Jean Pierre Lanfranchi et François Berlinghi
François Berlinghi : « E Teatrale montre la vitalité de la production théâtrale corse »
- Quel bilan dressez-vous de cette 9ème édition ? Avez-vous atteint les objectifs que vous vous étiez fixés ?
- Nous avons atteint le 1er objectif puisqu’avec 24 spectacles présentés, qui sont, tous, des créations de l’année, nous avons réussi à montrer la variété, la richesse et la vitalité de la production théâtrale corse. Si les troupes sont contentes de venir, c’est que ce festival est un moyen, pour elles, de se faire connaître, de montrer ce qu’elles font et d’obtenir des contrats. C’est une occasion pour les programmateurs insulaires et continentaux de voir et d’acheter des spectacles.
- La fréquentation vous a-t-elle satisfaite ?
- Au niveau de la fréquentation qui était le 2nd objectif, nous avons constaté que le public était, à la fois, plus nombreux et fidèle. Les gens reviennent d’une année sur l’autre, certains assistent à plusieurs spectacles. Mais si la fréquentation monte en puissance, elle ne croît pas autant qu’on le voudrait. On regrette que les gens ne viennent pas plus voir des spectacles vivants et ne s’intéressent pas plus à ce qui se passe chez nous. C’est dommage !
- Le théâtre insulaire manque-t-il de notoriété ?
- Un des objectifs du festival E Teatrale est de montrer la qualité du théâtre corse et de faire en sorte que les gens viennent le voir. C’est vrai que le public se déplace plus difficilement pour une production locale que pour une grande vedette ou une pièce de boulevard. Mais on y arrive. Des troupes, comme U Teatrinu ou Unita Teatrale, parviennent quasiment à remplir la grande salle du théâtre municipal. La pièce « U Chjarasgetu », présentée il y a un mois et demi, a fait 400 spectateurs, ce n’est quand même pas rien ! Le théâtre doit gagner en notoriété, non seulement dans l’île, mais aussi à l’extérieur. Des productions corses ont été programmées sur le continent parce qu’elles ont été vues lors du festival.
- Que comptez-vous faire pour attirer plus de monde ?
- Cette année, nous avons innové. Nous avons présenté trois spectacles au lycée Giocante de Casabianca, qui étaient ouverts à tous les publics, mais destinés plus spécialement aux scolaires. Le résultat est très intéressant. C’est une piste que nous allons poursuivre. Il y a tout un travail à faire au niveau des collégiens et des lycéens pour les initier au spectacle vivant. Des élèves ont pu assister, mardi, à une lecture de Noël Casale disant les notes d’un archéologue qui a accompagné, contre son gré, Hitler et Mussolini dans une visite de Rome. Ce n’était pas une lecture facile. Les élèves avaient, au programme, la question du fascisme et du totalitarisme qu’ils ont pu aborder autrement que dans un livre. L’entendre raconter par un comédien prend un autre relief et une autre réalité.
- Le but n’est-il pas aussi de les éduquer au théâtre pour en faire de futurs spectateurs ?
- Nous l’espérons. Nous aimerions que ces spectacles, que nous leur proposons, leur donnent le goût d’aller au théâtre.
- Quel est l’état de la production en langue corse ?
- C’est très variable. Il est évident que le théâtre est un bon moyen de faire vivre la langue. Mais, il se trouve que, cette année, seulement deux spectacles ont été présentés en langue corse et deux pour le jeune public.
- Comment évolue la qualité des spectacles ?
- Le théâtre corse n’est pas très vieux, il date, au mieux, d’une trentaine années. Les troupes ont foisonné, les cours se sont développés. De façon évidente, on note, chaque année, une amélioration des productions. Les programmateurs du continent, qui assistent au festival pour voir ce qui se fait en Corse, constatent eux-aussi une progression de la qualité.
- A quel niveau se fait cette progression ?
- Au niveau du jeu des comédiens qui travaillent et s’investissent de plus en plus sérieusement, beaucoup se sont professionnalisés. Egalement au niveau de la scénographie et de la mise en scène où des progrès importants ont été réalisés.
- Le festival a-t-il un impact sur la production locale ?
- Tout à fait. Il est créateur de pièces. La pièce « Moins 2 » de Samuel Benchetrit a été montée par Jacques Tresse spécialement pour l’occasion. Pour certaines troupes, le festival constitue même un objectif. Elles font en sorte que leurs pièces soient prêtes pour ce moment-là. Ce fut, par exemple, le cas de la pièce « L’enclos de l’éléphant » de Paul Grenier.
- Un théâtre est vivant aussi par son ancrage dans un territoire. Les thèmes abordés reflètent-ils la société corse et ses problèmes ?
- Tout à fait. Le théâtre, c’est la vie. Quelque soit le thème abordé, on retrouve ce qui fait les hommes : l’amour, la haine, la violence, tous les problèmes que nous pouvons connaître. Par exemple, les deux pièces présentées en langue corse, « U Chjarasgetu » et « A Sintenza », traitent des problèmes que connait la Corse aujourd’hui. « U Chjarasgetu », bien que le texte ait été écrit en 1905 par Tchekhov, est extrêmement d’actualité. On y parle de gens qui sont obligés de vendre leurs terres, lesquelles sont achetées par des industriels ou des touristes. C’est une pièce très prémonitoire par rapport à ce qui se passe, aujourd’hui, partout et, en particulier, en Corse. D’une façon générale, le théâtre est un voyage qui nous emmène sur des chemins que l’on n’a peut-être pas l’habitude de fréquenter, qui nous fait voir des choses, poétiques ou au contraire très sérieuses, que l’on ne voit pas dans la vie de tous les jours.
Propos recueillis par Nicole MARI
- Quel bilan dressez-vous de cette 9ème édition ? Avez-vous atteint les objectifs que vous vous étiez fixés ?
- Nous avons atteint le 1er objectif puisqu’avec 24 spectacles présentés, qui sont, tous, des créations de l’année, nous avons réussi à montrer la variété, la richesse et la vitalité de la production théâtrale corse. Si les troupes sont contentes de venir, c’est que ce festival est un moyen, pour elles, de se faire connaître, de montrer ce qu’elles font et d’obtenir des contrats. C’est une occasion pour les programmateurs insulaires et continentaux de voir et d’acheter des spectacles.
- La fréquentation vous a-t-elle satisfaite ?
- Au niveau de la fréquentation qui était le 2nd objectif, nous avons constaté que le public était, à la fois, plus nombreux et fidèle. Les gens reviennent d’une année sur l’autre, certains assistent à plusieurs spectacles. Mais si la fréquentation monte en puissance, elle ne croît pas autant qu’on le voudrait. On regrette que les gens ne viennent pas plus voir des spectacles vivants et ne s’intéressent pas plus à ce qui se passe chez nous. C’est dommage !
- Le théâtre insulaire manque-t-il de notoriété ?
- Un des objectifs du festival E Teatrale est de montrer la qualité du théâtre corse et de faire en sorte que les gens viennent le voir. C’est vrai que le public se déplace plus difficilement pour une production locale que pour une grande vedette ou une pièce de boulevard. Mais on y arrive. Des troupes, comme U Teatrinu ou Unita Teatrale, parviennent quasiment à remplir la grande salle du théâtre municipal. La pièce « U Chjarasgetu », présentée il y a un mois et demi, a fait 400 spectateurs, ce n’est quand même pas rien ! Le théâtre doit gagner en notoriété, non seulement dans l’île, mais aussi à l’extérieur. Des productions corses ont été programmées sur le continent parce qu’elles ont été vues lors du festival.
- Que comptez-vous faire pour attirer plus de monde ?
- Cette année, nous avons innové. Nous avons présenté trois spectacles au lycée Giocante de Casabianca, qui étaient ouverts à tous les publics, mais destinés plus spécialement aux scolaires. Le résultat est très intéressant. C’est une piste que nous allons poursuivre. Il y a tout un travail à faire au niveau des collégiens et des lycéens pour les initier au spectacle vivant. Des élèves ont pu assister, mardi, à une lecture de Noël Casale disant les notes d’un archéologue qui a accompagné, contre son gré, Hitler et Mussolini dans une visite de Rome. Ce n’était pas une lecture facile. Les élèves avaient, au programme, la question du fascisme et du totalitarisme qu’ils ont pu aborder autrement que dans un livre. L’entendre raconter par un comédien prend un autre relief et une autre réalité.
- Le but n’est-il pas aussi de les éduquer au théâtre pour en faire de futurs spectateurs ?
- Nous l’espérons. Nous aimerions que ces spectacles, que nous leur proposons, leur donnent le goût d’aller au théâtre.
- Quel est l’état de la production en langue corse ?
- C’est très variable. Il est évident que le théâtre est un bon moyen de faire vivre la langue. Mais, il se trouve que, cette année, seulement deux spectacles ont été présentés en langue corse et deux pour le jeune public.
- Comment évolue la qualité des spectacles ?
- Le théâtre corse n’est pas très vieux, il date, au mieux, d’une trentaine années. Les troupes ont foisonné, les cours se sont développés. De façon évidente, on note, chaque année, une amélioration des productions. Les programmateurs du continent, qui assistent au festival pour voir ce qui se fait en Corse, constatent eux-aussi une progression de la qualité.
- A quel niveau se fait cette progression ?
- Au niveau du jeu des comédiens qui travaillent et s’investissent de plus en plus sérieusement, beaucoup se sont professionnalisés. Egalement au niveau de la scénographie et de la mise en scène où des progrès importants ont été réalisés.
- Le festival a-t-il un impact sur la production locale ?
- Tout à fait. Il est créateur de pièces. La pièce « Moins 2 » de Samuel Benchetrit a été montée par Jacques Tresse spécialement pour l’occasion. Pour certaines troupes, le festival constitue même un objectif. Elles font en sorte que leurs pièces soient prêtes pour ce moment-là. Ce fut, par exemple, le cas de la pièce « L’enclos de l’éléphant » de Paul Grenier.
- Un théâtre est vivant aussi par son ancrage dans un territoire. Les thèmes abordés reflètent-ils la société corse et ses problèmes ?
- Tout à fait. Le théâtre, c’est la vie. Quelque soit le thème abordé, on retrouve ce qui fait les hommes : l’amour, la haine, la violence, tous les problèmes que nous pouvons connaître. Par exemple, les deux pièces présentées en langue corse, « U Chjarasgetu » et « A Sintenza », traitent des problèmes que connait la Corse aujourd’hui. « U Chjarasgetu », bien que le texte ait été écrit en 1905 par Tchekhov, est extrêmement d’actualité. On y parle de gens qui sont obligés de vendre leurs terres, lesquelles sont achetées par des industriels ou des touristes. C’est une pièce très prémonitoire par rapport à ce qui se passe, aujourd’hui, partout et, en particulier, en Corse. D’une façon générale, le théâtre est un voyage qui nous emmène sur des chemins que l’on n’a peut-être pas l’habitude de fréquenter, qui nous fait voir des choses, poétiques ou au contraire très sérieuses, que l’on ne voit pas dans la vie de tous les jours.
Propos recueillis par Nicole MARI
Jean Pierre Lanfranchi : « Le festival a trouvé sa vitesse de croisière »