "Bâtards, vous m’accusez à tort." Plusieurs membres de sa famille ont exprimé leur colère et ont invectivé les parties civiles, leurs avocats et les journalistes.
Antoine Pietri, acquitté lors d’un premier procès à Ajaccio en 2020, a été condamné à dix ans d'interdiction de permis de chasse, dix ans d’inéligibilité et à la confiscation du fusil à pompe, arme présumée utilisée lors du meurtre.
"Vindicte judiciaire"
Lors du procès, l’accusé avait reconnu à plusieurs reprises être monté sur les lieux du crime le jour des faits, avant de faire un revirement près d’un an après l’assassinat.
Pour justifier ses réquisitions de 18 ans, inférieures aux 25 ans requis en première instance, l'avocat général a expliqué tenir compte qu'il était devenu père et "avait évolué favorablement" mais a appelé les jurés à ne "pas succomber aux écrans de fumée de la défense".
Celle-ci, portée par trois avocats, s'est appliquée pendant quatre heures à dénoncer, un dossier ouvert "sur une rumeur", des "irrégularités innombrables" dans une "enquête bâclée" avec des "carences béantes" par des enquêteurs ayant "tous quitté la gendarmerie" et une juge d'instruction "mutée" depuis.
La défense a regretté qu'une trace de pas et deux mégots, dont l'un "avec un ADN masculin complet" pouvant "peut-être identifier l'auteur", n'aient pas été analysés. Et selon elle, d'autres pistes potentielles ont été ignorées.
Assurant qu'il n'y avait "pas de mobile" puisque les aides agricoles ne lui ont jamais été retirées, que "personne ne le voit sur la scène de crime" et qu'il y avait "deux tireurs", Me Dominique Paolini a insisté: "Si vous avez le moindre doute, vous devez l'acquitter".
"On passe de 25 ans à 18 ans" de réquisitions "parce que le dossier est creux, vide", a-t-il également pointé, estimant que si "on a un dossier solide et clair", "on demande le maximum légal", soit la perpétuité.
Me Anna-Maria Sollacaro a dénoncé "une vindicte judiciaire" de magistrats n'ayant pas "supporté" l'acquittement de première instance. "L'erreur judiciaire, c'est ce qu'on vous demande", "la condamnation à tout prix d'Antoine Pietri", a asséné Me Paul Sollacaro avant de lancer: "Acquittez-le".
"Mon innocence a été reconnue une première fois et j'ose espérer qu'elle le sera une deuxième fois", avait déclaré l'accusé avant que la cour ne se retire pour délibérer.