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Européennes : Jean Lassalle à la rencontre des agriculteurs corses


Maria-Serena Volpei-Aliotti le Samedi 4 Mai 2024 à 08:22

Jean Lassalle, est en visite en Corse ces 3 et 4 mai pour rencontrer les agriculteurs de l'île. Connu comme un fervent défenseur de la ruralité, deux fois candidat malheureux à l'élection présidentielle, cet élu atypique se lance cette fois-ci dans la course aux élections européennes prévues pour le 9 juin. Rencontre avec le tête de liste d'Alliance rurale



Jean Lassalle
Jean Lassalle
- Quelles sont les raisons qui vous ont poussé à vous présenter aux élections européennes ?
 - Je ne m’étais pas représenté aux législatives, pour des raisons de santé. Et depuis j’avais le sentiment d’être en délit de fuite. Ayant été maire dès l'âge de 21 ans et ayant remporté 25 scrutins sur 27, sauf les deux élections présidentielles où j'ai tout de même réalisé un score honorable en Corse avec 15 000 voix, je me suis senti dans l'obligation de ne pas fuir mes responsabilités. Quand les européennes sont arrivées, je me disais que je ne pouvais pas rester sans rien faire. Je suis un combattant et un combattant doit combattre jusqu’au bout.
 
- Quelle est votre vision de l'Europe ?
- Pour moi, l'Europe a représenté un rêve formidable. Cependant, le problème réside dans notre gestion de ce rêve. Nous n'avons pas réussi à créer une citoyenneté européenne et nous avons soumis le peuple à une série de référendums. La France ne souhaite pas être orientée vers l'extrême gauche, l'extrême droite, ou être sous l'égide d'une politique exclusivement macroniste. Elle aspire à l'authenticité. Elle n'a pas été correctement intégrée dans le projet européen. On ne nous a jamais reproché de ne pas en faire assez, mais plutôt d'en faire trop. Cependant, la détermination d'une personne qui croit en un idéal peut galvaniser les autres. Les résistants sont rarement nombreux, mais leur détermination est puissante. Nous devons insuffler à l'Europe actuelle une détermination similaire à celle des résistants, afin qu'elle retrouve son essence originelle, celle d'une Europe des peuples et des nations telle que la voulaient le général de Gaulle et le chancelier Konrad Adenauer.

 
- Vous êtes perçu comme un fervent défenseur de la ruralité. Comment comptez-vous représenter les intérêts des territoires ruraux au Parlement européen ?
- Il est important d'être présent et engagé. Il est essentiel d'écouter nos compatriotes et concitoyens, une écoute souvent absente, notamment de la part des députés européens. Il est plus probable de croiser un ours polaire à Ajaccio qu'un député européen, car une fois élus, ils semblent disparaître. Je veux que notre présence soit visible. Dans notre liste, nous avons Denise Leiboff qui incarne la ruralité au sein de notre mouvement. En tant que maire de Lieuche et présidente des communes pastorales de France, elle est intimement liée au monde rural. Nous comprenons naturellement ses enjeux, nous les vivons au quotidien. Nous ressentons profondément les difficultés des agriculteurs, des artisans, la disparition des services publics, autant de maux qui empêchent de véritablement exprimer les valeurs de liberté, d'égalité et de fraternité sur tout le territoire. Nous sommes conscients de nos importations massives malgré la richesse de la France : 60 % de produits carnés et 60 % de produits végétaux sont importés, une réalité incroyable. Nous devons agir avec lucidité, sans colère ni animosité, en dressant un état des lieux et en lançant une réflexion constructive. C'est le début d'une grande aventure, d'une épopée remarquable. Le désespoir des agriculteurs que nous avons rencontré il y a deux mois doit être le moteur du changement. Nous devons restaurer l'espoir, permettre à un enfant de succéder à ses parents, ce qui est malheureusement devenu quasi impossible de nos jours.
 
- En tant que candidat apprécié en Corse, comment comptez-vous aborder les spécificités de l'île dans votre programme européen ?
- Ma démarche pour intégrer les spécificités de l'île dans mon programme européen est fondamentalement respectueuse de son histoire et de son identité singulière. La Corse, avec sa langue et son attachement résolu à son passé, représente un territoire unique qui mérite une attention particulière dans notre politique européenne. Je considère que la Corse, tout comme d'autres territoires de la France métropolitaine qui risquent d'être marginalisés malgré leur importance économique, doivent devenir le fer de lance de nos initiatives. Notre objectif n'est pas de perturber mais d'illustrer un modèle à suivre. C'est cette excellence et cette différence affichée qui ont contribué à maintenir la France et la Corse en tant que premières destinations touristiques mondiales. Il est essentiel de soutenir les maires et les agriculteurs qui préservent ces territoires de manière exceptionnelle, tout en luttant contre les contraintes grandissantes imposées par les grandes intercommunalités et les directives agricoles déconnectées de la réalité. La Corse, à mes yeux, incarne cet esprit de renouveau et de résilience, et c'est pourquoi je lui consacre une attention particulière dans mon engagement politique.
 
- Quelles sont, selon vous, les principales problématiques auxquelles les agriculteurs corses sont confrontés, et comment envisagez-vous de les résoudre au niveau européen ?
-  Je pense qu’il y a la problématique numéro un qui est celle du prix des terrains. Il y a un véritable conflit entre l’agriculture et l’installation de Jeunes Agriculteurs. Nous en avons rencontré beaucoup déjà. Nous allons encore les rencontrer à la foire de Venacu, mais avec le prix des terrains qu’on ne protège plus du tout et qu’on laisse ouvert, donne des différences considérables. Deuxièmement, nous avons la chance d’avoir des produits ici qui sont extrêmement typés. Ils sont originaux, or la technocratie européenne a précisément horreur de ce qui est original et typé. Vu qu’elle veut tout normaliser, elle veut tout mettre sur la même enseigne et nous n’avons pas d’unification de la TVA. Nous n’avons pas non plus la même parité de l’euro, ce qui fait que nous avons des coûts de revient qui sont très chers, et nous sommes obligés d’envoyer se transformer, notamment sur le plan agricole, des productions que nous pouvons très bien transformer sur place avec une immense plus-value et en permettant à nos jeunes de continuer. Mais c’est vrai pour l’artisanat également, c’est pour le petit commerce. C’est absolument inimaginable mais en France et sur le continent, de nombreux Villages n’ont même plus un bistrot. Qui aurait pu imaginer des choses pareilles. Je pense qu’il faut prendre le mal à la racine, en disant ce que personne n’a dit avant nous car nous sommes placés pour le faire. Sans faire une ségrégation supplémentaire car nous adressons aussi bien aux Champs-Élysées qu’à Ajaccio ou aux villages les plus éloignés de village Corse de la montagne. Tout le monde en France a un aïeul issue de la campagne. En Corse comme en France il faut revenir aux sources que nous perdons de plus en plus, et c’est ce sue ne supportent pas les Français. C’est à toute la France que nous allons nous adresser comme nous nous adresserons à tous les pays, dans un esprit de résistance qui ne se satisfont plus de la terrible et impitoyable organisation que nous avons mis en place.
 
- Vous évoquez dans votre campagne la transmission d'entreprise comme l'une des problématiques à traiter au niveau européen. Comment comptez-vous favoriser cette transmission, notamment pour les agriculteurs et les petites exploitations en Corse ?
- Tout d’abord, je pense qu'il est primordial de réduire considérablement les charges. Les propriétaires, les parents, ont supporté toute leur vie des charges pour acquérir leur maison, leur propriété et leur capacité de production. Il est essentiel de les soulager de ces charges. De plus, il est nécessaire de revenir à des exploitations familiales de taille humaine. Travailler en famille, partager ensemble le plaisir du travail, retrouver des services publics qui permettent de souffler et de se soigner collectivement, tout cela contribue à maintenir les gens au pays. Je crois fermement que le modèle des petites exploitations, qui ont soutenu ce pays en restant relativement indépendantes, sans s'endetter excessivement ni investir dans des équipements coûteux, est crucial. Cette approche devrait être généralisée tant au niveau national qu'européen.
 
- Avec un crédit de seulement 1% dans les sondages, comment comptez-vous mobiliser les électeurs et espérez-vous améliorer votre score lors des élections européennes ?
- Les sondeurs ne m’ont pas fait de cadeaux depuis 2016, depuis que je me suis opposé à Macron et que j’ai dénoncé la financiarisation croissante de la civilisation. Ou quelques patrons ont été autoproclamés Patron absolus des maisons d’éditions, des instituts, de sondages et des plus gros médias nationaux. 
Ils n’ont pas intérêt à voir émerger des listes comme les nôtres. Par contre quel bonheur avec la presse locale et régionale qui nous soutiennent en toute honnêteté. Ce sont des hommes et des femmes qui font le métier de journalistes, mais qui sont comme nous, dans la grande obligation de rapporter exactement ce qui se passe. C’est une grande charge pour tous de reconnaître ça.
Les sondages ne savent pas sonder le monde rural. Ils ne mesurent pas l’enthousiasme, nous sommes partout. Nous avons fait des réunions à plus de 1200 personnes. En Corse, comme vous le voyez, je reçois un accueil extraordinaire. Moi quand je fais mes campagnes, et que je compare avec ce qui est dit, je n’ai pas du tout l’impression de perdre l’élection donc, soit il se passe quelque chose soit le mal est encore beaucoup plus profond. Le côté "disqualifié", qui est antidémocratique possible, qui fait que lors des dernières présidentielles, alors que j’avais les mêmes atouts que les autres, j’ai fait quatre heures de délai à comparer avec les 230 de Mélenchon ou de la mairesse de Paris ou de la présidente d’Île-de-France. Mais un jour ou l’autre, les Français comprendront même si je pense qu’ils comprendrons cette fois-ci. C’est la raison pour laquelle je crois que nous allons déjouer ce pronostic de mauvaise augure qui veut contribuer à nous laisser sombrer un peu plus dans l’obscurantisme, l’absence de vérité scientifique, de réalité humaine, de toute espoir, de toute confiance et renforcer la boule à l’estomac des français.