Les représentants des intercommunalités corses réunis à l'IUT de Corte.
- Comment réagissez-vous à la fin de non-recevoir du ministre Baylet concernant la demande de moratoire sur les intercommunalités ?
- Sans surprise ! Avant Jean-Michel Baylet, beaucoup d’autres ont fermé les portes ou, en tous cas, n’ont laissé entrevoir aucune perspective d’adaptation. En revanche, nous avons vu, ce matin, que le droit commun auquel on veut soumettre la mise en œuvre de la loi NOTRe sur la Corse peut trouver des adaptations et être assoupli, notamment par le biais de véhicules législatifs et parfois d’amendements. Il nous reste à y travailler avec des outils juridiques et techniques.
- Quelles adaptations, par exemple ?
- Notamment la prorogation des délais de mise en œuvre des nouveaux schémas de coopération intercommunale (SDCI). Egalement, dans le cadre de la rédaction des ordonnances et de la mise en œuvre de la Conférence de coordination des collectivités, dans la rédaction du décret qui fixera ses modalités d’application, existent des pistes techniques, juridiques et pratiques qui permettent, à mon sens, d’adapter et d’assouplir. Cette journée de rencontre à Corte a essayé de démontrer que, si on fait œuvre de solidarité et de technicité, on peut arriver avec des arguments forts devant le gouvernement, des arguments autres que des arguments politiques.
- Refusez-vous la mise en place de la nouvelle carte intercommunale au 1er janvier 2017 ?
- Cette mise en place est, à mon sens, assez précipitée. Je rentre dans la réflexion générale qui consiste à dire qu’en Corse, plus qu’ailleurs, cette réponse s’est faite dans la précipitation. En Corse, plus qu’ailleurs, elle entraine des conséquences importantes, ne serait-ce que par la disparition programmée de l’échelon départemental et, donc, dans le chamboulement total et en profondeur de la carte administrative ! Ce qui veut dire que le droit commun sur la réorganisation territoriale au niveau des Intercommunalités doit forcément être en adéquation avec ce bouleversement et cette suppression des Conseils départementaux, ne serait-ce qu’au niveau de la représentativité des territoires et de leur cohérence !
- Le ministre Baylet fixe une date butoir au 15 juin. N’est-ce pas un peu tard pour agir ? Que pouvez-vous faire concrètement ?
- Le 15 juin est la date fixée par le droit commun. Mr Baylet invite les élus – je les ai moi même incités ce matin - à faire preuve de responsabilités et à trouver des schémas alternatifs définissant de nouveaux périmètres. Si on peut retenir un point positif du côté du ministère, c’est qu’en cas de proposition de schéma alternatif, celle-ci serait, grosso modo, acceptée. Encore faut-il qu’elle réponde à certains critères législatifs sur lesquels on peut, également, définir des points d’adaptation.
- Les élus ont toutes sortes de craintes : perte de pouvoir de décision, compétences sans ressources financières, augmentation des impôts… Que pouvez-faire ?
- C’est un peu excessif ! Je reste, malgré les apparences, un fervent partisan du fait intercommunal, mais je suis tout aussi un fervent partisan du fait communal ! De la même manière que je défends la collectivité unique. Je dis simplement que, pour que tout fonctionne et pour trouver des points d’équilibre, il faut aller vers la clarification des compétences de ces collectivités entre elles, ensuite vers un renforcement des moyens qui leur sont dévolus et, enfin, se creuser l’esprit pour trouver des recettes, des nouvelles sources de financement permettant de mettre en œuvre les projets sur ces territoires. Ce qui implique une ingénierie pour l’ensemble de ces collectivités.
- Que redoutez-vous le plus ?
- Rien de particulièrement nouveau depuis la fronde qui est née dans l’Alta-Rocca. Je déplore la succession de réformes qui, depuis 2010, touchent de près les Intercommunalités et les organisations territoriales. Ces réformes sont mises en œuvre de manière précipitée, y compris en cours de mandature. C’est le chamboulement permanent, la fuite en avant institutionnelle ! C’est contre-productif pour l’action publique ! J’aimerais que l’on appuie un peu sur le bouton « Pause », qu’on fasse des évaluations et des études d’impact. Il est assez stupéfiant qu’il existe déjà un certain nombre d’outils dans la boite à outils législatifs qui permettent de travailler en commun et de mettre en ordre un certain nombre d’actions. Alors qu’on les a à peine ou même pas utilisés, on les met de côté pour créer, encore une fois, des réformes nouvelles. Je redoute les impacts sur les territoires et, bien évidemment, sur nos concitoyens de cette fuite en avant institutionnelle. Si l’Etat impose des réformes à marche forcée, sous prétexte de rationalisation de la dépense publique ou d’économie, il ne met en avant aucune étude d’impact des incidences financières et fiscales. Et, encore une fois, qui paye au final ? C’est le contribuable ! Il va payer davantage pour, peut-être même, des qualités de service rendu moindres.
- Pensez-vous que cette nouvelle réforme, comme le craignent nombre d’élus du rural, va sonner le glas du rural et de l’intérieur ?
- Effectivement ! J’ai été le premier à dire. Concernant mon territoire, j’ai parlé de schéma ruralicide. Il faut veiller à ce que ces réformes de périmètres maintiennent des unités territoriales cohérentes en adéquation avec les bassins de vie et surtout la nature des territoires. C’est pour cela que je me suis élevé, pour que nous ne soyons pas mariés dans d’immenses ensembles intercommunaux : le littoral et la montagne, l’urbain et le rural. Voilà ce qu’il faut absolument maintenir ! La réforme a du bon, à condition qu’elle soit cohérente, pertinente et au service, non seulement des territoires, mais aussi de nos concitoyens.
- Que va-t-il se passer maintenant ?
- Aujourd’hui, j’ai tenu avec l’AdCF à informer l’ensemble des élus communautaires et les présidents des communautés de communes des dispositions qui nous attendent sur le train législatif à venir, des dispositions quasiment immédiates, obligatoires à mettre en œuvre. Il est convenu avec la Collectivité territoriale de Corse de nous revoir assez rapidement pour proposer des schémas alternatifs à ceux notifiés pour le 15 juin. Ils ont vocation à se substituer ou à s’appliquer aux territoires qui n’ont pas trouvé leur compte dans cette refonte des périmètres.
Propos recueillis par Nicole MARI.
- Sans surprise ! Avant Jean-Michel Baylet, beaucoup d’autres ont fermé les portes ou, en tous cas, n’ont laissé entrevoir aucune perspective d’adaptation. En revanche, nous avons vu, ce matin, que le droit commun auquel on veut soumettre la mise en œuvre de la loi NOTRe sur la Corse peut trouver des adaptations et être assoupli, notamment par le biais de véhicules législatifs et parfois d’amendements. Il nous reste à y travailler avec des outils juridiques et techniques.
- Quelles adaptations, par exemple ?
- Notamment la prorogation des délais de mise en œuvre des nouveaux schémas de coopération intercommunale (SDCI). Egalement, dans le cadre de la rédaction des ordonnances et de la mise en œuvre de la Conférence de coordination des collectivités, dans la rédaction du décret qui fixera ses modalités d’application, existent des pistes techniques, juridiques et pratiques qui permettent, à mon sens, d’adapter et d’assouplir. Cette journée de rencontre à Corte a essayé de démontrer que, si on fait œuvre de solidarité et de technicité, on peut arriver avec des arguments forts devant le gouvernement, des arguments autres que des arguments politiques.
- Refusez-vous la mise en place de la nouvelle carte intercommunale au 1er janvier 2017 ?
- Cette mise en place est, à mon sens, assez précipitée. Je rentre dans la réflexion générale qui consiste à dire qu’en Corse, plus qu’ailleurs, cette réponse s’est faite dans la précipitation. En Corse, plus qu’ailleurs, elle entraine des conséquences importantes, ne serait-ce que par la disparition programmée de l’échelon départemental et, donc, dans le chamboulement total et en profondeur de la carte administrative ! Ce qui veut dire que le droit commun sur la réorganisation territoriale au niveau des Intercommunalités doit forcément être en adéquation avec ce bouleversement et cette suppression des Conseils départementaux, ne serait-ce qu’au niveau de la représentativité des territoires et de leur cohérence !
- Le ministre Baylet fixe une date butoir au 15 juin. N’est-ce pas un peu tard pour agir ? Que pouvez-vous faire concrètement ?
- Le 15 juin est la date fixée par le droit commun. Mr Baylet invite les élus – je les ai moi même incités ce matin - à faire preuve de responsabilités et à trouver des schémas alternatifs définissant de nouveaux périmètres. Si on peut retenir un point positif du côté du ministère, c’est qu’en cas de proposition de schéma alternatif, celle-ci serait, grosso modo, acceptée. Encore faut-il qu’elle réponde à certains critères législatifs sur lesquels on peut, également, définir des points d’adaptation.
- Les élus ont toutes sortes de craintes : perte de pouvoir de décision, compétences sans ressources financières, augmentation des impôts… Que pouvez-faire ?
- C’est un peu excessif ! Je reste, malgré les apparences, un fervent partisan du fait intercommunal, mais je suis tout aussi un fervent partisan du fait communal ! De la même manière que je défends la collectivité unique. Je dis simplement que, pour que tout fonctionne et pour trouver des points d’équilibre, il faut aller vers la clarification des compétences de ces collectivités entre elles, ensuite vers un renforcement des moyens qui leur sont dévolus et, enfin, se creuser l’esprit pour trouver des recettes, des nouvelles sources de financement permettant de mettre en œuvre les projets sur ces territoires. Ce qui implique une ingénierie pour l’ensemble de ces collectivités.
- Que redoutez-vous le plus ?
- Rien de particulièrement nouveau depuis la fronde qui est née dans l’Alta-Rocca. Je déplore la succession de réformes qui, depuis 2010, touchent de près les Intercommunalités et les organisations territoriales. Ces réformes sont mises en œuvre de manière précipitée, y compris en cours de mandature. C’est le chamboulement permanent, la fuite en avant institutionnelle ! C’est contre-productif pour l’action publique ! J’aimerais que l’on appuie un peu sur le bouton « Pause », qu’on fasse des évaluations et des études d’impact. Il est assez stupéfiant qu’il existe déjà un certain nombre d’outils dans la boite à outils législatifs qui permettent de travailler en commun et de mettre en ordre un certain nombre d’actions. Alors qu’on les a à peine ou même pas utilisés, on les met de côté pour créer, encore une fois, des réformes nouvelles. Je redoute les impacts sur les territoires et, bien évidemment, sur nos concitoyens de cette fuite en avant institutionnelle. Si l’Etat impose des réformes à marche forcée, sous prétexte de rationalisation de la dépense publique ou d’économie, il ne met en avant aucune étude d’impact des incidences financières et fiscales. Et, encore une fois, qui paye au final ? C’est le contribuable ! Il va payer davantage pour, peut-être même, des qualités de service rendu moindres.
- Pensez-vous que cette nouvelle réforme, comme le craignent nombre d’élus du rural, va sonner le glas du rural et de l’intérieur ?
- Effectivement ! J’ai été le premier à dire. Concernant mon territoire, j’ai parlé de schéma ruralicide. Il faut veiller à ce que ces réformes de périmètres maintiennent des unités territoriales cohérentes en adéquation avec les bassins de vie et surtout la nature des territoires. C’est pour cela que je me suis élevé, pour que nous ne soyons pas mariés dans d’immenses ensembles intercommunaux : le littoral et la montagne, l’urbain et le rural. Voilà ce qu’il faut absolument maintenir ! La réforme a du bon, à condition qu’elle soit cohérente, pertinente et au service, non seulement des territoires, mais aussi de nos concitoyens.
- Que va-t-il se passer maintenant ?
- Aujourd’hui, j’ai tenu avec l’AdCF à informer l’ensemble des élus communautaires et les présidents des communautés de communes des dispositions qui nous attendent sur le train législatif à venir, des dispositions quasiment immédiates, obligatoires à mettre en œuvre. Il est convenu avec la Collectivité territoriale de Corse de nous revoir assez rapidement pour proposer des schémas alternatifs à ceux notifiés pour le 15 juin. Ils ont vocation à se substituer ou à s’appliquer aux territoires qui n’ont pas trouvé leur compte dans cette refonte des périmètres.
Propos recueillis par Nicole MARI.
Pierre Marcellesi, président de la communauté de l'Alta-Rocca et maire de Zoza.