Ce moment de retrouvailles (où ils sont de moins en moins nombreux) est important pour eux et nécessaire. Nécessaire pour la mémoire car rares sont les rencontres où ils peuvent se libérer de mots, de maux, de non-dits, de vécus entre personnes qui se comprennent pour avoir été aux côtés les uns des autres, là-bas au sud de Saïda, aux portes du djebel.
Il est bien difficile de comprendre aujourd’hui la situation de la France en Indochine ou en Algérie pour les nouvelles générations. Mais il est tout aussi difficile pour celle de nos pères ou grands-pères de comprendre pourquoi ils y furent envoyés et à quoi cela servit.
Nous savons bien que la « suite et fin » entraina des situations dramatiques d’exil, d’isolement, de conflits interpersonnels (voire Aléria 1975) et ailleurs sur le continent parce que la France ne savait que faire de tous ces rapatriés, parce que la France a été dépassée par « les évènements ».
Reste qu’aujourd’hui, ces hommes sont heureux de se retrouver de temps en temps entre anciens copains de « régiment », Harkis, Corses et Continentaux, Français d’Algérie… êtres humains en somme…
Au troisième jour de la rencontre, soit dimanche, une messe était célébrée en leur honneur dans la magnifique cathédrale de Bourges. Une messe assurée par l’Evêque de Bourges Mgr Maillard. Messe au cours de laquelle il manquait un peu le Dio Vi Salvi Régina… Lacune comblée par Jeannot Ciosi qui l’offrit à l’Evêque sur le parvis de la cathédrale, entouré de tous ses compagnons d’armes. Bel instant de recueillement.
Au dernier déjeuner ponctuant le congrès, le général Gaget, patron du commando Cobra, et Arthur Smet, photographe du général Bigeard dans le secteur de Saïda convièrent Patricia Mariani, co-auteure du livre Un gone dans le djebel.
Faute de trouver un éditeur, le livre n’est pas encore publié. Pour l’heure, l’objectif principal de Patricia Mariani est d’utiliser ce support historique doté de magnifiques photos d’Arthur Smet, pour aller à la rencontre des collégiens et lycéens afin d’échanger avec eux sur cette période méconnue.
C’est aussi pouvoir utiliser cet outil pour parler de respect, de communication, d’écoute et de non-violence. «La France honore, à juste titre, les anciens combattants des guerres mondiales précédentes. Ça ne sera pas le cas pour les combattants d’Indochine et d’Algérie, toute honteuse qu’elle est de cette période qu’elle souhaiterait mettre sous le tapis pour la cacher et l’oublier. Mais voilà, là-bas, il y eu des morts, militaires ou civils, Français ou Algériens. Et pour ceux qui sont revenus, quels qu’ils soient, mais notamment pour tous ces jeunes appelés (et non pas engagés) de 20 ans, il reste une souffrance, comme un sillon creusé dans leur chair dont la plaie ne cicatrisera jamais. C’est un devoir de mémoire et de résilience, si l’on peut utiliser cette période de notre Histoire comme outil d’échanges et de réflexions. Alors nous pourrons dire qu’ils n’ont pas vécu tout cela pour rien ».
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On peut joindre Patricia Mariani par mail contact@dememoired’homme.org