Le réquisitoire est tout aussi sévère et le ton aussi dur qu’en première instance. Pas plus que son prédécesseur, la procureur Clémence Caron n’a été convaincue par les explications des prévenus, ni par la nouvelle stratégie de Paul Giacobbi qui s’est défaussé sur ses conseillers. Elle avait, d’ailleurs, clairement laissé entendre, la veille, à la fin des auditions. Son réquisitoire, jeudi matin, a été à l’aune de cette conviction. Un réquisitoire sans appel qui a débuté par le rappel d’une phrase prononcée par Paul Giacobbi en 1997 et qui sonne le glas de la défense : « Le sens des affaires a remplacé l'intérêt général ». Sans surprise, Clémence Caron brosse le même tableau noir d'un système de fraude généralisée, un « système dévoyé » qui est « une atteinte à la démocratie et à la probité ». Dans cette chaîne de complicité, passive ou active, tout le monde est coupable, d'une façon ou d'une autre, de détournements de fonds publics, « Il y a quelque chose de pourri dans la Giacobbie ! », lance-t-elle. Elle n’apprécie pas « la mauvaise foi » des prévenus qui « plutôt que d’assumer » chargent des morts. Une rejet de la faute sur le dos d’autrui qu’elle considère comme un facteur aggravant : « On a assassiné Jean Leccia une deuxième fois à coups de poignards dans le dos ! ».
Une trahison de la population
A qui profite le crime ? Pour l’avocate générale, il n’y a aucun doute ! Le grand ordonnateur des subventions, « le commanditaire », c’est celui qui était au sommet de la hiérarchie administrative, l'ex-président du Conseil général, Paul Giacobbi. Il aurait mis en place « un système claniste et clientéliste » à visée clairement électorale à son seul bénéfice politique « pour conserver le pouvoir » en distribuant emplois et subventions. Son cabinet noir ? « Un rideau de fumée ». Augustin Viola et Dominique Domarchi ? « Des ramasseurs de voix ». Les bénéficiaires des subventions ? « Des porteurs de voix ». Clémence Caron ne croit pas une minute que Paul Giacobbi « aurait été berné, trompé, trahi ». Et d’ironiser : « Il serait donc le président le moins informé de toute la France... tout aurait été fait à son insu ! ». Estimant qu’il a commis une « trahison de la population sur ces principes », elle requiert, en conséquence, la confirmation de la condamnation de première instance : trois ans de prison ferme, 100 000 € d'amende et cinq ans d'inéligibilité.
Des peines plus lourdes
La procureur n’est guère plus tendre avec les autres co-accusés. Elle pointe sévèrement du doigt la responsabilité de l’ex-directeur général des services du département (DGS), Thierry Gamba-Martini, qui, en tant que patron de l’administration, aurait du rétablir le fonctionnement normal du processus de décision et faire respecter les règles. « Il ne l’a pas fait ! Il n’a pas recadré son collaborateur Jean Leccia. Sa défaillance a permis le détournement ». Elle requiert contre lui 2 ans de prison avec sursis et 5 ans d'interdiction d'exercer dans la fonction publique. Un quantum aggravé par un couperet professionnel par rapport à la condamnation de 1ère instance où l’ex-DGS avait écopé de 2 ans de prison avec sursis et 10 000 € d’amende.
La loi bafouée
Clémence Caron a la main tout aussi lourde avec les élus de la Commission du monde rural qui validait les dossiers et octroyait les subventions. A l’encontre du rapporteur, Pierre-Marie Mancini, qui « ne pouvait pas ignorer la loi », s’octroyer « en toute facilité » une subvention pour construire un gîte et l’utiliser pour la rénovation de son domicile, elle requiert 3 ans de prison dont 2 avec sursis, 12 000 € d'amende et 5 ans d’inéligibilité. Contre le président Jacques Costa, relaxé en première instance, elle requiert un an de prison avec sursis et 5 ans d'inéligibilité pour n’avoir pas « dénoncé les dysfonctionnements qu’il avait vus », pas mis fin au système qu’il dénonçait.
Un jeu conscient
Un reproche adressé aussi aux fonctionnaires, des maillons qui, selon elle, jouent pleinement le jeu du détournement de fonds publics. Un jeu avéré, conscient, pour l’ex-contrôleur des travaux, Hyacinthe Vinciguerra, qui a avoué n’avoir jamais fait de contrôle sur site. A l’encontre du maire de Pirelli, « fidèle de Paul Giacobbi », et « rapporteur de voix », elle requiert la confirmation de la condamnation de première instance : 2 ans de prison dont 1 an avec sursis, 5 ans d'interdiction d'exercer une fonction publique et 8000 € d’amende. Le ton se durcit contre Marie-Laure le Mée, à l’époque responsable du service habitat du département, qui « aurait dû contrôler le travail », « alerter sur les dossiers squelettiques » et empêcher les dérives. La jugeant responsable d’avoir failli à son rôle, la procureur requiert contre elle un an de prison avec sursis comme en première instance, assortie en prime d’une interdiction d'exercer une fonction publique.
Pas responsables !
La Défense accuse le coup et tente de déminer le terrain lors des plaidoiries. Martelant le même credo qu’en première instance « Pas coupable, pas responsable ! », Me Marie-Josée Bellagamba, avocate de Marie-Laure Le Mée, invoque le principe d'obéissance à des ordres donnés par une hiérarchie. Elle plaide la relaxe pour la chef de service prise « entre l’enclume et la menace éventuelle de poursuites judiciaires en cas de dérapage. C’est souvent les fonctionnaires administratifs qui sont retenus comme responsables de dysfonctionnements qui viennent d’ailleurs ». Tout comme Me Gilles Antomarchi, avocat de Jacques Costa, qui affirme ne pas comprendre des réquisitions « non conformes au dossier. Jacques Costa ne peut pas être mis en cause de quelque manière que ce soit. En tant que président de la Commission du monde rural, il ne faisait que donner son avis. En tant que conseiller, il n’a pas participé au vote. Il n’a donc participé à rien. C’est pour cela qu’il a été relaxé en 1ère instance. Je n’ai entendu dans le réquisitoire aucun argument de nature à me faire changer d’avis et à faire changer la juridiction d’appel d’avis ».
Le procès s’achève vendredi matin avec, notamment, les plaidoiries de la défense de Paul Giacobbi.
N.M.
Une trahison de la population
A qui profite le crime ? Pour l’avocate générale, il n’y a aucun doute ! Le grand ordonnateur des subventions, « le commanditaire », c’est celui qui était au sommet de la hiérarchie administrative, l'ex-président du Conseil général, Paul Giacobbi. Il aurait mis en place « un système claniste et clientéliste » à visée clairement électorale à son seul bénéfice politique « pour conserver le pouvoir » en distribuant emplois et subventions. Son cabinet noir ? « Un rideau de fumée ». Augustin Viola et Dominique Domarchi ? « Des ramasseurs de voix ». Les bénéficiaires des subventions ? « Des porteurs de voix ». Clémence Caron ne croit pas une minute que Paul Giacobbi « aurait été berné, trompé, trahi ». Et d’ironiser : « Il serait donc le président le moins informé de toute la France... tout aurait été fait à son insu ! ». Estimant qu’il a commis une « trahison de la population sur ces principes », elle requiert, en conséquence, la confirmation de la condamnation de première instance : trois ans de prison ferme, 100 000 € d'amende et cinq ans d'inéligibilité.
Des peines plus lourdes
La procureur n’est guère plus tendre avec les autres co-accusés. Elle pointe sévèrement du doigt la responsabilité de l’ex-directeur général des services du département (DGS), Thierry Gamba-Martini, qui, en tant que patron de l’administration, aurait du rétablir le fonctionnement normal du processus de décision et faire respecter les règles. « Il ne l’a pas fait ! Il n’a pas recadré son collaborateur Jean Leccia. Sa défaillance a permis le détournement ». Elle requiert contre lui 2 ans de prison avec sursis et 5 ans d'interdiction d'exercer dans la fonction publique. Un quantum aggravé par un couperet professionnel par rapport à la condamnation de 1ère instance où l’ex-DGS avait écopé de 2 ans de prison avec sursis et 10 000 € d’amende.
La loi bafouée
Clémence Caron a la main tout aussi lourde avec les élus de la Commission du monde rural qui validait les dossiers et octroyait les subventions. A l’encontre du rapporteur, Pierre-Marie Mancini, qui « ne pouvait pas ignorer la loi », s’octroyer « en toute facilité » une subvention pour construire un gîte et l’utiliser pour la rénovation de son domicile, elle requiert 3 ans de prison dont 2 avec sursis, 12 000 € d'amende et 5 ans d’inéligibilité. Contre le président Jacques Costa, relaxé en première instance, elle requiert un an de prison avec sursis et 5 ans d'inéligibilité pour n’avoir pas « dénoncé les dysfonctionnements qu’il avait vus », pas mis fin au système qu’il dénonçait.
Un jeu conscient
Un reproche adressé aussi aux fonctionnaires, des maillons qui, selon elle, jouent pleinement le jeu du détournement de fonds publics. Un jeu avéré, conscient, pour l’ex-contrôleur des travaux, Hyacinthe Vinciguerra, qui a avoué n’avoir jamais fait de contrôle sur site. A l’encontre du maire de Pirelli, « fidèle de Paul Giacobbi », et « rapporteur de voix », elle requiert la confirmation de la condamnation de première instance : 2 ans de prison dont 1 an avec sursis, 5 ans d'interdiction d'exercer une fonction publique et 8000 € d’amende. Le ton se durcit contre Marie-Laure le Mée, à l’époque responsable du service habitat du département, qui « aurait dû contrôler le travail », « alerter sur les dossiers squelettiques » et empêcher les dérives. La jugeant responsable d’avoir failli à son rôle, la procureur requiert contre elle un an de prison avec sursis comme en première instance, assortie en prime d’une interdiction d'exercer une fonction publique.
Pas responsables !
La Défense accuse le coup et tente de déminer le terrain lors des plaidoiries. Martelant le même credo qu’en première instance « Pas coupable, pas responsable ! », Me Marie-Josée Bellagamba, avocate de Marie-Laure Le Mée, invoque le principe d'obéissance à des ordres donnés par une hiérarchie. Elle plaide la relaxe pour la chef de service prise « entre l’enclume et la menace éventuelle de poursuites judiciaires en cas de dérapage. C’est souvent les fonctionnaires administratifs qui sont retenus comme responsables de dysfonctionnements qui viennent d’ailleurs ». Tout comme Me Gilles Antomarchi, avocat de Jacques Costa, qui affirme ne pas comprendre des réquisitions « non conformes au dossier. Jacques Costa ne peut pas être mis en cause de quelque manière que ce soit. En tant que président de la Commission du monde rural, il ne faisait que donner son avis. En tant que conseiller, il n’a pas participé au vote. Il n’a donc participé à rien. C’est pour cela qu’il a été relaxé en 1ère instance. Je n’ai entendu dans le réquisitoire aucun argument de nature à me faire changer d’avis et à faire changer la juridiction d’appel d’avis ».
Le procès s’achève vendredi matin avec, notamment, les plaidoiries de la défense de Paul Giacobbi.
N.M.