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Permis de conduire à 17 ans : Le "oui mais" des auto-écoles corses


David Ravier le Lundi 26 Juin 2023 à 11:14

Le gouvernement va abaisser dès 2024 à 17 ans, au lieu de 18 ans actuellement, l'âge permettant de conduire seul, a annoncé Élisabeth Borne mardi 20 juin.



Photo d’illustration
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"À partir de janvier 2024, on pourra passer le permis de conduire à partir de 17 ans et conduire à partir de 17 ans", au lieu de 18 ans, a affirmé la Première ministre, en soulignant que cette mesure serait «un vrai plus» notamment pour les jeunes en apprentissage. Actuellement, un jeune en conduite accompagnée peut déjà passer le permis B à 17 ans, mais n'a le droit de prendre le volant par lui-même que le jour de ses 18 ans. Ce seuil sera donc abaissé d'un an. 

Alors que les accidents de la route sont la première cause de mortalité chez les jeunes âgés de 18 à 24 ans, Elisabeth Borne a promis d'être "très attentif sur le niveau demandé" pour obtenir le permis. Le gouvernement est aussi "en train de renforcer les attestations de sécurité routière pour en faire des sortes de pré-codes", a-t-elle ajouté, en assurant qu'il n'y avait "pas eu plus d'accidents" dans les pays voisins qui ont un permis de conduire à 17 ans.

En Corse, cette mesure a été accueillie tièdement par les responsables d'auto-écoles, qui craignent un affaiblissement de la conduite accompagnée et la multiplication des accidents de la route. "Depuis cette annonce, on a déjà huit personnes de l'auto-école qui veulent abandonner la conduite accompagnée pour passer le permis normal", explique  Jean-Marc Angelotti, représentant corse de l'Unidec, le syndicat des auto-écoles. Pour le directeur de l'auto-école CESR20 de Bastia, la nouvelle mesure rend moins attrayant aux yeux des jeunes le passage par la conduite accompagnée, un dispositif plus long en termes de formation, mais qui augmente grandement la sécurité sur la route. "Ça n'a pas de sens, le gouvernement prône la sécurité routière d'un côté, mais allège le niveau de formation de l'autre. Pour avoir son permis en conduite accompagnée, un jeune doit faire au moins 3 000 km durant deux ans en étant encadré par un adulte qui a plus de cinq d'expérience, c'est un gage pour prendre confiance en soi, sachant que certains sont même amenés à faire plus de 20 000 km de route. En passant à l'auto-école, l'adolescent a besoin de faire 20 heures de pratique minimum et 500 km pour devenir conducteur". Ce constat, partagé par d'autres gérants d'auto-école insulaires, accentue l'inquiétude des professionnels quant à la sécurité.  Pour rappel, 18% des accidents recensés en 2019 impliquaient des conducteurs novices, c'est-à-dire ayant obtenu son permis depuis moins de deux ans selon la Sécurité routière.

Trop jeunes pour conduire ?
Si plusieurs associations ont fait part de leur hostilité à l'abaissement, pour Jean-Marc Angelotti,, l'abaissement de l'âge pour décrocher le précieux sésame n'est pas une mauvaise chose en soi, à condition que la mesure soit encadrée de manière responsable. "À la base, ce nouveau dispositif n'aurait dû être ouvert qu'à ceux qui ont fait de la conduite accompagnée, parce que ces jeunes ont gagné de l'expérience en roulant avec leurs parents pendant un ou deux ans. Mais la ministre a préféré l'élargir à tout le monde, ce qui veut dire qu'un adolescent de 17 ans peut obtenir son permis en quelques mois sans avoir d'expérience. Au final, ça dévalorise complètement la conduite accompagnée. Sans compter qu'il y a une forme d'injustice pour ceux qui ont commencé à conduire à 15 ans avec leurs parents, qui peuvent passer leur permis à 17 ans, mais doivent attendre la majorité pour conduire seuls. Imaginez qu'un jeune de 17 ans qui peut conduire avant eux alors qu'il n'a pas fait de conduite accompagnée, c'est déloyal."

Cet abaissement de l'âge d'obtention du permis soulève d'autres problèmes, avec potentiellement des annulations massives de parcours de jeunes en conduite accompagnés qui basculent vers un cursus classique, ce qui créera donc un goulot d'étranglement au niveau des centres d'examen. "La France manque cruellement d'inspecteurs, et avec tous les désistements à venir, qu'on estime entre 30 et 40% des jeunes inscrits en conduite accompagnée en 2022 et 2023, il faudra mettre les bouchées doubles pour accueillir tous ces nouveaux candidats", prévient Jean-Marc Angelotti.