Les deux leaders et élus territoriaux de Femu a Corsica, Gilles Simeoni, maire de Bastia, et Jean Christophe Angelini, conseiller général de Porto Vecchio.
- Quel bilan tirez-vous des élections municipales ?
- Le bilan est, globalement, très positif. Des centaines de femmes et d’hommes, issus de notre mouvement, ont été élus en qualité de maires, de conseillers municipaux ou communautaires dans toutes les régions de Corse. Ces élus démontrent la force et l’étendue de notre implantation sur tout le territoire. Au-delà, ils prouvent combien nos idées et notre vision stratégique ont progressé lors de ces dernières années.
- Que vous inspire le sondage d’Opinionway qui dit que près de 74% des Corses valident l’union que vous avez initiée à Bastia ?
- Je suis heureux des résultats de ce sondage qui confirment les remontées que nous avons eu du terrain. L’élection de Bastia a été passionnément suivie dans la Corse entière. Globalement, son résultat est interprété comme un signe d’espoir très fort. Cela ne peut que nous réjouir et nous encourager à réussir politiquement dans les semaines et les mois à-venir. Nous souhaitons que, dans ce type de contrat politique, toutes les forces nationalistes soient partie prenante. Cela n’a pu être le cas à Bastia, les conditions politiques n’ayant pas été réunies.
- Que faut-il faire pour qu’elles le soient ?
- A chacun de faire sa part de chemin afin que ce qui n’a pas été possible, hier, à Bastia, le devienne lors des prochaines échéances électorales. Je crois que l’accord politique de Bastia est très important. Ses conséquences, qui restent encore à décliner et dont on percevra mieux la portée dans quelque temps, sont fondamentales.
- Quelles sont-elles, selon vous ?
- Elles sont de deux ordres. Premièrement, notre démarche a permis de conquérir démocratiquement une citadelle historique du système claniste. Cette citadelle a perduré sur un système que nous avons dénoncé et qui a été cautionné pendant des décennies par l’Etat qui s’est abstenu de le sanctionner ou de le combattre. Plus fondamentalement, cette citadelle a défendu une vision très conservatrice et réactionnaire de la société corse en étant historiquement opposée à toutes les avancées : l’université, la langue, le statut particulier, le processus de Matignon, les Arrêtés Miot… Deuxièmement, au-delà de la victoire démocratique, il y a aussi le contenu politique de l’accord de mandature.
- Un accord que vos adversaires et maints observateurs ont qualifié de « contre-nature ». Comment expliquez-vous ce clivage avec le ressenti de la population ?
- Ceux, qui considèrent que notre victoire est due à une alliance contre-nature, sont justement ceux qui ont un intérêt politique direct au maintien du conservatisme ! Il ne faut pas aller chercher plus loin ! Même s’il y a des désaccords ou des différences d’appréciation entre les partenaires de cette nouvelle majorité municipale, il n’empêche qu’ensemble nous avons envoyé un signe d’espoir fort. Nous avons passé un contrat politique très clair qui place, au cœur de chacun des actes de la vie communale, la pratique réelle de la démocratie. Cette exigence est en rupture totale avec ce qui se faisait avant. Ce que nous vivons au quotidien permet de le mesurer à chaque pas. Ceux, qui défendent l’ancien système, cherchent des arguments pour justifier des alliances apparemment très lisibles au plan politique, mais objectivement construites sur des pratiques totalement antidémocratiques.
- Ce type d’union et de contrat de mandature peut-il être décliné sur d’autres scrutins, notamment territorial ?
- La construction faite à Bastia l’a été à l’occasion d’une élection municipale. Elle ne peut être transposable à d’autres niveaux, purement et simplement. Par contre, l’état d’esprit, la logique politique et la méthode, qui ont permis la victoire, peuvent, à notre sens, être largement transposés à d’autres occasions, notamment à d’autres échéances électorales.
- Ce qui signifie ?
- L’union bastiaise a donné un signal d’espoir. Elle a permis de démontrer que l’on pouvait démocratiquement, avec une démarche validée par une très grande majorité d’électeurs, changer profondément les choses. Ce signal d’espoir va être, à notre avis, entendu et répercuté dans toute la Corse. C’est, en tous cas, le souhait que je forme.
- Vous dites que ces élections marquent la fin d’un cycle. Qu’entendez-vous par là ?
- Nous avons été élus aux Territoriales de mars 2010 sur une ligne stratégique claire, marquée, à la fois, par la fidélité au fil historique de la lutte du peuple corse pour son droit à l’existence et par une volonté d’ouverture. Les idées qui étaient, hier, défendues par les seuls Nationalistes, sont, aujourd’hui, objectivement majoritaires au sein de la société corse. Nous voulions concrétiser cette évolution en proposant des plateformes de progrès et des rapprochements avec les forces progressistes. Cette idée, que nous avons mis au cœur de notre campagne électorale de 2010 et de notre stratégie, a été largement validée depuis.
- De quelle manière ?
- Elle a, notamment, permis des votes historiques à l’Assemblée de Corse (CTC), qui sont intervenus, tantôt à l’unanimité, tantôt à une très large majorité : le vote sur le PADDUC (Plan d’aménagement et de développement durable de la Corse), le statut de coofficialité de la langue, la politique foncière et le statut de résident, les Arrêtés Miot et le transfert de la compétence fiscale... On peut, aujourd’hui, considérer que les Corses et les élus de la CTC ont fait leur part de chemin. Maintenant, la balle est dans le camp de l’Etat. C’est la raison pour laquelle nous voulons, une fois encore et avec une solennité particulière, l'interpeller en lui disant qu’il doit changer fondamentalement de politique en Corse !
- Vous faites un constat très dur des relations entre la Corse et l’Etat. Que reprochez-vous concrètement à Paris ?
- Le constat est dur, mais objectif. Il faut, quand même, rappeler que si la Corse est, aujourd’hui, dans une situation très difficile au plan économique, social et culturel et, quelquefois, dramatique au plan sociétal, le premier responsable historique de cette situation est l’Etat. Or, celui-ci n’assume absolument pas sa part majeure de responsabilité. De façon plus politique et plus directe, par rapport au processus en cours, il est clair que l’Etat joue la montre et manœuvre. Il refuse totalement d’entrer dans une véritable logique de dialogue.
- C’est-à-dire ?
- Le dialogue se construit avec des objectifs partagés et un calendrier fixant des points d’étapes et d’évaluation. Des éléments qui, aujourd’hui, font cruellement défaut ! Il y a fort à parier que le projet de loi sur la décentralisation, à paraître dans les prochains jours et dont un chapitre doit être consacré à la Corse, confirmera que le compte politique n’y est pas et que l’Etat n’a, pour l’heure, aucune volonté de s’engager dans un véritable processus de dialogue. Les choses ne peuvent pas durer ainsi !
- Quel appel lancez-vous au nouveau gouvernement ?
- Nous avons fait le choix clair et irréversible de l’action démocratique. Ce choix ne sera, en aucun cas, remis en cause. Nous savons, aussi, que dans les conditions politiques actuelles, la solution politique globale et, donc, la paix dans ce pays, sont à portée de main. L’Etat doit faire sa part de chemin. Il se refuse jusqu’à aujourd’hui à le faire. Il doit, impérativement, changer d’attitude. Des votes sont intervenus à la CTC. A l’Etat de dire clairement, comment et sous quel calendrier, il va les prendre en compte ! Nous demandons un engagement fort et public au plus haut niveau, au nouveau gouvernement et au président de la République, et un calendrier qui nous permettrait de savoir, sous quel délai, la révision constitutionnelle, et les corollaires politiques et juridiques qu’elle implique, seront validés.
Propos recueillis par Nicole MARI
- Le bilan est, globalement, très positif. Des centaines de femmes et d’hommes, issus de notre mouvement, ont été élus en qualité de maires, de conseillers municipaux ou communautaires dans toutes les régions de Corse. Ces élus démontrent la force et l’étendue de notre implantation sur tout le territoire. Au-delà, ils prouvent combien nos idées et notre vision stratégique ont progressé lors de ces dernières années.
- Que vous inspire le sondage d’Opinionway qui dit que près de 74% des Corses valident l’union que vous avez initiée à Bastia ?
- Je suis heureux des résultats de ce sondage qui confirment les remontées que nous avons eu du terrain. L’élection de Bastia a été passionnément suivie dans la Corse entière. Globalement, son résultat est interprété comme un signe d’espoir très fort. Cela ne peut que nous réjouir et nous encourager à réussir politiquement dans les semaines et les mois à-venir. Nous souhaitons que, dans ce type de contrat politique, toutes les forces nationalistes soient partie prenante. Cela n’a pu être le cas à Bastia, les conditions politiques n’ayant pas été réunies.
- Que faut-il faire pour qu’elles le soient ?
- A chacun de faire sa part de chemin afin que ce qui n’a pas été possible, hier, à Bastia, le devienne lors des prochaines échéances électorales. Je crois que l’accord politique de Bastia est très important. Ses conséquences, qui restent encore à décliner et dont on percevra mieux la portée dans quelque temps, sont fondamentales.
- Quelles sont-elles, selon vous ?
- Elles sont de deux ordres. Premièrement, notre démarche a permis de conquérir démocratiquement une citadelle historique du système claniste. Cette citadelle a perduré sur un système que nous avons dénoncé et qui a été cautionné pendant des décennies par l’Etat qui s’est abstenu de le sanctionner ou de le combattre. Plus fondamentalement, cette citadelle a défendu une vision très conservatrice et réactionnaire de la société corse en étant historiquement opposée à toutes les avancées : l’université, la langue, le statut particulier, le processus de Matignon, les Arrêtés Miot… Deuxièmement, au-delà de la victoire démocratique, il y a aussi le contenu politique de l’accord de mandature.
- Un accord que vos adversaires et maints observateurs ont qualifié de « contre-nature ». Comment expliquez-vous ce clivage avec le ressenti de la population ?
- Ceux, qui considèrent que notre victoire est due à une alliance contre-nature, sont justement ceux qui ont un intérêt politique direct au maintien du conservatisme ! Il ne faut pas aller chercher plus loin ! Même s’il y a des désaccords ou des différences d’appréciation entre les partenaires de cette nouvelle majorité municipale, il n’empêche qu’ensemble nous avons envoyé un signe d’espoir fort. Nous avons passé un contrat politique très clair qui place, au cœur de chacun des actes de la vie communale, la pratique réelle de la démocratie. Cette exigence est en rupture totale avec ce qui se faisait avant. Ce que nous vivons au quotidien permet de le mesurer à chaque pas. Ceux, qui défendent l’ancien système, cherchent des arguments pour justifier des alliances apparemment très lisibles au plan politique, mais objectivement construites sur des pratiques totalement antidémocratiques.
- Ce type d’union et de contrat de mandature peut-il être décliné sur d’autres scrutins, notamment territorial ?
- La construction faite à Bastia l’a été à l’occasion d’une élection municipale. Elle ne peut être transposable à d’autres niveaux, purement et simplement. Par contre, l’état d’esprit, la logique politique et la méthode, qui ont permis la victoire, peuvent, à notre sens, être largement transposés à d’autres occasions, notamment à d’autres échéances électorales.
- Ce qui signifie ?
- L’union bastiaise a donné un signal d’espoir. Elle a permis de démontrer que l’on pouvait démocratiquement, avec une démarche validée par une très grande majorité d’électeurs, changer profondément les choses. Ce signal d’espoir va être, à notre avis, entendu et répercuté dans toute la Corse. C’est, en tous cas, le souhait que je forme.
- Vous dites que ces élections marquent la fin d’un cycle. Qu’entendez-vous par là ?
- Nous avons été élus aux Territoriales de mars 2010 sur une ligne stratégique claire, marquée, à la fois, par la fidélité au fil historique de la lutte du peuple corse pour son droit à l’existence et par une volonté d’ouverture. Les idées qui étaient, hier, défendues par les seuls Nationalistes, sont, aujourd’hui, objectivement majoritaires au sein de la société corse. Nous voulions concrétiser cette évolution en proposant des plateformes de progrès et des rapprochements avec les forces progressistes. Cette idée, que nous avons mis au cœur de notre campagne électorale de 2010 et de notre stratégie, a été largement validée depuis.
- De quelle manière ?
- Elle a, notamment, permis des votes historiques à l’Assemblée de Corse (CTC), qui sont intervenus, tantôt à l’unanimité, tantôt à une très large majorité : le vote sur le PADDUC (Plan d’aménagement et de développement durable de la Corse), le statut de coofficialité de la langue, la politique foncière et le statut de résident, les Arrêtés Miot et le transfert de la compétence fiscale... On peut, aujourd’hui, considérer que les Corses et les élus de la CTC ont fait leur part de chemin. Maintenant, la balle est dans le camp de l’Etat. C’est la raison pour laquelle nous voulons, une fois encore et avec une solennité particulière, l'interpeller en lui disant qu’il doit changer fondamentalement de politique en Corse !
- Vous faites un constat très dur des relations entre la Corse et l’Etat. Que reprochez-vous concrètement à Paris ?
- Le constat est dur, mais objectif. Il faut, quand même, rappeler que si la Corse est, aujourd’hui, dans une situation très difficile au plan économique, social et culturel et, quelquefois, dramatique au plan sociétal, le premier responsable historique de cette situation est l’Etat. Or, celui-ci n’assume absolument pas sa part majeure de responsabilité. De façon plus politique et plus directe, par rapport au processus en cours, il est clair que l’Etat joue la montre et manœuvre. Il refuse totalement d’entrer dans une véritable logique de dialogue.
- C’est-à-dire ?
- Le dialogue se construit avec des objectifs partagés et un calendrier fixant des points d’étapes et d’évaluation. Des éléments qui, aujourd’hui, font cruellement défaut ! Il y a fort à parier que le projet de loi sur la décentralisation, à paraître dans les prochains jours et dont un chapitre doit être consacré à la Corse, confirmera que le compte politique n’y est pas et que l’Etat n’a, pour l’heure, aucune volonté de s’engager dans un véritable processus de dialogue. Les choses ne peuvent pas durer ainsi !
- Quel appel lancez-vous au nouveau gouvernement ?
- Nous avons fait le choix clair et irréversible de l’action démocratique. Ce choix ne sera, en aucun cas, remis en cause. Nous savons, aussi, que dans les conditions politiques actuelles, la solution politique globale et, donc, la paix dans ce pays, sont à portée de main. L’Etat doit faire sa part de chemin. Il se refuse jusqu’à aujourd’hui à le faire. Il doit, impérativement, changer d’attitude. Des votes sont intervenus à la CTC. A l’Etat de dire clairement, comment et sous quel calendrier, il va les prendre en compte ! Nous demandons un engagement fort et public au plus haut niveau, au nouveau gouvernement et au président de la République, et un calendrier qui nous permettrait de savoir, sous quel délai, la révision constitutionnelle, et les corollaires politiques et juridiques qu’elle implique, seront validés.
Propos recueillis par Nicole MARI
Les élus municipaux et territoriaux et les militants de Femu a Corsica autour de leurs deux leaders, Gilles Simeoni et Jean Christophe Angelini.
A suivre demain : l'interview de Jean-Christophe Angelini