(Photo : Archives Michel Luccioni)
- Êtes-vous satisfait par la proposition d’écriture constitutionnelle qui a été adoubée hier soir à Beauvau ?
- Bien sûr, sinon je l'aurais fait savoir. Ce texte n’est ni plus ni moins qu'une convergence entre les différents protagonistes qui ont été de bonne volonté et qui ont essayé de trouver une voie de sortie pour la présenter aux élus de l'Assemblée de Corse. Après, il reste encore des divergences. On est sur un chemin qui est encore parsemé d'embûches, mais je crois que le fait de déjà déboucher sur une écriture commune, partagée largement par Paul-Félix Benedetti, Jean-Christophe Angelini, en passant par Gilles Simeoni, moi-même ou Valérie Bozzi, c'est quand même quelque chose d'assez intéressant.
- Pour autant, pour continuer à cheminer vers l'autonomie, le Président de la République exige comme condition sine qua non la recherche d'un consensus au-delà de la famille nationaliste lors du vote à l'Assemblée de Corse. Or, vous l'avez dit, il subsiste encore des divergences du côté notamment de Jean-Martin Mondoloni…
- Tout dépend de ce que l’on entend par divergences. Je ne me ferai pas le marionnettiste de qui que ce soit, chacun s'exprime selon sa conscience et ses convictions. Jean-Martin Mondoloni a depuis le début une opposition sur le principe de création de normes législatives pour la Corse. C'est l'un des points d’un accord qui, sur le reste, n'a fait de sa part l'objet d'aucune contestation, d'aucune remise en question. Il est d'accord sur la première partie concernant la reconnaissance d’une communauté linguistique, historique et culturelle, et sur l'attachement à la terre. Quant à l'adaptation des normes législatives et réglementaires, c'est ce qu'il demande depuis plusieurs années, et c’est d'ailleurs ce que le groupe Un Soffiu Novu a demandé le 5 juillet dernier à l'Assemblée de Corse. Aujourd'hui, chacun doit faire un examen de conscience. Je rappelle que si d'aventure demain on arrivait jusqu'au bout, c'est-à-dire à la réforme de la Constitution avec un article écrit comme celui que nous avons validé hier, ce n'est pas pour autant qu'on aurait une compétence législative, parce qu'il faut une loi organique pour pouvoir lancer la machine. Est-ce que ce point qui correspond à des demandes constantes, notamment de ceux qui gagnent les élections en Corse depuis plusieurs années, vaut le coup d'être utilisé pour voter contre tout ? C'est la question à laquelle il faut que chacun réponde. À titre personnel, je me satisfais davantage de voir des articles de presse où les gens sont en bonne entente et sont dans une convergence, plutôt que de voir une Corse où on est dans le clivage permanent et dans la contestation et surtout où on ne fait pas dans le détail. Je fais confiance à l'intelligence de Jean-Martin Mondoloni et de ceux qui sont sur la même ligne que lui pour ne pas prendre le risque de bloquer tout le processus politique pour un point de divergence qui aujourd'hui n'est pas définitivement tranché de manière ferme. Après, je ne vais pas dire ce qu'il faut faire et je ne sais pas comment les choses vont être présentées à l'Assemblée de Corse. Est-ce que ce sera un vote d'un bloc ? Est-ce que ce vote d’un bloc entraînerait un vote négatif de la part de Jean-Martin Mondoloni et d'autres parce qu'il y a un élément qui aujourd'hui ne convient pas et qui n'est pas définitif ? Chacun prendra ses responsabilités. Si le vote se fait par alinéa, cela permettrait éventuellement de reconnaître qu'il y a un accord quasi complet excepté à ce sujet, puisque le groupe Un Soffiu Novu ne semble pas aujourd'hui être en désaccord sur l'ensemble du projet. C'est une stratégie que les deux co-présidents du groupe, Valérie Bozzi et Jean-Martin Mondoloni, vont devoir déterminer ensemble.
- Au vu des éléments qui ont été actés hier soir à Beauvau, selon vous, la proposition d’écriture constitutionnelle pourra-t-elle passer l'épreuve de l'Assemblée nationale et a fortiori du Parlement ?
- C'est difficile, mais à cœur vaillant, rien d'impossible. Nous avons besoin du Gouvernement pour qu'il porte ce projet de loi constitutionnelle. Ensuite, il y a aussi les parlementaires de la majorité, mais également de l'opposition, et j'imagine que les députés LIOT corses et le sénateur Pariggi, qui sont autonomistes, vont également être en défense de cette modification constitutionelle. Pour ma part, si demain il y a la force que confère un vote large de l'Assemblée de Corse par-delà les clivages, je suis également prêt à aller défendre la position. Après, nous allons avoir beaucoup d'obstacles sur notre route. C'est ce qui a amené, je pense, notamment Gilles Simeoni à accepter un certain nombre de concessions par rapport à ce qu'il défendait. J'en ai tiré les conséquences aussi en acceptant de cheminer pour pouvoir sortir d'une espèce d'impasse politique. Ensuite, le Parlement devra avoir une double lecture. D'abord, évidemment sur la qualité du texte et pour qu’elle soit bien comprise, il faut bien l'expliquer. Donc je fais confiance au ministre, au Gouvernement, mais également à ceux qui porteront le texte pour convaincre du bien-fondé de son adoption. Et je crois qu'il y a aussi le fait de faire la part des choses, de ne pas être dans un exercice politicien, de ne pas prendre la Corse en otage à travers les oppositions qu'on peut avoir vis à vis du Président de la République ou vis à vis du ministre de l'Intérieur, et à ne pas être également dans un exercice de caricature qu’occasionne parfois la Corse. Et donc avoir un travail sérieux de conviction, d'explications, qui permettent d'aller chercher ces votes des 3/5ème du Parlement. Il faudra peut-être aussi accepter aussi le fait que le texte puisse être amené à muter par la volonté des parlementaires. Ils peuvent être de manière assumée amenés à re-rédiger le texte, à l'amender, à le faire un peu muter. Et à ce moment-là, chacun prendra aussi les décisions politiques en son âme et conscience, en se disant « là nous avons un bougé qui est inacceptable et on considère qu'on s'éloigne trop de notre vision de départ » ou sinon en acceptant de transiger, ce que nous avons fait jusqu'à présent. Les conclusions que je tire de mon expérience, c'est que sur des textes de loi, et encore plus fortement sur des textes de loi constitutionnelle, c'est indispensable d'avoir cet esprit de consensus et de convergence. Ce que nous avons fait jusqu'à présent entre nous, y compris avec le Gouvernement, il va falloir le poursuivre ensuite avec le Parlement, le Sénat et l'Assemblée Nationale. Et il ne faut pas croire que le Sénat est le lieu de tous les dangers, je puis vous assurer aujourd'hui que l'Assemblée Nationale n'est pas non plus, à mon avis, totalement acquise à cette modification de la Constitution. Donc à nous de faire le nécessaire.
- Bien sûr, sinon je l'aurais fait savoir. Ce texte n’est ni plus ni moins qu'une convergence entre les différents protagonistes qui ont été de bonne volonté et qui ont essayé de trouver une voie de sortie pour la présenter aux élus de l'Assemblée de Corse. Après, il reste encore des divergences. On est sur un chemin qui est encore parsemé d'embûches, mais je crois que le fait de déjà déboucher sur une écriture commune, partagée largement par Paul-Félix Benedetti, Jean-Christophe Angelini, en passant par Gilles Simeoni, moi-même ou Valérie Bozzi, c'est quand même quelque chose d'assez intéressant.
- Pour autant, pour continuer à cheminer vers l'autonomie, le Président de la République exige comme condition sine qua non la recherche d'un consensus au-delà de la famille nationaliste lors du vote à l'Assemblée de Corse. Or, vous l'avez dit, il subsiste encore des divergences du côté notamment de Jean-Martin Mondoloni…
- Tout dépend de ce que l’on entend par divergences. Je ne me ferai pas le marionnettiste de qui que ce soit, chacun s'exprime selon sa conscience et ses convictions. Jean-Martin Mondoloni a depuis le début une opposition sur le principe de création de normes législatives pour la Corse. C'est l'un des points d’un accord qui, sur le reste, n'a fait de sa part l'objet d'aucune contestation, d'aucune remise en question. Il est d'accord sur la première partie concernant la reconnaissance d’une communauté linguistique, historique et culturelle, et sur l'attachement à la terre. Quant à l'adaptation des normes législatives et réglementaires, c'est ce qu'il demande depuis plusieurs années, et c’est d'ailleurs ce que le groupe Un Soffiu Novu a demandé le 5 juillet dernier à l'Assemblée de Corse. Aujourd'hui, chacun doit faire un examen de conscience. Je rappelle que si d'aventure demain on arrivait jusqu'au bout, c'est-à-dire à la réforme de la Constitution avec un article écrit comme celui que nous avons validé hier, ce n'est pas pour autant qu'on aurait une compétence législative, parce qu'il faut une loi organique pour pouvoir lancer la machine. Est-ce que ce point qui correspond à des demandes constantes, notamment de ceux qui gagnent les élections en Corse depuis plusieurs années, vaut le coup d'être utilisé pour voter contre tout ? C'est la question à laquelle il faut que chacun réponde. À titre personnel, je me satisfais davantage de voir des articles de presse où les gens sont en bonne entente et sont dans une convergence, plutôt que de voir une Corse où on est dans le clivage permanent et dans la contestation et surtout où on ne fait pas dans le détail. Je fais confiance à l'intelligence de Jean-Martin Mondoloni et de ceux qui sont sur la même ligne que lui pour ne pas prendre le risque de bloquer tout le processus politique pour un point de divergence qui aujourd'hui n'est pas définitivement tranché de manière ferme. Après, je ne vais pas dire ce qu'il faut faire et je ne sais pas comment les choses vont être présentées à l'Assemblée de Corse. Est-ce que ce sera un vote d'un bloc ? Est-ce que ce vote d’un bloc entraînerait un vote négatif de la part de Jean-Martin Mondoloni et d'autres parce qu'il y a un élément qui aujourd'hui ne convient pas et qui n'est pas définitif ? Chacun prendra ses responsabilités. Si le vote se fait par alinéa, cela permettrait éventuellement de reconnaître qu'il y a un accord quasi complet excepté à ce sujet, puisque le groupe Un Soffiu Novu ne semble pas aujourd'hui être en désaccord sur l'ensemble du projet. C'est une stratégie que les deux co-présidents du groupe, Valérie Bozzi et Jean-Martin Mondoloni, vont devoir déterminer ensemble.
- Au vu des éléments qui ont été actés hier soir à Beauvau, selon vous, la proposition d’écriture constitutionnelle pourra-t-elle passer l'épreuve de l'Assemblée nationale et a fortiori du Parlement ?
- C'est difficile, mais à cœur vaillant, rien d'impossible. Nous avons besoin du Gouvernement pour qu'il porte ce projet de loi constitutionnelle. Ensuite, il y a aussi les parlementaires de la majorité, mais également de l'opposition, et j'imagine que les députés LIOT corses et le sénateur Pariggi, qui sont autonomistes, vont également être en défense de cette modification constitutionelle. Pour ma part, si demain il y a la force que confère un vote large de l'Assemblée de Corse par-delà les clivages, je suis également prêt à aller défendre la position. Après, nous allons avoir beaucoup d'obstacles sur notre route. C'est ce qui a amené, je pense, notamment Gilles Simeoni à accepter un certain nombre de concessions par rapport à ce qu'il défendait. J'en ai tiré les conséquences aussi en acceptant de cheminer pour pouvoir sortir d'une espèce d'impasse politique. Ensuite, le Parlement devra avoir une double lecture. D'abord, évidemment sur la qualité du texte et pour qu’elle soit bien comprise, il faut bien l'expliquer. Donc je fais confiance au ministre, au Gouvernement, mais également à ceux qui porteront le texte pour convaincre du bien-fondé de son adoption. Et je crois qu'il y a aussi le fait de faire la part des choses, de ne pas être dans un exercice politicien, de ne pas prendre la Corse en otage à travers les oppositions qu'on peut avoir vis à vis du Président de la République ou vis à vis du ministre de l'Intérieur, et à ne pas être également dans un exercice de caricature qu’occasionne parfois la Corse. Et donc avoir un travail sérieux de conviction, d'explications, qui permettent d'aller chercher ces votes des 3/5ème du Parlement. Il faudra peut-être aussi accepter aussi le fait que le texte puisse être amené à muter par la volonté des parlementaires. Ils peuvent être de manière assumée amenés à re-rédiger le texte, à l'amender, à le faire un peu muter. Et à ce moment-là, chacun prendra aussi les décisions politiques en son âme et conscience, en se disant « là nous avons un bougé qui est inacceptable et on considère qu'on s'éloigne trop de notre vision de départ » ou sinon en acceptant de transiger, ce que nous avons fait jusqu'à présent. Les conclusions que je tire de mon expérience, c'est que sur des textes de loi, et encore plus fortement sur des textes de loi constitutionnelle, c'est indispensable d'avoir cet esprit de consensus et de convergence. Ce que nous avons fait jusqu'à présent entre nous, y compris avec le Gouvernement, il va falloir le poursuivre ensuite avec le Parlement, le Sénat et l'Assemblée Nationale. Et il ne faut pas croire que le Sénat est le lieu de tous les dangers, je puis vous assurer aujourd'hui que l'Assemblée Nationale n'est pas non plus, à mon avis, totalement acquise à cette modification de la Constitution. Donc à nous de faire le nécessaire.