Corse Net Infos - Pure player corse

Cinéma et télévision : le réalisateur Ange Casta n'est plus


La rédaction le Vendredi 16 Octobre 2020 à 17:36

Ange Casta, auteur et réalisateur pour la télévision d'une centaine d'œuvres, qui a, par ailleurs, assurré la rénovation puis la présidence de la Société civile des auteurs multimédias (SCAM) est décédé à l'âge de 94 ans. Pour la Corse il réalisa pour la télévision notamment une adaptation inoubliable de "Colomba" l'œuvre de Mérimée et tourna également une œuvre d'actualité "La Parabole Corse" nous rappelle son frère Jean. Il sera inhumé à Lumio berceau de la famille



(Photo DR)
(Photo DR)

Ange Casta est né à Marseille et a passé son enfance à Aix-en Provence. À l’Université, au cours de ses études supérieures de lettres il découvre le théâtre et fait sa première expérience de mise en scène. Il est admis à l’IDHEC (Institut des Hautes Etudes Cinématographiques) en 1949. Il commence sa carrière comme assistant de Jacques Becker et de Raymond Rouleau. Il réalise un court métrage Autour de Casque d'or (INA) pendant le tournage du film, puis un moyen métrage cinéma (35 mm) Orly le monde.


Il commence sa carrière à la RTF (plus tard ORTF) en 1952 et devient réalisateur en 1955. Il appartient à la première génération des réalisateurs qui comptent Stellio Lorenzi, Marcel Bluwal, Claude Santelli, Jean Prat, J ean-Pierre Marchand, Hubert Knapp, Jean-Claude Bringuier, Jean-Marie Drot etc. . Ange Casta s’est consacré à la Télévision Publique.



Au fil des années, il partage son activité entre fictions, grands reportages et documentaires de création. Il a réalisé plus de 100 films (voir INA /Inathèque de France).

Pour Cinq Colonnes à la Une puis les éditions spéciales d’Information Première (Pierre Desgraupes), il parcourt le monde à l’heure de la décolonisation : Somalie/Éthiopie, Roumanie communiste, Palestine (Gaza), Vietnam (La guerre à 25 ans), Algérie (L’Algérie dix ans après), Laos (Commando, piste Ho Chi Minh, bombardements B52), Cambodge (Siège de Phnom-Penh/Chronique d’une route coupée), Tchad (Au-delà de la guerre), Amérique latine (Typhon sur le Honduras/Médecins Sans Frontières).

À travers ses documentaires de création il observe, analyse, témoigne à propos d’un monde qui change au long des années de croissance, les Trente Glorieuses , avec le meilleur et le pire : l’ébranlement de mai 68 et la longue grève de l'ORTF pour la "liberté d'expression", suivie des années de crise (De mère en fille, le temps s’en va Madame, La rupture, Les chemins de la Vie, les Dossiers de l'Écran, Daniel Claude Simone et 1 million d’autres, La Pub, Que Vive Mexico, Beurs, La Parabole Corse). Pierre Bourdieu et Françoise Dolto ont collaboré à ses travaux. Il a également tracé les portraits/documents de grands écrivains et de personnalités : Alain-Fournier (À la recherche du Grand Meaulnes), Saint-Exupéry (Visages de Saint-Exupéry), Ampathé Bâ, Amadou Seydou (Service de la Recherche ORTF). Il a participé à Lectures pour tous.



Il a dirigé dans ses films de fiction : Suzanne Flon, Patrick Dewaere, Martine Carol, Alice Sapritch, Jean Desailly, Philippe Avron, Claude Evrard, Bernard Fresson, Juliette Gréco, Jean-Marc Bory, Catherine Rouvel, Grégoire Aslan, Henri Virlojeux, etc. dans des œuvres telles que La Belle Équipe, Si j'étais vous , Monsieur Il, Drame à un personnage, La roulette russe, Colomba1, Jean Jaurès Vie et mort d’un socialiste, Mademoiselle Clarisse.
Il a reçu pour ses films des prix nationaux et internationaux (Prix René Barthélemy, Grand prix de la Télévision 1965, Prague d’Or 1981, Sept d’Or 1985, Grand Prix du Jury Festival de l’Environnement 1992)

En 1976 il a été l’initiateur de la campagne de communication pour Médecins sans frontières, alors à ses débuts, prise en charge gratuitement par Havas, avec le slogan : « Dans leur salle d’attente 2 milliards d’hommes ». Cette campagne constitue pour les fondateurs de MSF « une deuxième naissance ». Elle est le point de départ de la notoriété internationale de cette ONG qui recevra le Prix Nobel de la Paix en 1999.(L’aventure MSF – Anne Vallaeys, Prix Joseph Kessel, Fayard 2005 / Au seuil de l’éternité – Xavier Emmanuelli, Albin Michel 2011).

Parallèlement, pendant 15 ans - 1977/1993 - Ange Casta a été Professeur associé des Sciences de la Communication et des Études Cinématographique à l’Université Louis Lumière Lyon II où il mettra en place la filière communication/cinéma de 3e cycle.



En , après la privatisation de TF1 et la création de plusieurs chaînes de Télévision Commerciales, Ange Casta, au sein d’un groupe d’experts, a avancé la proposition d’une réforme fondamentale du financement de la Télévision Publique - service d’État - qui lui permettrait d’échapper à la marchandisation de sa politique des programmes : Suppression de la publicité sur ses antennes, compensée, à parts égales, par une Contribution Culture et Communication, modulée, prélevée sur l’ensemble du marché publicitaire, les deux aspects étant indissociables, les recettes publicitaires abandonnées par la Télévision Publique retournant sur le marché commercial. Ce choix sera accompagné d’une révision équilibrée de la Redevance TV payée par les usagers. (http/blog scam fr 8082/Accueil/tabid/36/EntrylD30/Default.aspx) . Retenue dans un premier temps par Michel Rocard, Premier Ministre, cette proposition sera finalement abandonnée sous les pressions.



À partir de 1990, Ange CASTA a animé le groupe de travail « Pour que vive la Télévision Publique », auquel participaient Pierre Bourdieu, Max Gallo, Pierre Moinot, Claude Marti, Jean Martin juriste-avocat, et Christian Pierret Président de la Caisse des Dépôts. Vingt ans plus tard, le , dans un contexte politique différent, cette proposition de réforme a été reprise de façon inattendue par le nouveau Président de la République Nicolas Sarkozy, sans la contrepartie financière équivalente pour la Télévision Publique ainsi privée d’une partie de ses moyens (V. article. de Claude Soula,Nouvel Observateur du ).


De 2003 à 2007, Ange Casta a été président de la SCAM (Société Civile des Auteurs Multimedia).

Il a été à l'origine en 2005 de la création des Étoiles de la Scam, attribuées chaque année aux meilleurs films documentaires diffusés.

Il était Chevalier de la Légion d’honneur.
(source Wikipedia)


L’hommage de la Scam : « on vous devait bien ça »

Ce sont les mots, que la Scam fait siens, glissés à l’oreille d’Ange Casta par François Mitterrand lorsqu’il lui accroche la légion d’honneur au revers de sa veste après avoir évoqué sa riche filmographie. 

Ange Casta s’en est allé ce mardi 13 octobre. Réalisateur éclectique, il s’est frotté à tous les genres, grands reportages, documentaires, fictions et à quelques grandes figures du cinéma, Suzanne Flon, Patrick Dewaere, Bernard Fresson.
Avec De mère en fille, il explore les non-dits qui se transmettent d’une génération l’autre et décroche en 1965 le Prix René Barthélémy de la meilleure émission de télévision. 

Vingt-cinq ans plus tard en 1991, il signe Beurs, scènes de vie et états d’âme de Zineb, Djamel et Khalid, où il s’attache à leur énergie, leur créativité, leurs réussites et prend à contre-pied les clichés-banlieue.
On citera encore « Jaurès, vie et mort d’un socialiste », une fiction-documentaire réalisée en 1980 au crépuscule des années Giscard, dans laquelle Michel Rocard voit matière à « réconcilier le peuple de France ».
Sans oublier La guerre a vingt-cinq ans, tourné en 1970 au cœur du drame vietnamien, qui allie l’énergie du reportage et la grâce du cinéma. 

Le conseil d’administration et toute l’équipe de la Scam se souviennent de ce qu’ils lui doivent. En septembre 2003, lorsqu’il prend la présidence de la Scam, il adresse un long courrier à tous les auteurs et autrices. Il en appelle à « une génération nouvelle de femmes et d’hommes (…) talentueux lucides et sages, volontaires et surtout capable d’anticiper pour faire face aux défis qui s’accumulent, à la pression qui s’exerce pour réduire la place des auteurs, pour s’attaquer à son droit moral qui est le fondement et la justification de leur existence ». L’élan est donné, sous son impulsion, la Scam renforcée entre dans un nouvel âge. 

Ange est notamment le père des Étoiles de la Scam décernées chaque année à trente documentaires et reportages. « Je constatais la solitude des auteurs, leur paupérisation, leurs très beaux films diffusés après minuit… ». Les Étoiles qui soufflent leurs quinze bougies cette année brilleront encore sur grand écran début novembre au Forum des images. Il en était le plus fidèle spectateur.