« Nous venons de découvrir la position du gouvernement. Globalement, ce qui me frappe, c'est l'absence de perspective politique globale. Rien sur les Arrêtés Miot ! Rien sur le statut de coofficialité de la langue corse ! Rien sur le statut de résident ! Rien sur la révision constitutionnelle ! Rien sur les perspectives offertes par la nouvelle donne politique créée par le débat démocratique et les évolutions profondes de la société corse ! Rien sur tout ce qui fait la substance d'une véritable solution politique ! Il y a, certes, un point positif : l'annonce de principe d'une collectivité unique et son corollaire, la suppression des Conseils généraux. Ce combat, mené depuis des décennies, est, donc, sur le point d'aboutir. Mais le calendrier proposé reste aléatoire et le contenu final de la réforme, incertain ! Au total, à l’évidence, la forme et le ton des propos gouvernementaux ont changé et sont plus ouverts, mais les réponses sur le fond restent largement insuffisantes. Si on avait placé, depuis le début, le curseur au bon niveau juridique et politique, la réforme concernant la Corse aurait, d'ores et déjà, eu une dimension constitutionnelle. Au lieu de cela, nous nous retrouvons contraints de passer par l'insertion d'un article inclus dans une loi générale, sans que la perspective d'une révision constitutionnelle ne soit, aujourd'hui, garantie, ni même évoquée par le gouvernement. Nous devons tirer les conséquences de cette situation et engager des initiatives nouvelles ».
Jean-Guy Talamoni, leader du groupe Corsica Libera :
« Le compte n’y est pas bien entendu. Nous enregistrons avec satisfaction uniquement le principe de la collectivité unique qui est validé. C’est quelque chose, c’est vrai, d’important, mais qui ne suffit pas au regard des différentes demandes formulées de façon massivement majoritaire par l’Assemblée de Corse. Je pense à la coofficialité de la langue corse, je pense au statut de résident, à la demande de révision constitutionnelle qui a été demandée par une majorité écrasante de l’Assemblée de Corse, et puis je pense également à la question essentielle des prisonniers politiques que nous avons replacé au cœur du débat et qui est appelé à des développements dans les temps à venir. C’est pour nous véritablement essentiel qu’il y ait un signal qui soit donné sur cette question pour que le processus de dialogue entre la Corse et Paris puisse véritablement progresser. En résumé, le compte n’y est pas. Nous prenons acte de la validation de la collectivité unique mais il y a encore beaucoup à faire du côté du gouvernement pour arriver à être à la hauteur des espérances d’une majorité des élus de l’Assemblée de Corse. Il y a un frémissement par rapport à la position antérieure du gouvernement français et en particulier du ministre de l’Intérieur, cela dit, nous ne sommes pas encore aujourd’hui dans une situation satisfaisante s’agissant de ce dialogue. Donc nous sommes vraiment au niveau de prémices de dialogue ».
Jean-Charles Orsucci, leader du groupe « Démocrates, socialistes et radicaux », et maire de Bonifacio :
« Ma position a évolué et peut encore évoluer. Je n’étais pas au départ favorable au référendum pour des raisons que j’ai explicité dans cet hémicycle. J’étais d’ailleurs le seul élu à dire que j’étais très réservé. J’ai ensuite été convaincu par mes amis politiques qu’il fallait absolument passer par cette phase. Au jour d’aujourd’hui, je continue à penser qu’entre deux maux il faut choisir le moindre et ma volonté c’est qu’on aille très vite vers cette collectivité unique. Nous sommes ici les représentants du peuple corse élus au suffrage universel, et je pense que nous avons toute légitimité à pouvoir donner notre point de vue et à pouvoir défendre une position. Donc moi je suis plutôt dans l’idée qu’il faille aller vite pour avoir une collectivité unique dès 2018 et je dirais le référendum il aura lieu aussi en décembre 2015 si les élus ont fait le mauvais choix. Je crois qu’aujourd’hui il ne faut pas se cacher derrière ça. Je suis pour la collectivité unique dès 2018 et donc ne pas passer par l’étape du référendum. Je suis donc très satisfait sur le fond et sur la forme de ce qui a été dit aujourd’hui. Sur le fond parce qu’on a avancé de façon importante sur une question cruciale qu’est la collectivité unique, et sur la forme aussi parce qu’il y a une volonté très claire du gouvernement de continuer à travailler dans la sincérité, dans l’échange et en ne s’interdisant pas d’avancer chemin faisant vers des ambitions plus importantes, constitutionnelles. Mais il faut aussi être clair : les ministres actuels ne peuvent pas s’engager sur une réforme constitutionnelle car cela demande un large consensus qui n’existe pas aujourd’hui au sein des différents parlements ».
Aline Castellani, leader du groupe La Gauche Républicaine :
« Le Ministre l’Intérieur a annoncé une collectivité unique, et nous nous étions prononcés pour une collectivité unique. Toutefois reste pour nous à connaitre le statut de cette collectivité unique et le mode de scrutin, parce que ce qui a été proposé par l’Assemblée de Corse ne nous satisfait pas. Quant au référendum, nous l’avons demandé. Par ailleurs, j’ai demandé dans mon intervention qu’au lieu que ce soit un amendement de la loi NOTRe, ce soit une loi spécifique. Je ne comprends pas très bien pour quelle raison on ne pourrait pas faire une loi spécifique ».
Camille de Rocca Serra, leader du groupe « Rassembler pour la Corse », député de la 2ème circonscription de Corse-du-Sud:
« Ce calendrier est tenable à une seule condition : que nous évitions le référendum. Or nous nous avons ici demandé unanimement que le peuple soit consulté préalablement au projet pour savoir s’il était d’accord puisque lui-même avait refusé la collectivité unique en 2003. Le passage par la loi NOTRe interdit la consultation référendaire. Cela pose un problème puisque nous l’avons voté ici. Donc faut-il, au risque de faire un déni de démocratie, provoquer une élection plus rapidement que celle qui aurait lieu si on passait par un projet de loi, qui à ce moment là renverrait peut être l’élection en 2018 ou en 2019. Pour le reste on a bien compris qu’il n’y avait pas grand chose. Il n’y a pas de révision de la constitution, mais ça je n’en doutais pas. Les ordonnances préciseront quelles sont les modalités de compétences, car on ne sait toujours pas quel type de collectivité unique ce sera, le gouvernement n’a pas dit comment il l’imagine, si il l’imagine comme nous avec une chambre des territoires ou pas. Par contre, il ne pouvait pas refuser le principe de la collectivité unique, puisqu’il nous a lui même sollicité pour qu’on lui présente un projet.
Aujourd’hui il n’a fait que confirmé le principe d’une collectivité unique, c’est la moindre des choses qu’il pouvait faire. Pour le reste, on travaille ! On a travaillé sur le foncier, on a travaillé sur les droits de succession, mais on n’a pas aboutit sur ce que nous aurions souhaité, on est resté a minima. Mais je reconnais au Ministre de l’Intérieur d’avoir été toujours un acteur qui a cherché à être positif. Il n’a pas toujours apporté les réponses concrètement, mais il a toujours cherché à être positif. Je lui reconnais au moins ce mérite, c’est à dire que ses 25% de corse et son efficacité par ailleurs dans le gouvernement ont pu porter jusqu’ici à quelques progrès, maintenant j’attends de voir la suite ».
Laurent Marcangeli, député de la 1ère circonscription de Corse-du-Sud :
« J’ai deux regrets : le premier concerne le fait que la Corse ne fasse pas l’objet d’un texte à part entière et qu’on insère cette réflexion dans un amendement appartenant à un autre texte beaucoup plus général. Moi j’étais favorable à ce qu’il y ait une loi qui concerne véritablement l’avenir de la Corse, d’autant plus que je souhaitais qu’il s’agisse d’une loi constitutionnelle. C’est mon deuxième regret : je souhaite l’inscription de la Corse dans la Constitution de la Vème République, et visiblement on n’en prend pas véritablement le chemin suite à ce que les ministres ont pu dire aujourd’hui. Cela étant dit, je suis favorable au principe de collectivité unique ce n’est un secret pour personne. Il y a eu une avancée en ce sens, le texte va être débattu à l’Assemblée Nationale, et en tant que député, je prendrai toute ma liberté, et j’agirai davantage en tant que député de la Corse qu’en tant que député siégeant au groupe UMP. Je verrai ce que le gouvernement écrira dans cet amendement, je le commenterai, je l’amenderai si j’estime que c’est nécessaire, et je voterai pour ou contre en fonction de ce que je croirai bon pour la Corse, et non pas en fonction de consignes de vote du groupe auquel j’appartiens. J’entends prendre toute ma liberté sur ce texte ».
François Tatti, Conseiller Territorial, Président de la CAB, Président du MCD
« L'Assemblée de Corse a vécu ce matin un moment important. La création de la collectivité unique demandée par notre assemblée a été prise en compte par le gouvernement qui projette d’inscrire la Corse dans le mouvement de modernisation des institutions territoriales du pays, en lui préservant toute sa spécificité. Je veux saluer la qualité des propos et la sincérité de l'engagement des ministres Bernard Cazeneuve et Marylise Lebranchu. Cela démontre que le dialogue constructif indispensable avec l'Etat est possible, dès lors que nous sommes capables de nous rassembler sur l'essentiel, dans le respect des sensibilités politiques de chacun. Le calendrier indiqué par le gouvernement pose la question du référendum qui ne pourrait avoir lieu si nous nous engageons en faveur de la mise en place de la collectivité unique au premier janvier 2018. C'est une question importante qu'il faut prendre le temps d'examiner malgré l'urgence, puisqu'un autre calendrier est possible selon le ministre de l'intérieur. Je propose que l'Assemblée de Corse soit convoquée dès que possible pour en débattre. Il nous appartiendra de dégager une position la plus large possible pour démontrer au gouvernement, une nouvelle fois, notre capacité à dépasser nos clivages pour nous hisser à la hauteur de l'enjeu ».
Marcel Francisci, Conseiller territorial de Corse, Premier vice-président du conseil général de Corse-du-Sud et Président de la Fédération UMP de Corse-du-Sud
"Je prends acte de la volonté du gouvernement d'instituer une collectivité unique pour la Corse. Cette nouvelle organisation administrative et politique entend répondre à un besoin d'amélioration de l'efficacité de l'action publique en Corse. Mais aussi d'offrir à nos compatriotes une plus grande clarté dans l'exercice des compétences.
Même si je ne suis pas convaincu de la plus grande efficacité de cette future collectivité unique, je n'y suis pas opposé. Je regrette que la voie législative soit privilégiée au dépend de la voie référendaire qui aurait eu le mérite de faire reposer la création de la nouvelle collectivité sur une base populaire.
Je déplore également que la durée des mandats des élus issus des élections départementales et territoriales de 2015 soient ramenée à 2 ans au lieu de 6. Cela ajoute au sentiment de précipitation.
Je reste attentif aux déclarations ultérieures du gouvernement qui doit préciser ses intentions dans les tous prochains jours"
François Casasoprana, conseiller général du 3ème canton d’Ajaccio :
« Je me félicite que la nécessite d’une simplification administrative se soit imposée. Le travail considérable effectué par la commission présidée par Pierre Chaubon et par le comité stratégique a, sur ce point, été pris en compte. Dès les prochaines semaines, le principe d’une collectivité unique sera proposé à l’adoption du Parlement. Elle sera opérationnelle au plus tard le 1er janvier 2018. C’est un travail de co-écriture qu’il convient désormais de mener à terme. Le Gouvernement devra ainsi demeurer ouvert au dialogue avec tous les élus locaux. Avec cette décision, il s’agit d’ouvrir un nouveau chemin pour la démocratie locale, de mettre en place une nouvelle gouvernance. Renforcer le pouvoir régional permet en effet d’accroître la capacité d’initiative locale avec de nouveaux leviers d’action qu’il faudra mobiliser pour le développement de la Corse. C’est la condition pour que cette réforme soit utile. Puisse cette annonce d’un changement institutionnel nous permettre de franchir un cap politique ! »
Manon PERELLI