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En Corse, une espèce endémique de chauve-souris menacée d’extinction


Cécile Orsoni le Dimanche 25 Août 2024 à 19:37

En Corse, 22 espèces de chauve-souris ont été identifiées. Parmi elles, le Myostis Nustrale, une espèce endémique, menacée de disparaître. Ces gardiennes de la nuit sont pourtant essentielles au bon fonctionnement de l’écosystème. Le groupe Chiroptères Corse tire la sonnette d’alarme.



Photo d'illustration Pixabay
Photo d'illustration Pixabay
Depuis plus de trente ans, le groupe Chiroptères Corse, basé à Corte, étudie les chauves-souris dans les quatre coins de l’île. Depuis la création de l’association, 22 espèces ont été répertoriées. Parmi leur découverte phare, une espèce endémique récemment identifiée suite à des tests génétiques : le Murin de Corse ou Myostis Nustrale. Elle vit dans des territoires montagneux, comme Evisa, Corte, Ghisoni et Conca. Kate Derrick, chargée d’études au sein de l’association Chiroptères Corse, explique : « Elle est génétiquement distincte de celles que l’on retrouve sur le continent et n’a pas la même tête que les autres. Elle est difficile à suivre, car elle se niche dans des failles rocheuses. On estime qu’elles sont moins de mille à l’échelle insulaire. » Problème : malgré les différentes lois qui protègent les chauves-souris en Europe et sur le plan national, le Myostis Nustrale est en danger d’extinction. Selon Kate Derrick, plusieurs facteurs sont en cause : « Le changement climatique, l’utilisation de pesticides, la pollution lumineuse, la destruction de leurs gîtes, la fragmentation des paysages, comme la dégradation des cours d’eau, des arbres, ou les constructions de routes qui se multiplient. Cela entrave les déplacements entre leur gîte et l’endroit où elles chassent. »

Ces gardiennes de la nuit sont également victimes de destructions parfois volontaires, d’objets de craintes et de préjugés. « On a souvent peur de ces animaux, notamment qu’elles s’accrochent dans les cheveux. Des légendes persistent, comme quoi elles transmettraient des maladies, mais tout cela est faux. Seuls dix cas ont été répertoriés en France, et cette maladie n’existe pas en Corse. Quand elles s’installent dans les greniers, les combles, les joints ou les volets des maisons, elles se font chasser ou tuer. Elles sont inoffensives, ce ne sont que des femelles qui s’installent le temps d’un été pour s’occuper de leurs petits. Le mieux, c’est d’attendre qu’elles partent d’elles-mêmes », conseille Kate Derrick. L’ensemble de ces facteurs risquent ainsi de favoriser leur extinction. Pourtant, elles sont essentielles au fonctionnement de l’écosystème. « Elles remplissent chacune leur rôle. Les pipistrelles mangent des insectes comme les moustiques qui nous embêtent en été, et permettent de réguler les populations. D'autres se nourrissent aussi de nuisibles et de ravageurs de cultures comme les mouches ou les papillons, elles sont donc les alliées des agriculteurs. Il faut laisser faire la nature, mais parfois l’homme a du mal avec cela. » regrette Kate Derrick.

En Corse, outre le Myostis Nustrale, deux autres espèces sont en danger : le Murin de Capaccini, qui chasse sur les cours d’eau et qui est sensible à la pollution lumineuse, ainsi que le Rhinolophus Euryale, dont la population commence à diminuer. L’association multiplie les initiatives pour les protéger : « Nous travaillons actuellement à la création de corridors sombres pour que les animaux puissent se déplacer correctement. Ces couloirs protégeront également l’ensemble de la faune. Nous travaillons également sur les exploitations, car les agriculteurs ont compris que les chauves-souris leur étaient utiles. Pour l’instant, nous sommes concentrés sur la Balagne, mais nous aimerions élargir cette action sur l’ensemble de la Corse. » Enfin, l’association mène une large campagne de sensibilisation. Ce samedi, à 19h30, à l’occasion de "La nuit européenne de la chauve-souris", elle organise une projection de film sur la tour de Campomoro. Il s’agit du long-métrage « Les ailes du maquis », tourné en Corse, qui raconte l’histoire du Myostis Nustrale et qui retrace le travail mené par le comité depuis trente ans. L’association a également mis en place le numéro SOS Chauve Souris, (0495474594) : « Si une chauve-souris est blessée, vous pouvez nous appeler et nous vous donnerons des conseils, puis nous prendrons éventuellement contact avec le centre de soins à Oletta. Nous pouvons aussi intervenir dans les maisons, sans toutefois déloger les animaux. » prévient Kate Derrick.