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Grâce à la mobilisation des élus, le Niolu retrouve un médecin généraliste et prépare l’avenir


le Vendredi 15 Septembre 2023 à 09:06

Le départ du docteur Titus Ududec du cabinet de Calacuccia mi-août avait suscité une certaine inquiétude dans la micro-région. Si son remplacement n’a pas été chose évidente, la mobilisation des élus des cinq communes a récemment payé puisqu’un nouveau praticien a annoncé son installation à temps plein à compter du 1er janvier



(Photo d'illustration)
(Photo d'illustration)
C’est un problème bien connu de nombreux territoires ruraux. Après 5 ans de bons et loyaux services au sein du cabinet de Calacuccia, le docteur Titus Ududec a quitté le Niolu au milieu du mois d’août, laissant derrière lui la perspective d’un désert médical. « C’est un médecin étranger qui était arrivé sur un coup de chance à une époque où nous n’avions déjà plus de médecin sur le canton depuis plusieurs mois », rappelle Benjamin Luciani, adjoint au maire de Calacuccia, tout en saluant le travail que le praticien a effectué auprès de la population niulinca depuis 2018. En mars dernier, quand le docteurUdudec fait part de son désir de quitter l’île pour des raisons familiales, c’est donc la douche froide pour la micro-région. Et l’inquiétude ne tarde pas à naître, le remplacement d’un médecin généraliste en plein cœur de la Corse n’étant pas chose aisée. Devant l’urgence de la situation, les élus des cinq communes du Niolu s’astreignent dès lors à travailler de concert pour mobiliser tous les institutionnels tels que l’Agence Régionale de Santé de Corse, la Caisse Primaire d’Assurance Maladie, le Comité de massif, la Collectivité de Corse, ou encore le conseil de l’ordre des médecins sur le sujet.
 
« Nous avons monté un comité de pilotage qui s’est réuni en mai et nous avons à la fois essayé de travailler à gérer le remplacement du Dr Ududec, mais aussi à se poser des questions afin de construire une offre de santé pérenne afin de ne plus être le bec dans l’eau tous les cinq ans », dévoile Benjamin Luciani, « Cela a permis de positionner la problématique du canton dans l’esprit de tout le monde et de mobiliser toutes les ressources qui peuvent œuvrer en Corse. En parallèle, nous avons également commencé à chercher un remplaçant et nous avons eu des pistes à l’étranger ». Assez rapidement, les élus pensent même toucher au but en entamant des discussions avec un couple roumain, dont le mari est médecin généraliste avec une spécialisation en gynécologie et la femme finit ses études de pédiatrie. « Ils étaient très intéressants et intéressés par l’idée de s’installer. Mais malheureusement il avait obtenu son diplôme de médecine générale en Moldavie, alors qu’il avait fait tout le reste de son cursus en Roumanie. Comme la Moldavie n’est pas dans l’Union Européenne, il ne répondait pas aux critères de diplômes permettant pas de valider son installation, donc cela a été retoqué par le conseil de l’Ordre à Paris », regrette l’adjoint au maire de Calacuccia, en sifflant : « Malgré la pénurie de médecins au niveau national, le conseil de l’Ordre est assez strict sur l’installation de médecins étrangers ».

Un nouveau médecin au sein du cabinet de Calacuccia dès le 1er janvier

Face à cette déconvenue, les élus ne désespèrent pas et lancent d’autres lignes, notamment à destination de médecins locaux pour éventuellement leur proposer faire des piges dans les cinq communes du Niolu. « Nous avons alors eu un premier retour du Dr Jean-Paul Langlade qui est originaire d’Albertacce mais qui a fait toute sa carrière en tant que généraliste dans les Pyrénées dans le rural », dévoile Benjamin Luciani en louant les nombreuses qualités du praticien. « Il est capitaine des pompiers, maitre de stage, il a monté et coordonné des équipes de soins primaires », détaille-t-il. Dans un premier temps le généraliste, qui souhaite prendre sa retraite en fin d’année sur le continent, émet la possibilité de venir quelques jours par mois donner un coup de main à son territoire d’origine dès 2024. Une proposition bienvenue, mais pas suffisante pour remplir l’ensemble des besoins. Mais les choses évoluent rapidement dans le bon sens. 
 
« Nous avons poussé les discussions avec lui, il a constaté qu’il y avait une dynamique politique, et l’idée de construire quelque chose de cohérent au niveau de l’offre de santé et il a reconsidéré la question. Il nous a annoncé il y a 15 jours que finalement il était prêt à s’installer à temps plein en tant que médecin généraliste dans le Niolu, et nous sommes donc heureux de pouvoir annoncer qu’il reprendra le cabinet à Calacuccia à partir du 1er janvier », se réjouit l’adjoint au maire de Calacuccia, en précisant qu’une solution transitoire a également été trouvée pour les quatre prochains mois : « Les appels que nous avons lancés ont trouvé un écho ; puisque nous avons deux médecins cortenais, les Dr Andrea Reboul et Jean-Louis Leschi, qui font des visites à domicile une fois par mois depuis que le Dr Ududec est parti. Nous avons aussi deux pistes supplémentaires qui vont se mettre en place rapidement : le Dr Corinne Ferrandi d’Ile-Rousse et le Dr Benjamin Acquaviva, installé à Ajaccio mais originaire de Calacuccia, qui vont venir compléter ce dispositif temporaire à raison d’une journée de consultation par mois, probablement en cabinet. Ce dispositif permettra globalement d’avoir une couverture d’un jour par semaine pour la population ». 

Construire une offre de santé pour l'avenir

Au-delà de parer à l’urgence, pour les élus du territoire, l’installation prochaine du Dr Langlade ouvre en outre des perspectives intéressantes pour la suite. « Nous allons pouvoir travailler à construire la suite », estime Benjamin Luciani, « Nous allons vraiment nous appuyer sur le Dr Langlade pour ne pas laisser retomber le soufflé de ces réunions et pouvoir travailler de façon opérationnelle sur la construction d’une offre de santé cohérente pour la population. Il sera le pivot de toute cette réflexion pour à terme pouvoir engager des solutions qui soient plus pérennes, avec par exemple des projets immobiliers qui soient initiés par les politiques pour créer un petit centre de santé afin de permettre à des praticiens de venir ponctuellement, mais aussi pour pouvoir mieux coordonner les choses avec le pharmacien et les deux équipes d’infirmières, ainsi que les pompiers », ajoute-t-il. 
 
Dans ce droit fil, il est par exemple envisagé de s’appuyer sur les étudiants qui débutent leur parcours en médecine à Corte pour préparer l’avenir. « L’idée c’est qu’avec son statut de maitre de stage, le Dr Langlade puisse se positionner pour recevoir de futurs médecins sur leurs dernières années d’études, et pourquoi pas susciter chez eux l’envie de s’installer dans le Niolu une fois diplômés. C’est quelque chose qui n’a jamais été fait jusqu’à présent, que nous allons intégrer au dispositif. Le but est d’arriver à changer le paradigme et la vision des jeunes médecins qui sont peut-être plus attirés par des installations ville, afin de montrer que dans le rural ils peuvent aussi y trouver leur compte », glisse Benjamin Luciani. 
 
« Nous avons le sentiment que ce projet de construction d’une offre de santé dans le Niolu peut aussi avoir valeur d’exemple dans le rural pour montrer qu’il y a des solutions à mettre en place et qu’avec une dynamique politique et le soutien des professionnels de santé, il y a sans doute la possibilité de construire des solutions d’avenir qui ne seront peut-être plus uniquement dépendantes de l’installation d’un généraliste », note-t-il encore avant de conclure : « La route reste longue mais nous avons le sentiment que cela peut être quelque chose d’assez singulier qui peut donner envie à d’autres micro régions de ne pas baisser les bras quand il n’y a plus de médecins ».