Jean-Christophe Angelini, conseiller exécutif et président de l’Agence de développement économique de la Corse (ADEC).
- Un rapport sur le thermalisme a été voté. De quoi s’agit-il exactement ?
- Il s’agit d’un rapport qui acte la restitution d’une étude commandée sous l’ancienne mandature et réalisée par le cabinet Artelia. Son but est de définir les éléments fondateurs d’une politique thermale pour la Corse dont nous avons examiné les conclusions. Nous savons qu’historiquement, la Corse bénéficie d’un potentiel très important en matière de valorisation de thermalisme ou du thermo-ludisme avec la perspective de création tout à fait considérable d’emplois directs ou induits.
- C’est-à-dire ?
- Plusieurs centaines d’emplois pourraient être créées et le nombre de curistes, multiplié par quatre sur un laps de temps relativement bref. On peut imaginer des projets de territoire qui permettraient de connecter à une offre de santé revisitée, plus dynamique et plus attractive, une offre économique avec tout ce que cela suppose d’hébergement, de restauration, de services, de commerces de proximité et de requalification rurale et urbaine. C’est, donc, une vision économique nouvelle que nous portons à l’ADEC et à l’ATC (Agence de tourisme de la Corse).
- Quel est l’état actuel du thermalisme en Corse ? Résiduel ?
- Oui ! C’est, malheureusement, résiduel ! Aujourd’hui, un seul site, Petrapola, bénéficie de l’agrément « Sécurité sociale ». Les autres sites sont, parfois, délaissés, souvent totalement abandonnés. L’étude recense plus d’une quarantaine de sites potentiellement porteurs. Or, quelques uns à peine sont péniblement valorisés. Il y a, donc, un gisement, d’abord, thermal, mais également d’activités et d’emplois, tout à fait important. Depuis 30 ans, pour des raisons de toutes natures, ce gisement est largement sous-utilisé.
- Combien de thermes fonctionnent véritablement aujourd’hui ?
- Une poignée ! Ils arrivent à survivre très péniblement. Pietrapola de manière assez douloureuse. Baracci en étant largement sous-exploité. Plus, ici ou là, quelques velléités, mais rien de très structuré. Il y a tellement plus à faire ! Il y a matière à définir une véritable politique thermale que nous voulons intégrer au SRDEII (Schéma régional de développement économique d’innovation et d’internationalisation) parce qu’elle nous paraît un élément, parmi d’autres, de la diversification économique et de la création d’emplois rémunérés, qualifiés et non délocalisables.
- Quels types de thermalisme peut-on développer ?
- Le thermalisme et le thermo-ludisme. Le thermalisme, au sens strict du terme, ouvre droit à des prestations qui, parce que bénéficiant d’un agrément, sont remboursées par la Sécurité sociale. Cela touche à la santé publique et à la logique des cures thermales. Le thermo-ludisme concerne des sites et des équipements qui ne bénéficient pas forcément de l’agrément et qui, donc, donnent lieu à d’autres types de prestations liées au thermalisme, telles que le soin du corps et le bien-être, les SPA…, mais qui n’offrent pas les mêmes vertus curatives. Ce sont deux logiques très intimement liées, mais quand même différentes. Tout ceci participe d’une dynamique globale que le Conseil exécutif veut mettre en œuvre. Après trois décennies passées à parler du sujet sous tous les angles, on n’a pas beaucoup avancé !
- Quelles seraient les atouts de la Corse en matière de thermalisme ?
- Les études, dont nous bénéficions, font trois constats. Le premier est la très bonne qualité globale de l’eau thermale. C’est un fait scientifique et technique incontestable. Le second est la diversité géographique des sites. Cela présente un intérêt au niveau du maillage de l’offre avec, comme pour d’autres types d’activités, la possibilité de construire des parcours autour de sites porteurs. Le troisième est la domanialité. La puissance publique, en l’occurrence la région, le département, les communautés de communes (EPCI) ou les communes elles-mêmes, est propriétaire de la plupart des sites. La Collectivité unique permettra la globalisation de la domanialité et une meilleure articulation avec les EPCI pour le lancement de projets sur ces sites.
- Quelle vision et quels types de projets envisagez-vous de mettre en oeuvre ?
- L’idée de sites pilotes en Haute Corse autant qu’en Corse du Sud me paraît pertinente. Cela a été dit par Dominique Bucchini, aussi bien que par Stéphanie Grimaldi. Plutôt que de partir de grands principes, même s’il en faut pour guider l’action publique, nous préférons privilégier une vision très pratique et très opérationnelle qui tendra, en partenariat avec des opérateurs privés, dans le cadre d’appels à projets, à mettre ces sites en exploitation. C’est une démarche très concrète. Cela fait 30 ans que l’on aborde le thermalisme sous l’angle de la qualité des eaux, de la diversité des sites, de l’ouverture de tel site plutôt que de tel autre… Nous choisirons des sites qui seront, peut-être plus rapidement que d’autres, de nature à être opérationnels pour les mettre en exploitation dans un cadre juridique clair qui associera des opérateurs privés, mais à des conditions, par nous, définies.
- Lesquelles, par exemple ?
- C’est difficile à dire aujourd’hui ! Ce domaine peut attirer des opérateurs sérieux - et c’est, bien sûr, ce que nous souhaitons -, en même temps que des groupes qui seraient guidés par un intérêt rapide et une logique de spéculation plutôt que d’exploitation à long terme. On sait que des chaines importantes regardent la Corse avec intérêt. Pourquoi ne pas penser également à susciter la création d’un opérateur local qui œuvrerait en concertation avec un opérateur plus important ? Toutes les pistes sont ouvertes. Ce qui est certain, c’est que nous voulons relocaliser l’économie qui sera attachée à ces thermes. Il n’est pas question pour nous, au moment où nous nous proposons de les remettre en mouvement et en fonctionnement, de confier les clés à un privé sans que nous ayons le moindre droit de regard.
- Comment comptez-vous financer la rénovation de structures souvent très vétustes ?
- Le financement, au moment où nous parlons, n’est pas véritablement un problème parce que quelques sites peuvent être mis en exploitation plus rapidement que d’autres. L’ADEC et l’ATC ont également prévu des sommes de l’ordre de 2 millions € par an pour amorcer la pompe. Opterons-nous pour un schéma de délégation de service public ou de concession ? Nous verrons. Je ne veux préjuger de rien. Il est largement possible que des opérateurs privés participent à la requalification des sites et aux investissements à réaliser aussi bien qu’à l’exploitation. Nous n’avons pas de religion ou de doctrine très arrêtée. D’abord, parce que nous voulons aller plus loin dans l’analyse des conclusions de l’étude. Ensuite, parce que nous attendons que l’Assemblée et la Commission du développement nous proposent des pistes de réflexion et de travail que nous reprendrons à notre compte si nous les jugeons pertinentes, le moment venu, lors de l’examen, en décembre, du fameux schéma économique.
- En combien de temps espérez-vous faire de la Corse une destination thermale ?
- Notre volonté est que, dès l’année prochaine, la Corse commence à mettre en œuvre une politique en matière de thermalisme. A compter du SRDEII, on pourra commencer à dire que la Corse a une doctrine et bénéficie de mesures d’aides très concrètes dans ce domaine. J’espère que nous verrons les premiers développements concrets de cette politique dès l’année prochaine ou dans le courant de l’année qui suivra.
Propos recueillis par Nicole MARI.
- Il s’agit d’un rapport qui acte la restitution d’une étude commandée sous l’ancienne mandature et réalisée par le cabinet Artelia. Son but est de définir les éléments fondateurs d’une politique thermale pour la Corse dont nous avons examiné les conclusions. Nous savons qu’historiquement, la Corse bénéficie d’un potentiel très important en matière de valorisation de thermalisme ou du thermo-ludisme avec la perspective de création tout à fait considérable d’emplois directs ou induits.
- C’est-à-dire ?
- Plusieurs centaines d’emplois pourraient être créées et le nombre de curistes, multiplié par quatre sur un laps de temps relativement bref. On peut imaginer des projets de territoire qui permettraient de connecter à une offre de santé revisitée, plus dynamique et plus attractive, une offre économique avec tout ce que cela suppose d’hébergement, de restauration, de services, de commerces de proximité et de requalification rurale et urbaine. C’est, donc, une vision économique nouvelle que nous portons à l’ADEC et à l’ATC (Agence de tourisme de la Corse).
- Quel est l’état actuel du thermalisme en Corse ? Résiduel ?
- Oui ! C’est, malheureusement, résiduel ! Aujourd’hui, un seul site, Petrapola, bénéficie de l’agrément « Sécurité sociale ». Les autres sites sont, parfois, délaissés, souvent totalement abandonnés. L’étude recense plus d’une quarantaine de sites potentiellement porteurs. Or, quelques uns à peine sont péniblement valorisés. Il y a, donc, un gisement, d’abord, thermal, mais également d’activités et d’emplois, tout à fait important. Depuis 30 ans, pour des raisons de toutes natures, ce gisement est largement sous-utilisé.
- Combien de thermes fonctionnent véritablement aujourd’hui ?
- Une poignée ! Ils arrivent à survivre très péniblement. Pietrapola de manière assez douloureuse. Baracci en étant largement sous-exploité. Plus, ici ou là, quelques velléités, mais rien de très structuré. Il y a tellement plus à faire ! Il y a matière à définir une véritable politique thermale que nous voulons intégrer au SRDEII (Schéma régional de développement économique d’innovation et d’internationalisation) parce qu’elle nous paraît un élément, parmi d’autres, de la diversification économique et de la création d’emplois rémunérés, qualifiés et non délocalisables.
- Quels types de thermalisme peut-on développer ?
- Le thermalisme et le thermo-ludisme. Le thermalisme, au sens strict du terme, ouvre droit à des prestations qui, parce que bénéficiant d’un agrément, sont remboursées par la Sécurité sociale. Cela touche à la santé publique et à la logique des cures thermales. Le thermo-ludisme concerne des sites et des équipements qui ne bénéficient pas forcément de l’agrément et qui, donc, donnent lieu à d’autres types de prestations liées au thermalisme, telles que le soin du corps et le bien-être, les SPA…, mais qui n’offrent pas les mêmes vertus curatives. Ce sont deux logiques très intimement liées, mais quand même différentes. Tout ceci participe d’une dynamique globale que le Conseil exécutif veut mettre en œuvre. Après trois décennies passées à parler du sujet sous tous les angles, on n’a pas beaucoup avancé !
- Quelles seraient les atouts de la Corse en matière de thermalisme ?
- Les études, dont nous bénéficions, font trois constats. Le premier est la très bonne qualité globale de l’eau thermale. C’est un fait scientifique et technique incontestable. Le second est la diversité géographique des sites. Cela présente un intérêt au niveau du maillage de l’offre avec, comme pour d’autres types d’activités, la possibilité de construire des parcours autour de sites porteurs. Le troisième est la domanialité. La puissance publique, en l’occurrence la région, le département, les communautés de communes (EPCI) ou les communes elles-mêmes, est propriétaire de la plupart des sites. La Collectivité unique permettra la globalisation de la domanialité et une meilleure articulation avec les EPCI pour le lancement de projets sur ces sites.
- Quelle vision et quels types de projets envisagez-vous de mettre en oeuvre ?
- L’idée de sites pilotes en Haute Corse autant qu’en Corse du Sud me paraît pertinente. Cela a été dit par Dominique Bucchini, aussi bien que par Stéphanie Grimaldi. Plutôt que de partir de grands principes, même s’il en faut pour guider l’action publique, nous préférons privilégier une vision très pratique et très opérationnelle qui tendra, en partenariat avec des opérateurs privés, dans le cadre d’appels à projets, à mettre ces sites en exploitation. C’est une démarche très concrète. Cela fait 30 ans que l’on aborde le thermalisme sous l’angle de la qualité des eaux, de la diversité des sites, de l’ouverture de tel site plutôt que de tel autre… Nous choisirons des sites qui seront, peut-être plus rapidement que d’autres, de nature à être opérationnels pour les mettre en exploitation dans un cadre juridique clair qui associera des opérateurs privés, mais à des conditions, par nous, définies.
- Lesquelles, par exemple ?
- C’est difficile à dire aujourd’hui ! Ce domaine peut attirer des opérateurs sérieux - et c’est, bien sûr, ce que nous souhaitons -, en même temps que des groupes qui seraient guidés par un intérêt rapide et une logique de spéculation plutôt que d’exploitation à long terme. On sait que des chaines importantes regardent la Corse avec intérêt. Pourquoi ne pas penser également à susciter la création d’un opérateur local qui œuvrerait en concertation avec un opérateur plus important ? Toutes les pistes sont ouvertes. Ce qui est certain, c’est que nous voulons relocaliser l’économie qui sera attachée à ces thermes. Il n’est pas question pour nous, au moment où nous nous proposons de les remettre en mouvement et en fonctionnement, de confier les clés à un privé sans que nous ayons le moindre droit de regard.
- Comment comptez-vous financer la rénovation de structures souvent très vétustes ?
- Le financement, au moment où nous parlons, n’est pas véritablement un problème parce que quelques sites peuvent être mis en exploitation plus rapidement que d’autres. L’ADEC et l’ATC ont également prévu des sommes de l’ordre de 2 millions € par an pour amorcer la pompe. Opterons-nous pour un schéma de délégation de service public ou de concession ? Nous verrons. Je ne veux préjuger de rien. Il est largement possible que des opérateurs privés participent à la requalification des sites et aux investissements à réaliser aussi bien qu’à l’exploitation. Nous n’avons pas de religion ou de doctrine très arrêtée. D’abord, parce que nous voulons aller plus loin dans l’analyse des conclusions de l’étude. Ensuite, parce que nous attendons que l’Assemblée et la Commission du développement nous proposent des pistes de réflexion et de travail que nous reprendrons à notre compte si nous les jugeons pertinentes, le moment venu, lors de l’examen, en décembre, du fameux schéma économique.
- En combien de temps espérez-vous faire de la Corse une destination thermale ?
- Notre volonté est que, dès l’année prochaine, la Corse commence à mettre en œuvre une politique en matière de thermalisme. A compter du SRDEII, on pourra commencer à dire que la Corse a une doctrine et bénéficie de mesures d’aides très concrètes dans ce domaine. J’espère que nous verrons les premiers développements concrets de cette politique dès l’année prochaine ou dans le courant de l’année qui suivra.
Propos recueillis par Nicole MARI.