
Des finances en tension, des investissements jugés peu soutenables, et un pilotage à revoir. C’est un tableau sévère de la gestion de la Communauté de communes de l’Île-Rousse-Balagne (CCIRB) que dresse la Chambre Régionale des Comptes (CRC) dans son rapport d’observations définitives des exercices 2019 et suivants publié vendredi dernier. Un document dans lequel elle rappelle tout d’abord que la collectivité est née il y a seulement 8 ans, de la fusion des anciennes communautés de communes E cinque Pieve di Balagna, et du Bassin de vie de l’Île-Rousse et note qu’après une « nécessaire période d’harmonisation, la CCIRB exerce désormais un large panel de compétences, ce qui est à relever favorablement ».
« Grâce à l’exercice financièrement équilibré de la compétence « déchets », elle a pu diversifier son champ d’action. Elle exerce la compétence sociale à travers un centre intercommunal d’action sociale. Elle œuvre également à la politique locale de l’habitat, à la protection du patrimoine et offre un service de transports en commun depuis 2022 », détaille-t-elle. Mais cette montée en puissance a un coût. « La situation du budget principal devient préoccupante en 2023 », écrit la chambre, en relevant des « charges croissantes liées à la politique de l’habitat et à l’action sociale ». Selon l’institution, la capacité d’autofinancement est d’ailleurs désormais négative, et devrait continuer à se dégrader en 2024 et 2025, notamment du fait du transfert de la gestion de sept crèches. La juridiction recommande donc « de maîtriser les charges de gestion » et « d’adapter la politique d’investissement aux capacités financières restreintes ». Elle note un « niveau très élevé » des dépenses d’investissement, devenu « peu soutenable » au regard d’une capacité de désendettement jugée « dégradée » et de l’absence de marges de manœuvre sur les autres leviers de financement. Sur le plan comptable, la chambre appelle ainsi à une vigilance accrue. « La fiabilité des comptes doit devenir une priorité, la mise en place d’un pilotage de la fonction comptable et financière devenant impérative», pose la CRC en préconisant : « En effet, après avoir achevé le transfert du patrimoine relatif à la compétence « déchets » vers le budget annexe créé à cette fin en 2022, il conviendra d’améliorer le suivi de ses immobilisations, de provisionner des créances anciennes et d’acquitter les dettes auprès de la Collectivité de Corse et de l’Office d’équipement hydraulique de Corse ».
Le rapport s’attarde également sur le service public de l’eau, exploité en régie dans 17 communes, et par délégation dans 5 autres. Là aussi, le constat est sévère : « L’intercommunalité contrôle insuffisamment son délégataire », « la connaissance des réseaux fait défaut », et « l’effort de planification est insuffisant ». Quant aux comptes de la régie, leur « insincérité » empêche toute analyse financière rétrospective. En outre, la chambre juge que « le faible niveau de la tarification de l’eau ne suffit pas à couvrir le coût d’exploitation du service, ni les investissements à venir, et a fortiori, l’acquittement obligatoire de la dette envers l’office ».
Enfin, dans le secteur de l’urbanisme, alors que l’élaboration du Schéma de cohérence territoriale (ScoT) est confiée depuis 2013 au PETR de Balagne, le constat est là aussi mitigé. Si plusieurs « ateliers participatifs » ont ben été organisés depuis 2021, permettant l’élaboration d’un « projet d’aménagement stratégique » débattu en avril 2023, la chambre déplore en effet que « depuis la conférence des maires du 22 juin 2023, aucune avancée significative n’a été constatée », notant toutefois que « les travaux d’élaboration du SCOT ont récemment été relancés ».
" La vision d’un territoire qui a choisi de ne pas subir son avenir"
Dans un courrier daté du 26 mars, Lionel Mortini, le président de la CCIRB a souhaité réagir point par point aux observations de la chambre. Il y voit avant tout la reconnaissance d’un cap assumé de la part de l’intercommunalité. « Ce rapport met en lumière, au-delà des chiffres, la vision d’un territoire qui a choisi de ne pas subir son avenir, mais de le construire », écrit-il en soulignant que « si la comptabilité rend compte du passé, c’est bien notre action collective qui dessine le futur ». « Or l’ampleur de notre engagement, la diversité de nos projets et leur cohérence témoignent d’un projet de territoire profondément assumé et résolument tourné vers l’intérêt de nos populations et notamment les plus fragiles », insiste-t-il.
Le président de la communauté de communes affirme ainsi que le rapport de la CRC met en avant plusieurs points qui « illustrent l’ampleur de l’action publique et du dynamisme de l’intercommunalité ». Il relève notamment que la CCIRB est « la première collectivité en termes d’investissement par habitant en Corse », ou encore celle qui « déploie le plus grand nombre de compétences parmi les intercommunalités corses, notamment dans le domaine social ». Des éléments qui sont pour lui la « traduction concrète d’une volonté politique forte, d’un attachement profond au service public et d’un sens aigu de la responsabilité territoriale ».
Face aux inquiétudes exprimées par la chambre quant à la soutenabilité des investissements de l’intercommunalité, le président souhaite également apporter des clarifications et explique qu’il « serait réducteur d’isoler ces constats du contexte dans lequel s’inscrit notre action : celui d’une intercommunalité jeune, ayant repris une multiplicité de compétences, parfois dans des conditions initiales dégradées, avec la volonté affirmée de ne laisser aucun territoire, aucune population en marge du développement et du service public ». Il appuie ainsi sur le fait que si l’intercommunalité a fait des « choix ambitieux », « ces choix sont calculés et maîtrisés ». « Chaque projet, et d’autant plus ceux financés par emprunt, est adossé à des recettes et des économies structurelles qui garantissent un équilibre budgétaire et financier », explique-t-il.
Il convient par ailleurs que la gestion de trésorerie « nécessite des ajustements », mais dévoile que des « mesures ont d’ores et déjà été prises pour fluidifier et anticiper nos flux financiers ». « Dans cette même logique d’équilibre financier, l’ensemble des budgets annexes sont entièrement autonomes et ne nécessitent aucune subvention d’équilibre du budget général », précise-t-il encore.
« Notre communauté de communes, bien que l’une des plus petites de Corse, se distingue par une gestion dynamique, volontariste et tournée vers le futur. Nous assumons nos choix, car nous savons qu’ils sont pertinents et nécessaires », résume-t-il avant de conclure : « Notre stratégie ne s’arrête pas aux ratios comptables à court terme : elle s’inscrit dans une vision de génération, pour construire un territoire juste, équilibré et fier de ses racines. Ce n’est pas une simple gestion locale, c’est un engagement de civilisation territoriale : celui de transmettre un cadre de vie digne, durable et solidaire ».
« Grâce à l’exercice financièrement équilibré de la compétence « déchets », elle a pu diversifier son champ d’action. Elle exerce la compétence sociale à travers un centre intercommunal d’action sociale. Elle œuvre également à la politique locale de l’habitat, à la protection du patrimoine et offre un service de transports en commun depuis 2022 », détaille-t-elle. Mais cette montée en puissance a un coût. « La situation du budget principal devient préoccupante en 2023 », écrit la chambre, en relevant des « charges croissantes liées à la politique de l’habitat et à l’action sociale ». Selon l’institution, la capacité d’autofinancement est d’ailleurs désormais négative, et devrait continuer à se dégrader en 2024 et 2025, notamment du fait du transfert de la gestion de sept crèches. La juridiction recommande donc « de maîtriser les charges de gestion » et « d’adapter la politique d’investissement aux capacités financières restreintes ». Elle note un « niveau très élevé » des dépenses d’investissement, devenu « peu soutenable » au regard d’une capacité de désendettement jugée « dégradée » et de l’absence de marges de manœuvre sur les autres leviers de financement. Sur le plan comptable, la chambre appelle ainsi à une vigilance accrue. « La fiabilité des comptes doit devenir une priorité, la mise en place d’un pilotage de la fonction comptable et financière devenant impérative», pose la CRC en préconisant : « En effet, après avoir achevé le transfert du patrimoine relatif à la compétence « déchets » vers le budget annexe créé à cette fin en 2022, il conviendra d’améliorer le suivi de ses immobilisations, de provisionner des créances anciennes et d’acquitter les dettes auprès de la Collectivité de Corse et de l’Office d’équipement hydraulique de Corse ».
Le rapport s’attarde également sur le service public de l’eau, exploité en régie dans 17 communes, et par délégation dans 5 autres. Là aussi, le constat est sévère : « L’intercommunalité contrôle insuffisamment son délégataire », « la connaissance des réseaux fait défaut », et « l’effort de planification est insuffisant ». Quant aux comptes de la régie, leur « insincérité » empêche toute analyse financière rétrospective. En outre, la chambre juge que « le faible niveau de la tarification de l’eau ne suffit pas à couvrir le coût d’exploitation du service, ni les investissements à venir, et a fortiori, l’acquittement obligatoire de la dette envers l’office ».
Enfin, dans le secteur de l’urbanisme, alors que l’élaboration du Schéma de cohérence territoriale (ScoT) est confiée depuis 2013 au PETR de Balagne, le constat est là aussi mitigé. Si plusieurs « ateliers participatifs » ont ben été organisés depuis 2021, permettant l’élaboration d’un « projet d’aménagement stratégique » débattu en avril 2023, la chambre déplore en effet que « depuis la conférence des maires du 22 juin 2023, aucune avancée significative n’a été constatée », notant toutefois que « les travaux d’élaboration du SCOT ont récemment été relancés ».
" La vision d’un territoire qui a choisi de ne pas subir son avenir"
Dans un courrier daté du 26 mars, Lionel Mortini, le président de la CCIRB a souhaité réagir point par point aux observations de la chambre. Il y voit avant tout la reconnaissance d’un cap assumé de la part de l’intercommunalité. « Ce rapport met en lumière, au-delà des chiffres, la vision d’un territoire qui a choisi de ne pas subir son avenir, mais de le construire », écrit-il en soulignant que « si la comptabilité rend compte du passé, c’est bien notre action collective qui dessine le futur ». « Or l’ampleur de notre engagement, la diversité de nos projets et leur cohérence témoignent d’un projet de territoire profondément assumé et résolument tourné vers l’intérêt de nos populations et notamment les plus fragiles », insiste-t-il.
Le président de la communauté de communes affirme ainsi que le rapport de la CRC met en avant plusieurs points qui « illustrent l’ampleur de l’action publique et du dynamisme de l’intercommunalité ». Il relève notamment que la CCIRB est « la première collectivité en termes d’investissement par habitant en Corse », ou encore celle qui « déploie le plus grand nombre de compétences parmi les intercommunalités corses, notamment dans le domaine social ». Des éléments qui sont pour lui la « traduction concrète d’une volonté politique forte, d’un attachement profond au service public et d’un sens aigu de la responsabilité territoriale ».
Face aux inquiétudes exprimées par la chambre quant à la soutenabilité des investissements de l’intercommunalité, le président souhaite également apporter des clarifications et explique qu’il « serait réducteur d’isoler ces constats du contexte dans lequel s’inscrit notre action : celui d’une intercommunalité jeune, ayant repris une multiplicité de compétences, parfois dans des conditions initiales dégradées, avec la volonté affirmée de ne laisser aucun territoire, aucune population en marge du développement et du service public ». Il appuie ainsi sur le fait que si l’intercommunalité a fait des « choix ambitieux », « ces choix sont calculés et maîtrisés ». « Chaque projet, et d’autant plus ceux financés par emprunt, est adossé à des recettes et des économies structurelles qui garantissent un équilibre budgétaire et financier », explique-t-il.
Il convient par ailleurs que la gestion de trésorerie « nécessite des ajustements », mais dévoile que des « mesures ont d’ores et déjà été prises pour fluidifier et anticiper nos flux financiers ». « Dans cette même logique d’équilibre financier, l’ensemble des budgets annexes sont entièrement autonomes et ne nécessitent aucune subvention d’équilibre du budget général », précise-t-il encore.
« Notre communauté de communes, bien que l’une des plus petites de Corse, se distingue par une gestion dynamique, volontariste et tournée vers le futur. Nous assumons nos choix, car nous savons qu’ils sont pertinents et nécessaires », résume-t-il avant de conclure : « Notre stratégie ne s’arrête pas aux ratios comptables à court terme : elle s’inscrit dans une vision de génération, pour construire un territoire juste, équilibré et fier de ses racines. Ce n’est pas une simple gestion locale, c’est un engagement de civilisation territoriale : celui de transmettre un cadre de vie digne, durable et solidaire ».