La Méditerranée est un laboratoire naturel qui permet d’étudier le transport et le devenir des masses l’air continentales polluées et leurs interactions avec le climat régional et la qualité de l’air, et de mieux prévoir les conditions qui devraient prévaloir dans une grande partie de l’Europe dans les prochaines décennies. Plus de 250 scientifiques d’une douzaine de pays au total sont mobilisés pour ChArMEx dans et autour du bassin occidental pour réaliser l’inventaire le plus complet jamais réalisé des espèces chimiques présentes dans l’atmosphère, de leurs transformations au cours du transport des masses d’air, et de leurs impacts sur le climat régional.
Dans le cadre de la grande campagne expérimentale ChArMEx-2013 en cours, une vaste panoplie de moyens d'observation est déployée en Méditerranée occidentale et centrale : des moyens aéroportés incluant des avions de recherche et des ballons dérivants pour sonder l’atmosphère en trois dimensions à l’échelle régionale, des moyens de sondage incluant des ballons sondes, un ULM et des instruments de télédétection pour sonder la colonne atmosphérique, une station mobile à la surface de la mer grâce à un voilier expérimental fonctionnant avec une pile à hydrogène pour ne pas polluer les relevés, et un réseau de stations de suivi au sol avec des mesures renforcées par la mise en place d'instruments de mesures (lidars, radiomètres, compteurs de particules, analyseurs chimiques de pointe…).en particulier sur des super-sites insulaires.
L'observatoire CORSICA
Au Cap Corse, les moyens de surveillance de l’Observatoire CORSiCA (Centre d’Observation Régional pour la urveillance du Climat et de l’Environnement Atmosphérique et Océanographique en Méditerranée) financé principalement par la Collectivité Territoriale de Corse (fonds CPER-FEDER), sont évidemment mobilisés pour la campagne ChArMEx.
Cet observatoire porté par l'Université Paul Sabatier de Toulouse s'appuie sur un accord de consortium avec l'Université de Corse Pascal Paoli, le CEA, l'Université Blaise Pascal de Clermont-Ferrand, l'Université du Littoral Côté d'Opale et l'Ecole Nationale des Mines de Douai. Pour les activités autour du projet ChArMEx au Cap Corse, il implique également la participation d'équipes de recherche de Météo-France, de l'Université des Sciences etTechniques de Lille, de l'Université Paris-Est-Créteil et le soutien de Qualitair Corse, du Centre Départemental Météo-France de Haute Corse, du Conseil Général de Haute Corse, de la Marine Nationale et les communes d'Ersa et de Rogliano. Entre le 10 juin et le 10 août, les moyens sont considérablement renforcés par l’accueil d’une soixantaine de scientifiques (dont une équipe irlandaise et une américaine) qui se succèdent au Cap. En particulier sur le site isolé des éoliennes d’Ersa, propice à la mesure de la pollution de fond transportée depuis les lointaines sources continentales, 4 conteneurs, 2 camions et 2 remorques, bardés d’instruments scientifiques ont été installés pour compléter l’instrumentation existante et permettront de suivre en temps réel la pollution provenant de la vallée du Rhône, de la vallée du Pô ou du Sahara, en conjonction avec les moyens aéroportés déployés depuis des bases hors Corse. Une petite station automatisée a également été installée à environ 1900 m d’altitude sur le Pinerole (entre Corte et Calacuccia) et le voilier ZeroCO2 viendra également jusqu’au Cap Corse depuis le continent.
Impliqué dans d’autres campagnes de mesure
L’Observatoire CORSiCA avait déjà été impliqué dans d’autres campagnes de mesure :HyMeX (étude des événements météorologiques extrêmes) d’août à novembre 2012, VESSAER et la pré-campagne ChArMEx de juin-juillet 2012. Cette dernière avait permis d’obtenir des premiers résultats particulièrement intéressants la pollution en particules fines mesurée au Cap Corse, dans un lieu isolé des sources de pollution, avait été plus forte que celle mesurée pendant la même période dans la banlieueparisienne ; les particules ultrafines sont dominées par des composés organiques, alors qu’en Méditerranée orientale elles sont dominées par des sulfates; une augmentation significative des teneurs en particules (PM10) visible dans les stations de surveillance de la qualité de l’air de Qualitair Corse même en zone de trafic urbain, lors des épisodes de poussières sahariennes.
D'une envergure sans précédent en Méditerranée occidentale, la campagne ChArMEx de l'été 2013 permettra d'engranger un nombre considérable de données, notamment sur les zones encore peu couvertes par les précédentes campagnes de mesures. Ces résultats contribueront à affiner la représentation des processus dans les modèles climatiques et deprévision de qualité de l’air.
ChArMEx-France implique près de 120 scientifiques d’une vingtaine de laboratoires, ainsi que les partenaires suivants : le CNRS, l’ADEME, le CNES, l’ANR, le CEA, Météo-France, la Collectivité Territoriale de Corse, Qualitair Corse, la Région Paca, Airpaca, l’École des Mines de Douai, l’École polytechnique, l’Ineris ainsi que les Universités de Aix-Marseille, Clermont-Ferrand, Paris Diderot, Littoral Côte d’Opale, Joseph Fourier, Lille 1, Lyon, Paris-Est-Créteil,Pierre-et-Marie-Curie, Toulouse III – Paul Sabatier, Strasbourg, Versailles Saint-Quentin-en- Yvelines. ChArMEx s'inscrit dans le méta-programme international et interdisciplinaire MISTRALS (Mediterranean Integrated Studies aT Regional And Local Scales, 2010-2020) dédié à la compréhension du fonctionnement du bassin Méditerranéen et piloté par le CNRS.
MISTRALS France est soutenu par 13 organismes
La Méditerranée, laboratoire climatique de l’Europe
Située à la confluence de plusieurs déversoirs naturels drainant l’air provenant des continents limitrophes (l’Europe et l’Afrique), cette région est le réceptacle de toutes sortes de pollutions. D’origine humaine, venant surtout du nord et se déversant dans le bassin via les grandes vallées fluviales (Rhône, Pô) ou de grands complexes industriels et urbains (Barcelone, Marseille, Gênes, Alger, Sfax) et d’origines naturelles, venues du coeur du Sahara sous la forme de gigantesques panaches de poussières désertiques, parfois émises par les volcans actifs et notamment l’Etna, ou encore issues d’émissions par la végétation ou la surface de la mer.
Toutes ces pollutions convergent dans le bassin qui, cerné de toute part par des reliefs, fait office d’immense réacteur chimique. Sous l’effet du climat méditerranéen, chaud, ensoleillé etsec, cette pollution évolue : de nouvelles espèces chimiques apparaissent, tandis que d’autres se transforment, ou disparaissent. Une partie de cette pollution va acquérir une nocivité accrue, donnant lieu à la formation de l’ozone et des poussières ultrafines susceptibles de causer des troubles respiratoires et cardiovasculaires. Elle va aussi pouvoir modifier le climat régional en provoquant plus de sécheresse encore par ses effets sur le rayonnement solaire et les nuages : le début d’un cercle vicieux.
Pour en savoir plus :
http://charmex.lsce.ipsl.fr
http://www.obs-mip.fr/corsica
ZéroCO2 à Macinaggio
Sur place Etienne Ruellan, directeur adjoint scientifique CNRS-INSU, directeur MISTRALS, François Dulac chercheur CEA au laboratoire des sciences du climat et de l'environnement (IPSL, CEA/CNRS/UVSQ) à Gif-sur-Yvette, Coordinateur ChArMEx et Dominique Lambert, maître de Conférences à l’Université Paul Sabatier de Toulouse, coordinateur CORSiCA ont expliqué tous les enjeux d'un tel dispositif.