Alors que les ministres de la Justice et de l’Intérieur viendront bientôt en Corse, il serait bon qu’ils se penchent sur l’occupation illégale du domaine public maritime. À Cagnanu, Capicorsu, le port privé et les constructions de la famille Catoni ont été condamnés dès 2006 par le tribunal administratif et en 2010 par le Conseil d’État à la démolition et à une remise en état des lieux… mais rien ne bouge. Les pieds dans l’eau, à quand le retour au droit ?
Les appartements, destinés à la location saisonnière, sont construits sur les rochers, parfois en surplomb au-dessus de la mer. À Cagnanu, Capicorsu, la famille Catoni a ainsi édifié un port (quais et appontements) et des bâtiments locatifs, sur le domaine public maritime, en complément du complexe hôtelier Le Caribou. Le port est réservé aux clients de la structure hôtelière. Depuis des dizaines d’années, les lieux sont captifs, réservés pour un usage exclusivement privé.
Constatant l’occupation illégale du domaine public maritime (DPM) par ces habitations en dur et le port, la direction départementale de l’équipement dresse (enfin) une contravention de grande voirie le 9 novembre 2004. Le tribunal administratif se déplace même sur les lieux le 23 mars 2006 afin de mieux cerner tout ce qui doit être démoli et constate : « d’une part, M. Catoni a édifié des quais et des pontons et a procédé à des enrochements qui avancent dans la mer, que ces ouvrages sont ainsi situés sur le domaine public maritime, que, d’autre part, M. Catoni a construit des murs de soutènement dont la base se situe sur des rochers à une faible hauteur au-dessus de la mer, que ces constructions doivent aussi être regardées comme étant situées sur le domaine public maritime ».
Le 1er juin 2006, le tribunal administratif condamne le contrevenant à remettre en état les lieux illégalement occupés sur le domaine public maritime de Cagnanu et à payer une amende de 1000 euros. La Cour administrative d’appel en 2009 et le Conseil d’État en 2010 confirmeront ce jugement.
Nous sommes fin 2012 et rien n’a bougé.
L’affaire dure depuis 1969. Le 6 janvier de cette année là, le directeur départemental de l’équipement agissant par délégation de M. le préfet de Haute-Corse, autorise Maurice Catoni à occuper 460 m2 du domaine public maritime destinés à l’implantation de huit bungalows préfabriqués démontables.
Cette autorisation d’occupation du territoire (AOT) est reconduite jusqu’au premier mai 1976.
Mais ce qui est construit n’est pas du tout démontable !
M. Catoni dépose alors une demande de permis de construire. Permis refusé en 1986.
Dans le même temps (en mai), une nouvelle AOT est accordée à M. Catoni pour une nouvelle durée de cinq ans. Elle l’autorise cette fois à occuper une superficie de 1800 m2 sur le DPM (appartements locatifs, quais et appontements). À l’issue de cette AOT aucune autre démarche administrative n’a été conduite. Les bungalows, quais et appontements sont donc maintenus illégalement depuis le 23 mai 1991.
De condamnation en autorisation refusée, de permis non accordé en occupation abusive, il est plus que temps d’appliquer les décisions de justice, que les bâtiments comme le port soient démolis et que la remise en état des lieux soit effective. La privatisation insidieuse, au fil des décennies, du domaine public maritime, inaliénable et imprescriptible, doit cesser.
Les jugements
TA : 28/12/2005 et 01/06/2006 condamnation à la remise en état des lieux
Cour administrative d’appel : l’arrêt du 22/01/2009 confirme le jugement du TA
Pourvoi de M. Catoni non admis par le Conseil d’Etat (7 avril 2010)