Des centaines de personnes, dont plusieurs militants nationalistes, rassemblées devant les grilles du palais de justice de Bastia en soutien aux deux prévenus siscais.
Des centaines de personnes en colère massées devant les grilles d’un Palais de justice cadenassé et sous haute surveillance, une salle comble et sous tension, des leaders nationalistes, dont le président de l’Assemblée de Corse et le président du conseil exécutif de Corse, venus apporter un soutien ferme à des prévenus insulaires, une île en émoi… La scène a tendance à devenir ordinaire depuis quelques mois à Bastia. Elle s’est reproduite, jeudi après-midi, lors de l’audience en comparution immédiate des cinq prévenus impliqués dans les violents incidents qui ont éclaté samedi dernier sur la plage de Sisco dans le Cap Corse et opposé des villageois à une famille d’origine maghrébine. Cinq protagonistes se sont, donc, retrouvés, ensemble, dans le box des accusés, mais séparés par des gendarmes. D’un côté, trois frères de nationalité marocaine, Djamal, Abdelillah et Mustapha Benhaddou, à l’origine de la rixe et poursuivis, notamment, pour violences en réunion avec armes sur personnes identifiées ou non-identifiées. Ils sont accusés d’avoir fait usage d’armes blanches, en l’occurrence un couteau, un fusil-harpon et une batte de base-ball, contre des habitants de Sisco et blessé grièvement un père et son fils, qui se sont constitués parties civiles. De l’autre, deux Siscais, Pierre Baldi et Lucien Straboni, poursuivis pour violences en réunion. Ils sont, notamment, accusés de coups de poing et de coups de pied à l’encontre d’un frère Benhaddou lorsqu’il était, soit à terre, soit évacué sur un brancard.
Des faits inacceptables
D’emblée, la présidente du tribunal annonce que, suite à une requête des avocats des frères Benhaddou qui ont besoin d’un délai pour préparer la défense de leurs clients, l’audience est renvoyée au 15 septembre prochain à 15 heures. Enonçant les chefs d’accusation de chaque prévenu, elle précise aux deux Siscais que « l’affaire sera jugée, non sur le fond, mais dans la globalité ». Puis, demande au procureur de la République, Nicolas Bessone, de requérir des mesures de sécurité préventives contre les prévenus afin de s’assurer de leur présence au futur procès. Ce dernier saisit l’occasion pour justifier son choix procédural d’une comparution immédiate : « Cette affaire a suscité une émotion particulièrement forte et a, donc, appelé une réponse rapide du ministère public qui a entendu le plus vite possible tous les protagonistes et pu, ainsi, avoir une vision assez claire des faits. La comparution immédiate est motivée par plusieurs raisons. D’abord, des scènes très violentes ont entrainé des dommages corporels qui restent très légers. Ensuite, il y a deux éléments inacceptables : le premier est d’estimer qu’une plage est à soi et commettre pour cela un certain nombre de violences, le second est de vouloir se faire justice soi-même avec des scènes d’une violence énorme qui aurait pu avoir des conséquences dramatiques ».
S’approprier la plage !
Le procureur revient sur la chronologie des faits constatés et étayés par des témoignages neutres et des vidéos « qui démontrent que la famille Benhaddou était dans une logique de s’approprier cette plage » et que « l’ambiance était délétère ». L’enquête établit que les frères Benhaddou commencent, d’abord, par planter un panneau de chantier à l’entrée de la plage pour en interdire l’accès. Puis, ils tentent de faire le vide et de chasser « les intrus » à travers quatre incidents qui font monter la pression. Le premier vise, à travers une dispute et des jets de pierre, à intimider un couple de touristes venu se baigner. Puis, les frères Benhaddou s’en prennent à de jeunes enfants, âgés d’une dizaine d’années, qui abordent la plage en canoë. « Les enfants crient d’habitude : « A l’abordage ! ». Là, ils ont crié : « Allah akbar ! ». La famille a voulu les chasser », explique Nicolas Bessone. Le troisième incident oppose les Benhaddou à un touriste belge qui prend la crique en photo et qui se fait insulter. A l’intimidation et aux violences verbales succèdent les violences physiques quand un jeune de Sisco, Jiry Newman, prend à son tour des photos avec son téléphone portable. Son père intervient pour le défendre. Les villageois avertis descendent sur la plage. Et, c’est l’escalade…
L’agressivité d’un seul
Le procureur est formel : « Celui qui joue le rôle moteur dans cette famille est celui qui a le casier judiciaire le plus chargé ». En l’occurrence, Mustapha Benhaddou qui aligne une longue liste de condamnations diverses et de peines de prison sur le continent : violences, outrages envers des représentants des forces de l’ordre, rébellion, dégradation de monuments publics, détention d’armes, usage et trafic de stupéfiants… « C’est lui qui va au contact des Newman et qui sort le couteau. Il commet l’acte le plus grave de la journée sur le père Newman. Ensuite, les villageois affluent. On n’est pas dans le cercle des poètes disparus ! Les gens sont plutôt énervés ! Mustapha est très agressif et s’empare d’un harpon ». Pas question d’intégrisme, tient-il à souligner, seulement « l’histoire d’individus caractériels qui veulent avoir la plage pour eux. Les choses dégénèrent essentiellement par l’attitude de Mustapha ». Mais, s’il reconnaît que la victime principale est du côté des Siscais il définit, néanmoins, deux agresseurs : les frères Benhaddou et les Siscais « qui ont frappé ceux qui étaient à terre ».
La part des choses
Nicolas Bessone estime faire la part des choses et replacer l’affaire dans son contexte : « La riposte est scandaleuse, inadmissible ! J’ai entendu la légitime émotion de la population de Sisco qui dit : « On a frappé nos enfants ! C’est inadmissible ! ». Mais, il y avait, aussi, des enfants sur cette plage qui ne sont pas responsables de la violence de leur famille. Une jeune fille de 17 ans s’est enfuie, affolée ! C’est là que la justice privée est intolérable, que se trouve le danger des mouvements de foule et c’est pourquoi les deux Siscais sont dans le box ! ». Il en profite pour indiquer que le procès ne concerne que les violences faites aux personnes. L’enquête judiciaire se poursuit sur l’atteinte aux biens, notamment sur l’incendie des voitures de la famille Benhaddou et l’identification des auteurs. Il révèle, également, qu’il y a un absent dans le box des accusés : un quatrième frère Benhaddou qui a pris la fuite après son audition et est activement recherché. Etant en situation irrégulière, il a fourni une fausse identité et s’est déclaré victime. « Quand on ment sur quelque chose d’aussi important que son identité, ça décrédibilise l’ensemble du discours. Mon but est de déterminer la responsabilité de cette personne qui est activement recherchée. Nous poursuivons les investigations ».
Des mesures coercitives
Enfin, le procureur requiert des mesures coercitives à l’encontre de chacun des prévenus : un contrôle judiciaire avec interdiction de paraître à Sisco et d’entrer en contact avec des personnes de la partie adverse pour deux frères Benhaddou qui n’ont pas de casier judiciaire : Abdelillah, qui vit en Espagne et était en vacances, et Djamal. Le placement en détention provisoire pour Mustapha : « Pour celui qui est à l’origine des violences, compte tenu de son rôle moteur, de son casier judiciaire et des problématiques de présentation…, il y aurait quand même une incompréhension qu’il sorte libre de ce tribunal ». Contrôle judiciaire également pour Pierre Baldi et Lucien Straboni avec interdiction d’entrer en contact avec les parties adverses. Si les avocats des frères Benhaddou ne trouvent rien à redire, ceux des Siscais, par la voix de Me Marc-Antoine Luca, montent au créneau pour demander une différence de traitement et récuser les contrôles judiciaires. L’avocat remarque que les deux Siscais « se sont présentés spontanément en garde à vue et se sont représentés à l’audience le lendemain sans aucune volonté de se soustraire alors qu’un des quatre frères Benhaddou est en fuite. On n’est pas dans la même implication de dangerosité et de risque de ne pas se présenter à l’audience, le 15 ». Il ne sera pas entendu ! Après un bref délibéré, le tribunal accède aux réquisitions du procureur.
Une presse nationale huée
La foule, mécontente, regagne tranquillement la sortie et rejoint la population de Sisco massée derrière les grilles. Comme la veille devant la gendarmerie de Borgo, la présence des médias nationaux, venus en nombre, est peu appréciée et même huée par une jeunesse qui ne supporte plus le traitement récurrent infligé à l’actualité corse, une actualité traitée par la presse continentale de manière volontairement partiale, sans aucun souci de vérité et uniquement à charge anti-corse. Comme la veille, ce sont les élus nationalistes qui doivent intervenir et s’interposer pour éviter des incidents et ramener le calme. Avec le maire de Sisco, Ange-Pierre Vivoni, ils jouent l’apaisement et restent sur place jusqu’à ce que la foule soit totalement dispersée. Tous espèrent que le renvoi du procès permettra de dénouer les tensions. Rien n’est moins sûr ! Affaire à suivre…
N.M.
Des faits inacceptables
D’emblée, la présidente du tribunal annonce que, suite à une requête des avocats des frères Benhaddou qui ont besoin d’un délai pour préparer la défense de leurs clients, l’audience est renvoyée au 15 septembre prochain à 15 heures. Enonçant les chefs d’accusation de chaque prévenu, elle précise aux deux Siscais que « l’affaire sera jugée, non sur le fond, mais dans la globalité ». Puis, demande au procureur de la République, Nicolas Bessone, de requérir des mesures de sécurité préventives contre les prévenus afin de s’assurer de leur présence au futur procès. Ce dernier saisit l’occasion pour justifier son choix procédural d’une comparution immédiate : « Cette affaire a suscité une émotion particulièrement forte et a, donc, appelé une réponse rapide du ministère public qui a entendu le plus vite possible tous les protagonistes et pu, ainsi, avoir une vision assez claire des faits. La comparution immédiate est motivée par plusieurs raisons. D’abord, des scènes très violentes ont entrainé des dommages corporels qui restent très légers. Ensuite, il y a deux éléments inacceptables : le premier est d’estimer qu’une plage est à soi et commettre pour cela un certain nombre de violences, le second est de vouloir se faire justice soi-même avec des scènes d’une violence énorme qui aurait pu avoir des conséquences dramatiques ».
S’approprier la plage !
Le procureur revient sur la chronologie des faits constatés et étayés par des témoignages neutres et des vidéos « qui démontrent que la famille Benhaddou était dans une logique de s’approprier cette plage » et que « l’ambiance était délétère ». L’enquête établit que les frères Benhaddou commencent, d’abord, par planter un panneau de chantier à l’entrée de la plage pour en interdire l’accès. Puis, ils tentent de faire le vide et de chasser « les intrus » à travers quatre incidents qui font monter la pression. Le premier vise, à travers une dispute et des jets de pierre, à intimider un couple de touristes venu se baigner. Puis, les frères Benhaddou s’en prennent à de jeunes enfants, âgés d’une dizaine d’années, qui abordent la plage en canoë. « Les enfants crient d’habitude : « A l’abordage ! ». Là, ils ont crié : « Allah akbar ! ». La famille a voulu les chasser », explique Nicolas Bessone. Le troisième incident oppose les Benhaddou à un touriste belge qui prend la crique en photo et qui se fait insulter. A l’intimidation et aux violences verbales succèdent les violences physiques quand un jeune de Sisco, Jiry Newman, prend à son tour des photos avec son téléphone portable. Son père intervient pour le défendre. Les villageois avertis descendent sur la plage. Et, c’est l’escalade…
L’agressivité d’un seul
Le procureur est formel : « Celui qui joue le rôle moteur dans cette famille est celui qui a le casier judiciaire le plus chargé ». En l’occurrence, Mustapha Benhaddou qui aligne une longue liste de condamnations diverses et de peines de prison sur le continent : violences, outrages envers des représentants des forces de l’ordre, rébellion, dégradation de monuments publics, détention d’armes, usage et trafic de stupéfiants… « C’est lui qui va au contact des Newman et qui sort le couteau. Il commet l’acte le plus grave de la journée sur le père Newman. Ensuite, les villageois affluent. On n’est pas dans le cercle des poètes disparus ! Les gens sont plutôt énervés ! Mustapha est très agressif et s’empare d’un harpon ». Pas question d’intégrisme, tient-il à souligner, seulement « l’histoire d’individus caractériels qui veulent avoir la plage pour eux. Les choses dégénèrent essentiellement par l’attitude de Mustapha ». Mais, s’il reconnaît que la victime principale est du côté des Siscais il définit, néanmoins, deux agresseurs : les frères Benhaddou et les Siscais « qui ont frappé ceux qui étaient à terre ».
La part des choses
Nicolas Bessone estime faire la part des choses et replacer l’affaire dans son contexte : « La riposte est scandaleuse, inadmissible ! J’ai entendu la légitime émotion de la population de Sisco qui dit : « On a frappé nos enfants ! C’est inadmissible ! ». Mais, il y avait, aussi, des enfants sur cette plage qui ne sont pas responsables de la violence de leur famille. Une jeune fille de 17 ans s’est enfuie, affolée ! C’est là que la justice privée est intolérable, que se trouve le danger des mouvements de foule et c’est pourquoi les deux Siscais sont dans le box ! ». Il en profite pour indiquer que le procès ne concerne que les violences faites aux personnes. L’enquête judiciaire se poursuit sur l’atteinte aux biens, notamment sur l’incendie des voitures de la famille Benhaddou et l’identification des auteurs. Il révèle, également, qu’il y a un absent dans le box des accusés : un quatrième frère Benhaddou qui a pris la fuite après son audition et est activement recherché. Etant en situation irrégulière, il a fourni une fausse identité et s’est déclaré victime. « Quand on ment sur quelque chose d’aussi important que son identité, ça décrédibilise l’ensemble du discours. Mon but est de déterminer la responsabilité de cette personne qui est activement recherchée. Nous poursuivons les investigations ».
Des mesures coercitives
Enfin, le procureur requiert des mesures coercitives à l’encontre de chacun des prévenus : un contrôle judiciaire avec interdiction de paraître à Sisco et d’entrer en contact avec des personnes de la partie adverse pour deux frères Benhaddou qui n’ont pas de casier judiciaire : Abdelillah, qui vit en Espagne et était en vacances, et Djamal. Le placement en détention provisoire pour Mustapha : « Pour celui qui est à l’origine des violences, compte tenu de son rôle moteur, de son casier judiciaire et des problématiques de présentation…, il y aurait quand même une incompréhension qu’il sorte libre de ce tribunal ». Contrôle judiciaire également pour Pierre Baldi et Lucien Straboni avec interdiction d’entrer en contact avec les parties adverses. Si les avocats des frères Benhaddou ne trouvent rien à redire, ceux des Siscais, par la voix de Me Marc-Antoine Luca, montent au créneau pour demander une différence de traitement et récuser les contrôles judiciaires. L’avocat remarque que les deux Siscais « se sont présentés spontanément en garde à vue et se sont représentés à l’audience le lendemain sans aucune volonté de se soustraire alors qu’un des quatre frères Benhaddou est en fuite. On n’est pas dans la même implication de dangerosité et de risque de ne pas se présenter à l’audience, le 15 ». Il ne sera pas entendu ! Après un bref délibéré, le tribunal accède aux réquisitions du procureur.
Une presse nationale huée
La foule, mécontente, regagne tranquillement la sortie et rejoint la population de Sisco massée derrière les grilles. Comme la veille devant la gendarmerie de Borgo, la présence des médias nationaux, venus en nombre, est peu appréciée et même huée par une jeunesse qui ne supporte plus le traitement récurrent infligé à l’actualité corse, une actualité traitée par la presse continentale de manière volontairement partiale, sans aucun souci de vérité et uniquement à charge anti-corse. Comme la veille, ce sont les élus nationalistes qui doivent intervenir et s’interposer pour éviter des incidents et ramener le calme. Avec le maire de Sisco, Ange-Pierre Vivoni, ils jouent l’apaisement et restent sur place jusqu’à ce que la foule soit totalement dispersée. Tous espèrent que le renvoi du procès permettra de dénouer les tensions. Rien n’est moins sûr ! Affaire à suivre…
N.M.