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Législatives. Paul André-Colombani : "À travers l'autonomie, on va pouvoir changer le quotidien des Corses"


le Lundi 24 Juin 2024 à 17:39

Député sortant et candidat du PNC-Avanzemu, Paul-André Colombani se relance dans la bataille des législatives pour conserver son siège de député de la 2ème circonscription de Corse-du-Sud, lors du scrutin anticipé des 30 juin et 7 juillet. Aux côtés de sa suppléante, Thérèse Malu-Pellegrinetti, il entend mettre l’accent sur l’importance de poursuivre le processus d’autonomie pour la Corse. Et avertit dans le même temps des conséquences que pourraient avoir une potentielle majorité du RN à l’Assemblée nationale sur celui-ci.



- Suite à la dissolution de l’Assemblée nationale, vous vous êtes rapidement déclaré candidat à votre propre succession. Une décision évidente ?
- C’est une décision qui a bien évidemment été prise avec l’aval des militants du PNC. Cependant je n’étais qu'à mi-mandat, donc il était aussi un peu naturel que ma volonté soit de poursuivre les actions que j’ai entamées. Nous n’attendions pas cette dissolution maintenant, elle amène beaucoup d'incertitudes et pour ma part une très grosse frustration, puisque ma proposition de loi visant à la création d’un CHU en Corse devait être votée quelques jours après. 
 
- Si vous êtes réélu, l'une de vos priorités sera donc de remettre cette proposition de loi pour la création d'un CHU sur la table ?
- De la façon la plus urgente possible. L’examen en commission des affaires sociales s'est très bien passé puisque j'ai recueilli l'unanimité des voix. Et la proposition de loi devait passer dans l’hémicycle dans le cadre d’une procédure d’examen simplifiée. Donc il n’y avait quasiment plus rien qui s'opposait à un vote en séance. Chaque année, en moyenne 30 000 Corses se déplacent sur le continent pour se faire soigner, ce n'est plus acceptable aujourd'hui. Nous sommes la dernière région à ne pas disposer de CHU. Il faut donner aux Corses les moyens de se soigner décemment.
 
- En 2022, vous aviez bénéficié d'un soutien de l'ensemble du mouvement national. Faute d’union des nationalistes, Core in Fronte a cette fois décidé de placer des candidats sur les quatre circonscriptions de l’île. Pour votre part, vous serez ainsi notamment opposé à Jean-Baptiste Cucchi. Cet élément ne risque-t-il pas de jouer en votre défaveur ?
- Core in Fronte est un parti démocratique, il est tout à fait légitime pour lui de pouvoir se présenter aux élections. Cette division peut effectivement affaiblir les candidatures, mais je ne suis pas inquiet outre mesure. J'ai reçu le soutien de nombreux élus du territoire et j'espère retrouver à peu près les voix qu'on avait recueilli au premier tour en 2022. Et j’espère aussi que nous saurons trouver le chemin pour se rassembler au 2nd tour.
 
- Quel bilan tirez-vous de ces deux ans de mandat ?
- Au travers le groupe LIOT, nous avons été en première ligne du débat sur la réforme des retraites. Nous avons longuement bataillé et nous avons déposé une motion de censure qui n’a pas abouti pour neuf voix. Cela fait seulement deux fois en 50 ans qu'on passe d'aussi près de faire tomber le Gouvernement, donc c'est quand même assez historique. Nous avons également participé à de nombreux combats contre la vie chère. Par exemple, plutôt que de faire baisser le taux de TVA sur l'essence, nous avions proposé de mettre en place des chèques essence afin de mieux aider les gens les plus défavorisés dans les territoires. Nous avons lutté pour préserver les acquis sociaux, notamment au niveau de l'assurance chômage. Notre groupe a vraiment effectué un travail de tous les côtés. Par ailleurs, toutes les thématiques sur la Corse ont été difficiles à faire entendre dans les lois de finances puisqu'il y a eu deux fois un recours au 49.3, mais, tout de même, le crédit d'impôt corse a pu être prorogé. Nous avons aussi porté un amendement pour surtaxer la vente des résidences secondaires. Et bien évidemment, la demande de création d’un CHU en Corse a été mon gros combat. Sur ma circonscription, l'année dernière, il y a aussi eu un combat assez important pour préserver la maternité de Porto-Vecchio, qui a pris beaucoup de temps.
 

- Justement, quelles mesures proposez-vous pour renforcer le pouvoir d’achat ?
- Aujourd’hui tout le monde promet tout et n'importe quoi, mais il ne faut pas tomber dans le populisme non plus. Il faudra voir exactement dans quel état se trouvent les finances du pays. On voit que les agences de notation ou la Commission européenne ont un certain nombre de reproches à faire à la France. Plutôt que de m'avancer sur des mesures incertaines qu'on ne pourra pas tenir, je préfère d'abord voir ce qu'on pourra faire au cas par cas, même si évidemment, il y a beaucoup de choses à mettre en place. Par exemple, on doit trouver des mesures pour aider les TPE, plutôt que d'aider de grosses entreprises qui vont - parce qu'on les exonère d'impôts - reverser plus à leurs actionnaires. Le rachat d'actions doit être taxé, c'est l’une des propositions de loi qu'avait fait le groupe LIOT. Il faudra aussi regarder ce qu’il est possible de faire du côté des très gros patrimoines, car on ne peut pas continuer à exonérer certaines classes de la population quand d'autres n'ont plus de quoi manger ou se chauffer.
 
- Comment imaginez-vous la suite du processus parlementaire pour l’autonomie ?
- C’est une grosse incertitude. Il est évident que dans le cas où le Rassemblement National serait majoritaire, il n'y aurait plus rien de ce côté-là et cela créerait de nombreuses tensions en Corse. Le Rassemblement National change souvent d'avis - notamment au niveau des retraites, du SMIC où toutes les semaines il a une position nouvelle -, mais là où il est constant c’est quant à sa position sur la Corse. Il est contre la langue, contre l'autonomie, contre l'identité, contre tout ce qu'on peut faire en Corse. Le processus de Beauvau n'était pas loin de régler un certain nombre de problèmes. Donc, j'espère qu'on trouvera les chemins de le raccrocher. C'est pour cela qu'il ne faut pas se tromper dimanche et envoyer à Paris des gens qui sont capables de parler de tout cela, quelle que soit la majorité élue.
 
- Ce vote massif en faveur du Rassemblement National lors des élections européennes est notamment lié aux questions de l'insécurité et de l'immigration. Quelles sont vos positions quant à ces sujets ?
- Nous n’avons pas de tabou là-dessus. Nous étions prêts à débattre, et même à voter le projet de loi asile-immigration. Là encore, on voit toute l'ambivalence du Rassemblement Nation. Au mois de décembre dernier, l’occasion était donnée d’évoquer très longuement ce sujet au Parlement avec ce projet de loi du ministre Darmanin. Et le Rassemblement Nation s’est allié à l'extrême gauche afin de formuler une motion de rejet. Pour notre part, tant qu’il y a de l’humanisme nous serons là. Mais si on part vers des mesures d'extrême droite, comme la suppression du droit du sol, ce sont des choses que je ne peux pas voter et je serai en opposition. Par contre, je suis en même temps pour faciliter les procédures d'expulsion pour les gens qui se conduisent mal. On entend que le Rassemblement National fait beaucoup de promesses, mais il ne faut pas oublier que l'immigration n'est pas qu'un problème français, mais un problème à l'échelle européenne. Si le taureau n’est pas pris par les cornes à l'échelle européenne, on ne va pas s'en sortir. Giorgia Meloni, n'a d’ailleurs rien fait de mieux que de rentrer dans le rang de ce côté-là. Il n'y a pas de solution miracle. Et beaucoup des prositions du Rassemblement National sont anticonstitutionnelles. Et même s'il devient majoritaire, il n'aura pas les deux tiers nécessaires pour faire évoluer la Constitution.