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Sécurité publique et intégrisme islamiste : L'assemblée de Corse approuve la résolution prioritaire


Pierre BERETTI le Jeudi 28 Juillet 2016 à 17:06

Au terme d'une longue journée de délibération, la résolution portant sur la sécurité publique et l’intégrisme islamiste a été votée malgré la non participation des communistes.



Sécurité publique et intégrisme islamiste : L'assemblée de Corse approuve la résolution prioritaire
L’ordre du jour de la dernière session estivale de l’Assemblée de Corse a été bousculé toute la journée par la question de la sécurité publique et l’intégrisme islamiste, sujets préoccupants après les derniers évènements. Après une minute de silence en hommage aux victimes, les deux présidents se sont, en effet, exprimés sur la question proposant une résolution.
 
L'intervention de Gilles Siméoni
« Jour après jour, drame après drame, la douleur se fait plus aigüe, le deuil plus sombre. Mes premières pensées vont vers tous ceux qui ont perdu la vie. Les fanatiques peuvent prendre des vies, ils échoueront à nous enlever notre humanité ainsi que notre envie et notre volonté de vivre ensemble. Notre premier devoir est donc celui du rassemblement, de la cohésion et de l’unité. Nous devons faire face. En ma qualité de Président de l’Exécutif de Corse, je demande à l’Etat que les mesures suivantes entre en vigueur sans délai : Mises en œuvre des procédures de droit commun prévu à l’échelle du territoire français. De manière plus particulière à notre île, je demande : une sécurisation renforcée des rassemblements festifs, sécurisation renforcée des fêtes et rassemblements religieux, sécurisation renforcée des établissements scolaires et universitaires, sécurisation renforcée des moyens de transports collectifs et notamment des transports maritimes.
Je propose également qu’un point mensuel soit établi sur ces mesures et qu’une communication publique compatible avec les exigences avec la confidentialité de certaines dispositions soit faite par l’autorité préfectorale afin de rassurer la population. Parallèlement au renforcement des mesures de sécurité, il nous appartient d’être collectivement et individuellement attentif aux indices ou élément pouvant laisser présumer un risque. Il ne faut pas pour autant tomber dans la psychose, la paranoïa. Lutter contre le terrorisme c’est aussi interdire la propagation et la diffusion de l’idéologie qui en est le terreau. Cette action relève là aussi des compétences régaliennes de l’Etat. Il ne peut y avoir de complaisance ou d’inertie face à des discours de haine ou d’exclusion ou de remise en cause de l’égalité entre les femmes et les hommes. Nous demandons par exemple l’expulsion des imams et étrangers tenant des discours incompatibles avec les valeurs et droits fondamentaux ou encore la fermeture des lieux de réunion ou de tels discours sont tenus.
La Corse est, depuis, Pasquale Paoli, une terre de liberté de culte. Elle le restera mais elle ne saurait accepter ni le communautarisme, ni l’intégrisme. Cette vision est partagée par la quasi totalité des musulmans qui vivent en Corse. Il faut saluer les représentant du culte musulman de Bastia et d’Ile-Rousse qui ont interdit l’accès des lieux de culte à des prédicateurs salafistes. C’est une attitude courageuse. L’appartenance à notre peuple transcende les religions, les origines ou la couleur de peau. Elle se construit par la capacité à s’approprier la langue, la culture, le vivre ensemble qui nous a constitué au fil des siècles en communauté humaine originale, ayant vocation à être reconnue dans ses droits. Ensemble, face à notre peuple, face aussi à une opinion publique française, européenne et internationale attentive à chaque signe d’espoir, faisons que notre vote soit l’acte fondateur d’une société où les femmes et les hommes vivent en paix et en harmonie, qu’ils soient croyants ou qu’ils ne le soient pas. Ce faisant, une fois encore, la Corse saura étonner l’Europe ».

Et celle de de Jean-Guy Talamoni effectuée en langue corse
« La Corse n’est pas à l’abri. En tant que garants des intérêts matériels et moraux de ce peuple, et bien que nous n’ayons pas toutes les compétences au plan juridique, nous devons en parler. 

Nous n’en parlerons pas comme l’ont fait les politiciens du Palais Bourbon qui ont donné récemment un spectacle indigne. Chercher à faire de la récupération politique sur un tel sujet n’est pas une attitude responsable. Dire, par exemple, « avec moi, l’attentat de Nice n’aurait pas eu lieu » c’est prendre les gens pour des imbéciles dans un but purement électoraliste. C’est honteux. 

Il s’agit là d’un sujet complexe mais nous devons cependant réfléchir et agir. Nous ne serions pas à notre place si nous n’en parlions pas. 

Pour ma part, lorsque j’ai été élu Président de cette Assemblée, j’ai mis en place, vous le savez, trois conférences permanentes. L’une d’elle traite de la gestion de la diversité culturelle, sujet en lien avec nos préoccupations actuelles. Bien que nous ayons travaillé sur ces thématiques, je ne peux pas exprimer une vérité absolue. Je vous donnerai simplement mon point de vue, ma contribution au débat. ` 

Il y a deux-cent cinquante ans, pendant la période d’indépendance, on votait déjà à Ile-Rousse comme dans toute la Corse. Un juif demanda lui aussi à voter. A cette époque, dans un pays chrétien, cela n’allait pas de soi. Face à cette demande, l’administration balanine consulta directement le chef de l’Etat, Pasquale Paoli, pour savoir ce qu’il convenait de faire. Celui-ci répondit : « En Corse, la liberté ne demande pas l’avis de l’Inquisition ». Un homme honnête, installé sur le territoire national, qu’il soit chrétien ou juif avait le droit de vote. C’est par cette réponse que fût instituée la tolérance religieuse en Corse. Les historiens appellent ce fait « l’affaire du juif d’Ile-Rousse ». Cette tolérance ne s’appliquait pas seulement aux juifs : lorsqu’un bateau tunisien avait une avarie près de l’île, Paoli lui envoyait des secours. 

L’Histoire est parfois curieuse. Deux-cent cinquante ans plus tard, il y a quelques jours, dans cette même cité d’Ile-Rousse, un autre évènement significatif est intervenu : quelques personnes arrivées d’on ne sait où, habillées comme à Raqqa, présentées comme étant des salafistes, ont voulu prêcher dans la salle de prière des musulmans. Ces derniers ont refusé et ces personnes se sont installées sur la plage d’Ile-Rousse pour entamer une prière publique. Les gens présents sur place leur ont demandé de quitter les lieux. Et ils ont bien fait. 

La tolérance religieuse est un élément majeur de notre tradition politique. Ceux qui veulent la remettre en cause ne peuvent se revendiquer de notre culture. Ceux qui confondent musulmans et salafistes et qui se préparent, au premier incident, à aller en bande dans les quartiers ou à frapper un homme venu ici pour y trouver du travail, ceux-là n’ont qu’à rester chez eux ou, s’ils en ont le courage, qu’ils aillent en Syrie combattre Daesh. A mon avis, ils ne seront pas nombreux. 

Les limites de la tolérance concernent les mouvements idéologiques ou sectaires, inconciliables avec nos valeurs. Les salafistes, y compris ceux qui ne pratiquent pas la violence, portent des idées qui conduisent à la destruction de notre société. Un exemple : on dit du racisme que ce n’est pas une opinion mais un délit. C’est vrai. De la même manière, la vision qu’ont les salafistes de la femme ne doit pas être considérée comme un point de vue mais comme un délit. Un imam qui refuse, dans une école ajaccienne, de serrer la main aux femmes, c’est inacceptable. 

Pour notre part, nous pensons qu’il est temps de déclarer en Europe que le salafisme, le wahhabisme et les mouvements semblables sont hors la loi. Il est temps également de fermer et bloquer les sites internet qui en font la promotion. En attendant ces décisions, qui ne dépendent pas de nous, et n’ayant malheureusement pas les compétences législatives, il me semble raisonnable de demander à l’administration française de faire en sorte que ces gens-là ne puissent plus arriver sur la terre corse où ils n’ont rien à faire. 

En Corse, nous devons savoir qui prêche et ce qu’il dit. Il en va de notre sécurité. Tous les lieux connus pour diffuser des idées salafistes doivent être fermés. 

Il y a un peuple de droit sur la terre corse, c’est le peuple corse. Ce peuple a toujours pratiqué la justice et le respect de chacun. En ces temps troublés, ces valeurs demeurent les idées force qui nous conduiront sur le chemin de la paix ». 


 Non participation des communistes
Après une suspension de séance, la droite s’est accordée sur la résolution « au delà des différences et des divergences » comme l’a souligné Camille de Rocca Serra qui aurait souhaité que la résolution soit amendée d’un texte dans lequel la traitrise des français ou étrangers résidant en France se rendant en Syrie serait reconnue.  Du côté de la gauche, Michel Stefani a présenté deux amendements, l’un faisant apparaitre la condamnation des actes terroristes, et un deuxième interdisant à n’importe quelle organisation de se substituer à l’autorité régalienne de l’Etat et à l’Etat de droit pour défendre le peuple corse. Ce dernier amendement a vraisemblablement retardé le vote une fois de plus avec une deuxième suspension de séance et une réunion des présidents de groupe. C'est au terme d'une longue journée que la résolution a été votée à l'unanimité malgré une non participation des communistes.