Cette grande fête des vignerons rassemble tous les acteurs de la vigne, qu'ils soient grands ou petits viticulteurs, ouvriers, vendangeurs. Généralement, elle s'étend aux corps de métiers associés à la fabrication du vin et inaugure les travaux du vignoble en hiver. D'ailleurs, il était d'usage de ne tailler la vigne qu'à la Saint-Vincent. La coutume voulait que le jour de la Saint-Vincent, les vignerons se rendent dans leur vigne et donnent le premier coup de sécateur.
Dans certaines régions, le vigneron revenait le soir affublé d'un bracelet de sarments autour du poignet. Dans d'autres contrées, au retour de la taille, on les faisait bruler dans l'âtre.
Pourquoi Saint-Vincent a-t-il été choisi comme saint patron des vignerons ? Chi lo sà ? Il n’y a guère de réponse franche. Saint Vincent est né en Espagne du début du IVe siècle.
Il a connu une fin tragique, il mourut, martyrisé et torturé. Deux hypothèses persistent néanmoins : la première en relation avec les aspects météorologiques reliés à cette date et donc aux retours des travaux dans la vigne. La deuxième, serait l'interprétation de Vincent, comme "Vin Sang", sang de la vigne.
Traditions et coutumes, proverbes et dictons…
Des gestes rituels, des adages auréolent la Saint-Vincent. Ainsi, en Haute-Marne, les vignerons, prononçaient cette phrase sacrée: "Saint-Vincent clair et beau, plus de vin que d'eau", s'ils pouvaient voir le soleil se refléter dans leur serpette. Cette formule sacrée provient d'un adage fort connu: "Prends garde au jour de Saint-Vincent, Car si ce jour tu vois et sens, que le soleil soit clair et beau, nous aurons du vin plus que d'eau."
Comme souvent, les dictons et proverbes attachés à la Saint-Vincent, sont prédictifs et de nature météo : "Le jour de la Saint-Vincent, si le soleil luit tout le jour: Vinée complète. S'il pleut une partie du jour: Demi-vinée. S'il pleut tout le jour: Disette. » Les dignitaires de la fête sont désignés par la Confrérie et généralement, il est d'usage que les participants arborent des costumes traditionnels. Cette fête patronale est sensiblement différente selon les régions.
Néanmoins, certaines traditions sont généralement communes :
- la messe ou la bénédiction en hommage à Saint-Vincent, où l'on voit le vin du saint, un vin béni par le prêtre
- la remise de la statue ou du bâton de Saint-Vincent à l'un des membres de la confrérie.
Cela s’est produit en Corse comme ailleurs, toujours selon les régions.
La coutume veut que ce soit le détenteur annuel de la statue de Saint-Vincent qui organise la fête religieuse. Ce qui a toujours été la coutume depuis la création de la confrérie dans l’appellation d’Ajaccio, sauf cette année.
Depuis 1996, une tradition solidement ancrée
Jacques Bianchetti, né dans le vin, a grandi dans son domaine de Capitoro et sait donc de quoi il parle. Il fait partie des vignerons à l’origine de la création la Confrérie des Compagnons du Sciacarellu d’Ajaccio en 1996 et sacrifie désormais à la tradition annuelle depuis 18 ans : « Nous avons un cépage exceptionnel avec le sciacarellu, que l’on ne trouve nulle part ailleurs. Nous le défendons, le protégeons et l’honorons en intronisant différentes personnalités du monde politique, culturel voire sportif… »
Une bonne chose assurément pour l’aire d’Ajaccio qui regroupe 14 vignerons sur les 250 hectares de vignes produisant 9 à 10000 hectolitres par an. Si la fête de la saint Vincent se déroulait précédemment de façon tournante, les membres de la Confrérie ont préférer choisir la ville cette fois, pour diverses raisons. La première étant de se rapprocher de la population de la cité impériale, la sensibiliser. Une bonne initiative si l’on en juge par le nombre de visiteurs qui se sont rendus samedi après-midi au Lazaret Ollandini.
François Ollandini et Raphaël Pierre-Bianchetti intronisés
De nombreux invités ont en effet répondu à l’invitation des vignerons, parmi lesquels le maître des lieux, celui qui a généreusement mis le musée d’Aspretto à la disposition des organisateurs, François Ollandini, que la Confrérie a choisi pour l’introniser. Avec lui, un autre membre de la famille du vin, qui n’est autre que Raphaël Pierre-Bianchetti, cousin de Jacques.
Le premier, mécène des arts et de la culture, celui par qui le Lazaret a retrouvé son âme, voyagiste et précurseur du tourisme en Corse, le deuxième, enfant de la vigne, qui a grandi au milieu des cépages de Capitoro et notamment de ce sciacarellu qu’il défend avec une passion peu commune.
Une bénédiction a été donnée sur les lieux de la fête où prônait la très belle statue de Saint Vincent que l’on doit à Vincent Tolla trop tôt disparu, qui n’est autre que le papa de Laetitia, du clos Ornasca.
La fête fut grandiose et l’ambiance facile à imaginer avec des stands situés tout au tour de la cour d’honneur joliment décorée.
Ajaccio, aire d’appellation
L’appellation d’Ajaccio c’est quatorze producteurs répartis sur 250 hectares de vignes au raisin gorgé de soleil et pour la plupart face à la mer. Il s’agit d’un territoire à l’identité affirmée où les versants s’exposent à la lumière du couchant. Les éléments semblent y unir leurs forces pour créer un climat ni trop rude ni trop aride, en fait, propice à une parfaite maturation. Le savoir-faire des hommes fait le reste. Le vin sera élevé minutieusement, avec
amour et passion, pour exalter toutes les saveurs dans le respect d’une tradition séculaire, transmise de génération en génération.
L’AOC Ajaccio : Domaine de Vaccellu (Cognocoli), Comte Abbatucci (Casalabriva), Pratavone (Pila-Canale), U Stiliccionu (Serra di Ferro), Domaine Quilichini (Pila-Canale), Clos Ornasca (Plaine Pisciatella), domaine Capitoro (Pisciatella), Domaine Martini (Eccica-Suarella), Domaine de la Sorba (Finosello-Ajaccio), Domaine Comte Peraldi (Stiletto-Ajaccio), Domaine Pietrella (Eccica-Suarella), Clos Serpaggi (Afa), Domaine A Peraccia (Peri), Clos d’Alzeto (Sari D’Orcino).
J. F.