Pendant près de deux heures, de violents incidents ont opposé forces de l'ordre et manifestants. Crédits Photo : Michel Luccioni
Impossible d’avancer. Sur la route territoriale 20 menant à Ajaccio, la circulation est bloquée au niveau du rond-point de la gare à Corte ce dimanche 6 mars. Il est 14 heures et déjà, près de 3 000 personnes s’entassent autour et sur le rond-point.
Comme les milliers d’autres qui affluent continuellement depuis les quatre coins de l’île, ils ont répondu à l’appel lancé jeudi 3 mars. Après s’être réunis à Corte, les syndicats universitaires, les responsables politiques nationalistes et une assemblée d’anonymes avaient décidé de fixer le rendez-vous dans la cité paoline, ce dimanche 6 mars à 14h30 pour soutenir Yvan Colonna, agressé le 2 mars par un codétenu dans la prison d’Arles et depuis dans le coma.
Malgré les premières gouttes de pluie et le ciel menaçant, le cortège se met en branle à 14h45. Drapeaux corses au vent et portraits à l’effigie d’Yvan Colonna, des milliers de personnes marchent vers le sud. 4 200 selon la préfecture, 15 000 selon les organisateurs. Certains représentants des forces de l’ordre préfèrent parler de 8 500 personnes.
Le cortège a mis une heure à rejoindre la mairie de Corte depuis la gare. Crédits Photo : Michel Luccioni
En tête du cortège, les représentants des syndicats universitaires brandissent une banderole : « Statu Francese Assassinu ». Slogan crié dès le départ du cortège et vivement repris tout au long de la marche. Une heure plus tard, il arrive devant la mairie et s’étale sur près d’un kilomètre, jusqu’au lycée Pascal Paoli. À l’avant, le défilé est stoppé net par un important dispositif policier renforcé par des barrières anti-émeutes. Infranchissables.
La violence en réponse à la violence
Pendant 2h, manifestants et forces de l'ordre se sont rendus coup sur coup. Crédits Photo : Michel Luccioni
La tension est palpable. Les premières cagoules apparaissent et masquent les visages d’une jeunesse prête à en découdre. La violence semble inévitable. « Les réponses du peuple corse sont en adéquation avec celles de l’Etat. Tout aussi violentes », murmure-t-on déjà.
L’étincelle ne s’est pas fait attendre.
Il est 15h40, un homme âgé, se dirige vers la barricade, béquille en main, et lui assène quelques coups. Il sourit. C’est presque symbolique. Il n’en faudra pas plus pour voir arriver une marée d’hommes tout de noir vêtus, charger et frapper la barrière.
Aucun discours n’a pu être prononcé par les organisateurs.
Une première brèche est ouverte sur la droite du dispositif. Les attaches n’ont pas tenu et un battant de la barrière s’est rabattu vers les gendarmes mobiles. Un espace de plus d’un mètre reste ouvert quelques secondes avant d’être comblé par un mur de boucliers anti-émeute, puis par la barrière elle-même consolidée par du tout-venant.
Les premières pierres, fumigènes et bûches de bois fusent au-dessus de la barrière. Pendant de courtes minutes, les forces de l’ordre ne répliquent pas. Puis les premiers gaz lacrymogènes enfument l’endroit et créent la panique. Sur le cours Paoli, des milliers de personnes observent, crient, applaudissent parfois, se figent souvent.
L’étincelle ne s’est pas fait attendre.
Il est 15h40, un homme âgé, se dirige vers la barricade, béquille en main, et lui assène quelques coups. Il sourit. C’est presque symbolique. Il n’en faudra pas plus pour voir arriver une marée d’hommes tout de noir vêtus, charger et frapper la barrière.
Aucun discours n’a pu être prononcé par les organisateurs.
Une première brèche est ouverte sur la droite du dispositif. Les attaches n’ont pas tenu et un battant de la barrière s’est rabattu vers les gendarmes mobiles. Un espace de plus d’un mètre reste ouvert quelques secondes avant d’être comblé par un mur de boucliers anti-émeute, puis par la barrière elle-même consolidée par du tout-venant.
Les premières pierres, fumigènes et bûches de bois fusent au-dessus de la barrière. Pendant de courtes minutes, les forces de l’ordre ne répliquent pas. Puis les premiers gaz lacrymogènes enfument l’endroit et créent la panique. Sur le cours Paoli, des milliers de personnes observent, crient, applaudissent parfois, se figent souvent.
Deux heures d’intenses affrontements
Après deux heures d'affrontements, le rond-point de la mairie de Corte ressemble à un champ de bataille. Crédits Photo : Pierre-Manuel Pescetti
Pendant près de deux heures, les cocktails molotov des manifestants rivalisent avec les lances à eau, les gaz lacrymogènes et les grenades de désencerclement des gendarmes. À court de munitions, les émeutiers, désossent un toit de ses tuiles, renversent des conteneurs de verre, chargent la barrière avec des piliers métalliques de panneaux de signalisation. À quelques mètres de là, une Renault Clio noire immatriculée dans le Rhône est réquisitionnée pour servir de bélier enflammé. Les projectiles fusent des deux côtés. Un petit contingent de manifestants allume un brasier fait de palettes et de tout venant contre la barrière anti-émeute. Une bouteille de gaz y est lancée. Par chance, elle n’explosera pas.
Côté manifestants, les blessés affluent vers un poste avancé des pompiers, portés à bout de bras par d’autres manifestants, surgissant de la fumée épaisse de lacrymogène. 24 ont été blessés légèrement. Pour la plupart, ils souffraient de plaies ouvertes.
Côté forces de l’ordre, 4 gendarmes ont été légèrement blessés selon la préfecture de Corse mais ont tout de même été transférés vers une structure hospitalière.
Côté forces de l’ordre, 4 gendarmes ont été légèrement blessés selon la préfecture de Corse mais ont tout de même été transférés vers une structure hospitalière.
Il est 18 heures, le calme règne. Celui d’avant la tempête ? « On recharge et on revient ! », préviennent certains manifestants. Finalement, ils ne sont jamais revenus. Le cours Paoli, lui, est vide. Des milliers de personnes sont restées sur place jusqu’à la fin des affrontements. La mobilisation est restée forte malgré la violence. Reste à savoir si elle se maintiendra dans le temps. Les syndicats étudiants ont déjà prévenu : « nous nous mobiliserons temps que nous n’aurons pas une réponse claire de l’Etat ».
Et cela pourrait durer plusieurs semaines, si ce n’est plus.
Et cela pourrait durer plusieurs semaines, si ce n’est plus.