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Don du sang : en Corse les besoins augmentent, mais les donneurs restent peu nombreux


Andrea Petitjean le Jeudi 2 Janvier 2025 à 18:59

Le docteur Brigitte Peres, médecin référente de l’Établissement français du Sang (EFS) pour la région Paca-Corse, tire la sonnette d’alarme face à une situation inquiétante sur l'île, où les besoins en sang augmentent, mais où les donneurs restent trop peu nombreux.



0Rendez-vous le 9 janvier à Saint-Florent. (Archives CNI)
0Rendez-vous le 9 janvier à Saint-Florent. (Archives CNI)
Le début de l’année est souvent l’occasion de prendre de bonnes résolutions, alors pourquoi ne pas en prendre une qui puisse sauver la vie de quelqu’un ? Ce jeudi 9 janvier 2025, de 9 à 13 heures, l’Établissement français du Sang (EFS) organise une collecte de sang à Saint-Florent, au bus de collecte situé Place des Portes. Alors que la Corse fait partie des régions où le taux de donneurs reste parmi les plus bas de France, un appel à la solidarité est lancé pour répondre aux besoins croissants des hôpitaux et sauver des vies. Le docteur Brigitte Peres, médecin référente pour la région Paca-Corse, tire la sonnette d’alarme face à une situation inquiétante sur l'île, où les besoins augmentent, mais où les donneurs restent trop peu nombreux.

Seulement 2,4% de la population en âge de donner participe aux collectes en Corse
"Entre 2023 et 2024, c'est-à-dire du 1er janvier au 30 novembre des deux années, on a prélevé 5 % de moins de dons, donc une chute des dons de 5 %", explique le Dr Brigitte Peres. Cette diminution s'inscrit dans une tendance de baisse continue du nombre de donneurs en Corse. En effet, la Corse reste l'une des régions où le taux de participation au don de sang est le plus faible du pays. Le taux de donneurs en Corse est particulièrement bas : seulement 2,4% de la population en âge de donner participe aux collectes. Un chiffre bien en deçà de celui observé dans d'autres régions de France. Par exemple, en Bretagne, ce taux atteint 4,57%. Cette faible générosité est un véritable défi pour l'EFS, qui se bat pour atteindre un nombre suffisant de dons pour répondre aux besoins croissants sur l'île.

Plusieurs facteurs expliquent cette baisse continue des dons de sang en Corse. Le Dr Peres identifie d’abord la crise sanitaire du Covid-19, qui a perturbé la dynamique des collectes. "Il y a eu le Covid qui est passé par là, qui a tué une certaine dynamique", affirme-t-elle. L’impact de la pandémie a été double : il a non seulement diminué le nombre de donneurs par la fermeture des lieux de collecte, mais a aussi instauré une période de méfiance qui persiste encore aujourd'hui. Une autre cause identifiée par Brigitte Peres est l'introduction du système de prise de rendez-vous pour les collectes de sang. "Certaines personnes ont été découragées par ce changement de méthode et ont cessé de participer" déplore-t-elle. Bien que ce système soit censé organiser les collectes de manière plus fluide, il aurait, paradoxalement, contribué à réduire la participation.

La consommation de produits sanguins : une baisse paradoxale
Une donnée importante à prendre en compte est la diminution de la consommation de produits sanguins en France et en Corse. Selon le docteur Peres, cette diminution est due à des améliorations dans les prescriptions médicales. "La délivrance, c’est-à-dire la consommation de produits sanguins, diminue en France et diminue en Corse aussi", note-t-elle. Cette tendance est attribuée aux recommandations de la Haute Autorité de Santé et de la Société française d’anesthésie, qui ont permis de réduire les transfusions. 

Cela a conduit à une situation paradoxale : bien que les dons diminuent, le nombre de poches de sang délivrées reste stable grâce à cette gestion plus rationnelle des stocks. "Le nombre de poches délivrées est important, et la baisse est significative, ce qui fait qu’on reste toujours dans le même pourcentage de poches qui viennent de l’extérieur", précise le docteur Brigitte Peres, médecin référente pour la région Paca-Corse, tire la sonnette d’alarme face à une situation inquiétante sur l'île, où les besoins augmentent, mais où les donneurs restent trop peu nombreux.Peres. En conséquence, près de 22% des poches utilisées en Corse proviennent toujours de dons effectués en dehors de l’île.

Des disparités de générosité entre Haute-Corse et Corse-du-Sud
La situation est d'autant plus préoccupante qu'en Corse, la demande en sang excède l'offre. "Il y a plus de demandes que de donneurs, et c'est le cas depuis de très, très nombreuses années", explique le docteur Peres. Ce déséquilibre s'est accentué en 2023, avec des différences notables entre les deux départements de l'île. En Haute-Corse, l'indice de générosité s’élève à 2,23%, tandis qu'en Corse-du-Sud, il est légèrement plus élevé, à 2,66%. Ces chiffres restent largement insuffisants pour répondre aux besoins, car le taux de générosité idéal se situe bien au-delà de 3%. "La Corse souffre d’un déséquilibre structurel en matière de dons, et, malgré nos efforts, nous peinons à combler cet écart. Pour information, en 2023, 52% des donneurs étaient des femmes à Ajaccio contre 54% à Bastia", ajoute le docteurr Peres.

Force est de constater que la participation reste insuffisante au regard des nécessités sanitaires. Brigitte Peres évoque également le contexte socio-économique difficile qui touche une grande partie de la population insulaire. "On sait qu’un donneur est un être humain heureux, ce qui n’est pas le cas en ce moment", explique-t-elle. Dans une période marquée par l’incertitude et le stress, les citoyens sont de plus en plus concentrés sur leurs préoccupations personnelles, ce qui détourne leur attention de la solidarité collective, une situation qui selon le praticien ne fait qu’aggraver un problème de fond : les préoccupations quotidiennes, liées aux difficultés économiques et sociales, sont souvent perçues comme prioritaires par rapport à des actes de solidarité, comme le don de sang. 
Brigitte Peres appelle donc la population insulaire à se mobiliser, soulignant qu'aucun effort ne doit être épargné pour garantir la sécurité sanitaire de tous. "On va dans les écoles, on va dans les lycées, mais il faut que tout le monde se mobilise, sinon, nous n'y arriverons pas", conclut-elle.

Pour rappel, le don de sang est accessible à tous les adultes en bonne santé, à condition de respecter certains critères : être majeur, peser plus de 50 kg, être en bonne santé, et ne pas dépasser 71 ans. Un entretien médical préalable permet de garantir que le donneur ne présente aucun risque pour lui-même ou pour le receveur.