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Médecine esthétique : depuis le confinement, les injections ont la côte chez les jeunes corses


Livia Santana le Dimanche 31 Juillet 2022 à 17:03

Les lèvres, les pommettes, le nez... après le confinement la médecine esthétique a connu un boom en Corse notamment chez les 16-20 ans.



Image illustration Pixabay
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Le Covid-19 a bien bousculé nos habitudes. Télétravail, ventes à emporter, achats de dernières minutes… En parallèle, un autre phénomène post-confinement peu attendu est apparu en Corse, une augmentation du nombre de recours à la médecine esthétique. Affiner son nez, avoir des lèvres plus pulpeuses, une mâchoire carrée, un menton et des pommettes plus saillantes, combler des rides naissantes… autant de possibilités offertes par les spécialistes de l’esthétique.
 
Dans son cabinet à Bastia, le docteur Andrea Vincentelli, a bien pu constater ce phénomène. « Ma patientèle a augmenté d’environ 5 à 10% mais elle s’est surtout diversifiée, de plus en plus de jeunes âgés de 15 à 20 ans sont en demande d’actes esthétiques, les hommes aussi », assure-t-elle. Pour le médecin, l’arrivée de ces jeunes patients correspond à l’emploi massif durant la crise Covid des réseaux sociaux, des appels en visio, mais aussi et surtout, des filtres utilisés sur Snapchat, Instagram ou Tik Tok pour « embellir » les visages.
« Cela a été sans aucun doute un accélérateur. Même avant cela, les injections étaient rentrées dans les mœurs. On le voit avec les sœurs Kardashian et dans la télé-réalité, les jeunes y sont habitués », poursuit Andrea Vincentelli. Et les parents n’hésitent pas à jouer le jeu puisque les mineurs en sont accompagnés. 
 
Toutefois, ce médecin n’accepte pas de pratiquer des actes ditS « déraisonnables ».  « On essaie de guider les jeunes, de les faire s’accepter, comme ils sont et de ne pas modifier leur visage. Ce qui reste naturel je le pratique mais je ne réponds pas à un excès », détaille le médecin esthétique.

Cette philosophie, Eric Simoni, secrétaire de l’association méditerranéenne de médecine esthétique, la partage. Lorsque de jeunes patients s’adressent à lui, l’homme préconise un entretien approfondi pour « définir des objectifs atteignables et raisonnables ». Pour lui, pas question de céder au « phénomène de mode et aux besoins artificiels créés par la société de consommation. »
Le praticien prône une pratique de la médecine esthétique plus médicale prenant en compte la santé et le bien-être global de l’individu. « Par exemple, on va rediriger les jeunes vers des pratiques les moins agressives possibles, pour qu’ils se sentent mieux et qu’ils s’acceptent mieux », précise Eric Simoni. 
 
Je trouvais mes lèvres fines
Cela fait deux ans que Mattea a franchi le cap à contre-courant de l’avis de ses proches. « Je trouvais mes lèvres fines, ce n’était pas un complexe mais je voulais améliorer leur aspect. On faisait que me dire que je n’en avais pas besoin mais moi j’en avais envie. Je me suis un peu renseignée, à Bastia il y avait 5 à 6 mois d’attente donc je suis partie sur Nice », confie la jeune femme de 22 ans qui tous les 5 mois effectuent des allers-retours sur le continent pour réinjecter ses lèvres puisque l’action repulpante s’efface après 5 à 8 mois selon les patients. Et cela à un coût, pour une piqure d’acide hyaluronique il faut compter environ 250€ à Nice et 350€ en Corse.
 
Un cercle vicieux
Depuis deux ans, Mattea se dit « très satisfaite » de l’aspect de sa bouche même si l’avis de ses proches n’a pas changé. Elle exprime tout de même quelques inquiétudes sur l’addiction que ces actes peuvent procurer. « C’est un cercle vicieux, une fois qu’on commence on n’a pas envie de s’arrêter. Moi je ne pense pas continuer les injections ailleurs parce que j’ai vu des filles qui en ont abusé et je n’aime pas le résultat. En revanche je réfléchis à me faire refaire la poitrine », confie-t-elle.
 

Des praticiens peu consciencieux 
Si les deux praticiens bastiais appliquent des principes éthiques quant à la pratique ou non d’injections, il semblerait que ce ne soit pas le cas de tous. Face à ce constat, le secrétaire de l’association méditerranéenne de médecine esthétique ne peut que le regretter. « Certains cèdent à la pression du patient. Aussi, il y a une part de subjectivité dans ce qui est plus ou moins naturel, c’est là que les approches diffèrent d’un praticien à l’autre », continue Eric Simoni. Le docteur Bruno Manzi, président de l’ordre des médecins de Haute-Corse s’inquiète surtout de la pratique illégale de la médecine esthétique sur l’île : « Il faut rappeler que ce sont des actes médicaux, que seuls les médecins ORL, dermatologues, ophtalmologues, chirurgiens esthétiques peuvent administrer. Il faut faire très attention aux injections dans les instituts de beauté ou dans les hôtels car des effets secondaires graves sont possibles. »