Marie-Antoinette Santoni-Brunelli, conseillère territoriale du groupe libéral « Le Rassemblement », et conseillère municipale d’Ajaccio.
- Quelle est votre réaction devant le rapport provisoire de la Cour des comptes ?
- Tout d’abord, je tiens à signaler que toutes les informations, que les élus peuvent avoir à ce jour, nous parviennent par voie de presse. Les élus ne sont pas encore destinataires de ce rapport qui n’est que provisoire. On peut imaginer que le document définitif confirmera ce que le provisoire dénonce, à savoir un déficit qui avoisine les 100 millions d’euros et qu’avait déjà fait apparaître le rapport Klopfer. Nous en avions largement débattu à l’occasion du budget primitif 2016. Ce n’est, donc, hélas, pas une surprise pour notre groupe ! Durant les cinq années de la précédente mandature, nous n’avons pas cessé de dénoncer la gestion calamiteuse de la majorité d’alors.
- Particulièrement les deux dernières années ?
- Oui ! Nous avions même annoncé ce déficit lors du débat sur le budget primitif 2015. Nous avions dit au président de l’Exécutif, Paul Giacobbi, que son budget était insincère, que ses engagements nouveaux en matière d’investissements ne pouvaient être retenus, faute de financement, et que le déficit était à notre porte. En revanche, ce que l’on peut regretter, c’est que, pendant ces cinq ans, il n’y ait pas eu une opposition majoritaire pour bloquer les différents budgets, notamment le dernier présenté par la précédente majorité. On aurait pu éviter cette catastrophe, on ne l'a pas évité ! Une partie de la majorité actuelle a été complice passive de cette gestion financière. À partir du moment où l’on s'abstient, on ne s'oppose pas par un vote, donc on approuve, on est dans une opposition passive, c'est bien dommage ! Cette partie de la majorité, qui se trouve aujourd'hui au pouvoir, doit assumer sa responsabilité.
- Comment expliquez-vous l’attitude de Paul Giacobbi qui a toujours qualifié ces accusations « d’odieux mensonges » et continue, contre vents et marées, de nier ?
- Je crois que l’ancien président de l’Exécutif a une forme de schizophrénie. Il est capable avec l’aplomb qui le caractérise, bien qu’étant pris la main dans le sac de dire : « Non, ce n’est pas vrai ! ». C’est ce que je qualifie de schizophrénie, pour ne pas dire autre chose ! On ne peut pas être patron de la principale collectivité de Corse et ignorer ce qu’il s’y passe. En aucun cas, l’ancien président de l’Exécutif peut dire, aujourd’hui, qu’il ne savait pas, qu’il n’avait pas connaissance des pratiques au sein des services et, plus haut, au sein de la Direction générale des services (DGS). Ce n’est pas possible ! Quand bien même il y aurait eu un cabinet gris, noir ou quelqu’il soit, le vrai patron était le patron de l’Exécutif, c’est lui qui était en charge des finances et qui présentait les budgets et les comptes administratifs.
- Les Directions générales adjointes avouent, aujourd’hui, qu’elles n’étaient pas entendues par la DGS. Le saviez-vous alors ?
- C’étaient des bruits qui couraient durant la précédente mandature, même si nous, élus, n’avions pas les preuves tangibles. Nous n’avions pas les éléments pour connaître ce qui se passait en interne. Les seules preuves, que nous avions, étaient les documents budgétaires qui nous étaient soumis et dans lesquels on pouvait, comme je l’ai dit et dénoncé à plusieurs reprises, constaté cette gestion calamiteuse. L’ancien président de l’Exécutif ne peut pas dire, aujourd’hui, qu’il ignorait cette situation dénoncée, dans un premier temps, par le cabinet Kopfler qu’il a également contredit. Aujourd’hui, la Cour des Comptes, qu’il appelait lui-même de ses vœux, met la lumière sur son mode de gestion. Je ne vois pas quels arguments il peut encore mettre en avant ! Ce n’est pas possible !
- Ce rapport met en cause « une organisation qui masquait ses dépenses ». Que vous inspire ce propos ?
- C’est le fameux système Giacobbi que nous avons dénoncé à plusieurs reprises. C’est un système clientéliste. Il ne faut pas mettre de côté les emplois qui ont été créés pendant 5 ans : près de 300 embauches pour celles qu’on a été capable d’identifier ! Sans transfert de compétences, il est inadmissible que les charges de fonctionnement aient explosé comme elles l’ont fait et qu’il y ait eu autant d’embauches. Ce n’est pas explicable ! On sait ce qu’il s’est passé au Conseil départemental de la Haute-Corse, où on laissera la justice suivre son cours. Malheureusement, on a le sentiment que cela a été transposé à la CTC. Là encore, il y a eu, sous la précédente mandature, des élus complices passifs de ce système puisque tous les budgets passaient avec une majorité, certes relative, mais passaient quand même !
- Que pensez-vous des « subventions allouées » que fustige le rapport ?
- Pendant cinq ans, nous avons constaté une baisse importante des investissements, de l’ordre de 60 millions €, et une augmentation des subventions, aux tiers, aux communes… Ce que nous découvrons, aujourd’hui, c’est le montant des chèques en blanc qui ont été signés par la précédente majorité. Des promesses ont été faites et n’ont pas été honorées. On faisait de la cavalerie financière. Sans parler des autorisations de programmes et d’engagements qui sont la fameuse dette non bancaire de la CTC. On ajoutait, à la liste, des engagements que nous n’étions pas capables d’honorer.
- Ces 100 millions € d'arriérés, faut-il les payer maintenant ou attendre comme la question a été posée ?
- D'après l'information que nous avons eu en Commission des finances, ces sommes dues ont été intégralement payées, fin juin, par la trésorerie de la CTC et une partie de l'emprunt qui a été mobilisé à cet effet. Normalement, cette dette est épurée. L'emprunt a été suffisamment important au budget primitif 2016 pour cela. Nous avons accepté de le voter parce qu’un effort a été fait pour le réviser. Il était, initialement, de 158 millions € et il est passé à 128 millions €. Aujourd’hui, nous atteignons la limite de l'emprunt qui va avoisiner quasiment 600 millions €. Nous arriverons vite à saturation. J'ai les plus grandes inquiétudes pour la consommation totale du Plan exceptionnel d'investissement (PEI).
- Pourquoi ?
- Si la CTC n'a pas la capacité d'apporter un financement de 30%, elle ne pourra pas consommer la dernière tranche du PEI. C'est un vrai problème ! Un comité d'évaluation a été mis en place, il est présidé par le président de la Commission des finances. On m'a d'ailleurs proposé la vice-présidence. Nous allons étudier l'utilisation du PEI dans sa dernière tranche et voir comment nous pouvons faire au mieux. Cet exercice est extrêmement contraint et périlleux parce qu'il faut capitaliser au maximum les dernières ressources qui nous permettront demain d'investir. C’est indispensable pour notre économie. On a assez reproché pendant cinq ans à la précédente mandature de baisser les investissements et, du coup, de mettre l'économie en panne !
- Devant l’énormité du passif et au regard de l’accord conclu avec l’Exécutif, quelle sera l’attitude de la droite, fin octobre, lors du débat sur le budget supplémentaire ?
- Un protocole a été signé à l'occasion du budget primitif. Nous vérifierons tous les points sur lesquels les différents groupes de l'Assemblée de Corse ont demandé à l'Exécutif un engagement. J'espère que nous aurons les informations dans un délai suffisant pour les étudier et en débattre lors de l'examen du budget supplémentaire fin octobre. Nous devons regarder devant et, plus que jamais, avoir une gestion rigoureuse de nos finances. La situation financière dégradée oblige l'actuelle majorité à réduire considérablement les charges de fonctionnement dont le rythme de croissance ne peut dépasser 0,5% par an, comme l'a préconisé le cabinet Klopfer. Cela semble être une mission quasi impossible, mais c'est la seule solution pour redresser les finances de la CTC.
Propos recueillis par Nicole MARI.
- Tout d’abord, je tiens à signaler que toutes les informations, que les élus peuvent avoir à ce jour, nous parviennent par voie de presse. Les élus ne sont pas encore destinataires de ce rapport qui n’est que provisoire. On peut imaginer que le document définitif confirmera ce que le provisoire dénonce, à savoir un déficit qui avoisine les 100 millions d’euros et qu’avait déjà fait apparaître le rapport Klopfer. Nous en avions largement débattu à l’occasion du budget primitif 2016. Ce n’est, donc, hélas, pas une surprise pour notre groupe ! Durant les cinq années de la précédente mandature, nous n’avons pas cessé de dénoncer la gestion calamiteuse de la majorité d’alors.
- Particulièrement les deux dernières années ?
- Oui ! Nous avions même annoncé ce déficit lors du débat sur le budget primitif 2015. Nous avions dit au président de l’Exécutif, Paul Giacobbi, que son budget était insincère, que ses engagements nouveaux en matière d’investissements ne pouvaient être retenus, faute de financement, et que le déficit était à notre porte. En revanche, ce que l’on peut regretter, c’est que, pendant ces cinq ans, il n’y ait pas eu une opposition majoritaire pour bloquer les différents budgets, notamment le dernier présenté par la précédente majorité. On aurait pu éviter cette catastrophe, on ne l'a pas évité ! Une partie de la majorité actuelle a été complice passive de cette gestion financière. À partir du moment où l’on s'abstient, on ne s'oppose pas par un vote, donc on approuve, on est dans une opposition passive, c'est bien dommage ! Cette partie de la majorité, qui se trouve aujourd'hui au pouvoir, doit assumer sa responsabilité.
- Comment expliquez-vous l’attitude de Paul Giacobbi qui a toujours qualifié ces accusations « d’odieux mensonges » et continue, contre vents et marées, de nier ?
- Je crois que l’ancien président de l’Exécutif a une forme de schizophrénie. Il est capable avec l’aplomb qui le caractérise, bien qu’étant pris la main dans le sac de dire : « Non, ce n’est pas vrai ! ». C’est ce que je qualifie de schizophrénie, pour ne pas dire autre chose ! On ne peut pas être patron de la principale collectivité de Corse et ignorer ce qu’il s’y passe. En aucun cas, l’ancien président de l’Exécutif peut dire, aujourd’hui, qu’il ne savait pas, qu’il n’avait pas connaissance des pratiques au sein des services et, plus haut, au sein de la Direction générale des services (DGS). Ce n’est pas possible ! Quand bien même il y aurait eu un cabinet gris, noir ou quelqu’il soit, le vrai patron était le patron de l’Exécutif, c’est lui qui était en charge des finances et qui présentait les budgets et les comptes administratifs.
- Les Directions générales adjointes avouent, aujourd’hui, qu’elles n’étaient pas entendues par la DGS. Le saviez-vous alors ?
- C’étaient des bruits qui couraient durant la précédente mandature, même si nous, élus, n’avions pas les preuves tangibles. Nous n’avions pas les éléments pour connaître ce qui se passait en interne. Les seules preuves, que nous avions, étaient les documents budgétaires qui nous étaient soumis et dans lesquels on pouvait, comme je l’ai dit et dénoncé à plusieurs reprises, constaté cette gestion calamiteuse. L’ancien président de l’Exécutif ne peut pas dire, aujourd’hui, qu’il ignorait cette situation dénoncée, dans un premier temps, par le cabinet Kopfler qu’il a également contredit. Aujourd’hui, la Cour des Comptes, qu’il appelait lui-même de ses vœux, met la lumière sur son mode de gestion. Je ne vois pas quels arguments il peut encore mettre en avant ! Ce n’est pas possible !
- Ce rapport met en cause « une organisation qui masquait ses dépenses ». Que vous inspire ce propos ?
- C’est le fameux système Giacobbi que nous avons dénoncé à plusieurs reprises. C’est un système clientéliste. Il ne faut pas mettre de côté les emplois qui ont été créés pendant 5 ans : près de 300 embauches pour celles qu’on a été capable d’identifier ! Sans transfert de compétences, il est inadmissible que les charges de fonctionnement aient explosé comme elles l’ont fait et qu’il y ait eu autant d’embauches. Ce n’est pas explicable ! On sait ce qu’il s’est passé au Conseil départemental de la Haute-Corse, où on laissera la justice suivre son cours. Malheureusement, on a le sentiment que cela a été transposé à la CTC. Là encore, il y a eu, sous la précédente mandature, des élus complices passifs de ce système puisque tous les budgets passaient avec une majorité, certes relative, mais passaient quand même !
- Que pensez-vous des « subventions allouées » que fustige le rapport ?
- Pendant cinq ans, nous avons constaté une baisse importante des investissements, de l’ordre de 60 millions €, et une augmentation des subventions, aux tiers, aux communes… Ce que nous découvrons, aujourd’hui, c’est le montant des chèques en blanc qui ont été signés par la précédente majorité. Des promesses ont été faites et n’ont pas été honorées. On faisait de la cavalerie financière. Sans parler des autorisations de programmes et d’engagements qui sont la fameuse dette non bancaire de la CTC. On ajoutait, à la liste, des engagements que nous n’étions pas capables d’honorer.
- Ces 100 millions € d'arriérés, faut-il les payer maintenant ou attendre comme la question a été posée ?
- D'après l'information que nous avons eu en Commission des finances, ces sommes dues ont été intégralement payées, fin juin, par la trésorerie de la CTC et une partie de l'emprunt qui a été mobilisé à cet effet. Normalement, cette dette est épurée. L'emprunt a été suffisamment important au budget primitif 2016 pour cela. Nous avons accepté de le voter parce qu’un effort a été fait pour le réviser. Il était, initialement, de 158 millions € et il est passé à 128 millions €. Aujourd’hui, nous atteignons la limite de l'emprunt qui va avoisiner quasiment 600 millions €. Nous arriverons vite à saturation. J'ai les plus grandes inquiétudes pour la consommation totale du Plan exceptionnel d'investissement (PEI).
- Pourquoi ?
- Si la CTC n'a pas la capacité d'apporter un financement de 30%, elle ne pourra pas consommer la dernière tranche du PEI. C'est un vrai problème ! Un comité d'évaluation a été mis en place, il est présidé par le président de la Commission des finances. On m'a d'ailleurs proposé la vice-présidence. Nous allons étudier l'utilisation du PEI dans sa dernière tranche et voir comment nous pouvons faire au mieux. Cet exercice est extrêmement contraint et périlleux parce qu'il faut capitaliser au maximum les dernières ressources qui nous permettront demain d'investir. C’est indispensable pour notre économie. On a assez reproché pendant cinq ans à la précédente mandature de baisser les investissements et, du coup, de mettre l'économie en panne !
- Devant l’énormité du passif et au regard de l’accord conclu avec l’Exécutif, quelle sera l’attitude de la droite, fin octobre, lors du débat sur le budget supplémentaire ?
- Un protocole a été signé à l'occasion du budget primitif. Nous vérifierons tous les points sur lesquels les différents groupes de l'Assemblée de Corse ont demandé à l'Exécutif un engagement. J'espère que nous aurons les informations dans un délai suffisant pour les étudier et en débattre lors de l'examen du budget supplémentaire fin octobre. Nous devons regarder devant et, plus que jamais, avoir une gestion rigoureuse de nos finances. La situation financière dégradée oblige l'actuelle majorité à réduire considérablement les charges de fonctionnement dont le rythme de croissance ne peut dépasser 0,5% par an, comme l'a préconisé le cabinet Klopfer. Cela semble être une mission quasi impossible, mais c'est la seule solution pour redresser les finances de la CTC.
Propos recueillis par Nicole MARI.