Me Jean-Sébastien De Casalta, bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Bastia.
- Quel est, dans ce dossier, l’élément le plus problématique ?
- Il ne faut pas perdre de vue la situation juridique dans laquelle nous nous trouvons. Deux décisions du Conseil constitutionnel ont retoqué des dispositifs qui proposaient qu’un régime spécifique et dérogatoire soit consacré par le législateur. La situation de désordre foncier, que connaît la Corse, ajoutée à la problématique de spéculation immobilière, mérite un traitement particulier. C’est juridiquement possible en l’état de la jurisprudence ancienne du Conseil constitutionnel. Les deux décisions, qu’il a prises, s’expliquent pour des raisons plus politiques que juridiques. La problématique s’inscrit dans cette toile de fond dans laquelle j’ai placé les quatre scénarii proposés. Il faut tenir compte de ces deux décisions et du fait que d’autres dispositifs dérogatoires ont été envisagés et sont en cours en Alsace-Moselle, à l’île Saint Martin ou en Polynésie française.
- De quels dispositifs dérogatoires bénéficient-elles ?
- D’un statut fiscal dérogatoire. Le dispositif en Alsace-Moselle est dérogatoire dans un certain nombre de domaines. Pour l’île Saint Martin ou la Polynésie française, c’est un dispositif fiscal qui a été validé. Donc, le principe de légalité autorise des dérogations. La jurisprudence européenne, qui a été rappelée lors du débat par le président de l’Assemblée de Corse, permet que des situations différentes puissent être traitées de manière différente. C’est cela qu’en réalité, nous soutenons. Nous le soutenons d’autant plus que ce principe nous permet de nous prévaloir de la légitimité d’un statut dérogatoire. Il est susceptible de conduire utilement une discussion qui, je l’espère, sera féconde et fertile et amènera le gouvernement, à considérer nécessaire et indispensable de proroger le dispositif dérogatoire des Arrêtés Miot, compte tenu de cette situation pathologique de désordre foncier.
- C’est-à-dire le quatrième scénario que vous proposez ? A-t-il votre préférence ?
- Difficile de se prononcer ! Le premier scénario est le plus pérenne et aurait ma faveur et, sans doute, celle de la majorité des Corses. Il instaure un dispositif dérogatoire qui permettrait le transfert de la compétence fiscale à la CTC, mais il nécessite une réforme de la Constitution, qui, nous le savons, est difficilement réalisable en l’état. Il en reste trois autres. Le second, qui est articulé sur l’article 72-2 de la Constitution, est un dispositif autonome. Il est considéré comme possible par des sachants qui se sont penchés sur la question. Il permettrait d’éviter une réforme de la Constitution. Bien mieux, les constitutionnalistes ont considéré que, ce traitement particulier à une situation paroxystiquement anormale étant conforme à la loi, le risque d’inconstitutionnalité serait moindre. Ce scénario peut être construit, mais il faut aller très vite pour le mettre en œuvre.
- Au final, n’est-ce pas la contrainte du temps qui déterminera le choix ?
- Nous savons qu’à compter de novembre démarrera la campagne des Présidentielles, et ce sujet des Arrêtés Miot est susceptible de cristalliser des tensions politiques au plan national. C’est dire qu’il est peu envisageable qu’un dispositif législatif puisse être construit et proposé par le gouvernement dans cette période électorale. Il faut agir vite, de manière pragmatique et efficace, en essayant de réunir un consensus autour d’un dispositif qui pourrait recevoir un accueil favorable de la part du gouvernement.
- Qu’avez-vous pensé du débat et des réactions des élus territoriaux à votre rapport ?
- J’ai écouté avec beaucoup d’attention les interventions des différents courants politiques. Il m’a semblé que la représentation politique insulaire avait pris la mesure de la nécessité d’agir vite et d’imaginer un dispositif permettant notamment d’aboutir à un report de l’application de ce droit commun qui est prévue à compter du 1er janvier 2018. Il leur appartiendra, ensuite, d’essayer de trouver les voies juridiques qui leur paraissent appropriées. Quel scénario retenir ? Lequel aura leur préférence ? Il est souhaitable que les élus se mettent d’accord sur un dispositif susceptible de faire avancer les discussions qu’ils conduiront très prochainement avec le gouvernement. Le but est de définir le véhicule législatif qui sera le plus approprié et qui évitera l’écueil de l’inconstitutionnalité. Si saisine du Conseil constitutionnel il y avait à nouveau, personne ne peut dire ce que déciderait cette juridiction !
- Eu égard au contexte politique actuel, peut-on sauver les Arrêtés Miot ?
- C’est difficile d’écrire l’avenir. Il appartiendra à la représentation élue de la Corse, soutenue par une forte mobilisation populaire, d’être convaincante auprès du gouvernement. Elle le sera d’autant plus qu’elle sera unie et qu’elle aura le soutien de toute la population. Le gouvernement réservera-t-il un accueil favorable à cette proposition ? Il serait prématuré de le dire. J’espère que tel sera le cas !
Propos recueillis par Nicole MARI.
- Il ne faut pas perdre de vue la situation juridique dans laquelle nous nous trouvons. Deux décisions du Conseil constitutionnel ont retoqué des dispositifs qui proposaient qu’un régime spécifique et dérogatoire soit consacré par le législateur. La situation de désordre foncier, que connaît la Corse, ajoutée à la problématique de spéculation immobilière, mérite un traitement particulier. C’est juridiquement possible en l’état de la jurisprudence ancienne du Conseil constitutionnel. Les deux décisions, qu’il a prises, s’expliquent pour des raisons plus politiques que juridiques. La problématique s’inscrit dans cette toile de fond dans laquelle j’ai placé les quatre scénarii proposés. Il faut tenir compte de ces deux décisions et du fait que d’autres dispositifs dérogatoires ont été envisagés et sont en cours en Alsace-Moselle, à l’île Saint Martin ou en Polynésie française.
- De quels dispositifs dérogatoires bénéficient-elles ?
- D’un statut fiscal dérogatoire. Le dispositif en Alsace-Moselle est dérogatoire dans un certain nombre de domaines. Pour l’île Saint Martin ou la Polynésie française, c’est un dispositif fiscal qui a été validé. Donc, le principe de légalité autorise des dérogations. La jurisprudence européenne, qui a été rappelée lors du débat par le président de l’Assemblée de Corse, permet que des situations différentes puissent être traitées de manière différente. C’est cela qu’en réalité, nous soutenons. Nous le soutenons d’autant plus que ce principe nous permet de nous prévaloir de la légitimité d’un statut dérogatoire. Il est susceptible de conduire utilement une discussion qui, je l’espère, sera féconde et fertile et amènera le gouvernement, à considérer nécessaire et indispensable de proroger le dispositif dérogatoire des Arrêtés Miot, compte tenu de cette situation pathologique de désordre foncier.
- C’est-à-dire le quatrième scénario que vous proposez ? A-t-il votre préférence ?
- Difficile de se prononcer ! Le premier scénario est le plus pérenne et aurait ma faveur et, sans doute, celle de la majorité des Corses. Il instaure un dispositif dérogatoire qui permettrait le transfert de la compétence fiscale à la CTC, mais il nécessite une réforme de la Constitution, qui, nous le savons, est difficilement réalisable en l’état. Il en reste trois autres. Le second, qui est articulé sur l’article 72-2 de la Constitution, est un dispositif autonome. Il est considéré comme possible par des sachants qui se sont penchés sur la question. Il permettrait d’éviter une réforme de la Constitution. Bien mieux, les constitutionnalistes ont considéré que, ce traitement particulier à une situation paroxystiquement anormale étant conforme à la loi, le risque d’inconstitutionnalité serait moindre. Ce scénario peut être construit, mais il faut aller très vite pour le mettre en œuvre.
- Au final, n’est-ce pas la contrainte du temps qui déterminera le choix ?
- Nous savons qu’à compter de novembre démarrera la campagne des Présidentielles, et ce sujet des Arrêtés Miot est susceptible de cristalliser des tensions politiques au plan national. C’est dire qu’il est peu envisageable qu’un dispositif législatif puisse être construit et proposé par le gouvernement dans cette période électorale. Il faut agir vite, de manière pragmatique et efficace, en essayant de réunir un consensus autour d’un dispositif qui pourrait recevoir un accueil favorable de la part du gouvernement.
- Qu’avez-vous pensé du débat et des réactions des élus territoriaux à votre rapport ?
- J’ai écouté avec beaucoup d’attention les interventions des différents courants politiques. Il m’a semblé que la représentation politique insulaire avait pris la mesure de la nécessité d’agir vite et d’imaginer un dispositif permettant notamment d’aboutir à un report de l’application de ce droit commun qui est prévue à compter du 1er janvier 2018. Il leur appartiendra, ensuite, d’essayer de trouver les voies juridiques qui leur paraissent appropriées. Quel scénario retenir ? Lequel aura leur préférence ? Il est souhaitable que les élus se mettent d’accord sur un dispositif susceptible de faire avancer les discussions qu’ils conduiront très prochainement avec le gouvernement. Le but est de définir le véhicule législatif qui sera le plus approprié et qui évitera l’écueil de l’inconstitutionnalité. Si saisine du Conseil constitutionnel il y avait à nouveau, personne ne peut dire ce que déciderait cette juridiction !
- Eu égard au contexte politique actuel, peut-on sauver les Arrêtés Miot ?
- C’est difficile d’écrire l’avenir. Il appartiendra à la représentation élue de la Corse, soutenue par une forte mobilisation populaire, d’être convaincante auprès du gouvernement. Elle le sera d’autant plus qu’elle sera unie et qu’elle aura le soutien de toute la population. Le gouvernement réservera-t-il un accueil favorable à cette proposition ? Il serait prématuré de le dire. J’espère que tel sera le cas !
Propos recueillis par Nicole MARI.