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Protection des balbuzards en Corse : Un nouvel arrêté qui ne satisfait pas entièrement "U Levante"


le Mardi 16 Mai 2023 à 15:36

Suite aux annonces qui avaient été faites dans le courant du mois d’avril, ce lundi la préfecture maritime de Méditerranée a publié un arrêté interdisant la navigation et le mouillage aux abords des nids de balbuzard pêcheur situés sur le territoire des communes de Galéria, Osani, Partinello, Serriera, Ota, Piana et Cargèse jusqu’au 31 juillet. Une mesure qui ne satisfait pas entièrement U Levante



Nid de balbuzard pêcheur au large de Giottani (Crédits Photo : Jean-Philippe Casanova/ OFB)
Nid de balbuzard pêcheur au large de Giottani (Crédits Photo : Jean-Philippe Casanova/ OFB)
Fin 2018, un rapport du CNRS mettait en exergue que la population de balbuzards pêcheurs s’effondrait dans la réserve naturelle de Scandola, notamment à cause du tourisme. Alors qu’un tiers de la population des couples territoriaux français de ce rapace se trouve en Corse - en majorité au niveau du site Natura 2000 Calvi-Cargèse-, l’espèce se trouve aujourd’hui en effet menacée sur l’île et est considérée comme en danger d’extinction. 
 
Depuis 2019, des périmètres de protection des nids ont donc été mis en place lors de la période de reproduction s’étalant de mars à août. « Nous nous sommes rendus compte que l’activité humaine avait énormément d’impact sur la reproduction des balbuzards. Depuis peu la préfecture maritime, qui a des prérogatives de protection de l’environnement marin prend des arrêtés chaque été pour interdire la navigation aux abords des nids susceptibles de donner lieu à une reproduction. Ces mesures nous les élaborons tout d’abord lors d’une phase de concertation avec les acteurs locaux, notamment les associations environnementales, mais aussi les bateliers », explique le Capitaine de frégate Pierre-Louis Josselin, porte-parole de la préfecture maritime de Méditerranée en précisant que cette phase se joue sous l’impulsion de la Direction de la Mer et du Littoral Corse (DMLC) et de l’Office de l’Environnement de la Corse (OEC). 
 
Dans ce droit fil, le 14 avril dernier, une réunion entre l’OEC, la DMLC, le Parc Naturel Régional de la Corse (PNRC), et les représentants de l’association des bateliers de Scandula avait permis d’acter plusieurs mesures, dont la prise d’un nouvel arrêté préfectoral définissant des zones de quiétude aux abords des nids occupés. Ce projet a ensuite été soumis durant trois semaines à une consultation publique en ligne. « Nous avons eu un seul retour sur ce projet d’arrêté, qui était plutôt positif et nous disait que nous allions dans le bon sens », dévoile le porte-parole de la préfecture maritime de Méditerranée. 
 
Publié ce 15 mai  par la préfecture maritime de Méditerranée, l'arrêté établi suite à ces différentes phases vient interdire la navigation et le mouillage aux abords des nids de balbuzards pêcheurs situés sur la façade occidentale de la Corse, sur le territoire des communes de Galéria, Osani, Partinello, Serriera, Ota, Piana et Cargèse jusqu’au 31 juillet. « Ces interdictions s’appliquent aux navires et aux engins immatriculés (y compris les véhicules nautiques à moteur) et lorsqu’ils viennent du large, aux engins non immatriculés », précise le texte qui vient délimiter 15 zones de quiétude où l’interdiction est en vigueur, à partir de l’inventaire des nids réalisés par l’OEC le 9 mai. À travers ce relevé, l’office faisait état de 14 nids en reproduction certaine, 16 nids en reproduction probable et 6 nids en reproduction possible. Pour autant, si l’arrêté retient bien les 14 nids en reproduction certaine, il écarte 15 nids en reproduction probable et les 6 en reproduction possible de son périmètre d’action.

Un arrêté qui ne satisfait pas entièrement U Levante

Un point qui n’a pas manqué de susciter l’interrogation d’U Levante qui a adressé une lettre  au préfet maritime de Méditerranée ce lundi. « Le préfet maritime a donc pris le risque de condamner une ou plusieurs reproductions en écartant 15 nids à reproduction probable constatée depuis le 22 mars. Il aurait dû les conserver comme proposé dans l’arrêté, quitte à enlever une ou des zone(s) de quiétude si la reproduction s’avère vraiment négative courant juin. Ne protéger que 15 nids après avoir proposé un arrêté de protection pour 31 nids n’est pas admissible », écrit l’association de défense de l’environnement. « Nous nous basons sur les données scientifiques élaborées par l’OEC qui était initialement parti sur une cible de 31 nids susceptibles de reproduction. Ces données évoluent au fur et à mesure des comptages que réalise l’office. Le dernier comptage scientifique réalisé le 9 mai n’a dénombré plus que 15 nids à protéger. Les autres nids identifiés au début comme susceptibles d’ouvrir à la reproduction sont désormais considérés comme en échec parce qu’ils étaient vides », indique pour sa part le porte-parole de la préfecture de Méditerranée. 
 
Par ailleurs, si U Levante se satisfait de la « mise en quiétude de 15 nids dès le 15 mai 2023 », qui « si elle se concrétise sur le terrain jusqu’en juillet compris est évidemment une amélioration par rapport à l’année 2022 pendant laquelle seulement 8 zones de quiétude avaient été décrétées et seulement à partir du 2 juillet », elle regrette que le 15 mai reste « encore une date trop tardive » pour la mise en place de ces mesures. « En effet, la couvaison peut commencer en mars et les éclosions et donc des poussins à protéger et à nourrir sont possibles dès début avril. Du 1er mars au 15 mai, aucune zone de quiétude n’a été mise en place. Les dérangements ont donc forcément eu lieu », avance-t-elle en appuyant : « Il n’y a qu’une seule bonne solution si l’on désire que cet aigle-pêcheur à juste titre protégé réussisse à se reproduire jusqu’à l’envol de poussins il est devenu indispensable de définir autant de zones de quiétude que de nids présents le long de la côte occidentale de la Corse et sur l’ensemble du littoral de la Corse du 1er mars au 31 août, sans avoir à prendre des arrêtés toujours trop tardifs et au cas par cas ».
 

La préfecture maritime de Méditerranée lance des travaux pour réviser le décret de la Réserve de Scandola

Une critique à laquelle la préfecture maritime de Méditerranée oppose des évolutions des arrêtés chaque année, à partir du retour d’expériences des saisons passées : « Typiquement l’an passé, nous nous sommes rendus compte que nous avions publié l’arrêté un peu tardivement et qu’il n’avait pas couvert le début de la période de reproduction. Inversement, le texte était en vigueur jusqu’au 31 août, or nous nous sommes rendus compte qu’à cette période il n’y avait plus de nécessité avérée car la période de reproduction était déjà passée. Cette année nous avons ajusté plus finement le dispositif, ce qui fait que l’arrêté entre en vigueur dès le 15 mai et est valable jusqu’au 31 juillet, avec une possibilité d’extension en août si nécessaire. Nous nous laissons un peu plus de souplesse pour adapter nos dispositifs afin de mieux couvrir la période de reproduction », souligne ainsi le Capitaine de frégate Pierre-Louis Josselin.

Afin de renforcer la protection de ces rapaces et plus largement la préservation de l’environnement dans la Réserve de Scandola, il annonce par ailleurs que la préfecture maritime de Méditerranée vient d’initier des travaux afin de réviser le décret de décembre 1975 qui avait porté sa création. « 
Ce décret avait été pris avant que le décret qui fixe les attributions du préfet maritime entre en vigueur.  Ce qui fait qu’aujourd’hui nous sommes un peu bridés dans notre capacité à légiférer pour protéger la réserve naturelle », révèle-t-il. Des travaux qui ne devraient toutefois pas aboutir avant plusieurs mois.