Jean-Jacques Panunzi, président du Conseil général de la Corse du Sud
- Pourquoi êtes-vous contre la réforme des cantons ?
- Cette proposition de loi a déjà été rejetée une fois par le Sénat au mois de janvier. Elle n’est passée qu’avec une courte majorité, d’une quinzaine de voix, à l’Assemblée nationale parce que, seuls, les socialistes l’ont votée. Elle porte, notamment, sur le changement d’intitulé des conseillers généraux qui vont s’appeler conseillers départementaux. Sur la durée du mandat avec le rallongement du mandat de la présidence, qui passe de 3 ans à 6 ans, comme pour l’ensemble des conseillers généraux. Et sur le redécoupage des cantons.
- Est-ce surtout ce dernier point qui fâche ?
- Oui. Les deux premiers points n’ont pas d’incidence majeure sur la vie publique et politique du département. Le redécoupage est beaucoup plus problématique parce qu’il se base sur le principe de remodeler les cantons avec une population minimum de 10 000 habitants, une moyenne départementale de 13 000 habitants et un seuil de plus ou moins 20 %. Si ce principe est appliqué dans le département de la Corse-du-Sud, cela signifie que, non seulement 3 ou 4 cantons ruraux vont être regroupés en un seul, mais ce seul canton, qui restera, sera totalement noyé sous la masse de population apportée par les communes urbaines.
- Le regroupement de cantons ruraux ne sera-t-il pas suffisant pour atteindre le seuil exigé ?
- Non. Même en regroupant 3 ou 4 cantons ruraux, le seuil des 10 000 habitants est loin d’être atteint. Donc, ces cantons ruraux, qui restent toujours en-deçà du seuil, vont être regroupés avec des communes comme Porto-Vecchio ou Ajaccio. Si on regarde la géographie du terrain et la localisation des communes, on se rend compte que, par exemple, les cantons des Deux Sevi, des Deux Sorru et du Cruzzini-Cinarca n’arrivent pas à rassembler 10 000 habitants. Ils en totalisent à peine 6000 ou 6500. Par conséquent, ils seront regroupés avec un canton d’Ajaccio, voire même avec 2 ou 3 villes de 3 500 ou 4 000 habitants comme Alata, Afa… Cette opération consiste à sacrifier, sur l’autel d’un principe qui résulte notamment d’une décision du Conseil d’Etat, les cantons ruraux pour atteindre le seuil démographique exigible.
- Vous soulevez également l’impact du redécoupage sur les intercommunalités. Que craignez-vous exactement ?
- Le redécoupage, tel que le suggère le projet de loi aujourd’hui par rapport au nombre d’habitants, raye complètement de la carte toutes les intercommunalités. En regroupant 2 ou 3 cantons et en y rajoutant un morceau d’un autre territoire, la nouvelle entité se retrouve à cheval sur 3 ou 4 intercommunalités. Il n’y a plus, ni cohérence territoriale, ni pertinence du territoire. Donc, tout ce travail, qui a été réalisé jusqu’à présent sur la cohérence territoriale et le périmètre pertinent des territoires, va disparaître.
- Qui va décider du contenu de ce redécoupage ? Est-il déjà acté ?
- Non. Le gouvernement décide du principe du découpage, le reste n’est pas encore connu. Nous serons consultés sur le projet de loi pendant six semaines. Aurons-nous la possibilité de modifier le découpage qui nous sera proposé ? Je n’en sais rien.
- Vous fustigez également le nouveau mode de scrutin. Pour quelles raisons ?
- Ce scrutin binominal, que l’on ne retrouve nulle part en Europe, est totalement incohérent. Il n’a aucun sens ! Sur un même territoire, les électeurs vont élire deux personnes avec l’obligation de désigner un homme et une femme. Ce binôme sera difficile à gérer parce qu’aujourd’hui, le Conseil général décide des opérations à mener sur le canton. Le conseiller général du canton fait une proposition à l’Exécutif départemental qui, en fonction de la situation financière du département, accède ou pas à la demande de l’élu, d’un élu. Le scrutin binominal fera naître, sur le même canton, alors qu’ils ont été élus ensemble, des antagonismes très forts entre les deux élus. L’un, par exemple, voulant aménager une route là où il réside, sur son territoire. L’autre voulant, bien entendu, faire des aménagements sur le sien.
- Ces deux représentants seront élus au scrutin majoritaire à deux tours. Auriez-vous préféré un scrutin par liste ?
- C’est bien-là le problème, parce que lorsque deux représentants sont élus sur une liste, la tête de liste porte un projet. Avec cette loi, ils pourront ne pas appartenir à la même sensibilité politique. Et, même s’ils sont d’accord entre eux avant l’élection et sont élus ensemble, une fois désignés, n’appartenant pas au même territoire, ils feront des calculs arithmétiques sur le nombre de voix d’un côté et de l’autre et suivront des tactiques politiciennes sur le choix des aménagements. Prenons un exemple : un nouveau canton, regroupant les Deux Sevi, les Deux Sorru, le Cruzzini-Cinarca et Ajaccio, risque d’avoir un élu issu du territoire d’Osani et un élu d’Ajaccio. L’élu d’Osani veut une salle des fêtes à Osani, l’élu d’Ajaccio ne va pas être d’accord et veut la salle des fêtes à Ajaccio ! Comment faire pour concilier les deux ?
- Ce binôme posera, donc, selon vous, plus de problèmes qu’il n’apportera de solutions ?
- Ce sera ingérable ! D’ailleurs, beaucoup d’amendements ont été déposés, aussi bien du groupe UMP, que des Radicaux, des Communistes et des Ecologistes qui ne sont pas d’accord sur ce principe du binôme. Même si le gouvernement se défend en disant qu’il impose le binôme parce qu’il veut imposer la parité.
- Que vous inspire ce principe de parité, au vu de la quasi-absence des femmes dans les Conseils généraux?
- Dans le contexte politique actuel, conformément aux lois qui ont été votées, personne n’interdit à une femme de se présenter à quelque élection que ce soit. La preuve, c’est que certaines femmes réussissent beaucoup mieux que les hommes. Imposer une femme à une élection n’est déjà pas valorisant pour elle ! L’imposer en binôme sur un territoire, je ne pense pas que ce soit un choix judicieux. Est-on sûr que, sur ce territoire, il y aura la volonté express d’une femme de s’engager en politique, d’être élue conseillère générale ou territoriale ? Nous avons déjà toutes les difficultés pour établir les listes paritaires, notamment aux élections régionales, alors pourquoi vouloir l’imposer aux cantonales !
- Quel serait, selon vous, le mode de scrutin le plus adéquat ?
- Il faudrait réfléchir, dans le cadre des institutions, à une représentation à la proportionnelle dans les villes et à une représentation uninominale dans les cantons ruraux avec une parité. Mais, pour la Corse, c’est très difficile et très compliqué à mettre en place.
- Nicolas Sarkozy laissait à la Corse le choix de rester ou pas hors de la réforme des collectivités. Qu’en est-il aujourd’hui ?
- C’est un peu compliqué. La Corse ne rentrera pas dans la réforme pour tout ce qui touche la région parce qu’elle n’est pas une région, mais une collectivité territoriale à statut particulier. Donc, quand le gouvernement prend une décision ou veut faire voter un projet de loi pour les autres régions, cette décision ne peut pas s’adapter d’office à notre île sans que l’Assemblée de Corse ne soit consultée. En ce qui concerne les départements, nous restons dans le droit commun. Ce qui va être appliqué au niveau national, sera appliqué à la Corse.
Propos recueillis par Nicole MARI
- Cette proposition de loi a déjà été rejetée une fois par le Sénat au mois de janvier. Elle n’est passée qu’avec une courte majorité, d’une quinzaine de voix, à l’Assemblée nationale parce que, seuls, les socialistes l’ont votée. Elle porte, notamment, sur le changement d’intitulé des conseillers généraux qui vont s’appeler conseillers départementaux. Sur la durée du mandat avec le rallongement du mandat de la présidence, qui passe de 3 ans à 6 ans, comme pour l’ensemble des conseillers généraux. Et sur le redécoupage des cantons.
- Est-ce surtout ce dernier point qui fâche ?
- Oui. Les deux premiers points n’ont pas d’incidence majeure sur la vie publique et politique du département. Le redécoupage est beaucoup plus problématique parce qu’il se base sur le principe de remodeler les cantons avec une population minimum de 10 000 habitants, une moyenne départementale de 13 000 habitants et un seuil de plus ou moins 20 %. Si ce principe est appliqué dans le département de la Corse-du-Sud, cela signifie que, non seulement 3 ou 4 cantons ruraux vont être regroupés en un seul, mais ce seul canton, qui restera, sera totalement noyé sous la masse de population apportée par les communes urbaines.
- Le regroupement de cantons ruraux ne sera-t-il pas suffisant pour atteindre le seuil exigé ?
- Non. Même en regroupant 3 ou 4 cantons ruraux, le seuil des 10 000 habitants est loin d’être atteint. Donc, ces cantons ruraux, qui restent toujours en-deçà du seuil, vont être regroupés avec des communes comme Porto-Vecchio ou Ajaccio. Si on regarde la géographie du terrain et la localisation des communes, on se rend compte que, par exemple, les cantons des Deux Sevi, des Deux Sorru et du Cruzzini-Cinarca n’arrivent pas à rassembler 10 000 habitants. Ils en totalisent à peine 6000 ou 6500. Par conséquent, ils seront regroupés avec un canton d’Ajaccio, voire même avec 2 ou 3 villes de 3 500 ou 4 000 habitants comme Alata, Afa… Cette opération consiste à sacrifier, sur l’autel d’un principe qui résulte notamment d’une décision du Conseil d’Etat, les cantons ruraux pour atteindre le seuil démographique exigible.
- Vous soulevez également l’impact du redécoupage sur les intercommunalités. Que craignez-vous exactement ?
- Le redécoupage, tel que le suggère le projet de loi aujourd’hui par rapport au nombre d’habitants, raye complètement de la carte toutes les intercommunalités. En regroupant 2 ou 3 cantons et en y rajoutant un morceau d’un autre territoire, la nouvelle entité se retrouve à cheval sur 3 ou 4 intercommunalités. Il n’y a plus, ni cohérence territoriale, ni pertinence du territoire. Donc, tout ce travail, qui a été réalisé jusqu’à présent sur la cohérence territoriale et le périmètre pertinent des territoires, va disparaître.
- Qui va décider du contenu de ce redécoupage ? Est-il déjà acté ?
- Non. Le gouvernement décide du principe du découpage, le reste n’est pas encore connu. Nous serons consultés sur le projet de loi pendant six semaines. Aurons-nous la possibilité de modifier le découpage qui nous sera proposé ? Je n’en sais rien.
- Vous fustigez également le nouveau mode de scrutin. Pour quelles raisons ?
- Ce scrutin binominal, que l’on ne retrouve nulle part en Europe, est totalement incohérent. Il n’a aucun sens ! Sur un même territoire, les électeurs vont élire deux personnes avec l’obligation de désigner un homme et une femme. Ce binôme sera difficile à gérer parce qu’aujourd’hui, le Conseil général décide des opérations à mener sur le canton. Le conseiller général du canton fait une proposition à l’Exécutif départemental qui, en fonction de la situation financière du département, accède ou pas à la demande de l’élu, d’un élu. Le scrutin binominal fera naître, sur le même canton, alors qu’ils ont été élus ensemble, des antagonismes très forts entre les deux élus. L’un, par exemple, voulant aménager une route là où il réside, sur son territoire. L’autre voulant, bien entendu, faire des aménagements sur le sien.
- Ces deux représentants seront élus au scrutin majoritaire à deux tours. Auriez-vous préféré un scrutin par liste ?
- C’est bien-là le problème, parce que lorsque deux représentants sont élus sur une liste, la tête de liste porte un projet. Avec cette loi, ils pourront ne pas appartenir à la même sensibilité politique. Et, même s’ils sont d’accord entre eux avant l’élection et sont élus ensemble, une fois désignés, n’appartenant pas au même territoire, ils feront des calculs arithmétiques sur le nombre de voix d’un côté et de l’autre et suivront des tactiques politiciennes sur le choix des aménagements. Prenons un exemple : un nouveau canton, regroupant les Deux Sevi, les Deux Sorru, le Cruzzini-Cinarca et Ajaccio, risque d’avoir un élu issu du territoire d’Osani et un élu d’Ajaccio. L’élu d’Osani veut une salle des fêtes à Osani, l’élu d’Ajaccio ne va pas être d’accord et veut la salle des fêtes à Ajaccio ! Comment faire pour concilier les deux ?
- Ce binôme posera, donc, selon vous, plus de problèmes qu’il n’apportera de solutions ?
- Ce sera ingérable ! D’ailleurs, beaucoup d’amendements ont été déposés, aussi bien du groupe UMP, que des Radicaux, des Communistes et des Ecologistes qui ne sont pas d’accord sur ce principe du binôme. Même si le gouvernement se défend en disant qu’il impose le binôme parce qu’il veut imposer la parité.
- Que vous inspire ce principe de parité, au vu de la quasi-absence des femmes dans les Conseils généraux?
- Dans le contexte politique actuel, conformément aux lois qui ont été votées, personne n’interdit à une femme de se présenter à quelque élection que ce soit. La preuve, c’est que certaines femmes réussissent beaucoup mieux que les hommes. Imposer une femme à une élection n’est déjà pas valorisant pour elle ! L’imposer en binôme sur un territoire, je ne pense pas que ce soit un choix judicieux. Est-on sûr que, sur ce territoire, il y aura la volonté express d’une femme de s’engager en politique, d’être élue conseillère générale ou territoriale ? Nous avons déjà toutes les difficultés pour établir les listes paritaires, notamment aux élections régionales, alors pourquoi vouloir l’imposer aux cantonales !
- Quel serait, selon vous, le mode de scrutin le plus adéquat ?
- Il faudrait réfléchir, dans le cadre des institutions, à une représentation à la proportionnelle dans les villes et à une représentation uninominale dans les cantons ruraux avec une parité. Mais, pour la Corse, c’est très difficile et très compliqué à mettre en place.
- Nicolas Sarkozy laissait à la Corse le choix de rester ou pas hors de la réforme des collectivités. Qu’en est-il aujourd’hui ?
- C’est un peu compliqué. La Corse ne rentrera pas dans la réforme pour tout ce qui touche la région parce qu’elle n’est pas une région, mais une collectivité territoriale à statut particulier. Donc, quand le gouvernement prend une décision ou veut faire voter un projet de loi pour les autres régions, cette décision ne peut pas s’adapter d’office à notre île sans que l’Assemblée de Corse ne soit consultée. En ce qui concerne les départements, nous restons dans le droit commun. Ce qui va être appliqué au niveau national, sera appliqué à la Corse.
Propos recueillis par Nicole MARI
Hémicycle de lAssemblée Nationale
Elections cantonales : Le scrutin binominal et paritaire adopté
La réforme des modes de scrutins locaux, qui vient d’être adoptée, en deuxième lecture, par l'Assemblée nationale, enterre, définitivement, la réforme de 2010 instaurée par le précédent gouvernement et abrogée par la gauche à l'automne dernier. Les conseillers généraux seront désormais appelés conseillers départementaux et se présenteront en binôme aux élections : un homme et une femme dans chaque canton, élus au scrutin majoritaire à deux tours pour six ans.
Un mode de scrutin inédit
La mesure instaurant ce scrutin binominal avait été rejetée en première lecture, le 17 janvier, et en seconde lecture, le 14 mars, par le Sénat qui avait, ainsi, amputé le projet de loi de Manuel Valls de sa principale disposition. Le 20 mars, la Commission des lois de l’Assemblée nationale a rétabli ce scrutin pour les élections cantonales. Le binôme vise à favoriser l'élection des femmes à l'échelon départemental où les hommes sont largement prédominants. En effet, les conseils généraux ne totalisent, aujourd’hui, sur le territoire national, que 15,3% de femmes élues. Dans l’île, seules 2 femmes sont élues en Corse du Sud et aucune en Haute-Corse. Le mode de scrutin inédit et la parité forcée suscitent l'opposition, pour des raisons différentes, de la droite, du centre, des Communistes et des Ecologistes. Uniquement soutenue par les socialistes, cette réforme a fait l’objet de plus de 1000 amendements.
Un redécoupage des cantons
Pour conserver le nombre total de conseillers, le nombre de cantons sera divisé par deux, passant ainsi de 4 000 à 2 000. La carte cantonale, inchangée depuis 1801, sera redécoupée en fonction de critères démographiques fustigés par la droite qui les accuse de favoriser les villes. Le Front de gauche et les Ecologistes, qui se sont abstenus lors du vote, défendent pour leur part, au nom du pluralisme, un système intégrant la représentation proportionnelle. Actuellement, les conseils généraux, qui gèrent les départements, sont renouvelés par moitié tous les trois ans lors des élections cantonales, avec un mode de scrutin majoritaire à deux tours.
La proportionnelle aux municipales
L'Assemblée vient, également, d’adopter de justesse, avec un vote assis-debout à une voix près, la réduction du seuil permettant le mode de scrutin proportionnel par liste pour les élections municipales. Ce seuil, qui est actuellement de 3500 habitants, descend à 500 habitants. Pour sa part, le Sénat s'était prononcé, à l'unanimité, pour un seuil de 1000 habitants. Autre changement prévu par ce texte : les intercommunalités seront désormais gérées par des représentants directement issus des listes des élections municipales.
La loi adoptée en avril
Après cette nouvelle étape franchie d'un parcours législatif, qui s’est avéré difficile, la réforme des modes de scrutins locaux devrait être définitivement adoptée à la mi-avril. Les députés vont, maintenant, tenter de se mettre d'accord sur un texte commun avec les sénateurs au sein d'une commission mixte paritaire (7 députés/7 sénateurs) qui se réunira le 2 avril. En cas d'accord, le projet sera adopté définitivement les 8 et 15 avril. En cas de désaccord, une 3ème lecture aura lieu et l'Assemblée aura le dernier mot, lors d'un ultime vote, le 17 avril.
Elections territoriales en 2014 ?
Enfin, les élections cantonales et territoriales ont été reportées à 2015. Elles devaient se dérouler en 2014 mais trois autres élections étant prévues - municipales, européennes, sénatoriales -, le gouvernement a préféré les décaler pour éviter un encombrement des scrutins. Pour sa part, l’opposition n’y voit qu’un moyen pour la majorité de gauche de limiter la défaite annoncée à ces divers scrutins.
Néanmoins, le suspens demeure sur la date des prochaines territoriales qui pourraient, finalement, être maintenues en 2014. Le Conseil d’Etat a fait savoir que, si la réforme en cours justifie le report des cantonales, rien ne justifie celui des Territoriales. Il argue que les électeurs ont donné aux élus régionaux un mandat de 4 ans et non de 5 ans et que rien n’autorise le gouvernement à y déroger. Affaire à suivre…
N. M.
La réforme des modes de scrutins locaux, qui vient d’être adoptée, en deuxième lecture, par l'Assemblée nationale, enterre, définitivement, la réforme de 2010 instaurée par le précédent gouvernement et abrogée par la gauche à l'automne dernier. Les conseillers généraux seront désormais appelés conseillers départementaux et se présenteront en binôme aux élections : un homme et une femme dans chaque canton, élus au scrutin majoritaire à deux tours pour six ans.
Un mode de scrutin inédit
La mesure instaurant ce scrutin binominal avait été rejetée en première lecture, le 17 janvier, et en seconde lecture, le 14 mars, par le Sénat qui avait, ainsi, amputé le projet de loi de Manuel Valls de sa principale disposition. Le 20 mars, la Commission des lois de l’Assemblée nationale a rétabli ce scrutin pour les élections cantonales. Le binôme vise à favoriser l'élection des femmes à l'échelon départemental où les hommes sont largement prédominants. En effet, les conseils généraux ne totalisent, aujourd’hui, sur le territoire national, que 15,3% de femmes élues. Dans l’île, seules 2 femmes sont élues en Corse du Sud et aucune en Haute-Corse. Le mode de scrutin inédit et la parité forcée suscitent l'opposition, pour des raisons différentes, de la droite, du centre, des Communistes et des Ecologistes. Uniquement soutenue par les socialistes, cette réforme a fait l’objet de plus de 1000 amendements.
Un redécoupage des cantons
Pour conserver le nombre total de conseillers, le nombre de cantons sera divisé par deux, passant ainsi de 4 000 à 2 000. La carte cantonale, inchangée depuis 1801, sera redécoupée en fonction de critères démographiques fustigés par la droite qui les accuse de favoriser les villes. Le Front de gauche et les Ecologistes, qui se sont abstenus lors du vote, défendent pour leur part, au nom du pluralisme, un système intégrant la représentation proportionnelle. Actuellement, les conseils généraux, qui gèrent les départements, sont renouvelés par moitié tous les trois ans lors des élections cantonales, avec un mode de scrutin majoritaire à deux tours.
La proportionnelle aux municipales
L'Assemblée vient, également, d’adopter de justesse, avec un vote assis-debout à une voix près, la réduction du seuil permettant le mode de scrutin proportionnel par liste pour les élections municipales. Ce seuil, qui est actuellement de 3500 habitants, descend à 500 habitants. Pour sa part, le Sénat s'était prononcé, à l'unanimité, pour un seuil de 1000 habitants. Autre changement prévu par ce texte : les intercommunalités seront désormais gérées par des représentants directement issus des listes des élections municipales.
La loi adoptée en avril
Après cette nouvelle étape franchie d'un parcours législatif, qui s’est avéré difficile, la réforme des modes de scrutins locaux devrait être définitivement adoptée à la mi-avril. Les députés vont, maintenant, tenter de se mettre d'accord sur un texte commun avec les sénateurs au sein d'une commission mixte paritaire (7 députés/7 sénateurs) qui se réunira le 2 avril. En cas d'accord, le projet sera adopté définitivement les 8 et 15 avril. En cas de désaccord, une 3ème lecture aura lieu et l'Assemblée aura le dernier mot, lors d'un ultime vote, le 17 avril.
Elections territoriales en 2014 ?
Enfin, les élections cantonales et territoriales ont été reportées à 2015. Elles devaient se dérouler en 2014 mais trois autres élections étant prévues - municipales, européennes, sénatoriales -, le gouvernement a préféré les décaler pour éviter un encombrement des scrutins. Pour sa part, l’opposition n’y voit qu’un moyen pour la majorité de gauche de limiter la défaite annoncée à ces divers scrutins.
Néanmoins, le suspens demeure sur la date des prochaines territoriales qui pourraient, finalement, être maintenues en 2014. Le Conseil d’Etat a fait savoir que, si la réforme en cours justifie le report des cantonales, rien ne justifie celui des Territoriales. Il argue que les électeurs ont donné aux élus régionaux un mandat de 4 ans et non de 5 ans et que rien n’autorise le gouvernement à y déroger. Affaire à suivre…
N. M.