Si l’épilogue du contentieux de la Collectivité de Corse avec la Corsica Ferries a un mérite, c’est bien de faire l’unanimité contre lui. La décision du Conseil d’Etat de condamner définitivement la première à payer 86 millions € à la seconde pour cause de service complémentaire subventionné à l’ex-SNCM, est tombée la veille comme un couperet dont l’onde de choc s’est ressentie jeudi matin à l’Assemblée de Corse qui tenait sa session de rentrée. Au-delà de la sentence juridique, c’est, d’abord, l’impact financier très lourd sur les finances de la CdC qui a suscité une bordée de réactions, ensuite le spectre de la remise en cause du service public maritime qui se dessine en filigrane dans la politique de la Commission européenne. C’est dire l’inquiétude du président de l’Exécutif, Gilles Simeoni, qui doit assumer un malencontreux héritage, issu des années 2007 à 2013, et qui avoue son incompréhension. « Au moment où ce système a été mis en place, tous les protagonistes savaient qu’il était vicié. Tout le monde était informé ». Et de cibler les responsables. En premier lieu, l’Etat « triplement concerné. D’abord, il avait l’autorité de contrôle et il ne l’a pas exercé alors qu’il fait des recours pour une simple virgule. Ensuite, il n’a pas transmis le contrat de DSP maritime à la Commission européenne alors qu’il avait obligation de le faire. Enfin, il était actionnaire de l’ex-SNCM et il a approuvé la surcompensation illégale ». Mais pas seulement : « la contre-part de ce service complémentaire a été l’aide sociale dont a bénéficié la Corsica Ferries et qui était un mécanisme tout aussi illégal et contestable que le service complémentaire. Or, le service social n’a pas été contesté ».
Un service public contesté
Près de 26 millions € ont été donnés à l’un et 13 millions € à l’autre, chaque année, « soit un total de 38 millions € par an sur 6 ans qui ont manqué à la CTC. C’est de l’argent public ! ». Pour le président de l’Exécutif, « les Corses d’aujourd’hui et de demain n’ont pas à payer les conséquences d’un système qui a été mis en place de façon délibérée et qui est allé jusqu’à allouer 130 millions € par an ». Un système globalement « vicié » auquel les Nationalistes ont mis un terme définitif dès leur arrivée au pouvoir en 2015. Gilles Simeoni affirme également que le montant de 86,3 millions € est « disproportionné » et qu’il « ne correspond pas à la réalité du préjudice ». Au-delà de l’impact « catastrophique » de cette dette sur la capacité d’investissement de la CdC, ce qu’il redoute particulièrement, c’est le nouveau dogme de la Commission européenne : « C’est le principe même de la compensation qui est contesté et le principe même du service public, de l’octroi d’une subvention, quelque soit son montant, qui est remis en cause pas la Commission européenne ». Il l’annonce qu’il engagera un recours auprès de ladite Commission en jouant sur la distorsion de concurrence et le principe d’une juste indemnisation. « L’indemnité est disproportionnée, elle crée un avantage comparatif et rompt l’égalité de traitement entre les compagnies », comme il l’explique en vidéo au micro de Corse Net Infos :
Un service public contesté
Près de 26 millions € ont été donnés à l’un et 13 millions € à l’autre, chaque année, « soit un total de 38 millions € par an sur 6 ans qui ont manqué à la CTC. C’est de l’argent public ! ». Pour le président de l’Exécutif, « les Corses d’aujourd’hui et de demain n’ont pas à payer les conséquences d’un système qui a été mis en place de façon délibérée et qui est allé jusqu’à allouer 130 millions € par an ». Un système globalement « vicié » auquel les Nationalistes ont mis un terme définitif dès leur arrivée au pouvoir en 2015. Gilles Simeoni affirme également que le montant de 86,3 millions € est « disproportionné » et qu’il « ne correspond pas à la réalité du préjudice ». Au-delà de l’impact « catastrophique » de cette dette sur la capacité d’investissement de la CdC, ce qu’il redoute particulièrement, c’est le nouveau dogme de la Commission européenne : « C’est le principe même de la compensation qui est contesté et le principe même du service public, de l’octroi d’une subvention, quelque soit son montant, qui est remis en cause pas la Commission européenne ». Il l’annonce qu’il engagera un recours auprès de ladite Commission en jouant sur la distorsion de concurrence et le principe d’une juste indemnisation. « L’indemnité est disproportionnée, elle crée un avantage comparatif et rompt l’égalité de traitement entre les compagnies », comme il l’explique en vidéo au micro de Corse Net Infos :
Gilles Simeoni : « La Corse a besoin d’un service public maritime »
Un droit moral
Un avis partagé par tous les groupes politiques, de la majorité à l’opposition. Le président du groupe Core in Fronte, Paul-Félix Benedetti, taxe le quantum à payer de « sommes déraisonnables et farfelues » et en appelle à un code moral : « Est-ce que Corsica Ferries veut se positionner en partenaire de la Corse ? Peut-elle gagner sur le dos des Corses ? C’est la question que je pose aux dirigeants de la compagnie qui ont milité avec nous sur les bancs de l’université. U stintu corsu, cela compte aussi autant que le droit ! ». Le leader indépendantiste s’interroge également sur « la réalité de cette soulte injuste. Doit-on une dîme à une société suisse qui… maquille sa comptabilité réelle ? Non ! ». Il rappelle le contexte de l’époque, « le mécanisme pour maintenir à flots la SNCM et le risque de conflit social avec 1200 salariés, 30 jours de grève par an et 400 millions € de passif ». Et estime, lui aussi, que « la responsabilité la plus forte est celle de l’Etat. La CdC doit demander une compensation exceptionnelle », comme il l’explique en vidéo à Corse Net Infos :
Un avis partagé par tous les groupes politiques, de la majorité à l’opposition. Le président du groupe Core in Fronte, Paul-Félix Benedetti, taxe le quantum à payer de « sommes déraisonnables et farfelues » et en appelle à un code moral : « Est-ce que Corsica Ferries veut se positionner en partenaire de la Corse ? Peut-elle gagner sur le dos des Corses ? C’est la question que je pose aux dirigeants de la compagnie qui ont milité avec nous sur les bancs de l’université. U stintu corsu, cela compte aussi autant que le droit ! ». Le leader indépendantiste s’interroge également sur « la réalité de cette soulte injuste. Doit-on une dîme à une société suisse qui… maquille sa comptabilité réelle ? Non ! ». Il rappelle le contexte de l’époque, « le mécanisme pour maintenir à flots la SNCM et le risque de conflit social avec 1200 salariés, 30 jours de grève par an et 400 millions € de passif ». Et estime, lui aussi, que « la responsabilité la plus forte est celle de l’Etat. La CdC doit demander une compensation exceptionnelle », comme il l’explique en vidéo à Corse Net Infos :
Paul-Félix Benedetti : « L’Etat est responsable, l’Etat doit compenser »
Un très mauvais coup
Le président du groupe de droite, Laurent Marcangeli, reconnaît que « C’est un très mauvais coup fait à la Corse, un coup particulièrement rude. Personne ne peut rester insensible à cette situation. C’est une décision que l’on peut peut-être contester, qui est excessivement lourde au regard du dossier, mais qui a trouvé sa limite en droit interne des voies de recours ». S’il « compatit au sentiment de l’Exécutif qui n’est pas responsable de la situation actuelle », il estime que l’accès aux responsabilités exige d’accepter les héritages. Et doute de la réussite du recours auprès des instances européennes qui « sont à l’origine même du problème ». Il reproche cependant à l’Exécutif corse « de ne pas avoir fait preuve de résilience sur cette question, alors que vous saviez que la condamnation était une issue possible. Pourquoi n’avez-vous pas provisionné suffisamment ? La résilience est une nécessité quand on vient aux responsabilités. Ça n’a pas été le cas ». Il avertit que les futurs budgets devront tenir compte de cette décision de justice. « Des choix devront s’opérer au niveau de l’investissement. Quelles opérations vont être différées, voire annulées ? Nous demandons d’être éclairés ». Si l’opposition de droite est « d’accord pour être à vos côtés pour défendre un modèle de service public des transports, il faut y aller pour gagner et anticiper les décisions qui ne vont pas dans le sens que nous voulons ».
Un choix cornélien
L’ex-président de l’Office des transports et élu de la majorité, Jean-Félix Acquaviva a rappelé la boussole de l’action des mois à venir : « Ce qui se joue va au-delà de cette décision judiciaire et financière et est éminemment politique. Le problème ne vient pas seulement des errements, mais des systèmes qui ont produit ces monstres pour que l’enveloppe retourne à Paris, et de l’autre système qui est celui de la procédure d’une compagnie ». Il répond à la droite : « Nous avons commencé à provisionner, mais la somme est tellement disproportionnée que nous ne pouvions pas provisionner la totalité sans porter préjudice aux aides publiques ». Se refusant d’être otage de la Corsica Ferries, Gilles Simeoni renchérit : « Nous avons provisionné 20 millions € sur la base d’un rapport d’expertise qui a fait cette évaluation en fonction du périmètre non contestable défini par les juges d’appel. Provisionner plus aurait signifier de renoncer à investir. Nous avons choisi d’investir ! ». Et conclut sur la nécessité de faire front ensemble : « La CdC ne peut pas payer seule, ce serait injuste ! Sommes-nous d’accord pour le dire ensemble et dire que nous avons besoin d’un service public maritime ? Si nous acceptons d’envisager une Corse sans service public maritime, nous aurons subi une défaite majeure ! ».
Affaire à suivre…
N.M.
Le président du groupe de droite, Laurent Marcangeli, reconnaît que « C’est un très mauvais coup fait à la Corse, un coup particulièrement rude. Personne ne peut rester insensible à cette situation. C’est une décision que l’on peut peut-être contester, qui est excessivement lourde au regard du dossier, mais qui a trouvé sa limite en droit interne des voies de recours ». S’il « compatit au sentiment de l’Exécutif qui n’est pas responsable de la situation actuelle », il estime que l’accès aux responsabilités exige d’accepter les héritages. Et doute de la réussite du recours auprès des instances européennes qui « sont à l’origine même du problème ». Il reproche cependant à l’Exécutif corse « de ne pas avoir fait preuve de résilience sur cette question, alors que vous saviez que la condamnation était une issue possible. Pourquoi n’avez-vous pas provisionné suffisamment ? La résilience est une nécessité quand on vient aux responsabilités. Ça n’a pas été le cas ». Il avertit que les futurs budgets devront tenir compte de cette décision de justice. « Des choix devront s’opérer au niveau de l’investissement. Quelles opérations vont être différées, voire annulées ? Nous demandons d’être éclairés ». Si l’opposition de droite est « d’accord pour être à vos côtés pour défendre un modèle de service public des transports, il faut y aller pour gagner et anticiper les décisions qui ne vont pas dans le sens que nous voulons ».
Un choix cornélien
L’ex-président de l’Office des transports et élu de la majorité, Jean-Félix Acquaviva a rappelé la boussole de l’action des mois à venir : « Ce qui se joue va au-delà de cette décision judiciaire et financière et est éminemment politique. Le problème ne vient pas seulement des errements, mais des systèmes qui ont produit ces monstres pour que l’enveloppe retourne à Paris, et de l’autre système qui est celui de la procédure d’une compagnie ». Il répond à la droite : « Nous avons commencé à provisionner, mais la somme est tellement disproportionnée que nous ne pouvions pas provisionner la totalité sans porter préjudice aux aides publiques ». Se refusant d’être otage de la Corsica Ferries, Gilles Simeoni renchérit : « Nous avons provisionné 20 millions € sur la base d’un rapport d’expertise qui a fait cette évaluation en fonction du périmètre non contestable défini par les juges d’appel. Provisionner plus aurait signifier de renoncer à investir. Nous avons choisi d’investir ! ». Et conclut sur la nécessité de faire front ensemble : « La CdC ne peut pas payer seule, ce serait injuste ! Sommes-nous d’accord pour le dire ensemble et dire que nous avons besoin d’un service public maritime ? Si nous acceptons d’envisager une Corse sans service public maritime, nous aurons subi une défaite majeure ! ».
Affaire à suivre…
N.M.