Gilles Simeoni, président du Conseil exécutif de la Collectivité territoriale de Corse (CTC).
- Pourquoi avez-vous demandé la pérennisation du GIRTEC ?
- Il faut remettre les choses en perspective. Le GIRTEC a été créé en 2007 pour une période initiale de 10 ans, mais il y a eu du retard à l’allumage puisque que ce n’est que deux ans plus tard, en 2009, qu’il a, effectivement, commencé à travailler. Le texte fondateur prévoit que cette période peut être renouvelée pour une durée de dix ans. Le GIRTEC composé aujourd’hui de 7 personnes, a effectué un travail remarquable, considérable, dont la qualité et l’importance sont saluées par tous les acteurs et tous les observateurs. Beaucoup a été fait, mais il reste, encore tellement à faire que même une décennie supplémentaire ne sera pas suffisante pour terminer le travail de reconstruction des titres de propriété et d’assainissement cadastral.
- Cette pérennisation a-t-elle été remise en cause ?
- Le principe même de la pérennisation du GIRTEC et de sa reconduction à minima pour une période de 10 ans a été réaffirmé à plusieurs reprises par le Conseil exécutif et l’Assemblée de Corse. Manuel Valls, alors Premier ministre, l’a validé devant cette même assemblée, et a affirmé que son financement serait assuré par le PEI (Plan exceptionnel d’investissements) jusqu’à l’expiration de celui-ci en 2020. De ce côté-là, on pensait qu’il y avait une garantie. Il fallait, six mois avant la date d’expiration, voter une déclaration d’intention pour reconduire la convention. Ce que nous avons fait lors d’une assemblée générale qui s’est tenue en mars dernier et qui a décidé, à l’unanimité, en présence du préfet de région, de reconduire le GIRTEC jusqu’en 2027.
- Dans ce cas, pourquoi êtes-vous inquiet ?
- Le trouble est né lorsque nous avons commencé à travailler à la nouvelle convention constitutive entre la CTC, le GIRTEC et l’Etat. Le Préfet nous a envoyé un courrier contenant deux séries de restrictions qui ont suscité notre inquiétude, celle du personnel du GIRTEC, voire des communes. Estimant que le financement par le PEI n’est prévu que jusqu’en 2020, le Préfet voulait une convention de trois ans, quitte à regarder, ensuite, ce que l’on pourrait faire. C’est bien en deçà de la période de dix ans qui avait été actée. Ensuite, la fonction principale du GIRTEC est de reconstituer les titres de propriété. Il est saisi par les notaires pour des bénéficiaires qui peuvent être, soit des personnes privées, soit des personnes publiques, notamment les communes qui veulent identifier et faire titrer leur patrimoine. A côté de cela, le GIRTEC, conformément au texte qui l’a institué, a développé une mission d’expertise et de conseil, notamment auprès de la CTC.
- Pourquoi la CTC a-t-elle besoin de cette expertise ?
- Par exemple, lors d’une opération d’expropriation pour construire une route, il faut identifier les parcelles traversées. Certaines, souvent, n’ont pas de titre de propriété. La CTC doit pouvoir mobiliser le GIRTEC pour faire l’identification cadastrale de ces parcelles, leur origine de propriété afin de mener à bien les procédures. Un autre sujet important est le projet Cyrénée d’alimentation de la Corse en gaz naturel avec un gazoduc qui va d’Est en Ouest. Il faudra identifier un tracé qui pourrait bien, à multiples reprises, passer sur des parcelles sans propriétaire identifié. Il faudra reconstituer leur origine de propriété. Nous avons, donc, besoin de cette mission du GIRTEC.
- Quel est le problème sur cette mission ?
- Dans son courrier, le Préfet disait que, selon une analyse de la Direction générale des collectivités locales, le texte fondateur du GIRTEC exclut ce type d’intervention, comme il exclut les interventions au profit des communes. Le GIRTEC doit se concentrer sur une intervention au profit des particuliers. C’est une vision très restrictive de son action. Nous sommes en désaccord, à la fois, sur la période réduite à 3 ans, et sur cette vision restrictive. Après la réception de cette lettre, nous avons discuté avec le Préfet qui a dissipé nos inquiétudes. Il a affirmé qu’il était prêt à partager notre analyse.
- Finalement, qu’avez-vous acté, vendredi, à l’Assemblée de Corse ?
- Nous avons adopté, à l’unanimité, un projet de convention qui repart sur dix ans et qui réaffirme de façon forte que cet outil nous est indispensable dans le cadre de notre stratégie foncière globale. Nous avons, d’abord, pris acte que le financement, qui est de l’ordre d’1 million € par an, n’est assuré que pour 3 ans, nous réfléchirons aux moyens de financer le GIRTEC de l’année 3 à l’année 10. Nous avons, ensuite, réaffirmé qu’à côté de sa mission principale, le GIRTEC a une mission accessoire, celle d’intervenir pour les personnes publiques dans le cadre de missions de service publique ou d’opérations d’utilité publique. Le vote à l’unanimité de l’Assemblée a salué le travail du GIRTEC et de son personnel qui était présent dans les tribunes et a été rassuré sur la pérennité de l’outil. Ce n’est pas pour rien que le GIRTEC intéresse au-delà des frontières de notre île.
- L’Etat est majoritaire au sein du GIRTEC. Envisagez-vous de reprendre en main la gouvernance ?
- Oui ! De la même façon qu’il faut réfléchir au financement à la fin du PEI, il faut réfléchir à la gouvernance. Aujourd’hui, l’Etat est majoritaire au sein du groupement d’intérêt public. Nous pensons de façon naturelle que, s’agissant d’un outil essentiel dans le cadre de la politique foncière de la Corse, la CTC a vocation à devenir majoritaire. Nous assumerions, évidemment, la majorité du financement. Nous souhaitons inscrire, de plus en plus, l’action du GIRTEC dans notre stratégie foncière d’ensemble telle qu’elle peut être déclinée, par exemple, par l’Office foncier et l’Agence de l’urbanisme. Il y a forcément des synergies fortes à établir entre ces outils. Le GIRTEC est présidé par Paul Grimaldi, un magistrat en détachement, dont tout le monde salue la compétence technique et l’investissement, il a beaucoup contribué à son rayonnement. Nous avons, d’ailleurs, sollicité sa reconduction dans ses fonctions de président. J’ai écrit en ce sens directement au Premier ministre.
- Pourquoi dites-vous que le succès du GIRTEC dépasse les frontières de notre île ? Intéresse-t-il d’autres pays ?
- Oui ! Tout à fait ! Des pays se retrouvent dans des situations de désordre foncier similaires à celle de la Corse. Le caractère original et efficace de la technicité développée par le GIRTEC intéresse beaucoup. Deux exemples ont été cités, lors du débat à l’Assemblée de Corse, par l’élue de Femu a Corsica, Marie Hélène Casanova-Servas. Elle a rappelé que les Japonais ont, déjà, fait une visite sur place. Des magistrats tahitiens arrivent cette semaine pour se faire expliquer les techniques de reconstitution des titres de propriété et d’identification des propriétaires, mises en œuvre par le GIRTEC.
Propos recueillis par Nicole MARI.
- Il faut remettre les choses en perspective. Le GIRTEC a été créé en 2007 pour une période initiale de 10 ans, mais il y a eu du retard à l’allumage puisque que ce n’est que deux ans plus tard, en 2009, qu’il a, effectivement, commencé à travailler. Le texte fondateur prévoit que cette période peut être renouvelée pour une durée de dix ans. Le GIRTEC composé aujourd’hui de 7 personnes, a effectué un travail remarquable, considérable, dont la qualité et l’importance sont saluées par tous les acteurs et tous les observateurs. Beaucoup a été fait, mais il reste, encore tellement à faire que même une décennie supplémentaire ne sera pas suffisante pour terminer le travail de reconstruction des titres de propriété et d’assainissement cadastral.
- Cette pérennisation a-t-elle été remise en cause ?
- Le principe même de la pérennisation du GIRTEC et de sa reconduction à minima pour une période de 10 ans a été réaffirmé à plusieurs reprises par le Conseil exécutif et l’Assemblée de Corse. Manuel Valls, alors Premier ministre, l’a validé devant cette même assemblée, et a affirmé que son financement serait assuré par le PEI (Plan exceptionnel d’investissements) jusqu’à l’expiration de celui-ci en 2020. De ce côté-là, on pensait qu’il y avait une garantie. Il fallait, six mois avant la date d’expiration, voter une déclaration d’intention pour reconduire la convention. Ce que nous avons fait lors d’une assemblée générale qui s’est tenue en mars dernier et qui a décidé, à l’unanimité, en présence du préfet de région, de reconduire le GIRTEC jusqu’en 2027.
- Dans ce cas, pourquoi êtes-vous inquiet ?
- Le trouble est né lorsque nous avons commencé à travailler à la nouvelle convention constitutive entre la CTC, le GIRTEC et l’Etat. Le Préfet nous a envoyé un courrier contenant deux séries de restrictions qui ont suscité notre inquiétude, celle du personnel du GIRTEC, voire des communes. Estimant que le financement par le PEI n’est prévu que jusqu’en 2020, le Préfet voulait une convention de trois ans, quitte à regarder, ensuite, ce que l’on pourrait faire. C’est bien en deçà de la période de dix ans qui avait été actée. Ensuite, la fonction principale du GIRTEC est de reconstituer les titres de propriété. Il est saisi par les notaires pour des bénéficiaires qui peuvent être, soit des personnes privées, soit des personnes publiques, notamment les communes qui veulent identifier et faire titrer leur patrimoine. A côté de cela, le GIRTEC, conformément au texte qui l’a institué, a développé une mission d’expertise et de conseil, notamment auprès de la CTC.
- Pourquoi la CTC a-t-elle besoin de cette expertise ?
- Par exemple, lors d’une opération d’expropriation pour construire une route, il faut identifier les parcelles traversées. Certaines, souvent, n’ont pas de titre de propriété. La CTC doit pouvoir mobiliser le GIRTEC pour faire l’identification cadastrale de ces parcelles, leur origine de propriété afin de mener à bien les procédures. Un autre sujet important est le projet Cyrénée d’alimentation de la Corse en gaz naturel avec un gazoduc qui va d’Est en Ouest. Il faudra identifier un tracé qui pourrait bien, à multiples reprises, passer sur des parcelles sans propriétaire identifié. Il faudra reconstituer leur origine de propriété. Nous avons, donc, besoin de cette mission du GIRTEC.
- Quel est le problème sur cette mission ?
- Dans son courrier, le Préfet disait que, selon une analyse de la Direction générale des collectivités locales, le texte fondateur du GIRTEC exclut ce type d’intervention, comme il exclut les interventions au profit des communes. Le GIRTEC doit se concentrer sur une intervention au profit des particuliers. C’est une vision très restrictive de son action. Nous sommes en désaccord, à la fois, sur la période réduite à 3 ans, et sur cette vision restrictive. Après la réception de cette lettre, nous avons discuté avec le Préfet qui a dissipé nos inquiétudes. Il a affirmé qu’il était prêt à partager notre analyse.
- Finalement, qu’avez-vous acté, vendredi, à l’Assemblée de Corse ?
- Nous avons adopté, à l’unanimité, un projet de convention qui repart sur dix ans et qui réaffirme de façon forte que cet outil nous est indispensable dans le cadre de notre stratégie foncière globale. Nous avons, d’abord, pris acte que le financement, qui est de l’ordre d’1 million € par an, n’est assuré que pour 3 ans, nous réfléchirons aux moyens de financer le GIRTEC de l’année 3 à l’année 10. Nous avons, ensuite, réaffirmé qu’à côté de sa mission principale, le GIRTEC a une mission accessoire, celle d’intervenir pour les personnes publiques dans le cadre de missions de service publique ou d’opérations d’utilité publique. Le vote à l’unanimité de l’Assemblée a salué le travail du GIRTEC et de son personnel qui était présent dans les tribunes et a été rassuré sur la pérennité de l’outil. Ce n’est pas pour rien que le GIRTEC intéresse au-delà des frontières de notre île.
- L’Etat est majoritaire au sein du GIRTEC. Envisagez-vous de reprendre en main la gouvernance ?
- Oui ! De la même façon qu’il faut réfléchir au financement à la fin du PEI, il faut réfléchir à la gouvernance. Aujourd’hui, l’Etat est majoritaire au sein du groupement d’intérêt public. Nous pensons de façon naturelle que, s’agissant d’un outil essentiel dans le cadre de la politique foncière de la Corse, la CTC a vocation à devenir majoritaire. Nous assumerions, évidemment, la majorité du financement. Nous souhaitons inscrire, de plus en plus, l’action du GIRTEC dans notre stratégie foncière d’ensemble telle qu’elle peut être déclinée, par exemple, par l’Office foncier et l’Agence de l’urbanisme. Il y a forcément des synergies fortes à établir entre ces outils. Le GIRTEC est présidé par Paul Grimaldi, un magistrat en détachement, dont tout le monde salue la compétence technique et l’investissement, il a beaucoup contribué à son rayonnement. Nous avons, d’ailleurs, sollicité sa reconduction dans ses fonctions de président. J’ai écrit en ce sens directement au Premier ministre.
- Pourquoi dites-vous que le succès du GIRTEC dépasse les frontières de notre île ? Intéresse-t-il d’autres pays ?
- Oui ! Tout à fait ! Des pays se retrouvent dans des situations de désordre foncier similaires à celle de la Corse. Le caractère original et efficace de la technicité développée par le GIRTEC intéresse beaucoup. Deux exemples ont été cités, lors du débat à l’Assemblée de Corse, par l’élue de Femu a Corsica, Marie Hélène Casanova-Servas. Elle a rappelé que les Japonais ont, déjà, fait une visite sur place. Des magistrats tahitiens arrivent cette semaine pour se faire expliquer les techniques de reconstitution des titres de propriété et d’identification des propriétaires, mises en œuvre par le GIRTEC.
Propos recueillis par Nicole MARI.