Le fret sur le port de Bastia.
« C’est un coup de gueule à l’encontre de l’Office des transports (OTC) et de la Collectivité de Corse. Ces deux structures ne font aucun effort pour faciliter la vie des transporteurs. On les met en garde, s’ils ne font rien, on passera à l’étape supérieure ». Les quatre transporteurs, qui représentent le Syndicat professionnel des transporteurs de la Corse (SPTC) - le Président Jean Marie Maurizi, entouré de Jean-Michel Evangelista (SETEC), Joseph Benzoni (COCCITRANS) et Jacques Bindinelli (Corsefret) - ne cachent ni leur colère, ni leur désarroi. « Nous sommes au bord de la crise de nerfs », lâche l’un d’eux. En cause : la difficulté d’embarquement de leurs remorques sur les navires des compagnies délégataires du service public par manque de places de fret. Le syndicat explique qu’une partie des remorques reste, chaque jour, à quai ou dans les entrepôts. « Le problème, c’est la priorité à l’embarquement. Les transporteurs continentaux et européens, les touristes ou les passagers font des réservations sur Internet, alors que les transporteurs corses ne le peuvent pas. Quand le matin, nous demandons aux compagnies de passer, par exemple, dix remorques, elles prennent note et nous rappellent deux heures après pour nous dire qu’il n’y a de place que pour 4 ou 6 remorques. Le résultat, c’est qu’un maximum de remorques ne sont pas embarquées. C’est comme ça, pas seulement l’été, mais toute l’année. C’est devenu invivable ! Ça nous coûte une petite fortune. Ça mécontente nos clients qui ne sont pas livrés à temps, ça nous empêche d’élargir notre clientèle. On ne peut pas, dans ces conditions, répondre à des appels d’offres sur le continent. On était une quarantaine d’entreprises, il y en a cinq de moins aujourd’hui. Si ça continue, il n’y aura plus de transporteurs corses ».
Des problèmes portuaires
Pour le syndicat, la coupe est pleine : « A cela s’ajoutent les problèmes portuaires. Le port de Bastia est saturé toute l’année, les navires sont plus en sécurité à l’extérieur qu’à l’intérieur. Les transporteurs se sont adaptés à cette situation. Des dizaines de remorques transitent tous les jours par les ports de l’Ile Rousse et de Porto-Vecchio pour livrer Bastia. A partir de mai, on est obligé de passer par Propriano pour livrer des clients à Porto-Vecchio. Ce sont des frais supplémentaires. Qui met la main à la poche ? Les transporteurs ! Sur la ligne de Porto-Vecchio, il y a des problèmes de place sur les navires pour les remorques, mais aussi un manque de couchettes pour les convoyeurs. Comment va-ton privilégier l’emploi en Corse si on n’a pas de place de cabine pour les chauffeurs ? ». Le syndicat s’inquiète aussi de la situation du port d’Ajaccio qui arrive à saturation avec un volume de fret en pleine augmentation. Les difficultés sont identiques sur le continent, notamment à Marseille, avec la contrainte parfois de passer par Toulon dans un contexte de flambée des prix du carburant : « Se dérouter sur Toulon est un coût supplémentaire qui nous appauvrit. On est obligé d’avoir des tracteurs pour charger et décharger les remorques ». Sans parler du réseau routier insulaire déficient et de la règlementation nationale. « Il y a 5 samedis rouges par an où les transporteurs n’ont pas le droit de rouler. Sur le continent, les transporteurs partent le matin, livrent et rentrent chez eux le soir, mais nous sommes dans une île, et quand une remorque arrive un samedi matin, nous devons attendre le lundi pour livrer. Nous demandons une dérogation, mais le préfet nous rétorque que c’est la règlementation nationale et nous oppose une fin de non-recevoir ».
Des problèmes portuaires
Pour le syndicat, la coupe est pleine : « A cela s’ajoutent les problèmes portuaires. Le port de Bastia est saturé toute l’année, les navires sont plus en sécurité à l’extérieur qu’à l’intérieur. Les transporteurs se sont adaptés à cette situation. Des dizaines de remorques transitent tous les jours par les ports de l’Ile Rousse et de Porto-Vecchio pour livrer Bastia. A partir de mai, on est obligé de passer par Propriano pour livrer des clients à Porto-Vecchio. Ce sont des frais supplémentaires. Qui met la main à la poche ? Les transporteurs ! Sur la ligne de Porto-Vecchio, il y a des problèmes de place sur les navires pour les remorques, mais aussi un manque de couchettes pour les convoyeurs. Comment va-ton privilégier l’emploi en Corse si on n’a pas de place de cabine pour les chauffeurs ? ». Le syndicat s’inquiète aussi de la situation du port d’Ajaccio qui arrive à saturation avec un volume de fret en pleine augmentation. Les difficultés sont identiques sur le continent, notamment à Marseille, avec la contrainte parfois de passer par Toulon dans un contexte de flambée des prix du carburant : « Se dérouter sur Toulon est un coût supplémentaire qui nous appauvrit. On est obligé d’avoir des tracteurs pour charger et décharger les remorques ». Sans parler du réseau routier insulaire déficient et de la règlementation nationale. « Il y a 5 samedis rouges par an où les transporteurs n’ont pas le droit de rouler. Sur le continent, les transporteurs partent le matin, livrent et rentrent chez eux le soir, mais nous sommes dans une île, et quand une remorque arrive un samedi matin, nous devons attendre le lundi pour livrer. Nous demandons une dérogation, mais le préfet nous rétorque que c’est la règlementation nationale et nous oppose une fin de non-recevoir ».
Une DSP insuffisante
Le syndicat se refuse à incriminer les compagnies maritimes, qu’elles soient délégataires ou pas, qui se livrent une concurrence acharnée sans souci de privilégier le transport insulaire, comme il refuse de s’arrêter aux règlements européens très contraignants, mais pointe du doigt la délégation de service public (DSP). Il n’est pas question de remettre en cause son principe, mais plutôt son périmètre qu’il juge sous dimensionné et peu favorable au transport insulaire : « Nous sommes de fervents défenseurs de la DSP parce qu’elle permet un cadre horaire et un cadre de rotation. Nous avons pu mesurer en période de Covid les limites des Obligations de service public (OSP) sur Toulon où les rotations étaient annulées 24 heures avant. Avec la DSP, on n’annule pas ». Le problème, qui, jusqu’en 2019, ne se posait qu’en période estivale, est devenu chronique toute l’année. « Nous sommes en souffrance en permanence depuis deux ans. On manque de place de fret depuis 2020. On perd 5000 remorques par an, c’est énorme ! Le trafic fret a augmenté, la Corse connaît un accroissement des touristes, de la population et de la consommation ». Si le syndicat reconnait que le tourisme gêne les transports de marchandise : « Une caravane ou un camping-car, c’est, à chaque fois, une remorque en moins », pas question, pour lui, de le limiter. « Tous les jours, on fait des choix à l’embarquement. Ça devient insupportable ! C’est paradoxal, sachant que la DSP a été mise en place en priorité pour le fret. C’est un service public qui, non seulement ne travaille pas à plein régime, mais est sous dimensionné par rapport à nos besoins ».
Plus de rotations
Le syndicat a, donc, saisi l’Office des transports (OTC) pour demander des rotations et des moyens supplémentaires, notamment sur Bastia pour accueillir plus de bateaux, mais aussi des navires plus grands, sachant qu’un navire de la Corsica Linea est dimensionné pour 110 remorques. « Il y a deux solutions. La première est de rajouter des rotations supplémentaires, de mettre deux bateaux par jour. C’est la solution idéale ! ». Si ce second bateau n’est pas plein, aucune importance, estime le syndicat : « C’est le service public ! Il n’y a pas une seule remorque qui doit rester sur le port de Marseille ! ». La seconde solution à moyen terme concerne les réservations : « On doit nous donner la possibilité de réserver une semaine ou un mois à l’avance. On a même proposé de payer les remorques qui ne seraient pas embarquées ». Une solution que les compagnies délégataires avaient agréée sur le principe et qui aurait due rentrer en vigueur en mai dernier, mais qui ne fut pas suivie d’effet. Le syndicat reconnait qu’un dialogue s’est instauré avec l’OTC depuis deux ans, mais, déplore-t-il : « On n’est pas entendu ! Cela fait deux ans que nous discutons, tous les lundi, dans une réunion hebdomadaire, avec l’OTC qui nous écoute, ou fait semblant de nous écouter. La Collectivité invoque les règlements européens et un problème de cadre juridique. Elle nous répond : « C’est compliqué ! C’est déjà un miracle qu’on ait sauvé le service public ». Elle se méfie comme du loup d’éventuelles recours concernant le service public ».
La menace de blocage
Pour mémoire, l’Exécutif corse a du arracher de haute lutte à Bruxelles une nouvelle DSP de 7 ans qui a été validée, le 28 avril dernier, par l’Assemblée de Corse, mais avec l’obligation de ne pas sortir du cadre fixé par la Commission européenne, fort réticente sur la nécessité d’un service public maritime qui contrevient, selon elle, aux sacro-saintes règles du marché et de la libre concurrence. Mais les diktats européens, le syndicat les balaye d’un revers de main : « Notre rôle, c’est de transporter des marchandises entre le continent et la Corse de la meilleure façon possible. Le rôle de l’OTC est de nous donner les moyens de faire rentrer les remorques en Corse. Nous sommes les victimes collatérales des tensions entre l’Union européenne et la CdC ! ». L’enjeu pour les transporteurs est de peser sur la nouvelle DSP qui devrait entrer en vigueur le 1er janvier 2023. « Le cahier des charges de la DSP est incohérent par rapport à nos besoins. L’appel d’offres est insuffisant ». Ils préviennent : « On n’a pas voulu troubler la période estivale, mais on ne tient plus notre base. Notre pouvoir de nuisance est important ». Le mois d’octobre s’annonce, donc, crucial, et sous la menace d’un blocage de l’île.
N.M.
Le syndicat se refuse à incriminer les compagnies maritimes, qu’elles soient délégataires ou pas, qui se livrent une concurrence acharnée sans souci de privilégier le transport insulaire, comme il refuse de s’arrêter aux règlements européens très contraignants, mais pointe du doigt la délégation de service public (DSP). Il n’est pas question de remettre en cause son principe, mais plutôt son périmètre qu’il juge sous dimensionné et peu favorable au transport insulaire : « Nous sommes de fervents défenseurs de la DSP parce qu’elle permet un cadre horaire et un cadre de rotation. Nous avons pu mesurer en période de Covid les limites des Obligations de service public (OSP) sur Toulon où les rotations étaient annulées 24 heures avant. Avec la DSP, on n’annule pas ». Le problème, qui, jusqu’en 2019, ne se posait qu’en période estivale, est devenu chronique toute l’année. « Nous sommes en souffrance en permanence depuis deux ans. On manque de place de fret depuis 2020. On perd 5000 remorques par an, c’est énorme ! Le trafic fret a augmenté, la Corse connaît un accroissement des touristes, de la population et de la consommation ». Si le syndicat reconnait que le tourisme gêne les transports de marchandise : « Une caravane ou un camping-car, c’est, à chaque fois, une remorque en moins », pas question, pour lui, de le limiter. « Tous les jours, on fait des choix à l’embarquement. Ça devient insupportable ! C’est paradoxal, sachant que la DSP a été mise en place en priorité pour le fret. C’est un service public qui, non seulement ne travaille pas à plein régime, mais est sous dimensionné par rapport à nos besoins ».
Plus de rotations
Le syndicat a, donc, saisi l’Office des transports (OTC) pour demander des rotations et des moyens supplémentaires, notamment sur Bastia pour accueillir plus de bateaux, mais aussi des navires plus grands, sachant qu’un navire de la Corsica Linea est dimensionné pour 110 remorques. « Il y a deux solutions. La première est de rajouter des rotations supplémentaires, de mettre deux bateaux par jour. C’est la solution idéale ! ». Si ce second bateau n’est pas plein, aucune importance, estime le syndicat : « C’est le service public ! Il n’y a pas une seule remorque qui doit rester sur le port de Marseille ! ». La seconde solution à moyen terme concerne les réservations : « On doit nous donner la possibilité de réserver une semaine ou un mois à l’avance. On a même proposé de payer les remorques qui ne seraient pas embarquées ». Une solution que les compagnies délégataires avaient agréée sur le principe et qui aurait due rentrer en vigueur en mai dernier, mais qui ne fut pas suivie d’effet. Le syndicat reconnait qu’un dialogue s’est instauré avec l’OTC depuis deux ans, mais, déplore-t-il : « On n’est pas entendu ! Cela fait deux ans que nous discutons, tous les lundi, dans une réunion hebdomadaire, avec l’OTC qui nous écoute, ou fait semblant de nous écouter. La Collectivité invoque les règlements européens et un problème de cadre juridique. Elle nous répond : « C’est compliqué ! C’est déjà un miracle qu’on ait sauvé le service public ». Elle se méfie comme du loup d’éventuelles recours concernant le service public ».
La menace de blocage
Pour mémoire, l’Exécutif corse a du arracher de haute lutte à Bruxelles une nouvelle DSP de 7 ans qui a été validée, le 28 avril dernier, par l’Assemblée de Corse, mais avec l’obligation de ne pas sortir du cadre fixé par la Commission européenne, fort réticente sur la nécessité d’un service public maritime qui contrevient, selon elle, aux sacro-saintes règles du marché et de la libre concurrence. Mais les diktats européens, le syndicat les balaye d’un revers de main : « Notre rôle, c’est de transporter des marchandises entre le continent et la Corse de la meilleure façon possible. Le rôle de l’OTC est de nous donner les moyens de faire rentrer les remorques en Corse. Nous sommes les victimes collatérales des tensions entre l’Union européenne et la CdC ! ». L’enjeu pour les transporteurs est de peser sur la nouvelle DSP qui devrait entrer en vigueur le 1er janvier 2023. « Le cahier des charges de la DSP est incohérent par rapport à nos besoins. L’appel d’offres est insuffisant ». Ils préviennent : « On n’a pas voulu troubler la période estivale, mais on ne tient plus notre base. Notre pouvoir de nuisance est important ». Le mois d’octobre s’annonce, donc, crucial, et sous la menace d’un blocage de l’île.
N.M.