« L’amour ne fait pas de bleus ». « Éduquez vos fils ». « Non, c’est non ! ». Impossible de ne pas avoir croisé ce type de messages tracés en lettres noires sur des feuilles blanches qui fleurissent sur les murs de l’île, à l’initiative du collectif Collages Féminicides Corse. Lancé en février 2019 par une militante féministe, d’abord dans des grandes villes du continent comme Marseille ou Paris, ce mouvement des Collages Féminicides a rapidement gagné la Corse. Si bien que les premiers collages y ont fait leur apparition à l’été suivant à Ile-Rousse, en la mémoire de Julie Douib, jeune femme assassinée par son ex-compagnon.
« Ensuite, nous avons commencé à lancer des appels aux femmes qui se sentaient concernées via Instagram. Puis, la première grosse session de collages en Corse a été faite en mars 2020 », explique Nane, au nom de ce collectif basé sur l’horizontalité. « Passer des messages au travers de l’espace public, c’est une manière de s’exprimer qui n’existait pas avant pour le mouvement féministe », souligne-t-elle par ailleurs en ajoutant : « Les collages ont aussi une symbolique car ils sont éphémères. Ils restent des feuilles qui se décollent au fil du temps. Il y a aussi tout le moment où nous choisissons le slogan, peignons et préparons la colle. Il y a toute une préparation, presque une cérémonie derrière tout cela. Et puis, il y a un truc vraiment très spécial quand des femmes se retrouvent pour ce genre d’actions pas vraiment légales, au cours de la nuit. C’est vraiment tout le processus qui veut dire quelque chose ».
« Ensuite, nous avons commencé à lancer des appels aux femmes qui se sentaient concernées via Instagram. Puis, la première grosse session de collages en Corse a été faite en mars 2020 », explique Nane, au nom de ce collectif basé sur l’horizontalité. « Passer des messages au travers de l’espace public, c’est une manière de s’exprimer qui n’existait pas avant pour le mouvement féministe », souligne-t-elle par ailleurs en ajoutant : « Les collages ont aussi une symbolique car ils sont éphémères. Ils restent des feuilles qui se décollent au fil du temps. Il y a aussi tout le moment où nous choisissons le slogan, peignons et préparons la colle. Il y a toute une préparation, presque une cérémonie derrière tout cela. Et puis, il y a un truc vraiment très spécial quand des femmes se retrouvent pour ce genre d’actions pas vraiment légales, au cours de la nuit. C’est vraiment tout le processus qui veut dire quelque chose ».
Libérer la parole
À travers ces opérations, les membres du collectif ambitionnent de libérer la parole sur des faits encore trop tabous en les affichant publiquement. Tout d’abord, les collages viennent ainsi donner une voix à celles qui n’en ont plus et font régulièrement le macabre décompte des trop nombreux féminicides, afin de pousser la population à ne pas oublier ces chiffres qui continuent effroyablement de grimper. Souvent, les collages laissent aussi la place à des témoignages de violences sexuelles et sont même parfois installés en présence des victimes qui les ont envoyés au collectif. D’autres encore prennent la forme de slogans féministes ou de mots de bienveillance. « Il y a toujours eu cette volonté d’être un soutien pour toutes les femmes », note la porte-parole du collectif, « L’objectif des collages, c’est que quand une femme est dans la rue et voit ces mots, ce soit comme si elle avait quelqu’un avec elle qui la comprenait. Par exemple, ce fameux collage qui revient régulièrement « tu n’es pas seule » veut tout et rien dire, mais pour la personne qui a besoin d’entendre ces mots, cela peut vraiment avoir un gros impact ». Dans la même veine, les nombreux collages « On vous croit » ont constitué autant de précieux soutiens pour les victimes, notamment pendant le mouvement #Iwas sur les réseaux sociaux. « Quand on est victime, on se sent souvent seule et on peut avoir honte de ce qui s’est passé. S’élever en groupe contribue à faire changer la honte de camp », appuie encore Nane.
Difficile de dire combien sont les femmes qui ont déjà participé à ces opérations de collages sur l'île, tant nombre d’entre elles ont contacté Collages Féminicides Corse depuis 2019 pour participer aux actions le temps d’une nuit ou plus régulièrement. « Au sein du collectif même, on compte une dizaine de colleuses vraiment actives, c’est-à-dire des personnes qui vont organiser les sessions collages ou des manifestations », dévoile la membre du collectif. « Il y a eu des personnes qui sont venues avec nous pour coller leur témoignage, d’autres car elles avaient besoin de faire une action, de se sentir utiles, cela peut être aussi un peu cathartique parfois. On sait pourquoi on vient. C’est de la sororité pure, quelque chose que l’on ne peut pas retrouver dans la vie quotidienne », ajoute-t-elle en précisant encore : « Il y a certaines personnes qui décident aussi d’aller coller seules, car on n’a pas besoin de passer par le collectif pour aller coller, cela appartient vraiment à tout le monde ».
Difficile de dire combien sont les femmes qui ont déjà participé à ces opérations de collages sur l'île, tant nombre d’entre elles ont contacté Collages Féminicides Corse depuis 2019 pour participer aux actions le temps d’une nuit ou plus régulièrement. « Au sein du collectif même, on compte une dizaine de colleuses vraiment actives, c’est-à-dire des personnes qui vont organiser les sessions collages ou des manifestations », dévoile la membre du collectif. « Il y a eu des personnes qui sont venues avec nous pour coller leur témoignage, d’autres car elles avaient besoin de faire une action, de se sentir utiles, cela peut être aussi un peu cathartique parfois. On sait pourquoi on vient. C’est de la sororité pure, quelque chose que l’on ne peut pas retrouver dans la vie quotidienne », ajoute-t-elle en précisant encore : « Il y a certaines personnes qui décident aussi d’aller coller seules, car on n’a pas besoin de passer par le collectif pour aller coller, cela appartient vraiment à tout le monde ».
Au nom de toutes les victimes
LIRE AUSSI Presque 7 ans après le féminicide de sa fille, Mylène Jacquet plus que jamais engagée dans la prévention De son côté, le collectif estime avoir réalisé plus d’une centaine de collages sur l’île. Des actions coups de poing qui peuvent parfois aller jusqu’à une dizaine de collages dans une nuit. Durant ces opérations, si les colleuses souhaitent rester discrètes, c’est avant tout car leur objectif est « de porter la parole de toutes les victimes ». « Nous avons vraiment ce principe de porter la parole des personnes qui ne peuvent pas ou plus parler ,dans le cas des féminicides. Notre but, c’est que nos actions soient visibles, mais nous ne voulons pas que nos visages soient mis dessus. Nous ne nous cachons pas, mais nous volons garder notre anonymat pour ne pas trahir le fait que ce que nous faisons n’est pas en notre nom, mais en celui de toutes les victimes », précise Nane, selon la vision du collectif.
Pour preuve, les colleuses arrivent rarement à passer inaperçues lors de leurs actions, d’autant plus qu’elles choisissent les lieux de leurs actions pour qu’ils soient le plus visibles possible. « On nous voit, on nous pose des questions, on vient tout le temps nous voir », livre la porte-parole du collectif en précisant que de nombreuses personnes viennent les féliciter ou encore les remercier. Un soutien d’une partie de la population qui transparait également de façon importante sur les réseaux sociaux. Mais l’engagement de ces femmes déterminées et courageuses pour des causes encore très taboues leur crée aussi parfois certains problèmes.
« Très régulièrement lors de nos collages nous recevons des insultes, voire même des tentatives d’intimidation. Cela arrive le plus souvent quand nous collons aux abords des routes, à des endroits où il y a beaucoup de passage. Souvent, ce sont des personnes qui sont en voiture, qui passent devant nous. Plus rarement, ce sont des personnes qui s’arrêtent physiquement qui viennent nous insulter ou nous intimider vraiment frontalement. Beaucoup de personnes nous narguent, sont dans l’intimidation ou dans l’humour très mal placé. Par exemple, quand nous collions au moment de #Iwas, des jeunes hommes passaient en voiture devant nous en nous disant « nous aussi nous avons violé, vous ne saurez jamais qui on est » », déplore Nane. Plus grave, une nuit de septembre 2020, un groupe de colleuses s’est fait suivre par des individus qui ont ensuite crevé les pneus de sa voiture. « Certaines de nos colleuses se sont aussi faites reconnaitre et trouvées sur les réseaux sociaux et là, elles se sont faites insulter ou menacer de façon plus personnelle », souffle encore Nane. « Nous ne voulons pas donner de l’importance à cela, nous faisons nos actions et nous savons que cela arrivera toujours. Mais nous essayons de faire attention, de rester prudentes, en groupe, de ne pas prendre des risques infondés et nous évitons de rentrer dans la confrontation avec ce genre de personnes. Nous savons pourquoi nous faisons tout cela et ce n’est pas pour ce genre de personnes. Nous continuons notre chemin », reprend-elle.
Pour preuve, les colleuses arrivent rarement à passer inaperçues lors de leurs actions, d’autant plus qu’elles choisissent les lieux de leurs actions pour qu’ils soient le plus visibles possible. « On nous voit, on nous pose des questions, on vient tout le temps nous voir », livre la porte-parole du collectif en précisant que de nombreuses personnes viennent les féliciter ou encore les remercier. Un soutien d’une partie de la population qui transparait également de façon importante sur les réseaux sociaux. Mais l’engagement de ces femmes déterminées et courageuses pour des causes encore très taboues leur crée aussi parfois certains problèmes.
« Très régulièrement lors de nos collages nous recevons des insultes, voire même des tentatives d’intimidation. Cela arrive le plus souvent quand nous collons aux abords des routes, à des endroits où il y a beaucoup de passage. Souvent, ce sont des personnes qui sont en voiture, qui passent devant nous. Plus rarement, ce sont des personnes qui s’arrêtent physiquement qui viennent nous insulter ou nous intimider vraiment frontalement. Beaucoup de personnes nous narguent, sont dans l’intimidation ou dans l’humour très mal placé. Par exemple, quand nous collions au moment de #Iwas, des jeunes hommes passaient en voiture devant nous en nous disant « nous aussi nous avons violé, vous ne saurez jamais qui on est » », déplore Nane. Plus grave, une nuit de septembre 2020, un groupe de colleuses s’est fait suivre par des individus qui ont ensuite crevé les pneus de sa voiture. « Certaines de nos colleuses se sont aussi faites reconnaitre et trouvées sur les réseaux sociaux et là, elles se sont faites insulter ou menacer de façon plus personnelle », souffle encore Nane. « Nous ne voulons pas donner de l’importance à cela, nous faisons nos actions et nous savons que cela arrivera toujours. Mais nous essayons de faire attention, de rester prudentes, en groupe, de ne pas prendre des risques infondés et nous évitons de rentrer dans la confrontation avec ce genre de personnes. Nous savons pourquoi nous faisons tout cela et ce n’est pas pour ce genre de personnes. Nous continuons notre chemin », reprend-elle.
" Notre combat n'est pas fini "
Très souvent, les colleuses voient également certains de leur messages arrachés ou même détournés afin d’avoir un tout autre sens. « Nous nous sommes un peu habituées malheureusement, mais cela nous conforte dans l’idée que notre combat n’est pas fini », martèle la membre du collectif. « Les collages sont faits pour avoir des réactions. N’importe quelle réaction, qu’elle soit positive ou négative, signifie toujours quelque chose. Donc, quand ce sont des réactions négatives voire injurieuses, cela veut tout simplement dire qu’il reste du chemin à faire et qu’il y a encore des mentalités à changer. Nous avons vu des tags près de nos collages qui disaient que certaines personnes méritaient des viols, c’est assez choquant. Il faut s’interroger sur pourquoi ces individus prennent du temps pour détourner nos collages, parce que c’est assez long à faire. Des fois, nous avons du mal à comprendre. Mais nous évitons de nous prendre la tête et d’essayer de comprendre l’incompréhensible. L’acte parle de lui-même. Nous, notre but, c’est d’être là pour les victimes », affirme-t-elle.
Grâce à ce mouvement des collages et à la mobilisation d’associations, de plus en plus nombreuses, qui accompagnent les femmes victimes de violences sexistes ou sexuelles, le collectif constate aujourd’hui que la parole commence à se libérer au fil du temps sur l’île. « Il y a une machine qui est en route », reconnait Nane, « Mais il y a encore du chemin à faire pour que les droits des femmes soient totalement respectés et ancrés dans les mentalités ».
En organisant ces opérations d’affichages illégaux, les colleuses, désormais présentes partout en France et même dans de nombreux autres pays, se soumettent au risque d’écoper d’une amende de 68 euros chacune. Un écueil dont le collectif corse est bien conscient acceptera de prendre « tant que le message que l’on veut faire passer demeurera plus important ».
Grâce à ce mouvement des collages et à la mobilisation d’associations, de plus en plus nombreuses, qui accompagnent les femmes victimes de violences sexistes ou sexuelles, le collectif constate aujourd’hui que la parole commence à se libérer au fil du temps sur l’île. « Il y a une machine qui est en route », reconnait Nane, « Mais il y a encore du chemin à faire pour que les droits des femmes soient totalement respectés et ancrés dans les mentalités ».
En organisant ces opérations d’affichages illégaux, les colleuses, désormais présentes partout en France et même dans de nombreux autres pays, se soumettent au risque d’écoper d’une amende de 68 euros chacune. Un écueil dont le collectif corse est bien conscient acceptera de prendre « tant que le message que l’on veut faire passer demeurera plus important ».