Marc Dufour, Président du directoire de la SNCM.
- Quelle est votre réaction après l’attribution de la DSP ?
- Une réaction de soulagement. Cela fait plus d’un an que toutes les équipes sont mobilisées. Et, quand je dis « mobilisé », le mot est faible ! Ce fut un parcours difficile où chacun a du faire beaucoup d’efforts. Je salue, d’ailleurs, les efforts de nos équipes et de celles de l’Office des transports (OTC) qui ont beaucoup travaillé sur ce dossier. Il nous faut, maintenant, nous montrer digne de la confiance qui nous a été accordée.
- Le compromis obtenu est-il satisfaisant pour la SNCM ?
- Une négociation est toujours un compromis. Des choses sont bien, d’autres plus difficiles. A partir du moment où nous sommes tombés d’accord, c’est que le compromis convient à l’entreprise. Nous allons faire tous nos efforts pour que ce contrat soit rempli à la satisfaction de tous. Et faire en sorte que cette nouvelle DSP soit le signe d’un nouveau départ pour la SNCM. Nous allons nous y employer dans les mois qui viennent.
- Vous vous êtes engagés à renouveler la flotte. Début juillet, Veolia a dit qu’elle ne donnera pas 1 centime pour les bateaux. Qui va financer ?
- Ce qu’a dit le président de Veolia est conforme à ce qui se passe dans toutes les entreprises. Lorsque l’Etat était le principal actionnaire, il avait un comportement différent. Il achetait des navires. Aujourd’hui, toute entreprise achète des biens de productions et les amortit sur une durée de 10, 15, 20 ou 25 ans. C’est l’exploitation et les moyens de production qui financent, ce ne sont pas les actionnaires qui, eux, jouent leur rôle au niveau de la capitalisation. C’est à nous, SNCM, de trouver les financements. C’est à l’amortissement économique de les payer. Nous sommes en train de travailler sur ce schéma-là. L’amortissement sera d’une vingtaine d’années pour les prochains navires qui seront acquis à partir de 2016.
- Vous misez sur une très forte progression du trafic. Une estimation, que nombre d’élus de la CTC jugent farfelue. Que leur répondez-vous ?
- Je pense qu’il y a insuffisance d’explications. La nouvelle DSP supprime 2 bateaux et les fréquences du Danielle Casanova et du Napoléon Bonaparte dans leur forme DSP. Nous mettons des navires de plus grande capacité. Nous transformons des cargos qui transportent, aujourd’hui, 500 ou 800 passagers en des bateaux qui transportent 1500 passagers. Il n’y a pas une génération spontanée de clientèle, mais un transfert de clientèle et une adaptation. Les flux de passagers sont traités différemment. La progression, que nous envisageons, est extrêmement modeste dans le temps. Elle n’est pas aussi importante qu’elle a été interprétée, par erreur, par un certain nombre de conseillers territoriaux.
- Les élus fustigent la hausse des tarifs résidents et du fret par rapport à ceux convenus dans le cahier des charges. Pourquoi y avez-vous dérogé ?
- Nous avons été très ambitieux dans la baisse des tarifs, notamment dans celle du mètre linéaire de fret. Nous avions envisagé une baisse de 35% à 40%. Il y aura une baisse, mais elle sera de l’ordre de 20% à 25%. Ce qui est déjà considérable ! L’objectif fixé était de 75€, le mètre linéaire. Il sera de 85 €. Aujourd’hui, le prix du mètre linéaire est, en réalité, beaucoup plus haut. Il faut, donc, retenir, qu’il y aura une baisse des tarifs et une amélioration de la qualité. C’est un vrai challenge économique pour les compagnies délégataires.
- L’obtention de la DSP est-elle un viatique pour l’entreprise ?
- La DSP correspondra, dans les années à venir, à la moitié du chiffre d’affaires de la SNCM. Aucune entreprise ne peut vivre si elle perd la moitié de son chiffre d’affaires ! Il était, donc, fondamental pour nous, pour la vie de l’entreprise et sa pérennité, d’obtenir la DSP. Celle-ci est, également, un moteur très fort de transformation de l’entreprise, une transformation qui a déjà commencé.
- A quel stade est la restructuration de la SNCM ?
- Nous avons, déjà, beaucoup travaillé sur le pacte social et sur un plan à long terme qui a été approuvé par les actionnaires. Ce plan doit être actualisé en fonction des résultats de la DSP. Nous avons bien avancé sur le financement des navires, qui reste encore à finaliser. C’est notre objectif jusqu’à la fin de l’année. Une fois, ce plan réalisé, nous serons en ordre de marche.
- Les contentieux juridiques à répétition ne pèsent-ils pas gravement sur l’avenir ?
- Je vous mentirais si je ne vous disais pas que c’est préoccupant ! Nous y travaillons. Des solutions sont déjà mises en œuvre, d’autres sont trouvées. C’est un combat de tous les jours.
- Tout le monde doute de la volonté de Veolia de continuer l’activité transport maritime. Quel est votre avis ?
- Pour le moment, je m’en tiens à ce qu’a dit le président Frérot. Il a répondu qu’il allait accompagner la restructuration de l’entreprise. Veolia va-t-elle continuer sur le long terme ? Certainement pas ! Mais, à partir du moment où elle accompagne la restructuration, il sera plus facile de constituer un tour de table, une fois que l’entreprise sera sortie de ces turbulences. Cela fait partie des aléas de la vie normale d’une entreprise.
Propos recueillis par Nicole MARI
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