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Entre échanges techniques et politiques, Corse et Martinique tissent des partenariats stratégiques


le Mardi 23 Mai 2023 à 19:52

Une délégation du conseil exécutif de la Martinique était en voyage d’études en Corse du 17 au 23 mai, afin notamment de s’intéresser en profondeur au retour d’expérience du Padduc, à l’heure où l’île s’astreint à construire un document similaire. Des échanges plus politiques ont par ailleurs portés sur les évolutions institutionnelles désirées par les deux territoires.



Ce mardi, à l’occasion de la conférence de presse organisée
Ce mardi, à l’occasion de la conférence de presse organisée
« Trouver des passerelles et construire des échanges avec la Corse ». Ce sont les objectifs de la délégation du conseil exécutif de la Martinique qui était en déplacement en Corse du 17 au 23 mai. Ce mardi, à l’occasion d’une conférence de presse organisée à Ajaccio, David Zobda, conseiller exécutif de l’Assemblée de Martinique en charge des politiques sur la biodiversité, l’environnement et le développement durable, des transports, de la stratégie énergétique et de l’aménagement du territoire, et Julien Paolini, président de l’Agence d’Aménagement durable, d’Urbanisme et d’Énergie de la Corse (AUE), ont précisé les contours de ce voyage d’études. 
 
« Le premier point à l’ordre du jour de cette visite était de partager les expériences en matière d’aménagement du territoire et notamment d’échanger sur le Padduc et l’expérience qu’a été celle de la Corse en matière de document de planification qui se voulait aussi un projet de société à l’horizon 2040 », explique Julien Paolini. Un sujet qui intéresse hautement la Collectivité Territoriale de Martinique qui a missionné son Agence de Développement Durable, d’Urbanisme et d’Aménagement (ADDUAM) pour mener des études de révision de son Schéma d’Aménagement Régional qui vient fixer les orientations fondamentales à moyen terme en matière de développement durable, de mise en valeur du territoire et de protection de l’environnement.
 
« Nous sommes dans une phase de construction du Plan d’Aménagement et de Développement Durable de la Martinique (PADDMA) qui ressemble un peu au Padduc et sur lequel nous souhaitons bénéficier de l’expérience corse pour vérifier ce qui a marché ou non afin de pas tomber dans les mêmes erreurs », précise David Zodba en dévoilant que pour aller plus loin dans la coopération les deux agences vont contractualiser un accord.« Nous voulons construire un programme d’échanges et de rencontres autour de ces questions. Nous allons tout prochainement organiser les assises du foncier en Martinique et évidemment nous allons inviter très largement nos homologues de Corse pour qu’ils nous apportent leur expérience parce que je suis convaincu qu’on peut s’enrichir mutuellement », ajoute le conseiller exécutif de la Martinique en reprenant : « Il y a des points où la Corse est plus avancée que nous et peut nous éclairer sur les choix qui seront les nôtres afin d’éviter les erreurs qui ont pu être commises ici. Et puis, sur d’autres politiques publiques, nous pouvons apporter beaucoup à la Corse, comme sur la question environnementale, sur le traitement et la valorisation des déchets, sur les transports, sur la question de l’énergie, de la production, distribution et gestion de l’eau. Ce sont des politiques publiques sur lesquelles nous avons des avancées qui sont assez intéressantes et que nous pouvons mutualiser avec d’autres collectivités sœurs. C’est un enrichissement mutuel qui peut nous permettre d’aller beaucoup plus vite ».

"Le chemin qu'ouvrira la Corse sera aussi au bénéfice des pays de la Caraïbe"

Au-delà des questions techniques, ce déplacement de la délégation martiniquaise s’inscrivait également dans un contexte politique particulier. « La délégation corse a une réunion jeudi à Beauvau pour traiter de la question du foncier, de la spéculation foncière et immobilière, de l’urbanisme et de l’aménagement du territoire », rappelle ainsi le président de l’AUE, « On retrouve le même type de revendications au niveau de la Martinique, c’est-à-dire l’accession à plus de compétences, à plus d’autonomie dans un certain nombre de secteurs. On peut avoir des partenariats stratégiques et porter une parole, même si les deux territoires sont différents et ont leurs spécificités et leurs propres contraintes. Il ne s’agit pas demain de calquer un nouveau statut de la Martinique, de la Réunion ou de la Guyane sur celui de la Corse, mais au contraire de pouvoir adapter les statuts aux problématiques de ces territoires et porter une parole commune auprès du Gouvernement. C’est là la nécessité d’une évolution institutionnelle pour replacer ces territoires et mieux prendre en compte les enjeux auxquels ils sont confrontés aujourd’hui ».
 
De son côté, David Zobda, lui-même issu d’une majorité qui porte l’autonomie comme perspective de développement politique, insiste sur les enjeux de ce point politique. « Nous avons nous aussi entamé un processus puisque notre président a lancé ce qui s’appelle « l’appel de Fort de France » qui consiste à rassembler autour de nous d’autres collectivités comme la Guyane, la Guadeloupe, Saint-Martin, Saint Barthélémy, Mayotte et puis d’autres qui sont déjà un peu autonomes comme la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie. Le but est de nous rassembler parce que nous pensons que c’est un rapport de force qu’il faut établir avec le Gouvernement pour avoir une chance d’aboutir à quelque chose et que nous soyons pris au sérieux », indique-t-il. 
 
De facto, il souligne que le processus de négociations entre la Corse et l’État est « très important » pour la Martinique. « Le Gouvernement sera contraint de répéter ce qu’il a fait une fois. La France ne peut pas vivre d’exceptions, il faut que ce qui est fait pour l’un soit aussi fait pour les autres », estime-t-il. Ainsi, il assure que la Martinique veut montrer qu’elle est « là autour de la Corse ». « C’est un poids supplémentaire face à un Gouvernement qui répond, on le voit bien, au rapport de force », glisse-t-il avant de conclure : « Il faut soutenir la Corse dans sa démarche. Je pense que le chemin qu’elle ouvrira sera aussi au bénéfice des pays de la Caraïbe ».