Pierre Chaubon, conseiller territorial du groupe Prima a Corsica, maire de Nonza et président de la communauté de communes du Cap Corse.
- La déception des élus corses a été forte et unanime en découvrant les deux avant-projets d’ordonnances gouvernementales. Etes-vous aussi déçu que vos collègues ?
- Je ne suis pas déçu à ce point ! Le gouvernement a indiqué, d’emblée, qu’il allait tenir les délais et que la collectivité de Corse verrait le jour le 1er janvier 2018. Pour moi, c’est fondamental ! Si on repousse les choses, elles ne reviennent jamais ! Il ne faut pas les repousser. Il faut tenir les délais ! Les ordonnances ont été présentées. Un travail de fond a été fait pour mettre en place les éléments qui permettent d’aboutir à la collectivité unique. Ce n’est pas rien !
- Qu’est-ce qui ne vous agrée pas dans ce contexte ?
- Il y a des petites choses à revoir qui feront l’objet des amendements que nous allons proposer. La plus importante est la représentation des territoires. Nous nous battons depuis le début pour défendre la nécessité d’une Chambre des territoires ou d’un Conseil des territoires. Peu importe l’appellation ! Ce qui est fondamental est sa composition et sa vocation, sa mission. Là-dessus, il reste encore beaucoup à faire.
- Que pensez-vous de la proposition gouvernementale d’une conférence de coordination ?
- La conférence de coordination des collectivités territoriales, qui, pour le gouvernement, tient lieu de représentation des territoires, ne va pas ! Je l’ai dit au ministre publiquement. Elle ne convient pas pour deux raisons. D’abord, sa composition ne correspond pas à nos attentes. Elle comprend tout l’Exécutif et seulement le président de l’Assemblée de Corse. Or, il faut que l’Assemblée de Corse qui est l’assemblée délibérante, soit représentée dans toutes ses sensibilités. Par exemple, par la Commission permanente ou par les présidents de groupe. Il faut, également, que les territoires y soient représentés à travers les présidents des intercommunalités. Ce qui n’est pas le cas. Ensuite, ses missions sont dérisoires. Nos amendements doivent donner une véritable mission, une fonction, une vocation à ce Conseil des territoires.
- Cette Chambre des territoires à laquelle les élus corses s’accrochent, le gouvernement n’en veut pas. Pourquoi s’obstiner ?
- Parce qu’elle est importante d’un point de vue de la logique des institutions On supprime deux échelons. Les deux Conseils départementaux, qu’on le veuille ou non, étaient, quand même, des échelons de proximité par rapport, notamment, aux maires et aux présidents des intercommunalités. Ces échelons supprimés, toutes leurs compétences seront exercées par la collectivité de Corse qui sera un organisme de grande puissance et disposera de gros moyens et d’immenses compétences. Il faut un organe de coordination générale qui fasse le lien entre la collectivité unique et les intercommunalités, un lien fonctionnel permettant les coopérations.
- Pensez-vous l’obtenir ?
- Le gouvernement a ouvert une porte. Jean-Michel Baylet a dit qu’il n’était pas hostile à la transformation de la conférence de coordination des collectivités territoriales en quelque chose de plus significatif, de plus substantiel. Il faut s’engouffrer dans cette porte en faisant des propositions. C’est ce que nous sommes en train de concevoir avec la Commission des compétences législatives et règlementaires de l’Assemblée de Corse que je présidais auparavant et à laquelle je continue de participer. On fera une série de propositions au gouvernement. S’il ne les prend pas en considération, on pourra s’émouvoir et, même au-delà, dire que nous sommes vraiment mécontents. S’il les prend en considération, nous aurons, à ce moment-là, rempli une partie de notre mission.
- Les élus, toutes tendances réunies, estiment que le gouvernement n’a pris en compte aucune demande essentielle. Pourquoi changerait-il d’avis ?
- Non ! Ce n’est pas vrai ! Le gouvernement crée une collectivité unique que nous demandons depuis des décennies. Ce n’est pas rien ! Telle qu’elle est prévue, cette collectivité correspond à 70% de ce que nous avons demandé. Si le gouvernement accepte notre demande de représentation significative des territoires dont le siège serait à Bastia, nous serions bien au-delà des 70%. Et, il faudra bien qu’il la prenne en compte.
- Rien n’a été accordé en matière de statut fiscal, de langue, de moratoire sur les intercommunalités…
- Il faut faire la part des choses ! Et rester lucide ! Concernant la collectivité unique, les deux points importants sont, je le répète, de tenir les délais et d’assurer la représentation des territoires. Les autres points sont indépendants. La question des ressources se discutera naturellement dans l’ordonnance financière, budgétaire et comptable. Qu’on demande davantage de ressources, pourquoi pas ! Qu’on réfléchisse encore, c’est naturel ! Mais, on n’en est pas là ! Du point de vue de l’ordonnance institutionnelle qui crée la collectivité unique et organise son fonctionnement, on n’est pas loin du tout de ce que nous avons proposé.
- Pensez-vous réellement que la réforme intègre la spécificité de la Corse ?
- La spécificité est en soi, elle sera institutionnelle ! Une seule collectivité exercera les compétences de l’ancienne collectivité territoriale et des deux conseils départementaux. Quand j’entends que c’est une coquille vide, je me dis qu’au contraire, c’est une coquille presque trop pleine ! Rien ne changera au niveau du fonctionnement : le Conseil exécutif, les agences et offices demeureront, l’assemblée délibérante montera à 63 élus. Tout cela a été pris en compte.
- Vous insistez sur les délais. De nombreux élus, à droite et à gauche, estiment qu’il est impossible de les maintenir et qu’il faut plus de temps. Qu’en pensez-vous ?
- Non ! Ce n’est pas sérieux de dire ça ! En métropole, la fusion des régions s’est faite en quatre mois. On est passé de 22 régions à 13. C’est au fond le même exercice. L’Outremer, la Martinique, la Guyane… ont réalisé la fusion que nous nous apprêtons à faire. L’Etat est rodé à ce genre d’exercice. Ce n’est pas vrai qu’il faut plus de temps ! C’est une manière de retarder les choses pour ne pas les faire ! Je ne suis pas d’accord ! A partir du moment où on s’est engagé pour faire les choses, il faut les faire et les faire dans les délais. Après, on peut utiliser toutes sortes de subterfuge pour retarder encore parce qu’en réalité, on ne veut pas faire.
- Quelle est votre position concernant le moratoire sur les intercommunalités refusé par le gouvernement ?
- Là, je partage la position unanime des élus. Compte tenu de la logique de la collectivité unique, il est plutôt de son ressort de créer les schémas de coopération intercommunale. Ils étaient départementaux, ils ne le seront plus puisque les départements disparaissent. Il eut été logique, normal, opportun de les établir en relation avec la collectivité unique. C’est pourquoi nous avons demandé un délai. Là-dessus, nous n’avons pas été entendus. La demande reste d’actualité.
- Le périmètre de la communauté du Cap Corse ne change pas. Auriez-vous été favorable à une fusion ?
- Oui ! Je n’étais pas du tout hostile à ce qu’on nous rapproche de la Conca D’Oru ou du Nebbiu, voire des deux, mais les élus en ont décidé autrement. Notre communauté fonctionne très bien depuis des années, cela ne me gêne pas que nous continuions à fonctionner de la même manière.
- Craignez-vous le transfert de compétences sur les Interco décidé par la loi Notre et l’incertitude sur les ressources qui l’accompagnent ?
- Je n’ai peur de rien ! Quand les problèmes arrivent, je les traite du mieux possible. La loi NOTRe prévoit effectivement des transferts de compétences étalés dans le temps. L’eau et l’assainissement : je m’y prépare. J’ai lancé les études nécessaires pour absorber cette compétence, le moment venu. La compétence tourisme viendra renforcer les intercommunalités avec d’autres sujets. Parallèlement, nous préparons un schéma de mutualisation des services dans tout le Cap entre les communes et la communauté. Nous travaillons. Il ne faut pas avoir peur d’exercer les compétences nouvelles. Le problème de l’adéquation entre ces compétences nouvelles et les moyens se pose effectivement. Il s’est posé dans le passé, il continue à se poser dans le présent et se posera dans l’avenir. C’est une bataille qu’il faut livrer pour obtenir les moyens allant avec les transferts.
- Beaucoup d’élus craignent que la loi NOTRe ne sonne le glas du rural. En tant que président d’une interco rurale, qu’en pensez-vous ?
- Je ne suis pas pessimiste à ce point ! Je me bats pour que les territoires existent, qu’ils vivent le mieux possible. Je me qualifie comme un optimiste de la volonté. Je suis volontaire pour que les choses se passent le mieux possible. Quand elles se passent moins bien, je me bats pour qu’elles s’améliorent.
Propos recueillis par Nicole MARI.
- Je ne suis pas déçu à ce point ! Le gouvernement a indiqué, d’emblée, qu’il allait tenir les délais et que la collectivité de Corse verrait le jour le 1er janvier 2018. Pour moi, c’est fondamental ! Si on repousse les choses, elles ne reviennent jamais ! Il ne faut pas les repousser. Il faut tenir les délais ! Les ordonnances ont été présentées. Un travail de fond a été fait pour mettre en place les éléments qui permettent d’aboutir à la collectivité unique. Ce n’est pas rien !
- Qu’est-ce qui ne vous agrée pas dans ce contexte ?
- Il y a des petites choses à revoir qui feront l’objet des amendements que nous allons proposer. La plus importante est la représentation des territoires. Nous nous battons depuis le début pour défendre la nécessité d’une Chambre des territoires ou d’un Conseil des territoires. Peu importe l’appellation ! Ce qui est fondamental est sa composition et sa vocation, sa mission. Là-dessus, il reste encore beaucoup à faire.
- Que pensez-vous de la proposition gouvernementale d’une conférence de coordination ?
- La conférence de coordination des collectivités territoriales, qui, pour le gouvernement, tient lieu de représentation des territoires, ne va pas ! Je l’ai dit au ministre publiquement. Elle ne convient pas pour deux raisons. D’abord, sa composition ne correspond pas à nos attentes. Elle comprend tout l’Exécutif et seulement le président de l’Assemblée de Corse. Or, il faut que l’Assemblée de Corse qui est l’assemblée délibérante, soit représentée dans toutes ses sensibilités. Par exemple, par la Commission permanente ou par les présidents de groupe. Il faut, également, que les territoires y soient représentés à travers les présidents des intercommunalités. Ce qui n’est pas le cas. Ensuite, ses missions sont dérisoires. Nos amendements doivent donner une véritable mission, une fonction, une vocation à ce Conseil des territoires.
- Cette Chambre des territoires à laquelle les élus corses s’accrochent, le gouvernement n’en veut pas. Pourquoi s’obstiner ?
- Parce qu’elle est importante d’un point de vue de la logique des institutions On supprime deux échelons. Les deux Conseils départementaux, qu’on le veuille ou non, étaient, quand même, des échelons de proximité par rapport, notamment, aux maires et aux présidents des intercommunalités. Ces échelons supprimés, toutes leurs compétences seront exercées par la collectivité de Corse qui sera un organisme de grande puissance et disposera de gros moyens et d’immenses compétences. Il faut un organe de coordination générale qui fasse le lien entre la collectivité unique et les intercommunalités, un lien fonctionnel permettant les coopérations.
- Pensez-vous l’obtenir ?
- Le gouvernement a ouvert une porte. Jean-Michel Baylet a dit qu’il n’était pas hostile à la transformation de la conférence de coordination des collectivités territoriales en quelque chose de plus significatif, de plus substantiel. Il faut s’engouffrer dans cette porte en faisant des propositions. C’est ce que nous sommes en train de concevoir avec la Commission des compétences législatives et règlementaires de l’Assemblée de Corse que je présidais auparavant et à laquelle je continue de participer. On fera une série de propositions au gouvernement. S’il ne les prend pas en considération, on pourra s’émouvoir et, même au-delà, dire que nous sommes vraiment mécontents. S’il les prend en considération, nous aurons, à ce moment-là, rempli une partie de notre mission.
- Les élus, toutes tendances réunies, estiment que le gouvernement n’a pris en compte aucune demande essentielle. Pourquoi changerait-il d’avis ?
- Non ! Ce n’est pas vrai ! Le gouvernement crée une collectivité unique que nous demandons depuis des décennies. Ce n’est pas rien ! Telle qu’elle est prévue, cette collectivité correspond à 70% de ce que nous avons demandé. Si le gouvernement accepte notre demande de représentation significative des territoires dont le siège serait à Bastia, nous serions bien au-delà des 70%. Et, il faudra bien qu’il la prenne en compte.
- Rien n’a été accordé en matière de statut fiscal, de langue, de moratoire sur les intercommunalités…
- Il faut faire la part des choses ! Et rester lucide ! Concernant la collectivité unique, les deux points importants sont, je le répète, de tenir les délais et d’assurer la représentation des territoires. Les autres points sont indépendants. La question des ressources se discutera naturellement dans l’ordonnance financière, budgétaire et comptable. Qu’on demande davantage de ressources, pourquoi pas ! Qu’on réfléchisse encore, c’est naturel ! Mais, on n’en est pas là ! Du point de vue de l’ordonnance institutionnelle qui crée la collectivité unique et organise son fonctionnement, on n’est pas loin du tout de ce que nous avons proposé.
- Pensez-vous réellement que la réforme intègre la spécificité de la Corse ?
- La spécificité est en soi, elle sera institutionnelle ! Une seule collectivité exercera les compétences de l’ancienne collectivité territoriale et des deux conseils départementaux. Quand j’entends que c’est une coquille vide, je me dis qu’au contraire, c’est une coquille presque trop pleine ! Rien ne changera au niveau du fonctionnement : le Conseil exécutif, les agences et offices demeureront, l’assemblée délibérante montera à 63 élus. Tout cela a été pris en compte.
- Vous insistez sur les délais. De nombreux élus, à droite et à gauche, estiment qu’il est impossible de les maintenir et qu’il faut plus de temps. Qu’en pensez-vous ?
- Non ! Ce n’est pas sérieux de dire ça ! En métropole, la fusion des régions s’est faite en quatre mois. On est passé de 22 régions à 13. C’est au fond le même exercice. L’Outremer, la Martinique, la Guyane… ont réalisé la fusion que nous nous apprêtons à faire. L’Etat est rodé à ce genre d’exercice. Ce n’est pas vrai qu’il faut plus de temps ! C’est une manière de retarder les choses pour ne pas les faire ! Je ne suis pas d’accord ! A partir du moment où on s’est engagé pour faire les choses, il faut les faire et les faire dans les délais. Après, on peut utiliser toutes sortes de subterfuge pour retarder encore parce qu’en réalité, on ne veut pas faire.
- Quelle est votre position concernant le moratoire sur les intercommunalités refusé par le gouvernement ?
- Là, je partage la position unanime des élus. Compte tenu de la logique de la collectivité unique, il est plutôt de son ressort de créer les schémas de coopération intercommunale. Ils étaient départementaux, ils ne le seront plus puisque les départements disparaissent. Il eut été logique, normal, opportun de les établir en relation avec la collectivité unique. C’est pourquoi nous avons demandé un délai. Là-dessus, nous n’avons pas été entendus. La demande reste d’actualité.
- Le périmètre de la communauté du Cap Corse ne change pas. Auriez-vous été favorable à une fusion ?
- Oui ! Je n’étais pas du tout hostile à ce qu’on nous rapproche de la Conca D’Oru ou du Nebbiu, voire des deux, mais les élus en ont décidé autrement. Notre communauté fonctionne très bien depuis des années, cela ne me gêne pas que nous continuions à fonctionner de la même manière.
- Craignez-vous le transfert de compétences sur les Interco décidé par la loi Notre et l’incertitude sur les ressources qui l’accompagnent ?
- Je n’ai peur de rien ! Quand les problèmes arrivent, je les traite du mieux possible. La loi NOTRe prévoit effectivement des transferts de compétences étalés dans le temps. L’eau et l’assainissement : je m’y prépare. J’ai lancé les études nécessaires pour absorber cette compétence, le moment venu. La compétence tourisme viendra renforcer les intercommunalités avec d’autres sujets. Parallèlement, nous préparons un schéma de mutualisation des services dans tout le Cap entre les communes et la communauté. Nous travaillons. Il ne faut pas avoir peur d’exercer les compétences nouvelles. Le problème de l’adéquation entre ces compétences nouvelles et les moyens se pose effectivement. Il s’est posé dans le passé, il continue à se poser dans le présent et se posera dans l’avenir. C’est une bataille qu’il faut livrer pour obtenir les moyens allant avec les transferts.
- Beaucoup d’élus craignent que la loi NOTRe ne sonne le glas du rural. En tant que président d’une interco rurale, qu’en pensez-vous ?
- Je ne suis pas pessimiste à ce point ! Je me bats pour que les territoires existent, qu’ils vivent le mieux possible. Je me qualifie comme un optimiste de la volonté. Je suis volontaire pour que les choses se passent le mieux possible. Quand elles se passent moins bien, je me bats pour qu’elles s’améliorent.
Propos recueillis par Nicole MARI.