Même si beaucoup de choses ont été réalisées avec la pose du pont provisoire de Baliri, l’ouverture de sentiers, et la réfection du pont de Tuani, Corte panse-t-elle toujours ses plaies un an après cette terrible catastrophe ?
Oui, puisqu’il y a eu les conséquences de cette catastrophe naturelle qui n’a pas d’équivalence dans l’histoire de Corte. Il faut bien se rendre compte de l’ampleur de la catastrophe et des dégâts que ces tempêtes ont causés, tant sur les infrastructures communales que sur celles dont la compétence relève de la CdC, ainsi que sur les infrastructures privées. Nous sommes toujours en train de panser nos plaies. Nous ne sommes plus dans la phase d’urgence, mais dans une phase d’après. Pour ce qui nous concerne, je vais citer une infrastructure qui n’a pas été totalement reconstruite, à savoir la prise d’eau et sa piste d’accès. En collaboration étroite avec l’État et la CdC, nous finalisons le dossier de reconstruction, avec une difficulté sur ce dossier, mais sur d’autres aussi : les critères d’évaluation qui donnent lieu aux soutiens des aides que l’on peut avoir, que ce soit au niveau du fonds catastrophe naturelle ou de nos partenaires, prennent souvent comme référence la reconstruction à l’identique. Or, les leçons qu’il faut tirer de ces catastrophes, c’est qu’il faut veiller à ce que les mêmes causes ne produisent pas les mêmes effets. Dans ce cas, nous devons adapter la reconstruction en tenant compte de ce qui, pour moi, constitue un impératif absolu.
Cela veut dire construire des aménagements supplémentaires pour sécuriser davantage encore la prise d’eau ?
Ces aménagements supplémentaires ont donc un coût significatif. Nous nous attachons à faire prendre en compte ce principe pour qu’il soit traduit en termes de cofinancement, afin que la ville n’ait pas à supporter une part trop importante dans ces reconstructions, puisque nous parlons ici d’une évaluation d’un peu plus d’un million d’euros pour reconstruire la prise, la voie d’accès et les nouveaux aménagements.
Depuis ces catastrophes, beaucoup de choses ont déjà été réalisées, comme la pose du pont provisoire de Baliri, l’ouverture de sentiers, et la mise en place d’une navette pour sauver la saison touristique. Et justement, au niveau de cette saison, a-t-on des chiffres sur la fréquentation ?
En préambule, j’insiste sur un point. Nous avons eu une mobilisation générale pour accompagner la commune afin de faire face dans l’urgence aux conséquences de cette catastrophe. S’agissant de la vallée, il a fallu, en quelques mois, organiser, comme nous nous y étions engagés, avec le soutien de l’État et de la Collectivité de Corse, la mobilisation de toutes les ressources nécessaires pour parvenir à organiser une activité touristique dans la vallée. Ce qui a été fait en très peu de temps. Bien évidemment, c’est une saison expérimentale avec l’organisation de la diversification de l’attrait touristique de la vallée, grâce à l’ouverture de plus de 30 km de sentiers et, du côté de la CdC, à la mise en place d’une navette pour un coût de plus de 500 000 euros. Tout cela a permis de bénéficier d’une activité touristique pour la saison. Comme nous l’avions dit au début, il convient d’en tirer un premier bilan, le plus exhaustif possible, sachant que l’on fait appel à plusieurs paramètres. Il y a les paramètres de fréquentation pour lesquels nous récoltons diverses données auprès de l’office de tourisme ou encore du Musée de la Corse, afin d’avoir un comparatif avec 2023. Nous faisons aussi un comparatif avec des éléments que nous avons récoltés auprès de l’Agence du tourisme de la Corse. Il y a également un autre paramètre important : le nombre de nuitées à Corte. La fréquentation et l’activité économique qui en découle ne vont pas nécessairement dans le même sens. Il peut y avoir une fréquentation correcte et un impact économique important dans le sens négatif, et de la même manière, il peut y avoir un peu moins de fréquentation avec un impact économique plus important. Pour tous ces éléments, nous avons mis en place un observatoire des incidences économiques de la catastrophe, en collaboration avec l’Université de Corse. Là aussi, ce sont des mécanismes lourds à gérer, mais qui sont importants pour organiser de la meilleure manière possible la prochaine saison, à court terme, et aussi pour décider, à moyen et long terme, quel sera l’avenir de la vallée par rapport à ces retours que nous avons. Dernier point, sans entrer dans le détail des données dont nous disposons déjà, nous nous sommes aperçus qu’une très grande majorité des visiteurs n’étaient pas au courant de cette catastrophe et donc de l’accessibilité de la vallée. Cela signifie d’abord que nous informerons davantage le public des incidences de ces catastrophes. Il y a donc beaucoup de paramètres à prendre en compte, et encore une fois, ils sont essentiels pour avoir les bonnes indications et prendre les bonnes décisions.
Il y a un chiffre qui circule depuis quelques jours en ville, et il concerne la fréquentation au lac du Melu. On entend qu’il y aurait eu dix fois moins de visiteurs cette année que les années précédentes, soit 10 000. C’est la réalité ?
Pour l’instant, je ne vais pas donner de chiffres. J’attends de croiser tous les indicateurs que nous avons, tout en en attendant d’autres, notamment ceux qui émanent de l’Office de l’Environnement de la Corse, pour confirmer ce que vous dites. Mais il est évident que le nombre de personnes qui se sont rendues aux lacs du Melu et du Capitellu a baissé de manière drastique par rapport aux années précédentes. Comme je le disais précédemment, en dehors de l’aspect quantitatif de la fréquentation, il faut que nous regardions comment cela a été compensé, notamment par la fréquentation des sentiers que nous avons ouverts, et corréler cela à l’impact économique qu’a eu cette baisse indéniable sur l’ensemble de la vallée, dont la visite des lacs constituait le point d’attrait pour les touristes. Les chiffres pris isolément ne constituent pas, pour moi, des indicateurs suffisants pour pouvoir décider de ce que l’on doit faire. Il faut prendre en compte un ensemble de paramètres. En accord avec le président de l’Exécutif de Corse, Gilles Simeoni, nous nous sommes fixés jusqu’à la fin de l’année pour récolter ces éléments, les analyser avec l’ensemble de nos partenaires, et ensuite avoir une réunion de concertation avec les socio-professionnels pour leur dire dans quelle mesure et quels points nous devons améliorer. Je pense, par exemple, aux réservations pour les navettes pour la saison 2025, et savoir quelles seront les premières pistes d’orientations pour le moyen et long terme concernant l’avenir de la vallée.
Au cours des premières réunions avec l’ensemble des partenaires, plusieurs pistes ont été évoquées, comme la réfection de la route, la construction d’une nouvelle route en rive droite, et même la mise en place d’un téléphérique. La réflexion sur ces projets s’est-elle poursuivie ?
Nous avons continué à travailler sur ces différents projets. Pour ce qui me concerne, je n’exclus aucune option. Il faut toutes les évaluer au regard de tous les éléments que nous aurons. Le deuxième point, c’est qu’aujourd’hui, je ne privilégie aucune solution. Nous attendons, parmi les éléments d’informations indispensables pour prendre des décisions, les conclusions de l’étude du bureau d’études Arcadis, mandaté par la CdC, qui a déjà rendu un premier rapport. Nous attendons de prendre connaissance de son deuxième rapport, et c’est là que les pistes que vous évoquez seront plus précisément étudiées.
Avec les catastrophes de l’an passé, la commune a-t-elle réfléchi à un plan à moyen terme prenant en compte les effets du changement climatique ?
Tout ce qui s’est passé il y a un an à travers ces catastrophes renforce ce qui constitue le fil rouge du plan qui vise à développer Corte pour les années à venir dans le cadre du développement durable, pour lequel nous nous sommes axés sur des pistes assez précises concernant le verdissement et l’augmentation de la perméabilisation des sols. Je n’en veux pour preuve que les actions concrètes entreprises par la municipalité à travers différents programmes mis en œuvre. Par exemple, la création d’un réseau pluvial dans la Haute Ville, qui est en cours. La création d’un réseau pluvial dans le cadre du projet de réaménagement du cours Paoli. La création d’un autre réseau pluvial dans le cadre de la construction du parking Filippi, rue Fontanarosa. Ce sont des éléments concrets qui traduisent cette volonté de prise en compte des effets du changement climatique. Le dernier exemple que l’on peut donner, c’est celui du Plan Local d’Urbanisme qui, évidemment, prend en compte tous ces aspects, et notamment celui de la perméabilisation des sols.