Xavier Luciani : " Il faut adapter la réforme des rythmes scolaires à la Corse". (Photo Stéphane Gamant)
Depuis plusieurs mois, la réforme des rythmes scolaires fait en Corse l'objet d'un plan pédagogique de concertation. Dernièrement, la directrice académique des services de l'éducation nationale Catherine, Mercier Benhamou, s'est rendue en plaine orientale visiter les groupes scolaires des communes d'Aléria, Ghisonaccia et Prunelli . Une journée constructive au cours de laquelle les enseignants, mais également les élus en charge des affaires scolaires ont pu faire part des difficultés de mise en application d'une telle réforme sur leurs communes respectives. Xavier Luciani conseiller territorial pour le groupe Femu a Corsica , mais également adjoint au maire de la commune de Ghisonaccia, en charge des affaires scolaires, nous a fait part de sa vision politique de l'application sur l'île d'une telle réforme.
- La réforme des rythmes scolaires est elle aisément applicable sur une île aux spécificités avérées?
- Les premiers chiffres qui nous ont été communiqués, notamment pour les communes insulaires qui ont appliqué la réforme dès cette rentrée scolaire attestent tout de même d'une certaine appréhension. En effet seules onze communes y ont adhéré sur l'île, six en Corse-du-Sud et cinq en Haute-Ccorse. Au niveau national, 1,3 millions d'écoliers bénéficient de ces nouveaux rythmes soit finalement tout juste un cinquième des communes françaises. Le compte n'y est pas et les difficultés d'application bien présentes tout comme les questions liées à la pérennité des aides de l'état.
- En quoi cette réforme devrait faire l'objet d'un aménagement spécifique pour l'île ?
- Le volet technique est l'un des paramètres incontournables de cette réforme, mais il existe un autre volet fondamental de l'application en Corse de la réforme des rythmes scolaires, c'est la prise en compte de la réalité sociologique de notre île. Ainsi, une demi journée d'école supplémentaire instaurée dans les écoles maternelles et primaires permettra effectivement un allègement de 45 minutes en moyenne du temps scolaire par jour de classe et la mise en place d'activités sportives, culturelles et artistiques. Je souhaite pour ma part y inclure, y compris dans la pratique de ces activités, la langue corse afin de créer les fondations d'une société bilingue à fort caractère identitaire. On peut très bien imaginer des encadrants associatifs de type BAFA qui exerceraient en langue corse. En somme, cette réforme scolaire pourrait constituer si l'on s'en donne la peine un moteur de développement d'une société bilingue et ce en plus des filières scolaires bilingues habituelles. Plus généralement, pourquoi ne pas évoquer la mise hors norme de l'académie de Corse afin de répondre aux critères spécifiques d'une éducation qui répondrait aux aspirations économiques et sociales de l'île.
- En tant qu'élu d'une commune chargé des affaires scolaires, quelles sont les difficultés à prendre en compte dans l'application de cette réforme ?
- Le maire de Ghisonaccia Francis Giudici, et l'équipe municipale, avons souhaité sursoir à la mise en application de la réforme qui entrera en application pour la rentrée prochaine. Notre commune sera en mesure de part les formations entreprises et le tissu associatif local de répondre à ce véritable défi. Mais quid des communes du rural profond, celles de montagne ? Ainsi , peut -être faut-il concevoir en Corse cette réforme dans le cadre d'un plan éducatif territorial qui pourrait être mis en oeuvre à l'échelle intercommunale. Une telle compétence pour un ECPI ne me semble pas relever du domaine de l'impossible. Cette mutualisation de moyens sera à même d'enrayer une éventuelle pénurie d'intervenants de qualité dotés de diplômes et de savoirs faire reconnus. 400 élèves à Ghisonaccia requièrent la présence de 23 animateurs puisque la réglementation prévoit un animateur pour 14 enfants de moins de six ans et un animateur pour dix huit enfants de plus de six ans. Dans ce contexte, il importe de mutualiser les moyens. Nous allons le faire avec la commune voisine de Prunelli mais on peut espérer à terme voir tous les dispositifs de type CEL, ALSH ,ATP, entrer en compétence intercommunale voire territoriale.
- L'inquiétude réside également dans le coût financier pour les collectivités de la mise en œuvre de la réforme, qu'en pensez vous ?
- Effectivement, si je reprends l'exemple de la commune de Ghisonaccia, nous avons évalué le coût de la réforme pour 36 semaines à 90 000 euros. La directrice académique des services de l'éducation nationale rencontrée récemment nous a réaffirmé l'engagement de l'état (CAF et Etat) de l'ordre de 100 euros par élève, donc en fait pour la commune une aide de 40 000 euros dont on ne sait s'ils seront effectifs en 2015/2016. Si le dispositif d'aide n'était pas dans l'avenir reconduit, une lourde charge pèserait sur les finances communales. Une charge susceptible d'impacter les budgets familiaux soit en faisant participer les parents, soit en augmentant la fiscalité. Et je n'ose imaginer ce qu'il adviendrait alors pour les petites communes qui disposent d'une école.
Propos recueillis par Patrick BONIN
- La réforme des rythmes scolaires est elle aisément applicable sur une île aux spécificités avérées?
- Les premiers chiffres qui nous ont été communiqués, notamment pour les communes insulaires qui ont appliqué la réforme dès cette rentrée scolaire attestent tout de même d'une certaine appréhension. En effet seules onze communes y ont adhéré sur l'île, six en Corse-du-Sud et cinq en Haute-Ccorse. Au niveau national, 1,3 millions d'écoliers bénéficient de ces nouveaux rythmes soit finalement tout juste un cinquième des communes françaises. Le compte n'y est pas et les difficultés d'application bien présentes tout comme les questions liées à la pérennité des aides de l'état.
- En quoi cette réforme devrait faire l'objet d'un aménagement spécifique pour l'île ?
- Le volet technique est l'un des paramètres incontournables de cette réforme, mais il existe un autre volet fondamental de l'application en Corse de la réforme des rythmes scolaires, c'est la prise en compte de la réalité sociologique de notre île. Ainsi, une demi journée d'école supplémentaire instaurée dans les écoles maternelles et primaires permettra effectivement un allègement de 45 minutes en moyenne du temps scolaire par jour de classe et la mise en place d'activités sportives, culturelles et artistiques. Je souhaite pour ma part y inclure, y compris dans la pratique de ces activités, la langue corse afin de créer les fondations d'une société bilingue à fort caractère identitaire. On peut très bien imaginer des encadrants associatifs de type BAFA qui exerceraient en langue corse. En somme, cette réforme scolaire pourrait constituer si l'on s'en donne la peine un moteur de développement d'une société bilingue et ce en plus des filières scolaires bilingues habituelles. Plus généralement, pourquoi ne pas évoquer la mise hors norme de l'académie de Corse afin de répondre aux critères spécifiques d'une éducation qui répondrait aux aspirations économiques et sociales de l'île.
- En tant qu'élu d'une commune chargé des affaires scolaires, quelles sont les difficultés à prendre en compte dans l'application de cette réforme ?
- Le maire de Ghisonaccia Francis Giudici, et l'équipe municipale, avons souhaité sursoir à la mise en application de la réforme qui entrera en application pour la rentrée prochaine. Notre commune sera en mesure de part les formations entreprises et le tissu associatif local de répondre à ce véritable défi. Mais quid des communes du rural profond, celles de montagne ? Ainsi , peut -être faut-il concevoir en Corse cette réforme dans le cadre d'un plan éducatif territorial qui pourrait être mis en oeuvre à l'échelle intercommunale. Une telle compétence pour un ECPI ne me semble pas relever du domaine de l'impossible. Cette mutualisation de moyens sera à même d'enrayer une éventuelle pénurie d'intervenants de qualité dotés de diplômes et de savoirs faire reconnus. 400 élèves à Ghisonaccia requièrent la présence de 23 animateurs puisque la réglementation prévoit un animateur pour 14 enfants de moins de six ans et un animateur pour dix huit enfants de plus de six ans. Dans ce contexte, il importe de mutualiser les moyens. Nous allons le faire avec la commune voisine de Prunelli mais on peut espérer à terme voir tous les dispositifs de type CEL, ALSH ,ATP, entrer en compétence intercommunale voire territoriale.
- L'inquiétude réside également dans le coût financier pour les collectivités de la mise en œuvre de la réforme, qu'en pensez vous ?
- Effectivement, si je reprends l'exemple de la commune de Ghisonaccia, nous avons évalué le coût de la réforme pour 36 semaines à 90 000 euros. La directrice académique des services de l'éducation nationale rencontrée récemment nous a réaffirmé l'engagement de l'état (CAF et Etat) de l'ordre de 100 euros par élève, donc en fait pour la commune une aide de 40 000 euros dont on ne sait s'ils seront effectifs en 2015/2016. Si le dispositif d'aide n'était pas dans l'avenir reconduit, une lourde charge pèserait sur les finances communales. Une charge susceptible d'impacter les budgets familiaux soit en faisant participer les parents, soit en augmentant la fiscalité. Et je n'ose imaginer ce qu'il adviendrait alors pour les petites communes qui disposent d'une école.
Propos recueillis par Patrick BONIN