"Par une lettre dont nous venons d’avoir connaissance (ci-jointe), la sous-préfète de Sartène, « pour la préfète et par délégation », demande à la Communauté de communes Sud Corse de retirer la délibération par laquelle elle présentait sa candidature pour la démarche Territoire Zéro Chômeur de Longue Durée (TZCLD). L’intervention inattendue de la préfecture pourrait avoir des conséquences extrêmement graves car les dossiers sont actuellement en cours de constitution et devront impérativement être déposés au plus tard à l’automne prochain.
On sait que ce programme, visant à proposer des contrats à durée indéterminée à des personnes en voie ou en situation d’exclusion, a donné d’excellents résultats dans de nombreux territoires lors d’une première phase d’expérimentation. Certains de ces territoires sont déjà parvenus à l’exhaustivité, c’est- à-dire à la suppression totale du chômage de longue durée.
C’est la raison pour laquelle, il y a deux ans, j’ai obtenu de l’Assemblée de Corse un vote à l’unanimité, afin de favoriser la participation des territoires de l’île à cette démarche particulièrement prometteuse. Depuis, nous avons constitué une commission ad hoc de l’Assemblée de Corse et organisé un grand nombre de réunions avec des élus locaux (généralement des intercommunalités) afin de les sensibiliser à cette question. Ces réunions ont permis d’enregistrer un accueil très positif des responsables des territoires, et plusieurs d’entre eux se sont positionnés pour participer à la seconde phase de Territoire Zéro Chômeur de Longue Durée : Communauté de communes Pasquale Paoli, Capi Corsu, Ville de Bastia notamment. D’autres sont sur le point d’adhérer au programme.
Bien entendu, tout cela a été fait en lien avec l’association TZCLD et son président Laurent Grandguillaume, représentée en Corse par Madame Véronique Albertini.
Or l’argumentation juridique sur laquelle s’appuie la préfecture (les communautés de communes ne seraient pas, selon elle, compétentes pour faciliter la création d’emplois) semble d’autant plus contestable que la loi elle-même a confié aux différents territoires la responsabilité de conduire la démarche et qu’à aucun moment, de l’autre côté de la mer, la compétence des communautés de communes n’a été contestée par les services de l’Etat. Ainsi, ce qui serait possible et souhaitable ailleurs ne le serait pas en Corse, quel que soit les progrès attendus en matière de lutte contre la précarité !
Cette intervention absurde n’est pas sans rappeler l’opposition acharnée des services de l’Etat à la charte corse en faveur de l’emploi local, alors que des chartes comparables sont en vigueur dans l’île de la Réunion ou même à... Paris !
Tout cela s’inscrit évidemment dans le contexte actuel de guérilla administrative livrée par l’Etat à la Collectivité de Corse, et ce quels que soient la nature et l’intérêt des démarches dont il s’agit, fussent- elles validées comme en l’espèce à l’unanimité de l’Assemblée. Ce genre de manœuvre paraît particulièrement dommageable s’agissant d’une question aussi sensible et qui concerne des milliers de familles corses en difficulté.
Aussi, il me semble que l’on franchit actuellement toutes les limites du raisonnable et que l’on piétine allègrement le principe de neutralité qui s’impose à l’Administration. Il est plus que temps de revenir à la raison et de permettre aux élus légitimement désignés par le suffrage universel, de pouvoir sereinement œuvrer au service de la Corse et des Corses."