Littoral de Linguizetta
C’est devant des élus plutôt remontés et pas vraiment prêts à laisser faire ce qu’ils considèrent comme « une histoire de fous, une aberration », que les services de l’Etat se sont livrés, lundi après-midi, pendant près de 2 heures, à une séance d’explication de l’étude effectuée conjointement par la DDTM2B (Direction départementale des territoires et de la mer de Haute-Corse) et le BRGM (Bureau de recherches géologiques et minières). La réunion a débuté par la présentation du document et des mesures de protection préconisées contre l’érosion et les submersions marines sur le littoral de la plaine orientale. Ensuite, les maires présents ont, tour à tour, exposé la problématique du littoral, pas seulement dans leur commune, mais région par région.
Des cas d’urgence
Tous ont clairement dit au préfet, Alain Rousseau, par la voix de leur président, Ange-Pierre Vivoni, qu’ils ne voulaient pas que le rapport soit officiel et applicable en l’état. Ils tiennent, au contraire, à ce qu’il reste un document banal afin que ni le Tribunal administratif, ni une administration ayant un lien avec l’urbanisme, ne puisse s’en emparer et l’opposer aux PLU (Plan local d’urbanisme). Comme c’est le cas pour les espaces remarquables où un document similaire fait désormais, en quelque sorte, jurisprudence.
Joseph Castelli, présent non en tant que président du Conseil général qui n’a pas de compétence en la matière, mais en tant que conseiller général de Casinca et ancien maire de Folelli, est intervenu dans le même sens. Il a alerté le Préfet sur l’urgence d’intervenir dans certains endroits déjà très impactés par l’érosion, comme la plage de Cap Sud sur la commune de Vescovato.
La crainte du gel des terres
Les élus locaux ont exprimé la crainte que toutes ces études ne finissent pas geler le développement de leur commune. Louis Semidei, maire de Talasani, a fait valoir qu’entre le désert et la bétonisation à outrance, il y avait un juste milieu !
Les maires ont expliqué que, contrairement aux affirmations du BRGM, la Plaine orientale a un poids économique non négligeable. Même si les retombées du tourisme et de l’activité littorale sont difficilement quantifiables, elles sont d’autant plus certaines que les structures touristiques, qui bordent ce littoral, disposent d’une grande capacité en termes de lits, ce qui leur permet de totaliser 30% des nuitées insulaires.
La responsabilité des maires
Le Préfet a écouté et pris le pouls de la fronde et des inquiétudes des élus communaux dont la vision et les enjeux sont bien éloignés de ceux des services de l’Etat. Il s’est voulu rassurant. Il a expliqué que l’Etat veut mettre en place un plan des risques liés à l’érosion et à la submersion marine afin d’informer les maires de l’existence de ces risques potentiels qui iront crescendo jusqu’à 2050. Il a demandé clairement aux maires de geler les constructions sur ces espaces submersibles en précisant que, s'ils passent outre, ils devront en assumer la responsabilité en cas de problèmes. L’Etat ne veut plus mettre la main à la poche pour indemniser qui que ce soit.
Une liste de risques
Quand au recul stratégique à l’intérieur des terres, préconisé par le BRGM et si décrié, il concernerait seulement les futures constructions. Celles existantes ne sauraient y être soumises. Alain Rousseau a semblé prendre conscience de l’urgence à agir. Il a promis de trouver des solutions à l’érosion du littoral, de tout faire pour aider les propriétaires des constructions existantes, depuis plus de 30 ans, à protéger leur habitation et leur outil de travail. Il a demandé aux maires de dresser une liste des établissements, des maisons individuelles et de toutes les constructions en dur du bord de mer construites en toute légalité, qui sont les plus menacées à très court terme afin de pouvoir intervenir, cas par cas, pour les protéger en attendant de trouver des solutions pérennes.
Une étude peu sérieuse
Pour cela, d’autres études doivent être réalisées. D’autant que le représentant de l’Office de l’Environnement a levé un lièvre ! Il a fait remarquer que l’étude du BRGM était beaucoup trop généraliste et pas assez hiérarchisée. Il estime qu’ayant été faite à une échelle trop large, 1/25000ème, elle ne permet pas de bâtir des plans d’actions, commune par commune. Pour travailler efficacement, il faut une échelle de 1/5000ème. Une façon d’expliquer que cette étude macro, qui a coûté 300 000 € aux contribuables, n’est pas assez sérieuse pour être considérée comme un document de référence ! Elle sera, donc, affinée, secteur par secteur, et s’étendra à tout le littoral insulaire. Une étude concernant la côte Nord-Ouest, de Galéria à Saint Florent, est, d’ailleurs, sur le point d’être lancée.
Pas d’argent
Ayant bien compris l’enjeu économique, le Préfet s’est engagé à donner des autorisations en bonne et due forme avec des AOT (Autorisation d’occupation temporaire) du domaine maritime. Mais l’aide de l’Etat sera purement technique. En aucun cas, financière. Le Préfet l’a dit sans ambages : « L’Etat ne financera rien ! Il n’y a pas de fonds. ». Il a juste évoqué la possibilité de recourir aux fonds Barnier, fonds de prévention des risques naturels majeurs. En clair, chacun, particulier ou professionnel, devra assumer le coût de son plan de sauvetage.
Les services de l’Etat reconnaissent, également, les dommages causés par le port de Taverna et la nécessité d’y remédier par l’installation d’un by-pass ou d’un aménagement spécifique qui permettrait de transférer, au Nord, le sable stocké au Sud du port. Mais, là aussi, ils n’avancent aucun moyen de financement !
Une prudence sceptique
Malgré toutes ces explications et ces assurances, les maires ou leurs représentants ne sont pas sortis tellement rassurés de la réunion. Certains même affichant un scepticisme prudent. Le Préfet a fait des promesses verbales, mais n’a pris aucun engagement, sauf celui de recevoir le 30 septembre, des représentants de l’UMIH (Union régionale des métiers et des industries de l’hôtellerie de Corse). Ceux-ci attendent plus que des promesses, ils espèrent des engagements fermes du représentant de l’Etat et la certitude que leur outil de travail sera préservé.
Affaire à suivre.
N.M.
A lire : Haute-Corse : L’Etat veut-il sacrifier le littoral de la plaine orientale ?
Des cas d’urgence
Tous ont clairement dit au préfet, Alain Rousseau, par la voix de leur président, Ange-Pierre Vivoni, qu’ils ne voulaient pas que le rapport soit officiel et applicable en l’état. Ils tiennent, au contraire, à ce qu’il reste un document banal afin que ni le Tribunal administratif, ni une administration ayant un lien avec l’urbanisme, ne puisse s’en emparer et l’opposer aux PLU (Plan local d’urbanisme). Comme c’est le cas pour les espaces remarquables où un document similaire fait désormais, en quelque sorte, jurisprudence.
Joseph Castelli, présent non en tant que président du Conseil général qui n’a pas de compétence en la matière, mais en tant que conseiller général de Casinca et ancien maire de Folelli, est intervenu dans le même sens. Il a alerté le Préfet sur l’urgence d’intervenir dans certains endroits déjà très impactés par l’érosion, comme la plage de Cap Sud sur la commune de Vescovato.
La crainte du gel des terres
Les élus locaux ont exprimé la crainte que toutes ces études ne finissent pas geler le développement de leur commune. Louis Semidei, maire de Talasani, a fait valoir qu’entre le désert et la bétonisation à outrance, il y avait un juste milieu !
Les maires ont expliqué que, contrairement aux affirmations du BRGM, la Plaine orientale a un poids économique non négligeable. Même si les retombées du tourisme et de l’activité littorale sont difficilement quantifiables, elles sont d’autant plus certaines que les structures touristiques, qui bordent ce littoral, disposent d’une grande capacité en termes de lits, ce qui leur permet de totaliser 30% des nuitées insulaires.
La responsabilité des maires
Le Préfet a écouté et pris le pouls de la fronde et des inquiétudes des élus communaux dont la vision et les enjeux sont bien éloignés de ceux des services de l’Etat. Il s’est voulu rassurant. Il a expliqué que l’Etat veut mettre en place un plan des risques liés à l’érosion et à la submersion marine afin d’informer les maires de l’existence de ces risques potentiels qui iront crescendo jusqu’à 2050. Il a demandé clairement aux maires de geler les constructions sur ces espaces submersibles en précisant que, s'ils passent outre, ils devront en assumer la responsabilité en cas de problèmes. L’Etat ne veut plus mettre la main à la poche pour indemniser qui que ce soit.
Une liste de risques
Quand au recul stratégique à l’intérieur des terres, préconisé par le BRGM et si décrié, il concernerait seulement les futures constructions. Celles existantes ne sauraient y être soumises. Alain Rousseau a semblé prendre conscience de l’urgence à agir. Il a promis de trouver des solutions à l’érosion du littoral, de tout faire pour aider les propriétaires des constructions existantes, depuis plus de 30 ans, à protéger leur habitation et leur outil de travail. Il a demandé aux maires de dresser une liste des établissements, des maisons individuelles et de toutes les constructions en dur du bord de mer construites en toute légalité, qui sont les plus menacées à très court terme afin de pouvoir intervenir, cas par cas, pour les protéger en attendant de trouver des solutions pérennes.
Une étude peu sérieuse
Pour cela, d’autres études doivent être réalisées. D’autant que le représentant de l’Office de l’Environnement a levé un lièvre ! Il a fait remarquer que l’étude du BRGM était beaucoup trop généraliste et pas assez hiérarchisée. Il estime qu’ayant été faite à une échelle trop large, 1/25000ème, elle ne permet pas de bâtir des plans d’actions, commune par commune. Pour travailler efficacement, il faut une échelle de 1/5000ème. Une façon d’expliquer que cette étude macro, qui a coûté 300 000 € aux contribuables, n’est pas assez sérieuse pour être considérée comme un document de référence ! Elle sera, donc, affinée, secteur par secteur, et s’étendra à tout le littoral insulaire. Une étude concernant la côte Nord-Ouest, de Galéria à Saint Florent, est, d’ailleurs, sur le point d’être lancée.
Pas d’argent
Ayant bien compris l’enjeu économique, le Préfet s’est engagé à donner des autorisations en bonne et due forme avec des AOT (Autorisation d’occupation temporaire) du domaine maritime. Mais l’aide de l’Etat sera purement technique. En aucun cas, financière. Le Préfet l’a dit sans ambages : « L’Etat ne financera rien ! Il n’y a pas de fonds. ». Il a juste évoqué la possibilité de recourir aux fonds Barnier, fonds de prévention des risques naturels majeurs. En clair, chacun, particulier ou professionnel, devra assumer le coût de son plan de sauvetage.
Les services de l’Etat reconnaissent, également, les dommages causés par le port de Taverna et la nécessité d’y remédier par l’installation d’un by-pass ou d’un aménagement spécifique qui permettrait de transférer, au Nord, le sable stocké au Sud du port. Mais, là aussi, ils n’avancent aucun moyen de financement !
Une prudence sceptique
Malgré toutes ces explications et ces assurances, les maires ou leurs représentants ne sont pas sortis tellement rassurés de la réunion. Certains même affichant un scepticisme prudent. Le Préfet a fait des promesses verbales, mais n’a pris aucun engagement, sauf celui de recevoir le 30 septembre, des représentants de l’UMIH (Union régionale des métiers et des industries de l’hôtellerie de Corse). Ceux-ci attendent plus que des promesses, ils espèrent des engagements fermes du représentant de l’Etat et la certitude que leur outil de travail sera préservé.
Affaire à suivre.
N.M.
A lire : Haute-Corse : L’Etat veut-il sacrifier le littoral de la plaine orientale ?