"A l'heure où le lien n'est plus à faire entre les dérives mafieuses et la spéculation immobilière et foncière, où des ministres viennent à tour de rôle en Corse dénoncer la présence d'une mafia liée à l'affairisme immobilier, comment comprendre que des préfets, en contradiction avec des décisions de justice, continuent de délivrer à grande échelle des permis de construire, sur des zones déclarées inconstructibles ? " interrogent, à l'Oriente, les défenseurs de la loi Littoral.
Accusateurs, les membres du Collectif ont poursuivi sur le même ton : "Depuis plusieurs années l’État accorde des permis de construire sur des zonages déclarés inconstructibles par les tribunaux. La politique de multiplication des résidences secondaires est donc, depuis de nombreuses années, la stratégie de l’État pour la Corse.
L’examen de registres communaux des demandes de permis de construire, à partir des dates des décisions de justice à aujourd’hui, montre que de très nombreux permis pour des maisons individuelles, le plus souvent des villas secondaires, ont été accordés par les mairies et l’État sur les zonages déclarés inconstructibles, violant les décisions de justice."
Pour le Collectif "si l’on veut vraiment réduire la spéculation immobilière en Corse, il faut réduire l’offre. Et cela est possible à travers les plans d’urbanisme".
Et de rappeler que "selon le Livre blanc des Assises du littoral, les espaces déjà ouverts à l’urbanisation sur 72 communes littorales disposant d’un plan d’urbanisme en vigueur dépassent déjà très largement le besoin démographique de l’île entière !"
Plu et cartes communales déférés, annulés
Le Collectif a rappelé aussi que "les associations se sont employées à faire annuler ces documents afin que la loi Littoral soit appliquée et que ne soient pas créées de nouvelles zones urbanisables qui, sur le PLU annulé de Sarra di Farru par exemple, couvraient 420 hectares ! Et chaque recours a été un succès puisque tous les jugements du Tribunal administratif de Bastia et de la Cour d’appel de Marseille ont annulé les plans locaux d’urbanisme (PLU) ou les cartes communales déférés."
Mais, selon le Collectif, " l’administration, tenue d’appliquer ces décisions, est passée outre…", citant à l'appui de son argumentation "ces villas" répondant à ces faits, visibles sur les littoraux de Purtivechju, Sarra di Farru, Ulmetu, Calcatoghju, Coti Chjavari, etc. "Villas érigées malgré l’avis souvent défavorable de la DDTM et par seule décision préfectorale ou par celle d’un « comité de lecture » … créé par le préfet. Les associations qui se battent pour faire respecter la loi Littoral, obtiennent satisfaction en justice mais, au bout du compte, les zones inconstructibles sont construites par la « Volonté du prince »"
"Prendre toutes les mesures nécessaires"
Pour le Collectif, "on est très loin en Corse" de la très récente déclaration de Christine Taubira, ministre de la Justice : “Les décisions de justice doivent être exécutées. S’il y a transgression, la justice a les moyens de faire respecter ses jugements... Nous sommes dans un état de droit et les règles s’imposent ! "Elles s’imposent aux pauvres, elles s’imposent aux riches, elles s’imposent aux faibles, elles s’imposent aux puissants” a averti la garde des Sceaux. En Corse, s’imposent-elles aux préfets ? Le Conseiller environnement et territoires du cabinet du président de la République, rencontré le 4 octobre par les associations du Collectif littoral, a répondu : « oui les décisions de justice doivent s’appliquer, en Corse comme ailleurs ».
"Le seront-elles vraiment?" interroge le Collectif pour l'application de la Loi Littoral.
"Seul l’avenir le dira. Mais la Corse gardera, hélas, de toute façon les stigmates de toutes ces années où de bonnes décisions de justice conformes à la Loi Littoral ont été bafouées par les plus hauts représentants de l’Etat" persiste et signe le Collectif.
Dès lors, l’ensemble des organisations du Collectif pour l’Application de la Loi Littoral en Corse "réaffirme avec force que les jugements des tribunaux n’ont pas vocation à être les victimes d’une interprétation à la marge. Ils ont la valeur absolue de la Loi."
"C’est pourquoi le CLL demande aux préfets de prendre toutes les mesures nécessaires afin que leurs services ne délivrent plus de permis de construire et/ou ne donnent plus d’avis de conformité dans les zonages où l’inconstructibilité a été confirmée par la compétence avisée, documentée et indiscutable des autorités judiciaires."