Le préfet de Corse, Bernard Schmeltz.
- Cela fait dix mois que vous êtes en poste en Corse, dans quel état d’esprit êtes-vous ?
- Je suis toujours dans le même état d’esprit d’écarter les à-priori. Je suis encore plus convaincu qu’il faut sortir de la relation un peu convenue entre la Corse et l’Etat, et la Corse et le reste de la France, faite de clichés et de préjugés qui n’ont pas lieu d’être et qui empoisonnent l’atmosphère inutilement. Plus que jamais, il faut les tenir à l’écart ! La Corse est une région avec une forte identité et une forte culture, il ne faut pas en déduire des généralités sur tel ou tel trait de caractère, cela n’a aucun sens ! Il ne faut pas aborder les questions à partir de cette vision un peu surannée des choses, mais de façon la plus pragmatique possible. Mon état d’esprit est d’apporter des réponses techniques, juridiques, à des problèmes réels. Pour cela, il faut entretenir, avec les acteurs économiques, sociaux et politiques du territoire, des relations dépassionnées, en dehors de tous rapports de forces.
- Quelle est votre impression générale sur la situation de l’île ?
- La Corse a pris un vrai retard par rapport à la moyenne nationale sur des sujets structurels importants. Deux en particulier : l’aménagement du territoire et la gestion des déchets. Il faut absolument combler ce décalage. Pour cela, faire un constat lucide sur les situations et les remèdes à apporter en termes de méthode, d’organisation technique et d’instruments, mais aussi, sur les atouts exceptionnels à mettre en valeur. Quel est le problème ? Quels sont les moyens pour les résoudre ? L’Etat est complètement impliqué sur tous ces sujets, il n’est pas contre, mais aux côtés des acteurs du territoire. On ne résoudra ces difficultés très concrètes qu’en travaillant tous ensemble. Je suis persuadé que la population de l’île attend que nous apportions, ensemble, des réponses pertinentes à ses problèmes quotidiens.
- Les relations entre la Corse et l’Etat ont été assez fraiches en début de mandature nationaliste avant de grandement s’améliorer. Un pas a-t-il été franchi dans la décrispation politique ?
- La relation avec l’Etat s’est normalisée et doit continuer à l’être. Les conflits ou les désaccords entre les orientations nationales et les points de vue locaux, que ce soit avec les socioprofessionnels ou les élus, font partie de la vie d’une démocratie. Il ne faut pas rechercher des consensus à tous prix, mais construire une relation permettant de collaborer sur les sujets les plus importants, de rechercher, autant que possible, des points d’entente et de conduire un travail de fond. C’est le rôle des services déconcentrés de l’Etat dont l’action quotidienne est importante et structure la vie d’un territoire, même si on n’en parle jamais. Notre rôle, dès lors que nous sommes embarqués sur le même navire, est de ramer ensemble.
- Je suis toujours dans le même état d’esprit d’écarter les à-priori. Je suis encore plus convaincu qu’il faut sortir de la relation un peu convenue entre la Corse et l’Etat, et la Corse et le reste de la France, faite de clichés et de préjugés qui n’ont pas lieu d’être et qui empoisonnent l’atmosphère inutilement. Plus que jamais, il faut les tenir à l’écart ! La Corse est une région avec une forte identité et une forte culture, il ne faut pas en déduire des généralités sur tel ou tel trait de caractère, cela n’a aucun sens ! Il ne faut pas aborder les questions à partir de cette vision un peu surannée des choses, mais de façon la plus pragmatique possible. Mon état d’esprit est d’apporter des réponses techniques, juridiques, à des problèmes réels. Pour cela, il faut entretenir, avec les acteurs économiques, sociaux et politiques du territoire, des relations dépassionnées, en dehors de tous rapports de forces.
- Quelle est votre impression générale sur la situation de l’île ?
- La Corse a pris un vrai retard par rapport à la moyenne nationale sur des sujets structurels importants. Deux en particulier : l’aménagement du territoire et la gestion des déchets. Il faut absolument combler ce décalage. Pour cela, faire un constat lucide sur les situations et les remèdes à apporter en termes de méthode, d’organisation technique et d’instruments, mais aussi, sur les atouts exceptionnels à mettre en valeur. Quel est le problème ? Quels sont les moyens pour les résoudre ? L’Etat est complètement impliqué sur tous ces sujets, il n’est pas contre, mais aux côtés des acteurs du territoire. On ne résoudra ces difficultés très concrètes qu’en travaillant tous ensemble. Je suis persuadé que la population de l’île attend que nous apportions, ensemble, des réponses pertinentes à ses problèmes quotidiens.
- Les relations entre la Corse et l’Etat ont été assez fraiches en début de mandature nationaliste avant de grandement s’améliorer. Un pas a-t-il été franchi dans la décrispation politique ?
- La relation avec l’Etat s’est normalisée et doit continuer à l’être. Les conflits ou les désaccords entre les orientations nationales et les points de vue locaux, que ce soit avec les socioprofessionnels ou les élus, font partie de la vie d’une démocratie. Il ne faut pas rechercher des consensus à tous prix, mais construire une relation permettant de collaborer sur les sujets les plus importants, de rechercher, autant que possible, des points d’entente et de conduire un travail de fond. C’est le rôle des services déconcentrés de l’Etat dont l’action quotidienne est importante et structure la vie d’un territoire, même si on n’en parle jamais. Notre rôle, dès lors que nous sommes embarqués sur le même navire, est de ramer ensemble.
Collectivité unique : « Il serait hasardeux de parier sur le report de la loi ou des échéances ! »
- La Collectivité unique a été définitivement adoptée par le Parlement. Que reste-t-il à faire maintenant ?
- L’Etat a rempli sa part du contrat. Les ordonnances ont été rédigées, débattues en Conseil des ministres et validées par le Parlement. Restent, maintenant, un chantier technique pour les trois collectivités qui fusionnent, des choses tout à fait concrètes, pragmatiques, juridiques et financières, et une gestion des ressources humaines à caler. Ce chantier-là, il appartient aux trois collectivités de le mener à bien de façon à être fin prêt le 1er janvier 2018, date de mise en place de la nouvelle collectivité.
- Le calendrier électoral et le changement de gouvernement pourraient, selon certains, la remettre en question, en tous cas dans les délais prévus. Quel est votre sentiment ?
- Il serait hasardeux de parier sur le report de la loi ou des échéances ! Sur un enjeu technique et juridique aussi compliqué, ce serait lourd de conséquences ! Comme je l’ai dit aux élus, quelques soient les opinions des uns et des autres, et même si certains souhaitent un changement de pied à l’issue des élections nationales, il ne faut pas prendre de risque ! Il faut, quoiqu’il arrive, continuer le chantier de la collectivité unique. L’installation d’un nouveau gouvernement et d’un nouveau Parlement demande quelques délais. L’actualité législative sera très vite remplie avec un temps utile, nécessairement restreint, pour débattre de projets de loi. Remettre en cause les échéances et les élections territoriales à la fin de l’année suppose que l’on identifie un vecteur, un créneau législatif et des politiques. Là, aussi, c’est un pari risqué !
- De nombreuses lois sont votées et jamais appliquées. N’est-ce pas un risque ?
- Non ! Seule une loi peut défaire ce qu’une loi a fait. Dès lors que la loi fixe des élections territoriales fin 2017 et une collectivité unique début 2018, tant qu’une loi contraire ne vient pas l’anéantir, cette loi prévaut. On ne peut pas, sur simple décision gouvernementale, dire « Stop ! ». C’est un principe de séparation des pouvoirs. Le gouvernement, qui représente l’Exécutif et a un pouvoir règlementaire, ne peut pas remettre en question une norme de valeur supérieure qui est la loi votée par le Parlement.
- La Collectivité unique a été définitivement adoptée par le Parlement. Que reste-t-il à faire maintenant ?
- L’Etat a rempli sa part du contrat. Les ordonnances ont été rédigées, débattues en Conseil des ministres et validées par le Parlement. Restent, maintenant, un chantier technique pour les trois collectivités qui fusionnent, des choses tout à fait concrètes, pragmatiques, juridiques et financières, et une gestion des ressources humaines à caler. Ce chantier-là, il appartient aux trois collectivités de le mener à bien de façon à être fin prêt le 1er janvier 2018, date de mise en place de la nouvelle collectivité.
- Le calendrier électoral et le changement de gouvernement pourraient, selon certains, la remettre en question, en tous cas dans les délais prévus. Quel est votre sentiment ?
- Il serait hasardeux de parier sur le report de la loi ou des échéances ! Sur un enjeu technique et juridique aussi compliqué, ce serait lourd de conséquences ! Comme je l’ai dit aux élus, quelques soient les opinions des uns et des autres, et même si certains souhaitent un changement de pied à l’issue des élections nationales, il ne faut pas prendre de risque ! Il faut, quoiqu’il arrive, continuer le chantier de la collectivité unique. L’installation d’un nouveau gouvernement et d’un nouveau Parlement demande quelques délais. L’actualité législative sera très vite remplie avec un temps utile, nécessairement restreint, pour débattre de projets de loi. Remettre en cause les échéances et les élections territoriales à la fin de l’année suppose que l’on identifie un vecteur, un créneau législatif et des politiques. Là, aussi, c’est un pari risqué !
- De nombreuses lois sont votées et jamais appliquées. N’est-ce pas un risque ?
- Non ! Seule une loi peut défaire ce qu’une loi a fait. Dès lors que la loi fixe des élections territoriales fin 2017 et une collectivité unique début 2018, tant qu’une loi contraire ne vient pas l’anéantir, cette loi prévaut. On ne peut pas, sur simple décision gouvernementale, dire « Stop ! ». C’est un principe de séparation des pouvoirs. Le gouvernement, qui représente l’Exécutif et a un pouvoir règlementaire, ne peut pas remettre en question une norme de valeur supérieure qui est la loi votée par le Parlement.
PLU : « Il est absolument nécessaire de mettre en place un document d’urbanisme »
- Un autre problème à échéance très rapide, le 27 mars, concerne les PLU. L’inquiétude des communes est forte. Où en est-on ?
- Sur 360 communes corses, 164 ont un document d’urbanisme dont 52 sont des PLU. La Corse a un retard, par rapport à la norme nationale, qui doit être comblé. Mais, ne pas avoir de PLU dans une petite commune de montagne de quelques dizaines ou centaines d’habitants n’a pas la même signification, ni les mêmes conséquences, que dans une commune littorale qui subit une forte pression foncière. Les petites communes de montagne peuvent se contenter d’un document de base, la carte communale, qui définit les règles essentielles. Pour gérer un ou deux permis de construire par an, cela suffit amplement. Ce n’est pas la peine de mettre une pression sur les maires et d’engager des frais auprès d’un cabinet conseil. En revanche, les communes les plus importantes, surtout situées sur le littoral, doivent s’engager dans une démarche PLU.
- Pourtant, beaucoup se retrouveront à la fin du mois sans PLU. Que risquent-t-elles ?
- Il est vrai que certaines communes se retrouveront sans document d’urbanisme : Cargèse, Piana, Biguglia, Saint-Florent, Porto-Vecchio… C’est un problème, mais il ne faut pas se crisper sur cette échéance. Si le retour au règlement national d’urbanisme ne dure que quelques semaines ou quelques mois, ce n’est pas dramatique ! Pendant cette période, une partie de la responsabilité retombera sur l’Etat. Le risque est de tomber dans un travers qui peut conduire sur le long terme à un phénomène de mitage, du cas par cas ou du coup par coup.
- C’est-à-dire ?
- L’avantage d’un document d’urbanisme est de définir, pour plusieurs années, la règle du jeu, c’est-à-dire les espaces protégés et les espaces à urbaniser. Il donne des indications claires à la population. Sans un document d’urbanisme, sans règles de zonage précises, à chaque permis de construire, on se contentera d’appliquer le principe de la constructibilité limitée et on se retrouvera dans des débats juridiques du style : « pourquoi lui peut construire et pas moi ? ». On finira par étendre les tâches d’urbanisation. C’est pour cela qu’il faut des PLU ! Le cas par cas ne remplacera jamais une stratégie clairement affichée qui stabilise les débats et évite que les querelles ne se multiplient. C’est un outil essentiel pour freiner la spéculation foncière.
- En Corse, les PLU doivent être compatibles avec le PADDUC. C’est une complication supplémentaire, mais peu ou pas de PLU le sont. Sont-ils valables pour autant ?
- C’est vrai, c’est compliqué ! Un PLU doit être, à la fois, compatible avec la Loi Littoral et avec le PADDUC qui est un document au 50/1000ème, donc une vue de haut. Le PLU, qui est un document à la parcelle, permet l’application intelligente du PADDUC, notamment en précisant l’épaisseur du trait. Les maires doivent se saisir de cet outil pour éviter de se retrouver dans des situations absurdes où on ne saurait pas comment appliquer à une parcelle un document au 50/1000ème. S’il n’y a pas de PLU, tous les permis de construire devront être conformes au PADDUC. Définir ce lien de conformité est difficile ! C’est pour cela qu’il faut un travail de stratégie et de vision de long terme. Le PLU sert à tracer ces perspectives et à construire un véritable choix politique.
- Comprenez-vous les difficultés des maires confrontés à un PADDUC illisible, à la loi Littoral, la loi Alur…?
- Je les comprends parfaitement. C’est la raison pour laquelle j’ai l’intention d’aller sur le terrain les rencontrer, et faire, en partenariat avec l’Agence de l’urbanisme et de l’énergie de la Corse, ce travail d’explication. Définir cette stratégie et une vision du territoire à échéance de 5, 10 ou 15 ans, est vraiment le cœur de la mission fondamentale du maire. Le PLU est, à la fois, une tâche majeure et une des missions les plus difficiles qui soient, mais les maires ne doivent pas se décourager. Nous sommes là pour les aider et leur donner des conseils. L’Etat ne doit pas être perçu comme celui qui exerce, in fine, un contrôle de légalité, mais celui qui accompagne et fait de la pédagogie. Les cabinets Conseils sont aussi un interlocuteur important, car ils tracent les traits sur les cartes. Tout ce travail de préparation et de formation est essentiel pour prévenir les difficultés en amont et apporter des réponses afin d’éviter des échecs.
- Le contrôle de légalité de l’Etat est très critiqué. Vos prédécesseurs ont été pointés du doigt. Quelle est votre ligne de conduite en la matière ?
- Ma ligne de conduite est d’appliquer la loi, de faire preuve de pragmatisme et de rester étanche à toutes formes de pression. Si les processus juridiques à l’œuvre, auxquels participait l’Etat, n’ont pas permis d’endiguer le mitage de l’espace et le grignotage progressif des espaces agricoles, ce n’est pas la conséquence de petits arrangements ou de connivence. C’est juste qu’à l’époque, on n’avait pas le même niveau de conscience et on n’appliquait pas, avec la même vigilance et la même notion d’urgence, les règles d’environnement. Au fil des années, le législateur n’a jamais cessé de renforcer les règles de protection de l’environnement, du littoral et des espaces agricoles. Le niveau d’artificialisation des terres, en Corse et sur le continent, a justifié des mesures beaucoup plus drastiques qui correspondent, aussi, à la montée en puissance de la préoccupation environnementale dans le débat politique et dans les règles de droit. L’état d’esprit général a changé. La législation s’est durcie et, tout naturellement, les conditions d’application de la règle par les services de l’Etat se sont renforcées.
- Comment expliquez-vous que tant de PLU, validés par le contrôle de légalité, soient annulés par la justice saisie par les associations ?
- Le contrôle de légalité, qu’exerce le Préfet, n’est pas un contrôle juridictionnel. Je ne suis pas un juge, encore moins un juge pénal ! Si, lors d’un contrôle de légalité, nous relevons des éléments susceptibles de donner lieu au constat d’une infraction pénale, nous les transmettons, comme le prévoit l’article 40 du code pénal, au Parquet qui décide s’il poursuit ou pas. L’étanchéité est totale entre les éléments judiciaires et le contrôle de légalité. Une société démocratique, c’est comme un orchestre symphonique, l’harmonie apparaît quand tous les instruments jouent ensemble. Il y a le pouvoir, assumé par l’Exécutif, et les contre-pouvoirs, représentés par les associations qui ont une fonction militante, mais le contrôle de légalité n’est pas un acte de militantisme. Nous ne sommes pas dans le même registre. J’assume une approche pragmatique des dossiers parce qu’il peut y avoir sur le terrain, dans l’application de la loi, des conflits d’intérêt général… L’approche du contrôle de légalité est de trouver la moins mauvaise des solutions. Qu’est-ce qui est mieux : un PLU avec quelques imperfections ou pas de PLU du tout ? Regardez ce qui se passe à Porto Vecchio qui n’a plus de PLU depuis des années ! Les services de l’Etat, qui subissent, depuis des années, des réductions d’effectifs, n’ont plus les moyens d’assurer le contrôle ou l’instruction au cas par cas de tous les permis de construire délivrés en Corse.
- Un autre problème à échéance très rapide, le 27 mars, concerne les PLU. L’inquiétude des communes est forte. Où en est-on ?
- Sur 360 communes corses, 164 ont un document d’urbanisme dont 52 sont des PLU. La Corse a un retard, par rapport à la norme nationale, qui doit être comblé. Mais, ne pas avoir de PLU dans une petite commune de montagne de quelques dizaines ou centaines d’habitants n’a pas la même signification, ni les mêmes conséquences, que dans une commune littorale qui subit une forte pression foncière. Les petites communes de montagne peuvent se contenter d’un document de base, la carte communale, qui définit les règles essentielles. Pour gérer un ou deux permis de construire par an, cela suffit amplement. Ce n’est pas la peine de mettre une pression sur les maires et d’engager des frais auprès d’un cabinet conseil. En revanche, les communes les plus importantes, surtout situées sur le littoral, doivent s’engager dans une démarche PLU.
- Pourtant, beaucoup se retrouveront à la fin du mois sans PLU. Que risquent-t-elles ?
- Il est vrai que certaines communes se retrouveront sans document d’urbanisme : Cargèse, Piana, Biguglia, Saint-Florent, Porto-Vecchio… C’est un problème, mais il ne faut pas se crisper sur cette échéance. Si le retour au règlement national d’urbanisme ne dure que quelques semaines ou quelques mois, ce n’est pas dramatique ! Pendant cette période, une partie de la responsabilité retombera sur l’Etat. Le risque est de tomber dans un travers qui peut conduire sur le long terme à un phénomène de mitage, du cas par cas ou du coup par coup.
- C’est-à-dire ?
- L’avantage d’un document d’urbanisme est de définir, pour plusieurs années, la règle du jeu, c’est-à-dire les espaces protégés et les espaces à urbaniser. Il donne des indications claires à la population. Sans un document d’urbanisme, sans règles de zonage précises, à chaque permis de construire, on se contentera d’appliquer le principe de la constructibilité limitée et on se retrouvera dans des débats juridiques du style : « pourquoi lui peut construire et pas moi ? ». On finira par étendre les tâches d’urbanisation. C’est pour cela qu’il faut des PLU ! Le cas par cas ne remplacera jamais une stratégie clairement affichée qui stabilise les débats et évite que les querelles ne se multiplient. C’est un outil essentiel pour freiner la spéculation foncière.
- En Corse, les PLU doivent être compatibles avec le PADDUC. C’est une complication supplémentaire, mais peu ou pas de PLU le sont. Sont-ils valables pour autant ?
- C’est vrai, c’est compliqué ! Un PLU doit être, à la fois, compatible avec la Loi Littoral et avec le PADDUC qui est un document au 50/1000ème, donc une vue de haut. Le PLU, qui est un document à la parcelle, permet l’application intelligente du PADDUC, notamment en précisant l’épaisseur du trait. Les maires doivent se saisir de cet outil pour éviter de se retrouver dans des situations absurdes où on ne saurait pas comment appliquer à une parcelle un document au 50/1000ème. S’il n’y a pas de PLU, tous les permis de construire devront être conformes au PADDUC. Définir ce lien de conformité est difficile ! C’est pour cela qu’il faut un travail de stratégie et de vision de long terme. Le PLU sert à tracer ces perspectives et à construire un véritable choix politique.
- Comprenez-vous les difficultés des maires confrontés à un PADDUC illisible, à la loi Littoral, la loi Alur…?
- Je les comprends parfaitement. C’est la raison pour laquelle j’ai l’intention d’aller sur le terrain les rencontrer, et faire, en partenariat avec l’Agence de l’urbanisme et de l’énergie de la Corse, ce travail d’explication. Définir cette stratégie et une vision du territoire à échéance de 5, 10 ou 15 ans, est vraiment le cœur de la mission fondamentale du maire. Le PLU est, à la fois, une tâche majeure et une des missions les plus difficiles qui soient, mais les maires ne doivent pas se décourager. Nous sommes là pour les aider et leur donner des conseils. L’Etat ne doit pas être perçu comme celui qui exerce, in fine, un contrôle de légalité, mais celui qui accompagne et fait de la pédagogie. Les cabinets Conseils sont aussi un interlocuteur important, car ils tracent les traits sur les cartes. Tout ce travail de préparation et de formation est essentiel pour prévenir les difficultés en amont et apporter des réponses afin d’éviter des échecs.
- Le contrôle de légalité de l’Etat est très critiqué. Vos prédécesseurs ont été pointés du doigt. Quelle est votre ligne de conduite en la matière ?
- Ma ligne de conduite est d’appliquer la loi, de faire preuve de pragmatisme et de rester étanche à toutes formes de pression. Si les processus juridiques à l’œuvre, auxquels participait l’Etat, n’ont pas permis d’endiguer le mitage de l’espace et le grignotage progressif des espaces agricoles, ce n’est pas la conséquence de petits arrangements ou de connivence. C’est juste qu’à l’époque, on n’avait pas le même niveau de conscience et on n’appliquait pas, avec la même vigilance et la même notion d’urgence, les règles d’environnement. Au fil des années, le législateur n’a jamais cessé de renforcer les règles de protection de l’environnement, du littoral et des espaces agricoles. Le niveau d’artificialisation des terres, en Corse et sur le continent, a justifié des mesures beaucoup plus drastiques qui correspondent, aussi, à la montée en puissance de la préoccupation environnementale dans le débat politique et dans les règles de droit. L’état d’esprit général a changé. La législation s’est durcie et, tout naturellement, les conditions d’application de la règle par les services de l’Etat se sont renforcées.
- Comment expliquez-vous que tant de PLU, validés par le contrôle de légalité, soient annulés par la justice saisie par les associations ?
- Le contrôle de légalité, qu’exerce le Préfet, n’est pas un contrôle juridictionnel. Je ne suis pas un juge, encore moins un juge pénal ! Si, lors d’un contrôle de légalité, nous relevons des éléments susceptibles de donner lieu au constat d’une infraction pénale, nous les transmettons, comme le prévoit l’article 40 du code pénal, au Parquet qui décide s’il poursuit ou pas. L’étanchéité est totale entre les éléments judiciaires et le contrôle de légalité. Une société démocratique, c’est comme un orchestre symphonique, l’harmonie apparaît quand tous les instruments jouent ensemble. Il y a le pouvoir, assumé par l’Exécutif, et les contre-pouvoirs, représentés par les associations qui ont une fonction militante, mais le contrôle de légalité n’est pas un acte de militantisme. Nous ne sommes pas dans le même registre. J’assume une approche pragmatique des dossiers parce qu’il peut y avoir sur le terrain, dans l’application de la loi, des conflits d’intérêt général… L’approche du contrôle de légalité est de trouver la moins mauvaise des solutions. Qu’est-ce qui est mieux : un PLU avec quelques imperfections ou pas de PLU du tout ? Regardez ce qui se passe à Porto Vecchio qui n’a plus de PLU depuis des années ! Les services de l’Etat, qui subissent, depuis des années, des réductions d’effectifs, n’ont plus les moyens d’assurer le contrôle ou l’instruction au cas par cas de tous les permis de construire délivrés en Corse.
Déchets : « Si on commence à bloquer partout, on ne s’en sortira pas ! »
- La gestion des déchets reste une actualité brûlante. Quelle est la position de l’Etat sur ce problème récurrent ?
- L’Etat a un rôle strictement limité. La CTC élabore la stratégie de traitement des déchets. Le SYVADEC met en place les procédures de traitement pour les intercommunalités qui organisent la collecte. L’Etat n’a pas de responsabilités, ni stratégiques, ni opérationnelles. Il reçoit des déclarations d’installations quand celles-ci, comme les plateformes de compostage, ne sont pas soumises à autorisation. Il instruit les demandes d’autorisations pour les installations de traitement et contrôle leur fonctionnement. Mais, au vu de la situation désolante des déchets en Corse, nous nous sommes mis à la disposition de la CTC, des Intercos et des maires pour trouver des solutions, pour jouer un rôle de médiation et faire en sorte que tout le monde travaille dans le même sens.
- Comment réagissez-vous au raz-le bol de la population qui s’exprime de nouveau ?
- Les populations, notamment celles qui vivent autour des centres de traitement, sont traumatisées par les décharges sauvages, le passif et l’absence de sites positifs de tri et de prétraitement. On mettait, dans les centres d’enfouissement, tout et n’importe quoi, notamment des fermentescibles qui provoquent toute une série de nuisances. Si la Corse développe le tri, installe des plateformes de compostage pour les fermentescibles et est capable de réduire de 10%, 20 % ou 40% les volumes à enfouir pour n’enfouir que les matières inertées, la situation n’aura plus rien à voir avec cette vision de cauchemar qui continue de traumatiser tout le monde. Il faut envoyer des signaux positifs pour dire : « Plus jamais ça ! » et rechercher des sites nouveaux pour montrer que ce n’est pas toujours au même endroit qu’on met en place des centres d’enfouissement. Il faut basculer du bon côté !
- La crispation reste forte sur le projet du centre d’enfouissement de Tallone III. Craignez-vous une nouvelle crise ?
- Bien sûr ! Mais, ce projet n’a plus rien à voir avec les anciennes installations qui ont causé beaucoup de nuisances, il applique des normes et des contrôles nouveaux. Une déclaration commune Etat-Syvadec-CTC a été signée en août et envisage un temps d’exploitation limité. Dans le même temps, des contrats de ruralité ont été actés et la CTC a engagé des démarches pour mettre en œuvre de façon très concrète un principe de solidarité à l’égard des territoires qui accueillent des sites afin de financer des projets d’intérêt public. Les agglomérations de Bastia et d’Ajaccio, qui sont les plus gros producteurs de déchets, enregistrent des signaux encourageants de diminution des volumes à enfouir. Ces signaux doivent être mis en exergue pour éviter un phénomène de contagion de blocage. Si on commence à bloquer partout, on ne s’en sortira pas ! C’est le risque aujourd’hui ! Il faut donner de la visibilité, rétablir la confiance, cranter les uns après les autres les signaux positifs. Il faut des réponses techniques, concrètes, pragmatiques, c’est comme cela qu’on avancera !
- La gestion des déchets reste une actualité brûlante. Quelle est la position de l’Etat sur ce problème récurrent ?
- L’Etat a un rôle strictement limité. La CTC élabore la stratégie de traitement des déchets. Le SYVADEC met en place les procédures de traitement pour les intercommunalités qui organisent la collecte. L’Etat n’a pas de responsabilités, ni stratégiques, ni opérationnelles. Il reçoit des déclarations d’installations quand celles-ci, comme les plateformes de compostage, ne sont pas soumises à autorisation. Il instruit les demandes d’autorisations pour les installations de traitement et contrôle leur fonctionnement. Mais, au vu de la situation désolante des déchets en Corse, nous nous sommes mis à la disposition de la CTC, des Intercos et des maires pour trouver des solutions, pour jouer un rôle de médiation et faire en sorte que tout le monde travaille dans le même sens.
- Comment réagissez-vous au raz-le bol de la population qui s’exprime de nouveau ?
- Les populations, notamment celles qui vivent autour des centres de traitement, sont traumatisées par les décharges sauvages, le passif et l’absence de sites positifs de tri et de prétraitement. On mettait, dans les centres d’enfouissement, tout et n’importe quoi, notamment des fermentescibles qui provoquent toute une série de nuisances. Si la Corse développe le tri, installe des plateformes de compostage pour les fermentescibles et est capable de réduire de 10%, 20 % ou 40% les volumes à enfouir pour n’enfouir que les matières inertées, la situation n’aura plus rien à voir avec cette vision de cauchemar qui continue de traumatiser tout le monde. Il faut envoyer des signaux positifs pour dire : « Plus jamais ça ! » et rechercher des sites nouveaux pour montrer que ce n’est pas toujours au même endroit qu’on met en place des centres d’enfouissement. Il faut basculer du bon côté !
- La crispation reste forte sur le projet du centre d’enfouissement de Tallone III. Craignez-vous une nouvelle crise ?
- Bien sûr ! Mais, ce projet n’a plus rien à voir avec les anciennes installations qui ont causé beaucoup de nuisances, il applique des normes et des contrôles nouveaux. Une déclaration commune Etat-Syvadec-CTC a été signée en août et envisage un temps d’exploitation limité. Dans le même temps, des contrats de ruralité ont été actés et la CTC a engagé des démarches pour mettre en œuvre de façon très concrète un principe de solidarité à l’égard des territoires qui accueillent des sites afin de financer des projets d’intérêt public. Les agglomérations de Bastia et d’Ajaccio, qui sont les plus gros producteurs de déchets, enregistrent des signaux encourageants de diminution des volumes à enfouir. Ces signaux doivent être mis en exergue pour éviter un phénomène de contagion de blocage. Si on commence à bloquer partout, on ne s’en sortira pas ! C’est le risque aujourd’hui ! Il faut donner de la visibilité, rétablir la confiance, cranter les uns après les autres les signaux positifs. Il faut des réponses techniques, concrètes, pragmatiques, c’est comme cela qu’on avancera !
Chômage et pauvreté : « Le problème est moins l’insuffisance des crédits que l’insuffisance des projets ! »
- Autre sujet : la pauvreté structurelle. Comment l’analysez-vous ?
- C’est le signal que le retour des investissements et des efforts effectués est insuffisant auprès de l’ensemble de la population. Mêmes s’ils ont permis une progression très significative du PIB (Produit intérieur brut) par habitant depuis une dizaine d’années, il reste des poches de pauvreté, des populations très vulnérables, notamment les personnes âgées. Leur taux de précarité est beaucoup plus élevé que la moyenne nationale. Là aussi, regardons les choses lucidement et essayons CTC et Etat de mettre en place des moyens d’actions pragmatiques et de mobiliser un certain nombre de leviers. Le premier est la nécessité de mieux accompagner les personnes qui sont en situation de précarité et de les aider à faire valoir leurs droits sur la couverture maladie ou le RSA (Revenu de solidarité active). Sur le continent, l’action des pouvoirs publics est prolongée par les associations. Le réseau associatif étant moins dense en Corse, il faut compenser. Le second levier est le logement social.
- N’est-ce pas le point noir en Corse ?
- Oui ! Le logement social en Corse est, à la fois, insuffisant et inadapté. Il faudrait, idéalement, augmenter de 40 à 45 % le nombre de logements sociaux pour répondre à la demande et revoir la structure des logements. Il y a une forte demande de petites surfaces, des T1 et T2, qui ne représentent que 15% de l’offre. Il faut apporter des réponses concrètes qui permettent aux gens d’accéder plus facilement à un logement. Quand on met bout à bout un certain nombre de mesures, on peut arriver à améliorer le quotidien.
- L’autre énorme point noir est le taux de chômage. Quelles solutions apporter ?
- Il faut, dans les programmations futures, les contrats de plans à-venir, mettre l’accent sur des projets qui auront un effet fort et démultiplicateur sur l’emploi et l’économie. La Cour des comptes a reproché au PEI (Plan exceptionnel d’investissement) d’avoir un peu trop saupoudré. Le tourisme représente 24% de la richesse de l’île. Le phénomène de pauvreté s’explique, en partie, par les emplois saisonniers de trois à quatre mois, alors que la Corse a tout pour que la saison touristique dure douze mois. Il faut absolument travailler sur la structuration de l’offre et définir des bonnes stratégies pour que les touristes restent plus longtemps et viennent tout au long de l’année.
- La Corse a tout un millefeuille de fonds à disposition, mais rien ne change vraiment. Le statut d’île-montagne sera-t-il suffisant pour revitaliser l’intérieur ?
- Les fonds existent. Il reste quand même 450 millions € à programmer sur le 4ème avenant du PEI ! La Corse a deux ans pour faire la programmation et jusqu’en 2024 pour dépenser l’argent. Le PEI aurait du s’arrêter, la loi NOTRe a prolongé le délai de consommation des crédits. Cela veut dire que le problème est moins l’insuffisance des crédits que l’insuffisance des projets ! Etat et collectivités ont cette même responsabilité de faire émerger des projets. Un certain nombre d’investissements, totalement indispensables, ont été faits, mais n’ont pas un impact économique immédiat, notamment l’effort considérable en matière d’assainissement. La remise aux normes des stations d’épuration a coûté des dizaines de millions €. Il faut, maintenant, franchir de nouvelles étapes et définir de vrais bons projets structurants.
- Lesquels ?
- Par exemple, les opérations Grand Site. C’est vraiment ce qu’il faut en Corse. Elles protègent les sites de la surfréquentation et en font de vrais pôles d’attraction touristique en structurant une offre de haute qualité. La Corse a tout ce qu’il faut pour faire, non pas deux opérations Grand Site, Patrimonio et le site de la Parata, mais au moins dix ou douze ! Il est anormal que des sites aussi prestigieux que Calvi et Bonifacio ne soient pas traités sous cette forme. Va-t-on laisser les autocars et les voitures s’embouteiller dans des sites aussi exceptionnels ? Non ! Il faut trouver le moyen de gérer cet afflux. Cela contribuera au développement d’une activité touristique très qualitative et très respectueuse du patrimoine et au rayonnement de la culture corse. S’il est maîtrisé, le tourisme n’est pas une agression, mais un moyen de faire parler de soi et de rayonner. Les aiguilles de Bavella en été, c’est des voitures partout, y compris sur l’emplacement réservé à l’hélicoptère des secours, des constructions faites on ne sait comment, et des milliers de gens qui se promènent dans des sites de canyoning dans des conditions de sécurité limites. Il faut arrêter cela !
- Autre sujet : la pauvreté structurelle. Comment l’analysez-vous ?
- C’est le signal que le retour des investissements et des efforts effectués est insuffisant auprès de l’ensemble de la population. Mêmes s’ils ont permis une progression très significative du PIB (Produit intérieur brut) par habitant depuis une dizaine d’années, il reste des poches de pauvreté, des populations très vulnérables, notamment les personnes âgées. Leur taux de précarité est beaucoup plus élevé que la moyenne nationale. Là aussi, regardons les choses lucidement et essayons CTC et Etat de mettre en place des moyens d’actions pragmatiques et de mobiliser un certain nombre de leviers. Le premier est la nécessité de mieux accompagner les personnes qui sont en situation de précarité et de les aider à faire valoir leurs droits sur la couverture maladie ou le RSA (Revenu de solidarité active). Sur le continent, l’action des pouvoirs publics est prolongée par les associations. Le réseau associatif étant moins dense en Corse, il faut compenser. Le second levier est le logement social.
- N’est-ce pas le point noir en Corse ?
- Oui ! Le logement social en Corse est, à la fois, insuffisant et inadapté. Il faudrait, idéalement, augmenter de 40 à 45 % le nombre de logements sociaux pour répondre à la demande et revoir la structure des logements. Il y a une forte demande de petites surfaces, des T1 et T2, qui ne représentent que 15% de l’offre. Il faut apporter des réponses concrètes qui permettent aux gens d’accéder plus facilement à un logement. Quand on met bout à bout un certain nombre de mesures, on peut arriver à améliorer le quotidien.
- L’autre énorme point noir est le taux de chômage. Quelles solutions apporter ?
- Il faut, dans les programmations futures, les contrats de plans à-venir, mettre l’accent sur des projets qui auront un effet fort et démultiplicateur sur l’emploi et l’économie. La Cour des comptes a reproché au PEI (Plan exceptionnel d’investissement) d’avoir un peu trop saupoudré. Le tourisme représente 24% de la richesse de l’île. Le phénomène de pauvreté s’explique, en partie, par les emplois saisonniers de trois à quatre mois, alors que la Corse a tout pour que la saison touristique dure douze mois. Il faut absolument travailler sur la structuration de l’offre et définir des bonnes stratégies pour que les touristes restent plus longtemps et viennent tout au long de l’année.
- La Corse a tout un millefeuille de fonds à disposition, mais rien ne change vraiment. Le statut d’île-montagne sera-t-il suffisant pour revitaliser l’intérieur ?
- Les fonds existent. Il reste quand même 450 millions € à programmer sur le 4ème avenant du PEI ! La Corse a deux ans pour faire la programmation et jusqu’en 2024 pour dépenser l’argent. Le PEI aurait du s’arrêter, la loi NOTRe a prolongé le délai de consommation des crédits. Cela veut dire que le problème est moins l’insuffisance des crédits que l’insuffisance des projets ! Etat et collectivités ont cette même responsabilité de faire émerger des projets. Un certain nombre d’investissements, totalement indispensables, ont été faits, mais n’ont pas un impact économique immédiat, notamment l’effort considérable en matière d’assainissement. La remise aux normes des stations d’épuration a coûté des dizaines de millions €. Il faut, maintenant, franchir de nouvelles étapes et définir de vrais bons projets structurants.
- Lesquels ?
- Par exemple, les opérations Grand Site. C’est vraiment ce qu’il faut en Corse. Elles protègent les sites de la surfréquentation et en font de vrais pôles d’attraction touristique en structurant une offre de haute qualité. La Corse a tout ce qu’il faut pour faire, non pas deux opérations Grand Site, Patrimonio et le site de la Parata, mais au moins dix ou douze ! Il est anormal que des sites aussi prestigieux que Calvi et Bonifacio ne soient pas traités sous cette forme. Va-t-on laisser les autocars et les voitures s’embouteiller dans des sites aussi exceptionnels ? Non ! Il faut trouver le moyen de gérer cet afflux. Cela contribuera au développement d’une activité touristique très qualitative et très respectueuse du patrimoine et au rayonnement de la culture corse. S’il est maîtrisé, le tourisme n’est pas une agression, mais un moyen de faire parler de soi et de rayonner. Les aiguilles de Bavella en été, c’est des voitures partout, y compris sur l’emplacement réservé à l’hélicoptère des secours, des constructions faites on ne sait comment, et des milliers de gens qui se promènent dans des sites de canyoning dans des conditions de sécurité limites. Il faut arrêter cela !
Terrorisme : « Aucune menace particulière identifiée en Corse à ce jour »
- L’actualité des derniers mois a avivé des tensions communautaires dans l’île. Comment appréhendez-vous cette situation ?
- Il faut être très vigilant. Ces phénomènes, qui se sont produits au jardin de l’Empereur, à Sisco…, il faut les analyser précisément, sans donner prise à des clichés : « Les Corses, tous racistes, tous violents… ». En Corse, des phénomènes de solidarité spontanée se manifestent en réaction à des comportements d’incivilité ou d’actes de petite délinquance, en soi ce n’est pas choquant, c’est même plutôt sain. Ce qu’il faut absolument condamner avec la plus grande fermeté, c’est quand, sur ces réactions de solidarité, se greffent des sentiments et des pulsions, comme la tentation de faire justice soi-même, le racisme et la xénophobie. Les échanges dans les réseaux sociaux à caractère raciste ne doivent faire l’objet d’aucune tolérance, ni d’aucune mansuétude. Le problème de cohésion sociale existe partout. Il y a des singularités en Corse, mais aussi la traduction à une échelle plus petite, donc avec une résonnance plus forte, des phénomènes qui existent sur le continent.
- Des phénomènes liés à la menace terroriste ?
- Oui ! C’est la raison pour laquelle, il y a quelques mois, j’avais organisé à Ajaccio et à Bastia, une réunion d’information - qui, malheureusement, n’a pas eu le succès que j’escomptais -, de tous les acteurs politiques, économiques et sociaux sur les phénomènes de terrorisme. Il ne faut pas confondre le terrorisme islamique et l’islam en général. L’islam est un monde infiniment complexe, traversé de nuances et de fractures profondes. Le terrorisme est issu d’une branche particulière de l’islam, le salafisme qui est lui-même divisé en un salafisme violent et un qui ne l’est pas, mais qui pose d’autres problèmes de compatibilité avec les valeurs de la République. Il faut faire un travail d’éducation et de compréhension des autres, encourager un vivre-ensemble conforme aux valeurs de la République qui sont les meilleurs remparts pour vivre, non pas les uns à côté des autres, mais les uns avec les autres. Le communautarisme, c’est chacun de son côté. A force de vivre sur un modèle communautaire, on finit de passer de l’ignorance de l’autre à la défiance, et de la défiance à l’agression. La société doit permettre des relations apaisées entre les différentes personnes, quelque soient leur origine. C’est le fondement même de la République.
- La Corse court-elle un risque d’attaque terroriste ?
- Le risque zéro n’existe pas en Corse, comme ailleurs. Le risque est latent partout. On est ici mobilisé comme ailleurs. On fait des exercices, y compris des exercices dits de tuerie de masse. On s’entraine et on applique les plans gouvernementaux. On ne laisse aucun signalement au hasard. Toutes les informations, qui nous reviennent, sont traitées et analysées, y compris en mettant en œuvre des moyens assez intrusifs de vérification pour s’assurer que le risque n’existe pas. Dans le même temps, à ce stade et à ce jour, nous n’avons identifié en Corse aucune menace particulière de cette nature pour la sécurité de la population.
Propos recueillis par Nicole MARI.
- L’actualité des derniers mois a avivé des tensions communautaires dans l’île. Comment appréhendez-vous cette situation ?
- Il faut être très vigilant. Ces phénomènes, qui se sont produits au jardin de l’Empereur, à Sisco…, il faut les analyser précisément, sans donner prise à des clichés : « Les Corses, tous racistes, tous violents… ». En Corse, des phénomènes de solidarité spontanée se manifestent en réaction à des comportements d’incivilité ou d’actes de petite délinquance, en soi ce n’est pas choquant, c’est même plutôt sain. Ce qu’il faut absolument condamner avec la plus grande fermeté, c’est quand, sur ces réactions de solidarité, se greffent des sentiments et des pulsions, comme la tentation de faire justice soi-même, le racisme et la xénophobie. Les échanges dans les réseaux sociaux à caractère raciste ne doivent faire l’objet d’aucune tolérance, ni d’aucune mansuétude. Le problème de cohésion sociale existe partout. Il y a des singularités en Corse, mais aussi la traduction à une échelle plus petite, donc avec une résonnance plus forte, des phénomènes qui existent sur le continent.
- Des phénomènes liés à la menace terroriste ?
- Oui ! C’est la raison pour laquelle, il y a quelques mois, j’avais organisé à Ajaccio et à Bastia, une réunion d’information - qui, malheureusement, n’a pas eu le succès que j’escomptais -, de tous les acteurs politiques, économiques et sociaux sur les phénomènes de terrorisme. Il ne faut pas confondre le terrorisme islamique et l’islam en général. L’islam est un monde infiniment complexe, traversé de nuances et de fractures profondes. Le terrorisme est issu d’une branche particulière de l’islam, le salafisme qui est lui-même divisé en un salafisme violent et un qui ne l’est pas, mais qui pose d’autres problèmes de compatibilité avec les valeurs de la République. Il faut faire un travail d’éducation et de compréhension des autres, encourager un vivre-ensemble conforme aux valeurs de la République qui sont les meilleurs remparts pour vivre, non pas les uns à côté des autres, mais les uns avec les autres. Le communautarisme, c’est chacun de son côté. A force de vivre sur un modèle communautaire, on finit de passer de l’ignorance de l’autre à la défiance, et de la défiance à l’agression. La société doit permettre des relations apaisées entre les différentes personnes, quelque soient leur origine. C’est le fondement même de la République.
- La Corse court-elle un risque d’attaque terroriste ?
- Le risque zéro n’existe pas en Corse, comme ailleurs. Le risque est latent partout. On est ici mobilisé comme ailleurs. On fait des exercices, y compris des exercices dits de tuerie de masse. On s’entraine et on applique les plans gouvernementaux. On ne laisse aucun signalement au hasard. Toutes les informations, qui nous reviennent, sont traitées et analysées, y compris en mettant en œuvre des moyens assez intrusifs de vérification pour s’assurer que le risque n’existe pas. Dans le même temps, à ce stade et à ce jour, nous n’avons identifié en Corse aucune menace particulière de cette nature pour la sécurité de la population.
Propos recueillis par Nicole MARI.