La Corse continue de se distinguer dans le domaine de l'agriculture biologique. Avec près de 600 producteurs et 36 000 hectares certifiés en agriculture bio, l'île se positionne comme un acteur clé du secteur, représentant 22 % de la Surface Agricole Utile (SAU) dédiée à cette pratique. Cette dynamique s'inscrit dans un contexte favorable, où le climat méditerranéen et les sols variés de l'île offrent des conditions idéales pour le développement de l'agriculture bio.
Le 28 novembre 2024, Inter Bio Corse, l’interprofession de l’agriculture biologique, a organisé un événement inédit au CFA de Haute-Corse dans le cadre de la campagne #BioRéflexe. L'objectif : sensibiliser les jeunes apprentis aux spécificités et aux défis de l’agriculture biologique. « L'objectif aujourd'hui, c'est de sensibiliser, non pas le consommateur, comme on a pu le faire sur les transactions, mais le professionnel via les apprentis du CFA. » explique Emilie Claudet, directrice d'Inter Bio Corse. Elle souligne que l’agriculture biologique, au-delà de ses vertus économiques, repose avant tout sur des principes environnementaux forts : « L’agriculture biologique protège les sols, car nous n’utilisons pas de produits chimiques de synthèse, mais plutôt des fertilisants naturels et du biocontrôle, c’est-à-dire l’utilisation d’insectes pour lutter contre les ravageurs. »
La diversité des productions biologiques en Corse est un autre atout majeur. Les plantes aromatiques dominent largement avec 80 % de la surface cultivée en bio, suivies par le maraîchage (19 %). La viticulture et les agrumes enregistrent respectivement 33 % et 27 % de surfaces en agriculture biologique. Ces chiffres témoignent d'une évolution constante du secteur, notamment dans la culture de produits qui se marient bien avec les particularités du climat local. « Le climat corse, chaud et humide, et ses sols variés, est un véritable atout pour le développement de cette filière, » souligne Emilie Claudet.
Cependant, malgré des conditions idéales, l’agriculture biologique en Corse se heurte à plusieurs défis, dont le manque d’accès au foncier. « Le principal frein reste l’accès aux terres. Certaines sont très fertiles, d’autres moins, ce qui complique l’installation de nouveaux agriculteurs, » confie Emilie Claudet.
Le coût des produits bio : une idée reçue ?
Un autre frein perçu concerne le prix des produits biologiques, souvent jugé plus élevé par les consommateurs. Pourtant, cette idée reçue mérite d'être nuancée. « La cherté des produits bio, c'est un peu une idée reçue. C'est quelque chose que le consommateur a dans l'esprit, mais qui n'est pas forcément vrai, » estime Emilie Claudet. Elle précise que, dans le cadre de la vente directe, la différence de prix est souvent inférieure à 5 % par rapport aux produits conventionnels, rendant l'écart plus faible que prévu.
Jean-Jacques Geronimi, producteur bio en Corse, abonde dans ce sens : « Nous fixons nos prix pour être accessibles au consommateur, tout en assurant la viabilité économique de notre exploitation. » Un équilibre essentiel, d'autant plus que, selon Emilie Claudet, les crises économiques récentes ont affecté la consommation des produits bio. « Depuis deux ans, avec la crise économique, le Covid, l'Ukraine, l'inflation, il est vrai qu'il y a eu une baisse de la consommation, » admet-elle. Cependant, elle observe une tendance encourageante : « Depuis quelques mois, on assiste à une reprise de la consommation des produits biologiques. »
L'éducation, clé de l'avenir du bio
Pour Jean-Jacques Geronimi, l’avenir de l’agriculture biologique passe par l'éducation des plus jeunes. « Il faut inculquer le bio dès le plus jeune âge, » affirme-t-il. Selon lui, l’éducation à la consommation responsable et à la connaissance des cycles naturels est essentielle pour sensibiliser les enfants et les jeunes adultes aux bienfaits du bio.
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Cette approche se retrouve au cœur des préoccupations des acteurs de la filière, notamment dans le cadre des actions menées auprès des jeunes professionnels et des consommateurs. « La prise de conscience des consommateurs, de plus en plus sensibles aux enjeux environnementaux, devrait permettre à l’agriculture biologique de continuer à se développer sur l’île, » conclut Emilie Claudet.
Si les défis sont nombreux, l’agriculture biologique en Corse reste optimiste. Les producteurs, malgré les difficultés économiques, continuent de croire en l’avenir du bio, avec l'espoir que la demande croissante et la sensibilisation des jeunes générations ouvriront de nouvelles perspectives pour cette filière porteuse de valeurs durables.