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Michel Stefani : "Le dispositif de service minimum sera inopérant."


Nicole Mari le Mercredi 10 Octobre 2012 à 10:56

Le Front de Gauche a été le seul groupe de l'Assemblée de Corse (CTC) à avoir voté contre la Délégation de service public (DSP). Membre de la majorité territoriale, il a bataillé ferme pour tenter d'amender un cahier des charges trop libéral à son goût. En vain. L'élu communiste, Michel Stefani, explique, à Corse Net Infos, les raisons de ce vote à contre-courant et sa consternation de voir plébisciter des objectifs bien éloignés des intérêts qu'il défend.



Michel Stefani : "Le dispositif de service minimum sera inopérant."
- Vous êtes le seul groupe à avoir voté contre la DSP. Pourquoi ?
- La réduction importante du périmètre de la DSP n'est pas neutre. Elle aura des effets tant au plan de la réponse des besoins exprimés par la Corse à travers le transport public maritime, mais également d'un point de vue social. On se retrouve avec 7 navires sur la DSP et le refus d'extension de celle-ci sur Toulon. En l'absence d'Obligations de service public (OSP) pour stabiliser l'ensemble de la desserte, des résiduels d’écrémage peuvent perdurer au delà de la délibération de la CTC, voire de celle qui va venir en débat dans un mois. Les OSP nécessiteraient une convention de la part des opérateurs et, en même temps, l'absence de compensations financières.
 
- Comment expliquez-vous que la plupart de vos amendements ont été rejetés, notamment sur les tarifs ?
- La grille tarifaire, telle que nous l’avions posée, n'a pas été retenue. Une avancée a été opérée en fin de débat, mais, même si elle apporte des améliorations, elle laisse des espaces dans lesquels la logique libérale de mise en concurrence à tous crins peut s'immiscer.
 
- Pourquoi avez-vous voté contre le service social et solidaire proposé par le STC ?
- Le dispositif, qui a été adopté, place la CTC dans un rôle qui ne peut pas être le sien et en fait un négociateur important qui peut se substituer à la direction des entreprises. Dans ces conditions, on ne respecte plus les principes de la démocratie sociale dans l'entreprise. Ces principes s'adressent aux principaux acteurs : les organisations syndicales et les dirigeants d'entreprise. Il y a, avec la mise en place d'un service minimum, la remise en cause du droit de grève et, s'agissant du préavis, une modification qui touche à la loi. Nous ne sommes pas d'accord !
 
- Le dispositif d’alerte sociale, que vous avez proposé, n’a pas été retenu…
- L'avenir montrera que, lorsqu'on met en cause fondamentalement l'intérêt des travailleurs, notamment si ceux-ci se mettent en grève à 100%, le dispositif de service minimum voté sera inopérant. Par conséquent, il faut privilégier le dialogue social, en permanence. Contrairement aux autres, le dispositif, que nous proposions, le permettait, sans remettre en cause le droit de grève et sans toucher aux principes de la Constitution et de la législation en la matière.
 
- Etes-vous satisfait de l’augmentation des capacités ?
- Il y a eu, fort heureusement, une augmentation des capacités s’agissant des passagers et, dans le même temps, une diminution du nombre de mètres linéaires pour le transport de marchandises. Cela aussi pose problème au regard des risques d’écrémage. A un moment donné, il faut dire ce que l’on veut. C’est la raison pour laquelle nous avions proposé l’extension de la DSP à Toulon.
 
- Cette extension n'est-elle pas rendue impossible par l'avis du Conseil d'Etat ?
- Contrairement à ce qui a été dit, l’arrêt du Conseil d’Etat, qui a cassé la décision de la Cour administrative d’appel de Marseille, permettait cette extension. Ne serait-ce que sur le fret, puisque nous constatons que, de ce point de vue, il n’y a pas de régularité ! Il y a même défaillance de la part de l'opérateur privé. Nous savons, au demeurant, que la SNCM, qui a ouvert une ligne, cet hiver, est déficitaire de 6 millions €. Par conséquent, il y a carence de l'opérateur privé et, donc, possibilité d'extension de la DSP à Toulon pour satisfaire aux besoins de la Corse, en complément de ce qui peut se faire au départ du port de Marseille.
 
- Vous attendiez-vous à un tel virage libéral de la part d'une majorité de gauche à laquelle vous participez ?
- A dire vrai, lorsqu'on regarde le vote final, on se rend compte qu'il ne diffère pas beaucoup de ce que nous avons connu précédemment : en 2001 avec l'ouverture à la concurrence à la demande du précédent Exécutif, ou en 2007. Nous ne sommes pas surpris. En revanche, nous avons défendu ce qui, selon nous, était la meilleure façon de promouvoir un service public de qualité dans l'intérêt bien compris de la Corse en traitant, bien entendu, les questions concernant les salariés aussi bien sur les ports de Marseille, Toulon ou Nice que sur les ports corses ou dans les compagnies.
                                                                               Propos recueillis par Nicole MARI