- En quoi cette rentrée parlementaire européenne est-elle si importante ?
- C’est vrai que la rentrée 2012 est très importante. Les programmes européens de développement régional et de politique agricole commune se déclinent sur 7 ans. Nous sommes sur la période 2007-2013, donc la prochaine période sera 2014-2020. La Commission européenne va négocier, avec chaque région, un programme spécifique durant l’année 2013 pour être prête au 1er janvier 2014. Elle va le faire sur les bases de règlements qui seront discutés et votés entre le dernier trimestre 2012 et le 1er trimestre 2013. Donc, les 6 mois qui viennent sont très chargés et auront beaucoup de conséquences.
- Que va-t-il se passer pour le développement régional ?
- Le Parlement européen a défini ses priorités. Nous rentrons dans un trilogue, c’est-à-dire un dialogue à trois composantes entre les Etats, le Parlement européen et la Commission pour essayer de rapprocher les points de vue et obtenir une négociation et un compromis valable. Le vote du Parlement est prévu, selon le calendrier officiel, en décembre. Il interviendra plus probablement en mars parce qu’il y a beaucoup de choses à régler qui nécessiteront nombre de navettes et d’échanges entre les institutions. Ce grand travail parlementaire va fixer les cadres du règlement qui permettront, ensuite, à chaque région de négocier son contrat et de solliciter des fonds européens sur tel ou tel domaine ou telle ou telle priorité.
- Que se prépare-t-il au niveau de la PAC ?
- La PAC se compose de deux piliers : le soutien aux revenus des agriculteurs avec des fonds qui leur sont attribués directement et le soutien au développement rural. Celui-ci peut être, en Corse, largement conforté. Pour cela, il est important que l’Assemblée de Corse et l’ODARC (Office de développement agricole et rural de la Corse) puissent mettre en place les mesures qui conviennent et bénéficier des fonds européens qui sont importants. Une délégation corse, formée du président de la Chambre d’agriculture et d’agriculteurs, va monter à Bruxelles pour une conférence de presse organisée, le 18 septembre, par José Bové qui est inquiet.
- Pourquoi est-il inquiet ?
- Les propositions de la Commission concernant la PAC sont intéressantes, mais suscitent beaucoup de résistances qui s’organisent. Les groupes parlementaires majoritaires, notamment le PPE (Parti populaire européen), qui sont aux mains de la FNSEA (Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles) et du Parti socialiste, sont en train d’ôter leur intérêt à nombre de mesures mises en avant par la Commission, comme l’aide aux petits agriculteurs, le maintien des petites fermes, etc. Cette série de mesures est proche de ce que nous espérons pour l’agriculture corse, mais se heurte aux grands lobbies agricoles qui vivent dans des plaines sur d’immenses exploitations très riches et très puissantes.
- Qu’en est-il du statut de région intermédiaire qui est un de vos chevaux de bataille ?
- Des décisions définitives vont être prises. Le vote final interviendra probablement au mois de mars. La procédure a débuté en octobre 2011 où nous avons été saisi d’un rapport sur la période précédente. La problématique est simple. L’Europe considère deux types de régions : les très pauvres, celles de l’Est qui ont adhéré à l’Union européenne (UE) après la chute du Mur de Berlin, et les autres qui sont traitées de façon indifférenciée, que ce soit l’Île de France qui est très riche ou la Corse qui ne l’est pas. Nous avons dit qu’il n’était plus possible de continuer ainsi et nous avons avancé l’idée de région intermédiaire. La Commission a repris cette idée dans sa proposition, le Parlement l’a votée très largement malgré des oppositions importantes. Maintenant, il faut que les Etats l’acceptent. Donc, il va y avoir une réunion du Conseil européen qui prendra position.
- Les Etats y sont-ils majoritairement favorables ?
- Certains sont pour, d’autres contre, d’autres font semblant d’être pour comme la France. Cette proposition est mise en balance avec d’autres. Certains pays lâchent du lest sur le FEDER, mais pas sur la PAC. L’Allemagne n’accepte les régions intermédiaires qu’avec la contrepartie de pouvoir modifier la PAC. Or, pour les Français, la PAC est inviolable, ils préfèrent sacrifier les régions intermédiaires. Tout cela va être décidé, ces jours-ci.
- Qu’est-ce que ce statut intermédiaire apporterait concrètement ?
- C’est tout simple. Au lieu d’avoir une dotation qui, en moyenne générale, sera, peut-être, de 200 € par habitant sur la période, la dotation sera de 600 €. Ça compte ! Concrètement, cela signifie plus de crédits et plus de possibilités d’intervention. Des domaines, qui sont exclus de l’intervention européenne, pourront, là, être pris en considération. Ensuite, les cofinancements seront meilleurs et passeront de 50% de fonds européens à 66%. Les opérations seront donc plus faciles à financer avec moins de recours aux finances publiques de la région, du département ou des communes. Ce programme est, à la fois, plus souple, mieux financé en masse et plus facile à financer projet par projet.
- Combien y aurait-il de régions intermédiaires ?
- Les régions intermédiaires sont celles comprises entre 75% et 90% du PIB (Produit intérieur brut) moyen européen. Il y aura certainement une gradation selon qu’une région est proche de la limite basse ou de la limite haute. La Corse se situe plutôt dans la fraction des plus de 80%. Il y aurait, en tout, une quarantaine de régions intermédiaires en Europe, dont une douzaine en France.
- Une autre de vos priorités est l’espace méditerranéen. De quoi s’agit-il ?
- J’ai pu rédiger et obtenir le vote à 610 voix sur 680 d’un rapport allant dans le sens de la création d’une macro-région en Méditerranée. C’est-à-dire que l’UE actionne, à partir d’elle-même, une démarche de regroupement de toutes les collectivités de Méditerranée pour leur permettre d’élaborer un projet de développement cohérent de l’espace méditerranéen dans ses limites européennes, mais aussi avec son voisinage, à l’Est avec la Turquie et le Moyen-Orient, au Sud avec le Maghreb. La Corse est plus concernée par cette 2nde dimension.
- Comment cet espace va-t-il s’articuler ?
- Le Parlement a voté le texte. Sur la base de ce vote, la Commission européenne va proposer au Conseil européen une démarche de mise en place d’une stratégie macro-régionale en Méditerranée. La 1ère étape concerne la zone adriatico-ionienne où les choses sont déjà avancées sur le terrain, les collectivités se sont rencontrées et se sont mises d’accord sur un programme de développement. Les collectivités de la Méditerranée occidentale, dont la Corse fait partie, seront invitées à le faire à leur tour et à monter un programme de coopération.
- De quel type de coopération s’agit-il ?
- Une coopération, soit environnementale parce que la Méditerranée pose un problème d’environnement, soit économique, sur les transports, la coopération avec le Sud… Dans ces domaines-là, nous allons essayer de faire en sorte que l’espace méditerranéen européen proprement dit, c’est-à-dire 150 millions d’habitants sur les 500 millions qui vivent autour de la Méditerranée, soit, d’abord, mieux coordonné et mieux organisé. Ensuite, à partir de cette action commune, nous proposerons des projets de développement qui intéresseront l’ensemble de l’espace méditerranéen.
- Est-ce une façon de constituer des régions à l’intérieur même de l’Europe ?
- La macro-région est une stratégie de développement régional qui a été mise en œuvre, pour la première fois, en Mer Baltique. Cette mer est polluée et pose un grave problème d’eutrophisation des fonds marins par les algues vertes... La stratégie macro-régionale a donné des résultats intéressants et a permis de faire des progrès considérables en concentrant les financements européens sur un certain nombre de priorités que toutes les régions limitrophes de la Mer Baltique avaient définies au préalable. Il faut arriver à faire la même chose en Méditerranée.
Propos recueillis par Nicole MARI
- C’est vrai que la rentrée 2012 est très importante. Les programmes européens de développement régional et de politique agricole commune se déclinent sur 7 ans. Nous sommes sur la période 2007-2013, donc la prochaine période sera 2014-2020. La Commission européenne va négocier, avec chaque région, un programme spécifique durant l’année 2013 pour être prête au 1er janvier 2014. Elle va le faire sur les bases de règlements qui seront discutés et votés entre le dernier trimestre 2012 et le 1er trimestre 2013. Donc, les 6 mois qui viennent sont très chargés et auront beaucoup de conséquences.
- Que va-t-il se passer pour le développement régional ?
- Le Parlement européen a défini ses priorités. Nous rentrons dans un trilogue, c’est-à-dire un dialogue à trois composantes entre les Etats, le Parlement européen et la Commission pour essayer de rapprocher les points de vue et obtenir une négociation et un compromis valable. Le vote du Parlement est prévu, selon le calendrier officiel, en décembre. Il interviendra plus probablement en mars parce qu’il y a beaucoup de choses à régler qui nécessiteront nombre de navettes et d’échanges entre les institutions. Ce grand travail parlementaire va fixer les cadres du règlement qui permettront, ensuite, à chaque région de négocier son contrat et de solliciter des fonds européens sur tel ou tel domaine ou telle ou telle priorité.
- Que se prépare-t-il au niveau de la PAC ?
- La PAC se compose de deux piliers : le soutien aux revenus des agriculteurs avec des fonds qui leur sont attribués directement et le soutien au développement rural. Celui-ci peut être, en Corse, largement conforté. Pour cela, il est important que l’Assemblée de Corse et l’ODARC (Office de développement agricole et rural de la Corse) puissent mettre en place les mesures qui conviennent et bénéficier des fonds européens qui sont importants. Une délégation corse, formée du président de la Chambre d’agriculture et d’agriculteurs, va monter à Bruxelles pour une conférence de presse organisée, le 18 septembre, par José Bové qui est inquiet.
- Pourquoi est-il inquiet ?
- Les propositions de la Commission concernant la PAC sont intéressantes, mais suscitent beaucoup de résistances qui s’organisent. Les groupes parlementaires majoritaires, notamment le PPE (Parti populaire européen), qui sont aux mains de la FNSEA (Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles) et du Parti socialiste, sont en train d’ôter leur intérêt à nombre de mesures mises en avant par la Commission, comme l’aide aux petits agriculteurs, le maintien des petites fermes, etc. Cette série de mesures est proche de ce que nous espérons pour l’agriculture corse, mais se heurte aux grands lobbies agricoles qui vivent dans des plaines sur d’immenses exploitations très riches et très puissantes.
- Qu’en est-il du statut de région intermédiaire qui est un de vos chevaux de bataille ?
- Des décisions définitives vont être prises. Le vote final interviendra probablement au mois de mars. La procédure a débuté en octobre 2011 où nous avons été saisi d’un rapport sur la période précédente. La problématique est simple. L’Europe considère deux types de régions : les très pauvres, celles de l’Est qui ont adhéré à l’Union européenne (UE) après la chute du Mur de Berlin, et les autres qui sont traitées de façon indifférenciée, que ce soit l’Île de France qui est très riche ou la Corse qui ne l’est pas. Nous avons dit qu’il n’était plus possible de continuer ainsi et nous avons avancé l’idée de région intermédiaire. La Commission a repris cette idée dans sa proposition, le Parlement l’a votée très largement malgré des oppositions importantes. Maintenant, il faut que les Etats l’acceptent. Donc, il va y avoir une réunion du Conseil européen qui prendra position.
- Les Etats y sont-ils majoritairement favorables ?
- Certains sont pour, d’autres contre, d’autres font semblant d’être pour comme la France. Cette proposition est mise en balance avec d’autres. Certains pays lâchent du lest sur le FEDER, mais pas sur la PAC. L’Allemagne n’accepte les régions intermédiaires qu’avec la contrepartie de pouvoir modifier la PAC. Or, pour les Français, la PAC est inviolable, ils préfèrent sacrifier les régions intermédiaires. Tout cela va être décidé, ces jours-ci.
- Qu’est-ce que ce statut intermédiaire apporterait concrètement ?
- C’est tout simple. Au lieu d’avoir une dotation qui, en moyenne générale, sera, peut-être, de 200 € par habitant sur la période, la dotation sera de 600 €. Ça compte ! Concrètement, cela signifie plus de crédits et plus de possibilités d’intervention. Des domaines, qui sont exclus de l’intervention européenne, pourront, là, être pris en considération. Ensuite, les cofinancements seront meilleurs et passeront de 50% de fonds européens à 66%. Les opérations seront donc plus faciles à financer avec moins de recours aux finances publiques de la région, du département ou des communes. Ce programme est, à la fois, plus souple, mieux financé en masse et plus facile à financer projet par projet.
- Combien y aurait-il de régions intermédiaires ?
- Les régions intermédiaires sont celles comprises entre 75% et 90% du PIB (Produit intérieur brut) moyen européen. Il y aura certainement une gradation selon qu’une région est proche de la limite basse ou de la limite haute. La Corse se situe plutôt dans la fraction des plus de 80%. Il y aurait, en tout, une quarantaine de régions intermédiaires en Europe, dont une douzaine en France.
- Une autre de vos priorités est l’espace méditerranéen. De quoi s’agit-il ?
- J’ai pu rédiger et obtenir le vote à 610 voix sur 680 d’un rapport allant dans le sens de la création d’une macro-région en Méditerranée. C’est-à-dire que l’UE actionne, à partir d’elle-même, une démarche de regroupement de toutes les collectivités de Méditerranée pour leur permettre d’élaborer un projet de développement cohérent de l’espace méditerranéen dans ses limites européennes, mais aussi avec son voisinage, à l’Est avec la Turquie et le Moyen-Orient, au Sud avec le Maghreb. La Corse est plus concernée par cette 2nde dimension.
- Comment cet espace va-t-il s’articuler ?
- Le Parlement a voté le texte. Sur la base de ce vote, la Commission européenne va proposer au Conseil européen une démarche de mise en place d’une stratégie macro-régionale en Méditerranée. La 1ère étape concerne la zone adriatico-ionienne où les choses sont déjà avancées sur le terrain, les collectivités se sont rencontrées et se sont mises d’accord sur un programme de développement. Les collectivités de la Méditerranée occidentale, dont la Corse fait partie, seront invitées à le faire à leur tour et à monter un programme de coopération.
- De quel type de coopération s’agit-il ?
- Une coopération, soit environnementale parce que la Méditerranée pose un problème d’environnement, soit économique, sur les transports, la coopération avec le Sud… Dans ces domaines-là, nous allons essayer de faire en sorte que l’espace méditerranéen européen proprement dit, c’est-à-dire 150 millions d’habitants sur les 500 millions qui vivent autour de la Méditerranée, soit, d’abord, mieux coordonné et mieux organisé. Ensuite, à partir de cette action commune, nous proposerons des projets de développement qui intéresseront l’ensemble de l’espace méditerranéen.
- Est-ce une façon de constituer des régions à l’intérieur même de l’Europe ?
- La macro-région est une stratégie de développement régional qui a été mise en œuvre, pour la première fois, en Mer Baltique. Cette mer est polluée et pose un grave problème d’eutrophisation des fonds marins par les algues vertes... La stratégie macro-régionale a donné des résultats intéressants et a permis de faire des progrès considérables en concentrant les financements européens sur un certain nombre de priorités que toutes les régions limitrophes de la Mer Baltique avaient définies au préalable. Il faut arriver à faire la même chose en Méditerranée.
Propos recueillis par Nicole MARI